Cap sur Sainte-Maxime

images (3)Parmi les nouveautés que j’aurai le plaisir de proposer cette année, il y a le retour des stages d’été.

Durant presque trente ans, chaque été avait lieu ce que l’on peut appeler un rassemblement d’aficionados du ju-jitsu, tout du moins de notre méthode. Ces stages se sont déroulés presque exclusivement sur la côte Atlantique à Soulac-sur-Mer. Mais, il y eut en 1977 une édition à Beauvallon-sur-Mer sur les rivages méditerranéens et trois années dans la belle campagne du département du Lot, au Temple-sur-Lot, précisément.

Cette année, en proposant le premier stage international de Sainte-Maxime, c’est en quelque sorte un retour aux sources que j’effectue.

En effet, enfant, j’accompagnais mon père durant presque tous les étés, à partir de 1958, au camp du golfe bleu, à Beauvallon sur la commune de Grimaud, à trois kilomètres de Sainte-Maxime. A l’époque, avec son ami Henri Courtine et le colosse hollandais Anton Geesing, ils dirigeaient l’un des plus importants stages de judo que la France, et même la planète entière, ait connu. Chaque été, les meilleurs judokas du monde se donnaient rendez-vous dans cet endroit merveilleux que l’on appelle le golfe de Saint-Tropez. Les meilleurs, mais il y avait aussi des pratiquants de base qui grossissaient les rangs de cet incontournable rendez-vous. A cette époque une ceinture jaune pouvait faire un randori avec un champion du monde.

On n’échappe pas à son enfance, et à titre personnel, je n’ai jamais pu abandonner ce magnifique département du Var. Même si l’illustre village vacances n’est plus. Il subsiste quand même l’excellent restaurant plage « Le Pingouin bleu ».

Donc, cette année, c’est avec un réel plaisir que je propose deux périodes estivales durant lesquelles l’expression « ju-jitsu et vacances » prendra tout son sens.

Entre 2010 et maintenant, vous n’êtes pas sans ignorer qu’il y a eu un vide en matière de stage, tout au moins durant les mois de juillet et d’août. Certains problèmes et la volonté de les résoudre, demandaient toute mon énergie, ainsi l’impasse a été – plus ou moins – volontairement faite.

Renouer avec l’habitude des stages est une véritable joie. C’est l’occasion de se retrouver dans un contexte complètement différent. Le lieu d’abord, loin de la pression de la ville et dans un environnement enchanteur. Ensuite la durée, une semaine durant laquelle la moitié de la journée est consacrée à l’art martial. Enfin, le fait de s’immerger dans une pratique durant les congés libère complètement le corps et l’esprit. C’est l’assurance de la réalisation d’énormes progrès. Il ne faut pas non plus oublier les bonnes relations qui peuvent se renforcer ou se nouer.

Sainte-Maxime a su s’adapter. En effet, si la «?cité du Préconil?» (nom du fleuve qui la traverse avant de se jeter dans la Méditerranée) offre la possibilité aux estivants de goûter à tout ce qui s’identifie à de vraies vacances ? celles-ci pouvant tout à la fois se révéler divertissantes, reposantes, culturelles et sportives ? elle a su garder son âme provençale. En atteste le cœur du village. Elle est assez différente de Saint-Tropez, son illustre voisine d’en face, dans la mesure où ses nuits ne sont pas agitées par les frasques de la «?jet set?». Cela n’est en aucun cas une attaque à l’encontre de ce village dont le charme et la beauté ne laisse personne indifférent.

C’est à cette époque de l’année que beaucoup d’entre nous réfléchissent et se décident quant à la destination de leurs prochaines vacances d’été. C’est pour cela que d’ici quelques jours les brochures informatives seront prêtes. Mais, sachant que les périodes proposées sont du 17 au 22 juillet et du 7 au 12 août, les ju-jitsukas intéressés par un ou deux séjours sur les rivages de la grande bleue peuvent, dès à présent, visiter le site Internet de l’office du tourisme, on n’est jamais assez précautionneux?: sainte-maxime.com

Bien évidemment, je suis à votre disposition pour toute précision utile quant à la préparation de votre séjour (eric@pariset.net). Pour votre information, les séances se dérouleront le matin de 9 h 30 à 12 h 30. L’après-midi étant complètement libre et pouvant ainsi être consacrée à la famille, à la baignade, aux excursions et balades, à d’autres activités physiques pour les insatiables, ou tout simplement au farniente, activité adaptée au climat et à la période !

