Kodokan Goshin-jitsu : une référence !

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Déménager a entre autres intérêts de devoir trier, classer et bien souvent c’est l’occasion de mettre la main sur des objets, des documents, des photos, etc. que l’on croyait disparus. Mieux encore, quelquefois on découvre des choses que l’on ne pensait pas posséder, sorte de cadeaux du ciel. C’est un peu le cas avec le document dont j’ai le plaisir de vous proposer un extrait. Il s’agit d’un petit opuscule paru en janvier 1957, sous le titre de Kodokan goshin-jitsu et je ne sais par quel miracle il a atterri dans un carton. L’illustration de ce billet présente la première technique du kata. On se doit d’opérer une « lecture inversée », aussi bien pour l’ordre des pages, lorsque l’on consulte l’ouvrage, que pour suivre les photos qui illustrent chacune d’entre elles. Il faut donc commencer par la photo qui est en haut et à droite, puis en bas à droite, en haut à gauche et en bas à gauche.

Ce document est précieux. Pour le pratiquant que je suis, il a une valeur inestimable. Tout d’abord pour son côté historique, le kata a été créé en 1956, nous sommes donc au plus près, il s’agit en quelque sorte de « la référence ». Ensuite, parce qu’à une période où d’incessants changements sont imposés, avec différents risques, dont celui de dénaturer le sens originel, cela permet de remettre les pendules à l’heure. Ces changements ne servant qu’à valoriser les personnes qui se targuent de détenir la dernière version !

Il faut en retenir le côté sobre, sans fioritures aucunes ; l’essentiel y est démontré. Cela nous laisse une trace pour que l’on se souvienne d’où nous venons.

Une technique par double page, à l’instar de celle qui est démontrée, et simplement quatre photos pour chaque phase du kata.

L’ouvrage date et paraît quelque peu vieillot quant à la qualité de l’impression, mais ce qui y est démontré suffit pour corroborer la conception qui est la mienne vis-à-vis de ces exercices que l’on nomme katas et pour celui-ci en particulier. Conception que je ne manque pas de faire partager très souvent par l’intermédiaire de ce blog. J’invite les nouveaux venus à ne pas hésiter à consulter les articles qui en font état !

Le kata est une mémoire et un exercice, avant tout !

Prise de conscience ?

img047En feuilletant le dernier numéro du magazine de la Fédération de judo Judo mag, j’ai pu constater, dans les quelques pages consacrées au ju-jitsu, plus exactement au judo-ju-jitsu, qu’il y était évoqué la nécessité de ne pas négliger l’aspect utilitaire de notre discipline bien-aimée. Qu’il était par conséquent utile d’accoler le mot self-défense à celui de ju-jitsu et qu’une progression était en cours de réalisation. Les bras m’en sont tombés. Mieux vaut tard que jamais, me direz-vous ! Il était temps, mais cela ne manque pas d’appeler quelques remarques.

La première, pourquoi cette décision, et pourquoi maintenant ? La deuxième, ce projet va-t-il être suivi d’effet ? La troisième, de quelle façon ?

Reprenons et détaillons ces remarques.

Premièrement, cette décision doit faire suite à une prise de conscience. D’abord que le développement du ju-jitsu sous sa forme « combat » est un triple non-sens. Outre le fait qu’un art martial traditionnel ne peut se pratiquer en compétition d’affrontements directs, cette forme de travail ne permet pas de capter une population qui est intéressée par l’aspect utilitaire. Enfin, développer le « ju-jitsu combat », c’est proposer une forme de concurrence au judo. Concernant le travail technique actuel il aura quand même fallu vingt ans pour s’apercevoir qu’il ne correspondait pas à une certaine demande ! (La dernière progression mise en place datant de 1995.) La baisse notable des licenciés due, entre autres, à la mise en place des nouveaux rythmes scolaires a sans doute déclenché une interrogation quant aux différents moyens d’enrayer cette inflexion. Le ju-jitsu bénéficie subitement d’un intérêt inattendu !