Une dernière précision pour informer que ces stages sont ouverts aux pratiquants de ju-jitsu, quel que soit leur niveau (exception faite des novices) mais aussi leur style ou école.

A bientôt sur les tatamis de Sainte-Maxime ? ou d’ailleurs ? et encore tous mes vœux pour cette nouvelle année.

Dans les prochains articles de ce blog, nous finirons l’anatomie des 16 techniques et je poursuivrai la révélation des projets de cette année.

 

Une belle histoire

Une jolie histoire, en forme de « contrepoids » (bien modeste) à une certaine actualité et pour terminer cette terrible année. Ce récit est emprunté au livre de Catherine Rambert, « Petite philosophie du matin », paru au livre de Poche.

Les deux malades

Deux hommes, sérieusement malades, occupaient la même chambre d’hôpital. Tous deux devaient rester alités, mais l’un des deux avait l’autorisation de se redresser dans son lit, pendant une heure, chaque après-midi, tandis que son compagnon d’infortune devait rester couché.

Le lit du premier homme étant situé juste à côté de la fenêtre, il profitait du laps de temps où il pouvait s’asseoir pour regarder au-dehors et décrire à son ami tout ce qui se passait à l’extérieur.

La chambre donnait sur un parc avec un magnifique lac. Les canards et les cygnes jouaient sur l’eau, tandis que les enfants faisaient naviguer leurs bateaux miniatures. Les jeunes amoureux marchaient bras dessus, bras dessous. Tout cela était beau et bucolique. Pendant une heure, l’homme assis décrivait tout à son compagnon avec force détails.

Ce moment embellissait la journée. Les deux hommes en profitaient pour se raconter leurs souvenirs, évoquer les enfants et leur famille… Pendant ce temps, tous deux oubliaient leur maladie, et cela mettait un peu de douceur dans leur malheur.

Au fur et à mesure des semaines, ce rendez-vous de l’après-midi devint une forme de récompense qui égayait leur vie quotidienne.

Quand l’heure arrivait, la féérie narrative recommençait. L’homme décrivait les fleurs, les arbres, en essayant de deviner leur variété, les enfants qui jouaient dans le bac à sable, la vue sur la ville au loin… En écoutant ces détails, l’autre fermait les yeux de bonheur en imaginant ces scènes belles et pittoresques.

La vie s’écoulait ainsi. Mais un matin, l’infirmière entra dans la chambre et découvrit que l’homme près de la fenêtre s’était éteint dans son sommeil.

Attristée, elle se fit aider pour enlever le corps, sous les yeux de son voisin, qui pleura la disparition de son ami.

Lorsqu’il sentit le moment propice, il demanda s’il pouvait être placé dans le lit à côté de la fenêtre. L’infirmière fut heureuse de lui faire ce plaisir et après s’être assuré qu’il était confortablement installé, le laissa seul.

Lentement, il se hissa sur un coude pour jeter un premier coup d’œil à l’extérieur. Il aurait enfin la joie de voir par lui-même tout ce que son compagnon savait si bien lui décrire… mais tout ce qu’il vit fut un mur.

Pourquoi son compagnon disparu lui avait-il décrit tant de merveilles alors qu’il n’en n’était rien ? demanda-t-il à l’infirmière.

« Sans doute pour vous donner du courage, répondit cette dernière en souriant, car, vous ne le saviez peut-être pas, mais il était aveugle. »

La morale de cette histoire est qu’il y a un bonheur immense à rendre les autres heureux, en dépit de ses propres soucis.

Et que si la peine partagée divise par deux la douleur, alors la joie partagée sera double.

A très bientôt !

Le maître et ses trois fils

En cette période d’activité ralentie et de fêtes, je vous propose une histoire de quelques lignes, petite en nombre de mots, mais grande dans le message qu’elle délivre. Comme toujours avec ces contes issus de la Chine et du Japon, nous ne sommes jamais déçus, ni par la forme et encore moins par le fond.

Il y avait autrefois un grand maître de kenjutsu (sabre) très célèbre dans tout le Japon qui, recevant la visite d’un autre grand maître, voulut illustrer l’enseignement qu’il avait donné à ses trois fils.

Le maître fit un clin d’œil à son invité et plaça un lourd vase de métal sur le coin des portes coulissantes, le cala avec un morceau de bambou et un petit clou, de façon à ce que le vase s’écrasât sur la tête du premier, qui, ouvrant la porte, entrerait dans la pièce.

Tout en bavardant et en buvant du thé, le maître appela son fils aîné qui vint aussitôt. Avant d’ouvrir, il sentit la présence du vase et l’endroit où il avait été placé. Il fit glisser la porte, passa sa main gauche par l’entrebâillement pour saisir le vase et continua à ouvrir la porte avec sa main droite. Puis, serrant le vase sur sa poitrine, il se glissa dans la pièce et refermant la porte derrière lui, il replaça le vase dans sa position initiale. Il avança alors et salua les deux maîtres. « Voici mon fils aîné, dit l’hôte en souriant, il a très bien saisi mon enseignement et il sera certainement un jour un maître de kenjutsu. »

Ayant appelé son deuxième fils, celui-ci entra sans hésitation, et n’attrapa le vase qu’au dernier moment?; il faillit le recevoir sur la tête. « Voici mon deuxième fils, dit le maître, il lui reste beaucoup à apprendre mais il s’améliore chaque jour. »

On appela alors le troisième fils. Entrant précipitamment dans la pièce, il reçut le vase sur la tête. Le coup fut sévère, mais avant que le vase n’atteigne les tatamis, il tira son sabre et d’un mouvement vif, coupa la pièce de métal en deux. « Voici mon fils cadet, Jiro, dit le vieil homme, c’est le benjamin de la famille, il lui reste une longue route à parcourir. »

Selon la formule?: « À méditer ».

Bonnes fêtes à tous.

2015, un certain bilan !

L’horreur, c’est le premier mot qui viendra à l’esprit à l’évocation de cette année qui touche à sa fin. Le 7 janvier, nous étions encore dans la première semaine du premier mois que l’effroyable nous frappait. Le 13 novembre il frappait à nouveau, nous laissant sidérés. Et puis, il y a eu le drame des migrants, les inondations meurtrières de l’automne dans les Alpes-Maritimes, la montée incessante du chômage, les tensions issues du scrutin régional, le nombre de tués sur les routes à nouveau en hausse et je dois en oublier ; ces événements n’embelliront pas les souvenirs attachés aux douze mois qui sont maintenant dernières nous.

Il y a eu aussi, sur le plan sportif, le triste constat que le sport préféré des Français se passait assez souvent sur le terrain judiciaire.

Après avoir évoqué le négatif (ô combien) en cherchant bien, il est heureusement possible de trouver des motifs de satisfaction, comme la manifestation de la solidarité dans le drame, le succès de la COP 21, si ce n’est au moins une nouvelle prise de conscience… Dans la famille des arts martiaux et des sports de combat nous avons la confirmation qu’en la personne de Teddy Rinner, nous détenons un phénomène.

A titre personnel, 2015 aura marqué une rupture intervenue au beau milieu de l’année, puisque c’est le 30 juin que je laissais les clefs du dojo de la Bastille à une nouvelle équipe, me faisant ainsi vivre dans la foulée le premier mois de septembre sans rentrée depuis plus de quarante ans. Je ne reviendrai pas sur les raisons qui m’ont amené à faire ce choix, les fidèles de ce blog les connaissent. Les autres peuvent aller faire un tour sur le billet posté le 30 juin dernier. Six mois après, je peux, non pas établir un bilan, mais faire part de quelques impressions. D’abord, la masse d’événements prévisibles est inférieur à celle des surprises (bonnes et mauvaises.) Dans le désordre : un contre-avis médical a mis le doute quant à la pertinence de l’intervention chirurgicale au niveau de l’épaule abîmée. Le fait de réduire considérablement, pour ne pas dire complètement, l’activité professionnelle ne manque pas tant que cela. Cela permet de souffler, de se consacrer à d’autres sujets, tout en restant dans ce qui a marqué ma vie. Pour être tout à fait honnête, c’est le travail dans les conditions qui m’étaient imposées qui ne me manque pas. A l’inverse, ne plus avoir d’élèves à faire progresser, ne plus avoir d’organisation à mettre en place pour atteindre cet objectif, se passer des contacts quotidiens, sur et hors tatamis, ainsi que de certaines longues discussions aux sujets multiples?; tous ces aspects sont autant de manques. Cependant cet état de fait facilite la réflexion sur l’avenir, offre du temps pour étudier quelques pistes. Là aussi, s’apercevoir que l’on peut se tromper sur certaines d’entre elles que l’on croyait ouvertes et qui en fait ne le sont pas. Quoi qu’il en soit, cela permet de se reposer et ce n’est pas négligeable.