Deuxième point : cela va-t-il rester au niveau d’un projet ? Et troisièmement, s’il existe une vraie volonté, de quelle manière va-t-elle se concrétiser ? Il est indiqué sur l’article en question que la mise en place d’une progression française intégrant le ju-jitsu-self-défense est en bonne voie. Ce sera donc une nouvelle progression avec un nouveau programme. De quoi décourager quelque peu les professeurs qui devront à nouveau devoir faire face à d’incessants changements. En espérant que ce ne soit pas une autre « usine à gaz », comme celle mise en place il y a vingt ans et qui avait suscité la réprobation de certains dont je fais partie. En souhaitant aussi que les programmes de grades n’imposent pas des thèmes en inadéquation avec l’aspiration des élèves. En clair qu’ils ne soient pas surchargés de judo, et que le jour de l’examen, l’ensemble du  jury connaisse le programme ! Et puis, je ne vois pas trop ce qui pourrait être inventé de plus en matière technique. A toujours vouloir faire du nouveau on en arrive à faire, parfois, n’importe quoi !

Saluons quand même cette prise de conscience.  Tout comme il faut saluer le fait de reconnaître que ce qui avait été proposé en son temps n’était pas cohérent.

Pour ce qui nous concerne, avec l’EAJJ, sous l’égide de la FEKAMT, ces prises de conscience ne nous concernent pas, notre « boîte à outils » étant parfaitement garnie depuis bon nombre d’années. En témoigne la couverture de l’ouvrage présentée en accompagnement de cet article, datant de…1985 !

 

Haut niveau et traumatismes

unnamed (19)Dernièrement plusieurs articles ont été consacrés aux risques de traumatismes liés aux sports de haut niveau dans des disciplines de contact. Notamment, le journal Le Monde dans son édition du 5 octobre, au titre évocateur : « La grande broyeuse », à propos du nombre croissant de blessures lors de la Coupe du monde de rugby, mais surtout de la gravité de ces blessures. Le 22 septembre sur Europe 1, une chronique médicale se faisait le relais d’un sujet qui mettait en avant les risques liés à la répétition des chocs au niveau de la tête. Ces risques et ces accidents ont toujours existé, en l’occurrence dans les sports dits de « contact », et pas seulement dans les disciplines de combat. Le rugby et bien sûr le football américain ne sont pas épargnés. Mais pourquoi, statistiques à l’appui, assistons-nous à une telle progression de graves traumatismes ? Certes, il y a un nombre croissant de pratiquants, mais ce n’est pas le sport amateur qui affole les compteurs. Non, selon les analystes, il faudrait tout simplement aller chercher du côté de la professionnalisation de certains sports. Celle-ci rendant les obligations de résultat plus importantes, tout simplement, étant entourés d’enjeux financiers considérables, qui parfois les dépassent, les athlètes sont soumis à une pression que l’on pourrait qualifier d’inhumaine, rendant les matchs ou les combats d’une âpreté du même nom. Et puis, l’on parle des matchs, durant lesquels la majorité des blessures surviennent, mais il ne faut pas oublier que ces accidents sont parfois et même souvent la conséquence d’entraînements beaucoup trop intensifs.

Cette pression, on la doit, une fois de plus, à des enjeux financiers, dictés par des personnes qui, elles, ne sont pas sur le terrain et qui connaîtront une meilleure vieillesse que ceux qu’ils ont poussés outrageusement dans l’arène.

Il ne faut pas oublier que l’une des définitions de l’activité physique est la suivante : « Le sport améliore l’homme » ! En sommes-nous convaincus à la lecture d’un commentaire du président de Provale (syndicat des joueurs de rugby du championnat de France), Robins Tchale-Watchou, (dans l’article du Monde) : « Quand tu n’as plus de cartilage aux deux genoux, tu ne peux même pas faire un tour de vélo avec tes gamins, tout ton quotidien change. » Je suis assez bien placé pour approuver cette analyse. Bien qu’à mon époque la pratique était davantage « civilisée », les contraintes n’étaient pas les mêmes. Imaginons les athlètes d’aujourd’hui, dans quelques décennies, notamment ceux que l’on met dans les cages !