Pour ce qui est de cette nouvelle année que tous, nous souhaitons meilleure, que ce soit sur le plan national, sportif ou personnel, nul ne peut faire de pronostic : « Les hommes font ce qu’ils peuvent, le destin fait le reste », c’est une nouvelle fois sur une citation de l’un de mes chanteurs préférés (que les habitués auront reconnu) que je clôturerai un des derniers billets de 2015.

Passez tous de très bonnes fêtes de fin d’année.

 

Anatomie des 16 techniques, (troisième volet)

Je sais que ce blog est très majoritairement suivi par des pratiquants de ju-jitsu, mais aussi d’autres arts martiaux. Je n’ignore pas non plus que des personnes qui ne peuvent plus être présentes sur les tatamis se sont fidélisées auprès de ces articles. Mais, il y a aussi quelques personnes qui n’ont jamais enfilé de kimono et qui aiment bien suivre notre activité et « mon humeur » ainsi que l’état d’esprit qui anime notre activité. J’en suis ravi et je m’excuse auprès d’eux pour les quelques billets trop techniques, comme celui d’aujourd’hui, dans lesquels ils pourraient se sentir un peu perdus. Cela leur transmettra peut-être l’envie de franchir le Rubicon et ainsi d’appartenir à la famille des samouraïs de notre époque, en constatant notamment que dans notre art il n’est pas question de force mais de subtilités techniques comme en attestent les quatre situations présentées ci-dessous. Que ces fidèles lecteurs se rassurent, d’autres articles moins techniques continueront d’agrémenter ce blog. Les arts martiaux ne sont-ils pas – aussi – une « école de vie »??

Donc, aujourd’hui, troisième volet de la saga des 16 techniques commencée il y a un mois.

Dans la neuvième technique, UKE fait face à TORI et le saisit par les cheveux avec sa main droite. Ce dernier réagit en plaquant ses deux mains sur celle de son agresseur. Simultanément il porte MAE-GERI en ligne basse. En reculant largement, il applique une torsion de poignet sans relâcher la pression à l’aide de ses deux mains, jusqu’à ce qu’UKE soit à plat ventre. Il termine avec un ATEMI porté avec le coude au niveau de la nuque. L’action de torsion est renforcée par l’ATEMI et le déplacement sur l’arrière.

La dixième technique voit UKE se placer sur la droite de TORI, et mettre sa main gauche sur l’épaule la plus éloignée de celui-ci. TORI porte immédiatement HIJI sur le sternum. Il enchaîne avec O-GOSHI à droite et sans le moindre temps d’arrêt, en gardant le poignet (ou la manche) droit(e) de UKE, et en plaçant sa main droite sur le coude droit de UKE, il l’amène face au sol à l’aide d’UDE-GATAME. Outre l’ATEMI au plexus, l’efficacité est obtenue par le positionnement des hanches sous le centre de gravité de l’agresseur et par un déplacement sur la gauche lors de l’application de la clef.

Dans la onzième technique et à l’instar de la septième, UKE applique une violente poussée de face et déséquilibre ainsi TORI qui se retrouve sur le dos. A ce moment, il y a un temps de lutte au cours duquel UKE saisit TORI à la gorge. Celui-ci place ces pieds sur le ventre de UKE, passe ses mains sous les avant-bras et saisit la veste de l’adversaire au niveau des revers. Il est en position pour le faire passer par-dessus. Le déséquilibre est obtenu par une «action-réaction» à l’aide des jambes et un accompagnement des deux mains vers le haut.

Dans la douzième, UKE porte un très large coup de poing circulaire en direction du visage (Il ne s’agit pas là d’un ATEMI très technique.) TORI effectue une esquive rotative accompagnée d’un grand déplacement qui le place sur la gauche de UKE. Il? « l’alpague » au niveau des épaules et lui applique KO-SOTO-GARI avec son pied droit. Dans cette action, là aussi, le déséquilibre est d’abord obtenu par la réaction de UKE qui n’ayant pas trouvé d’opposition se retrouve penché sur l’avant et tente alors de se rééquilibrer. TORI accentue cette tentative de reprise d’équilibre par une forte traction sur l’arrière. Appliquant ainsi le principe d’addition de forces. La projection s’effectue par un fauchage précis du pied gauche de UKE avec le pied droit, dans la direction du talon vers les orteils. Cela doit donner l’impression à UKE qu’un tapis lui serait tiré sous les pieds.

Dans ce « carré » la fluidité dans l’application des enchaînements est déterminante.

Très vite, sur ce blog, la suite et la fin de notre enchaînement bien-aimé.

Un week-end en ju-jitsu

sans-titre (7)Samedi et dimanche derniers, à l’initiative de l’Ecole atémi-ju-jitsu, se tenait à Monts en Touraine un grand rassemblement autour du ju-jitsu. Des pratiquants issus des clubs affiliés à l’EAJJ se sont retrouvés deux jours durant. Personnellement, ce fut un plaisir de pouvoir assurer mon rôle de directeur technique.

Ces deux jours ont été d’une intensité importante. En plus du stage qui fut le point fort, il y a eu une réunion de la commission technique, l’assemblée générale annuelle et un passage de grades. Cette forte activité, le nombre important de stagiaires, le travail constructif de la commission technique, le très bon niveau constaté lors des prestations qui conduisent aux grades supérieurs, et ? fait non négligeable – l’excellente ambiance qui régnait, sont autant de signes de l’excellente santé de notre association qui défend avec ardeur une forme de travail précieuse.

A noter que la fédération qui nous «?chapote?» (la Fédération européenne de karaté et d’arts martiaux traditionnels) nous avait délégué deux membres de son comité directeur, en tant qu’observateurs. Je crois qu’ils ont été impressionnés favorablement.

Parmi le travail effectué par la commission technique, il y a eu l’harmonisation de notre goshin-jitsu et la définition précise de ce que nous attendions des candidats aux grades lors de la présentation de ce kata, il en a été de même pour nos 16 techniques.

Tout ce qui s’est déroulé durant ces deux journées est important, mais j’insisterai sur le message qui a été adressé aux professeurs. Ce sont eux qui sont chargés de la transmission. C’est d’ailleurs le rôle premier d’une association comme l’EAJJ que de former ceux qui ensuite assureront l’enseignement auprès des élèves. Cela n’empêche pas les rassemblements comme ceux de ces deux journées. Dans ces occasions, en plus du travail effectué, la manifestation du plaisir de côtoyer des pratiquants venus d’horizons divers est évidente. Ce sont là de grands moments d’échanges.

A bientôt sur d’autres tatamis.

 

Anatomie des 16 techniques, la suite…

Nous poursuivons l’analyse des «16 techniques» entreprise il y a quinze jours sur ce même blog. Nous avions étudié les quatre premières. Aujourd’hui, passons aux quatre suivantes

Dans la cinquième, UKE saisit TORI par la tête avec son bras gauche. Le déséquilibre arrière pour l’application de TE-GURUMA est obtenu à l’aide d’une action de la main droite au niveau du menton de UKE et qui se répercute directement sur les cervicales. (Dans la réalité, il sera également possible d’agir sur des points très sensibles, en appliquant, par exemple, les doigts dans les yeux et/ou en saisissant les cheveux.) Au passage TORI applique TSUKKAKE au niveau de l’abdomen, pour « fixer » l’adversaire. Sans relâcher l’action de la main droite sur l’arrière, TORI place sa main gauche entre les jambes de UKE pour passer sous le centre de gravité. L’efficacité s’obtient par un simple principe de bascule : la main droite agit sur l’arrière et vers le bas tandis que la main gauche effectue une traction du bas vers le haut. TORI projette ainsi UKE avec TE-GURUMA.

Pour la sixième technique, avec sa main droite, UKE saisit la manche gauche de TORI en tirant, façon « arrachage » de sac à main. Celui-ci ne résiste pas, il pivote sur son pied gauche et porte MAE-GERI à droite au niveau du ventre. Il obtient un déséquilibre sur l’avant, et en poursuivant son pivot sur sa gauche il applique IPPON-SEOE-NAGE à droite.