Ju-jitsu et judo

Kano_JigoroDe par leur histoire, ju-jitsu et judo sont intimement liées. L’un ayant donné naissance à l’autre. Jigoro Kano a créé le judo à partir du ju-jitsu. Pour cela il a épuré la méthode de combat des samouraïs en fonction de raisons bien précises, en conservant les techniques qui regroupaient les critères suivants : efficacité et sécurité. Efficacité en combat et sécurité lors de la pratique, de l’entrainement.

A l’époque des samouraïs, seule l’efficacité comptait, bien qu’existait quand même un code d’honneur. Maitre Kano a souhaité aller plus loin et faire en sorte que l’art de combat soit aussi une façon de s’éduquer physiquement et mentalement. Combattre, si possible, une violence intrinsèque et plus largement, par l’étude de principes « intelligents », contribuer indirectement – et même directement – à une meilleure vie en société. On peut incontestablement qualifier cet homme d’humaniste.

Lors d’un voyage en France, lui fut présentée une méthode de self-défense – inspirée du judo – conçue par Moshé Feldanfrais, un disciple de Maitre Kawashi (voir ce blog en date du 28 novembre 2013.) L’auteur demanda à Jigoro Kano de bien vouloir préfacer l’ouvrage qui allait proposer la méthode en question. Ce dernier accepta en insistant sur le fait que ce n’était pas l’idée qu’il se faisait du judo, que pour lui, l’aspect utilitaire s’apparentais à une présentation réductrice, mais que si cela pouvait permettre aux étudiants, au travers de cette pratique, de se rapprocher d’une quête plus large, il n’y voyait pas d’inconvénient.

Malheureusement, par la suite, le judo est devenu, pour beaucoup, un sport de compétition en perdant à la fois de son sens utilitaire et n’hésitons pas à dire le mot, son aspect philosophique.

Au même titre que Jigoro Kano en 1882 changea le nom de ju-jitsu en judo, pour marquer les esprits et élargir l’éventail des bienfaits de sa pratique, il fut nécessaire, à la fin des années 1960, devant l’ampleur de la dérive compétitrice du judo, de revenir à l’appellation ju-jitsu afin d’insister sur le fait qu’existait une autre voix – parallèle – à celle axée sur la recherche de médailles.

Ces deux aspects (judo et ju-jitsu) pouvant très bien coexister, mais à la condition d’en avoir la volonté et d’être dotée d’une certaine ouverture d’esprit. En France, ce ne fut pas le cas, ou bien alors en proposant une forme de ju-jitsu, également orientée sur la compétition (incompatible avec un art martial traditionnel), et qui, par certaines techniques et formes de corps, s’opposait à une complémentarité pourtant naturelle.

Bon nombre de pratiquant d’un ju-jitsu traditionnel se sont trouvés désemparés, expliquant ainsi la multitude de styles en recherche d’identité et surtout de reconnaissance au sein d’une structure indispensable au bon développement de toute discipline. Notre école, l’EAJJ, partant du principe que l’union fait la force, a rejoint, il y a quelques années la fédération européenne de karaté et d’arts martiaux traditionnels (FEKAMT), espérant ainsi évoluer en toute sérénité et œuvrer pour une reconnaissance des styles à but non-compétitifs. C’est également une manière de stopper l’éradication programmée d’une forme de ju-jitsu.

Ce week-end se tient à Gien dans le Loiret, l’assemblée générale de cette institution, ainsi qu’un stage au cours duquel interviendront les principaux experts des disciplines appartenant à la FEKAMT. J’aurai le plaisir d’y apporter ma contribution.

Un dernier avis, sur la complémentarité du judo et du ju-jitsu. Au début des années 1970, au moment de ce que l’on a appelé d’une terme un peu lourd « la relance du ju-jitsu », l’idée était toute simple, il s’agissait de proposer deux pratiques, judo et ju-jitsu, avec des passerelles, chacune respectant l’autre et ses spécificités. Celles-ci devant d’ailleurs être considérées davantage comme des complémentarités que comme des différences. Mais sans doute était-ce trop simple !