Avec la septième, nous abordons une des techniques les plus complexes de notre enchaînement. D’abord, parce qu’elle comporte deux phases distinctes. Ce qui demande, en plus de la maîtrise technique indispensable à leur réalisation, une parfaite fluidité. De plus, cette phase intervient au milieu de l’enchaînement et risque de nuire à son ensemble en cas de cafouillage. Donc, TORI est surpris et amené au sol par une forte poussée. Il se retrouve sur le dos et l’avancée de UKE sa réaction première est de placer son pied droit sur son ventre, de façon à lui appliquer une forme de TOMOE-NAGE à partir du sol (ce qui explique la position pointe vers l’extérieur pour le pied en question.) Sur la défense de UKE, TORI va le renverser sur l’arrière en lui fauchant ses deux points d’appui. Pour cela, à partir de sa position sur le dos, il pivote sur sa gauche et engage son bras gauche derrière la jambe droite et son pied gauche derrière la jambe gauche. D’une action combinée de l’avant-bras et du mollet gauche, il fauche et écarte les deux appuis de son adversaire. Le pied droit, qui est resté au niveau du ventre de UKE, renforce cette action par une forte poussée. Une fois UKE sur le dos, TORI vient le fixer sur les cervicales en engageant sa main droite entre les jambes de façon à venir saisir le revers droit de la veste de UKE. La main gauche se place devant la gorge et saisit l’autre revers. Il conclut ainsi avec l’étranglement KATA-JUJI-JIME.

Dans la huitième, il s’agit du simple enchaînement de deux techniques, à savoir (sur une tentative de saisie de face) YOKO-GERI porté au niveau de la poitrine avec la jambe droite suivi d’O-SOTO-GARI à gauche. Nous sommes dans une logique de liaison : obtenir un déséquilibre arrière pour projeter dans cette direction. A noter que ceux qui n’arrivent pas à «monter la jambe» peuvent se contenter d’un coup de pied au niveau de l’abdomen, à ce moment-là, il leur sera indispensable de compenser à l’aide d’un rapide TEICHO de la main gauche au menton afin d’obtenir le déséquilibre approprié.

En résumé, voici les grands principes de ces quatre techniques : Dans la cinquième, c’est celui de la bascule, tout en passant sous le centre de gravité. Pour la sixième, le déséquilibre avant est obtenu grâce à MAE-GERI, il faut additionner à cela la force centrifuge créée par le déplacement de TORI. La septième propose le principe d’action-réaction ajouté au fauchage simultané des deux points d’appui. Quant à la huitième, il s’agit d’appliquer une logique d’enchaînement en fonction du déséquilibre obtenu avec l’ATEMI.

Il est des techniques qui peuvent apporter des critiques quant aux difficultés qu’elles imposent. Il est vrai que l’on peut toujours penser que se satisfaire d’une pratique simpliste fera l’affaire et qu’en cas d’agression les fioritures ne seront pas de mise. Ce qui est vrai dans la réalité. Mais pour espérer être efficace dans cette réalité, on ne peut faire autrement que de se surpasser à l’entraînement.  Deuxièmement, « qui peut le plus, peut le moins ». Troisièmement, aucune des techniques travaillées n’est illogique quant à leur liaison et par conséquent à leur efficacité. Et comme indiqué il y a quinze jours, elles répondent toutes à des évidences de déséquilibre, soit par des principes mécaniques, soit par l’utilisation des points sensibles de l’agresseur. Mais pour être efficaces, elles demandent de la vitesse de réaction et d’exécution ainsi que de la maitrise technique. Autant de qualités qui ne s’obtiennent pas en dehors d’une pratique régulière et rigoureuse. Enfin, régler des problèmes après avoir patiemment étudié les solutions qui en viennent à bout est aussi le travail d’un pratiquant d’arts martiaux et une très grande satisfaction personnelle lorsque la maîtrise est acquise. Si tant est…

 

Montréal 1995 et…abominable actualité !

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Sur la photo, je suis en compagnie d’André Ohayon, (sur la droite de l’image), Jean Frenette, Olivier Hermeline et Laurent Rabillon (sur la gauche.)

Il était prévu de consacrer l’intégralité de ce billet à l’évocation des vingt ans de la démonstration que j’avais effectuée à Montréal en 1995. Cependant on ne peut mettre de côté les événements dramatiques que nous venons de subir et vaquer à nos occupations comme si de rien n’était. Ne pas oublier (comment le pourrions-nous??), mais aussi continuer à vivre normalement. En 1995, déjà, notre pays subissait une vague d’attentats meurtriers. Quelques jours après l’horreur que nous venons de vivre, il est désolant de constater que la violence et l’abominable ne nous lâchent malheureusement pas !