 

2005…et la rue des Martyrs

imagesWON2G4F8Après 1995 le 17 avril dernier et 2015 le 15 juin, c’est l’année 2005 que je souhaite évoquer aujourd’hui et poursuivre ainsi la saga des années qui se terminent par le chiffre 5 et qui, à titre personnel et professionnel, ont été toutes marquées par un ou plusieurs faits majeurs.

2005 n’a donc pas échappé à la règle. L’événement aura été la fermeture du mythique dojo de la rue des Martyrs. Celui dans lequel mon père a commencé la pratique du judo en 1947, puis en a assuré la direction à partir de la fin des années 1960, jusqu’à sa disparition quelques jours avant 2005.

Cette salle avait été ouverte en 1944 par Roger Piquemal. Professeur de « culture physique » de son état, il était aussi un des pionniers du judo français.

A l’origine le club s’appelait « Club français de jiu-jitsu », ensuite il est devenu le « Club français de judo ». On l’appelait simplement le « Club français ». A la simple évocation de ce nom, tout le monde savait de quoi il s’agissait.

Situé dans l’une des rues les plus attachantes de Paris, la rue des Martyrs, il jouissait d’un emplacement exceptionnel. Ce qui devait avoir été un lavoir, ou des écuries, était devenu, au fil des années, un lieu incontournable dans le monde du judo, puis des arts martiaux. Une certaine vétusté rajoutait au charme de ce lieu inoubliable pour tous ceux qui l’ont fréquenté. Nous étions très loin de l’ultra-modernité des salles de gym de notre époque.

Des personnalités exceptionnelles y sont passées, il représentait une immense partie de l’histoire du judo et des arts martiaux français.

Personnellement, il m’est impossible de l’oublier. Pour ce qui est écrit ci-dessus, qui n’est qu’un résumé de ce qu’il a vraiment représenté, mais aussi parce que c’est là que j’ai enfilé mon premier kimono. C’est là que j’ai étudié le judo et le ju-jitsu, sous la direction de mon père, c’est dans ce lieu que j’ai appris mon métier et que je l’ai exercé jusqu’en 1989, date à laquelle j’ai quitté « le nid », pour voguer sur d’autres sites. Cela ne m’empêchait pas d’y revenir régulièrement.

Et puis, à la fin de l’année 2004, il y eut la terrible disparition de mon père et m’est revenu la très lourde tâche de devoir gérer la succession. Cela n’a pas été simple, preuve en est qu’après six mois d’exploitation en parallèle avec le dojo de la Bastille, que je venais d’ouvrir, j’ai été contraint de procéder à la fermeture définitive de ce lieu sacré. En effet, des règles de sécurité de plus en plus sévères empêchaient de poursuivre une exploitation normale sauf à faire des aménagements qu’ils m’étaient absolument impossible de réaliser, sur un plan purement technique.

C’est, selon l’expression consacrée, c’est « la mort dans l’âme » que je me suis résigné à me livrer à un acte qui ne pourra quitter ma mémoire.

Il n’aurait pas été facile de gérer de front les deux établissements et s’il avait fallu choisir, pas un seul instant je n’aurais hésité, c’est pour «la rue des Martyrs » que j’aurais opté.

En 2005, ce fut aussi ma dernière participation au festival des arts martiaux de Bercy. A douze reprises j’eus l’honneur de présenter notre discipline à l’occasion du plus important festival des arts martiaux. Toujours un grand moment.

Les fins de cycles sont douloureuses par nature, la consolation se trouve dans les bons souvenirs que nous laissent ces lieux et ces événements que nous avons eu la chance de fréquenter et de vivre ; ils nous ont fait vibrer et ajouter du sens à notre vie. D’autres viennent – ou viendront – en remplacement.

Septembre et projets

DSC03768Le mois de septembre touche à sa fin et lorsque l’on a en charge la gestion d’un club de sports et/ou d’arts martiaux, on peut déjà tirer un premier bilan et faire un pronostic sérieux pour le reste de la saison. C’est ce que j’ai connu pendant plus de quarante ans. Ce n’est pas le cas cette année, pour des raisons évoquées à plusieurs reprises sur ce blog. Affirmer que cela se vit dans une parfaite indifférence serait mentir ! Un inévitable manque est ressenti. D’autant plus que ce mois de septembre, à titre personnel, devait être celui d’une rééducation faisant suite à une intervention chirurgicale au niveau de l’épaule. Un contre-avis, qu’il a sans doute été prudent de suivre, a annulé purement et simplement l’opération. Du coup le trimestre ne présente plus la même physionomie en termes de planning. Est-ce que cela se classe dans la colonne bonne ou mauvaise nouvelle ? C’est une autre histoire ! En tout cas, cela accélère la réorganisation sur le plan personnel et professionnel.

A court terme, quelques projets sont en gestation. Sur le plan de la communication, comme vous avez pu le constater, le blog n’a pas pris de vacances. Le site Internet se transforme, il va devenir, dans un premier temps, un site dédié au ju-jitsu et principalement à notre méthode. Informations sur les manifestations, telles que stages privés et fédéraux (EAJJ/FEKAMT), coupes techniques. Mais aussi, des pages techniques, des vidéos, des infos sur de prochaines parutions, sondages, etc. Il n’est pas encore opérationnel à 100 %, loin de là mais vous pouvez déjà aller le visiter : www.jujitsuericpariset.com . Et puis, sans doute, la création d’une sorte d’amicale de mes élèves (anciens et futurs.)

Concernant le blog sur lequel vous vous trouvez, il va perdurer avec quelques innovations. J’ai pensé faire appel à certains intervenants extérieurs, des pratiquants gradés qui ouvriront l’information et la réflexion sur des sujets divers, en rapport avec notre art. La légitime défense, par exemple, mais aussi des sujets différents, comme le rôle qu’une discipline, telle que le ju-jitsu et les arts martiaux en général, peuvent avoir dans la société et les relations humaines. Les sujets ne manquent pas, les talents non plus !

Facebook et Twitter continueront à se faire les relais du site et du blog, mais aussi, ponctuellement à proposer des réflexions disons, plus personnelles.

J’imagine que pour la plupart des aficionados des arts martiaux, le chemin des dojos a été repris et que pour ce qui concerne certains qui me sont plus proches, après un moment de désappointement, il en a été de même. Je m’adresse à eux, plus particulièrement, en leur confirmant que le désappointement est partagé. Mais, comme je l’avais assuré dans un précédent article à l’aide d’une formule qui n’avait pas laissé insensibles certains : « Nous nous reverrons, ici ou là. » (Renaud) Il est important de toujours citer les auteurs, ce que j’avais omis de faire en son temps.

Bonne continuation et à bientôt.

 

Ju-jitsu et self-défense

unnamed (4)De mon point de vue, ju-jitsu et self-défense sont indissociables. Il existe juste une différence dans le fait que la self-défense est un des aspects du ju-jitsu. Ou bien, formulé différemment, que le ju-jitsu est une méthode de défense, mais pas que ! Puisqu’il est aussi une méthode d’éducation physique et mentale. Le côté utilitaire n’est pas la seule recherche au travers de son étude. Les personnes intéressées uniquement par cet aspect font très souvent l’impasse sur la tenue, les grades, les rituels, les protocoles, etc. Mais je crois sincèrement que le contraire n’est pas juste, on ne peut affirmer que lorsque l’on pratique le ju-jitsu, la défense personnelle ne nous concerne pas. (Sans pour autant que cela devienne une obsession.) D’abord parce qu’elle est le fondement de tout art de combat et le ju-jitsu en fait partie, ô combien, et ensuite on ne peut se permettre d’apprendre une technique qui ne requiert pas le critère d’efficacité. Surtout quand dans notre enseignement existent les défenses contre armes. Il serait irresponsable de ne pas prendre en compte le fait qu’une technique démontrée, enseignée, et qui va être ensuite répétée par les élèves ne possède pas comme principale qualité d’être efficace. Après, il est vrai que ce qui nous différencie peut-être des méthodes dites purement utilitaires, c’est la recherche d’un développement physique harmonieux, d’une formation morale empreinte de respect, de maîtrise (indispensable pour une parfaite réaction liée aux raisons de proportionnalité de la riposte), bref de l’application du code moral des budos et aussi, et c’est très important, d’une pureté technique, de la recherche du geste parfait. Ce dernier point ne nuisant absolument pas à une bonne efficacité, ni à une perte de temps, partant de l’adage : « Qui peut le plus, peut le moins. » Plus un mouvement sera répété, peaufiné, maîtrisé, plus il sera efficace. Je ne prétends pas non plus que toutes les méthodes purement utilitaires occultent totalement de telles données.