Bien que dans les moments que nous vivons, chaque mot peut se transformer en allusion inappropriée et surtout mal interprétée, je ne peux m’empêcher de penser qu’il y a là une raison supplémentaire pour lutter contre toute forme de violence dans tous les domaines y compris et surtout dans l’enseignement, la pratique et la promotion des activités physiques, dont les arts martiaux font partie !

Revenons donc à cet anniversaire et à Montréal.

Cela va faire exactement vingt?ans. C’était le troisième jeudi de novembre, celui du beaujolais nouveau?! Dans l’avion qui nous menait dans la belle province du Québec, nous avions d’ailleurs eu droit à un ballon de cette boisson qui partage les opinions. Il ne s’agit pas d’une chronique œnologique, mais cette évocation fait figure de point de repère. Le troisième jeudi du mois de novembre?1995, en compagnie d’Olivier Hermeline, d’André Ohayon et de Laurent Rabillon, je m’envolais pour Montréal afin de démontrer notre ju-jitsu outre-Atlantique. C’était à l’occasion d’un gala d’arts martiaux organisé par Jean Frenette, le karatéka champion de kata artistique qui avait véritablement enflammé Bercy quelques années auparavant.

En fait, ce jeudi-là, nous n’étions que trois. L’un de mes partenaires ayant oublié son passeport, il avait dû remettre son départ au lendemain. Le fait que l’on parle français à Montréal était sans doute la cause de cet acte manqué.

Comme toujours, lors de tels déplacements, l’activité principale n’est pas touristique. Outre la démonstration, nous sommes tributaires des organisateurs et des différentes obligations de communications qui leur sont imposées. Beaucoup de temps passé en car, dans cette mégapole dont les rues mesurent parfois plusieurs kilomètres.

Vers le 20 novembre, l’été indien est bel et bien terminé, l’hiver a largement pris ses quartiers. Quatre jours de froid intense avec en prime une belle tempête de neige dans la nuit du samedi au dimanche. A l’inverse de notre pays dans lequel quelques flocons peuvent entraîner une paralysie partielle et parfois totale, là-bas la vie continue normalement même avec un tapis de neige imposant.

Concernant le gala par lui-même, je n’ai plus souvenir de l’intégralité du programme proposé, mais Jean Frenette avait pensé le spectacle en deux parties, en «?panachant » intervenants français et nord-américains. Dans la délégation française figurait mon ami Christian Tissier, aux démonstrations d’aïkido toujours impeccables. Notre hôte était un peu la star de la soirée. Quant à nous, nous avons présenté la prestation qui était celle produite quelques mois auparavant dans l’enceinte de Bercy. Une petite entorse de la cheville en tout début de démo a ajouté une pression imprévue et c’est en serrant les dents dix minutes durant que j’ai pu assurer le spectacle.

La contrepartie fut une terrible boiterie pendant plusieurs jours et la conjugaison de cette blessure avec les trottoirs enneigés a donné à ce dimanche des allures de chemin de croix. Quatre jours éprouvants mais enthousiasmants, tout comme la qualité des souvenirs qui me reviennent vingt années plus tard.

La semaine prochaine, nous continuerons à « disséquer » nos 16 techniques.

Anatomie des 16 techniques

C’est un billet, assez technique que je vous propose cette semaine.

Les « 16 techniques » ont été créées en 1982, pour les besoins d’une démonstration de ju-jitsu à l’occasion des deuxièmes championnats du monde féminins de judo qui se déroulaient à Paris. Sur ce blog, plusieurs articles ont été consacrés à l’histoire de cet enchaînement qui est l’un des piliers de notre enseignement. Aujourd’hui, l’intention est d’analyser de la façon la plus simple (mais pas simpliste) ce qui peut être considéré comme un de nos katas modernes.

Lors de cette première démonstration, face à la différence de gabarit entre TORI et UKE, il était indispensable de mettre en avant les grands principes de base du ju-jitsu. Utilisation de la force de l’adversaire, de la gravitation, suppression de points d’appuis, etc. Le tout à l’aide de techniques qui retiennent l’attention, donc spectaculaires.