Ce billet vient en complément du précédent qui traitait des katas et de mon étonnement quant à constater que les modifications apportées, contre toute logique, n’allaient pas dans le bon sens. Au risque de me répéter, pour moi les katas sont – et dans l’ordre d’importance – premièrement la représentation d’un combat, certes codifié, mais il s’agit d’un affrontement quand même. A ce titre ils pourraient être considérés comme des méthodes d’entraînement (aux automatismes, entre autres). Deuxièmement, il s’agit d’exercices de style dans le sens où la précision et le geste parfait seront recherchés. Troisièmement, une rigueur d’attitude (utile dans d’autres domaines) sera demandée lors de leur présentation. Pour conclure, et pardon d’avoir déjà insisté sur ce point, je pense qu’il serait regrettable de considérer les katas uniquement comme des « purges » qu’il faudrait s’administrer avant un passage de grade. Même s’ils servent aussi de solides moyens d’évaluation pour gravir ces échelons, ce n’est pas leur unique vocation, loin de là !

Site ju-jitsu Eric Pariset : www.jujitsuericpariset.com

 

Réflexions sur le Goshin-jitsu

DSC03875L’arsenal technique de notre discipline est riche et divers. Le programme par ceinture de notre méthode atémi ju-jitsu propose d’abord une progression dans laquelle sont répertoriées des techniques de défenses debout et au sol sur les principales situations d’attaque. Ensuite les katas et enfin des exercices d’entraînement appelés communément randoris.

Aujourd’hui, intéressons-nous aux katas, plus particulièrement au goshin-jitsu, mais surtout à ces fameuses modifications dont il est victime.

Les katas sont en quelque sorte la mémoire de notre art. Ils permettent de véhiculer les richesses techniques au travers des années, mais ils sont aussi des exercices d’entraînement aux automatismes dans lesquels une rigueur de présentation est imposée. Parmi eux existe le goshin-jitsu. Ce qui signifie « technique de défenses ». Il a été créé en 1955 et présenté à Tokyo à l’occasion des premiers championnats du monde de judo pour ne pas oublier qui si le judo devenait un sport pratiqué en compétition, il ne fallait pas négliger l’aspect utilitaire qui était sa raison d’être initiale sous le nom de ju-jitsu. Au fil des années et bien que cela soit contradictoire avec leur vocation, quelques petites touches ont parfois été apportées, le plus souvent elles étaient le fruit du hasard ou bien d’une interprétation ponctuelle et même « d’un malentendu ». Mais par définition cela n’est pas logique. Or, force est de constater que cette logique a été une nouvelle fois bafouée dernièrement et de façon importante. Pourquoi d’incessantes modifications aux risques de perturber les étudiants et surtout de ne pas respecter l’esprit même de ces exercices de transmission. Pour imposer une sorte d’imprégnation sur les « sujets des fédérations » en obligeant les professeurs à un recyclage permanent ? Ou encore et cela est plus grave, lorsque les changements ne vont pas dans le bon sens, notamment en direction d’une meilleure efficacité, on pourrait se demander si ce ne serait pas une sorte de discrédit que l’on chercherait à infliger à un secteur, que l’on pourrait considérer comme concurrent. Quoi qu’il en soit, au sein de l’EAJJ, nous ne céderons pas et nous conserverons ce que nous pensons être des valeurs intangibles. Quitte à apparaître, une fois de plus, comme des rebelles, mais à ce titre nous sommes en cohérence avec nos idées – et nos actes – qui nous ont amenés depuis des années à nous démarquer d’actions qui ne nous paraissaient pas justes. Efficacité avant tout, mais également respect auprès des pratiquants qui consiste à ne pas leur infliger d’incessantes modifications. D’autant plus lorsqu’elles ne vont pas dans le bon sens.