Pour commencer cette étude, nous nous limiterons aux quatre premières.

En tout premier, UKE saisit le revers de TORI en exerçant une traction. La riposte consiste à ne pas résister et à aller dans le sens de l’attaque, en y ajoutant deux atémis (teicho au visage et shuto dans la saignée du coude) afin de renforcer la perte d’équilibre du à la non-résistance de TORI. Celui-ci obtenant un excellente opportunité pour appliquer o-soto-gari (grand fauchage extérieur).

Dans la deuxième technique (une saisie à la gorge de face en poussant), il s’agit de l’exemple parfait de l’utilisation de la force de l’adversaire par une technique de sacrifice de son propre corps afin de faire passer celui de l’agresseur « par-dessus ». C’est l’application de la fameuse « planchette japonaise », à savoir tomoe-nage.

Pour la troisième, sur une saisie arrière à la gorge, l’action consiste à faire passer l’adversaire par-dessus notre centre de gravité en nous plaçant juste en dessous du sien. Ainsi, grâce à un principe de bascule très simple, on applique une des plus fameuses techniques de projection, je veux parler d’ippon-seoe-nage.

Enfin, la quatrième technique consiste à supprimer purement et simplement l’unique point d’appui sur lequel UKE s’est placé en portant un coup de pied circulaire en direction des côtes de TORI. C’est une grande technique de jambe, o-uchi-gari qui projette l’attaquant sur l’arrière.

Ces principes sont le fondement même de notre discipline. Il est utile de les rappeler aux confirmés et indispensable de les inculquer aux débutants. C’est aussi apporter la preuve qu’à l’origine toutes les techniques sont faites pour qu’un moins fort physiquement puisse faire tomber un plus fort ! (Ce qui n’est malheureusement plus tout à fait le cas dans le judo moderne.) Lorsque l’on a compris de tels principes qui ne relèvent pas d’une énorme expertise en géométrie, l’apprentissage en est grandement favorisé, et par conséquent les progrès ne manqueront pas de suivre.

Ces explications peuvent paraître sommaires à certains, mais c’est un peu le but. Dans un premier temps, il est indispensable de globaliser afin de faciliter une rapide compréhension. Il sera toujours temps ? et même nécessaire ? d’entrer davantage dans les détails par la suite.

La suite, bientôt…

Bloc-notes

Le billet posté il y a quinze jours a suscité un intérêt phénoménal. Il traitait du projet (!?) de création d’une nouvelle progression par la FFJDA, dans laquelle serait inclus l’aspect self-défense du ju-jitsu. Relayé par Facebook, cet article a atteint cinq fois plus de personnes que la moyenne des autres billets sur ce réseau social. Pourquoi une telle audience?? Assurément le sujet (la self-défense) passionne. Mais, sans doute aussi la polémique qui découle de cette prise de conscience étonnante. Cela prouve, si besoin était, que tous ceux qui se reconnaissent depuis des lustres dans l’intérêt du développement du ju-jitsu sous son aspect premier ne sont pas des utopistes. Mais que de temps perdu ! Et puis, il sera intéressant de voir quelle sera la suite donnée à ce projet.

Pour ce qui nous concerne, à l’EAJJ, un tel intérêt ne peut que nous conforter dans la poursuite de notre chemin, d’autant que nous possédons une belle avance en matière de contenu technique. De plus, le fait d’avoir rejoint la FEKAMT depuis quelques saisons nous donne davantage de poids et de moyens. L’assemblée générale et le rassemblement des 10 et 11 octobre derniers à Gien ont permis de confirmer qu’il y avait un intérêt certain à regrouper des arts martiaux qui ont en commun la passion d’une forme de pratique traditionnelle, tout cela avec une totale liberté quant au contenu des programmes techniques de chaque école.

Les 28 et 29?novembre prochains, à Monts, ce sera au tour de l’EAJJ de tenir son A.G. Un stage tous niveaux sera également proposé, ainsi qu’un passage de grades. Ce sera aussi l’occasion de réunir les membres de la Commission technique. Un week-end chargé en perspective.

Enfin, pour terminer ce billet en forme de bloc-notes, j’informe qu’un nouveau livre est en préparation. Il portera sur un enchaînement inédit de quinze techniques mettant en valeur l’atémi-waza et le katame-waza, avec en bonus, les articles du blog de cette année riche en événements, pour le moins?!