Les plus novices excuseront ce billet assez technique. Les chevronnés apprécieront, du moins je l’espère !

Une rentrée…

 

photoUne dernière petite photo de mer et de ciel bleu, non pas pour remuer le « tant? dans la plaie » pour ceux qui reprennent cette semaine, mais tout simplement pour les bons souvenirs que représentent l’air marin et le ciel bleu. Alors, la rentrée, évoquons-la ! Tout d’abord, voilà un bel exemple de marronnier qui en terme journalistique signifie un sujet qui revient de façon récurrente, pour ne pas dire redondante, chaque année à la même période. Le guide des vins, celui des hôpitaux (il n’existe pas forcément de lien entre les deux), les soldes, etc. La rentrée scolaire en fait partie (et puis cela tombe bien, c’est la saison des marrons) avec ses variantes que sont la rentrée sportive et la rentrée tout court. Bref, c’est souvent le moment d’acter les bonnes résolutions prises pendant les vacances, vacances durant lesquelles s’opèrent souvent des prises de conscience au contact d’amis que l’on a enviés pour leur bonne forme physique exempte de toutes autres formes. Ou bien encore grâce à leur pouvoir de persuasion sur les bienfaits de la discipline de combat qu’ils ont pratiqué tout au long de la saison passée. Ce billet s’adresse aux novices, à ceux qui n’ont pas encore pratiqué les arts martiaux, ou alors, il y a longtemps. On se dit qu’après tout, pourquoi pas, il faut se bouger, et se lancer dans un art martial offre beaucoup d’avantages. D’abord, cela se fait en intérieur, garantissant un certain confort pour les journées pluvieuses de l’automne et celles rigoureuses de l’hiver, comme celles que nous pouvons connaître dans nos régions. Ensuite cela permet d’allier l’utile à l’agréable. Apprendre une méthode de défense, entretenir son corps et, si l’état d’esprit est bon dans le club (ce qui est souhaitable), c’est un plaisir que de s’y rendre et de partager un agréable moment au cours duquel l’amitié s’invite régulièrement. Sans pour autant tomber dans une ambiance à la décontraction trop importante, qui sera incompatible avec une pratique sérieuse et sécurisée. Au moment de choisir, il ne faudra pas oublier que justement le choix du professeur est tout aussi important que celui de la discipline. Un bon outil utilisé par un mauvais ouvrier ne donnera rien de bon ! Si malheureusement le novice n’est pas en mesure de juger le niveau technique de l’enseignant (parfois camouflé sous des titres ronflants, mais absolument creux), il doit être capable de juger l’ambiance générale. On a coutume de dire que la première impression est la bonne, alors peut-être faut-il se fier à cet adage, mais qui, comme les autres, comporte sa marge d’erreur ! N’oublions pas non plus la réputation ainsi que les avis des adhérents. Maintenant il est aussi indispensable de hiérarchiser ses propres priorités. Savoir ce que l’on recherche en premier. L’aspect utilitaire, l’aspect physique, un bien-être intérieur. Sachant que ces données restent intimement liées. Et puis, il faudra s’assurer que la pratique de la discipline permettra de se rendre entier au travail le lendemain, tout simplement s’y rendre. Enfin, et je prêche assez naturellement pour notre art, en insistant sur le fait qu’une discipline aux racines profondes, aux fondamentaux (techniques et mentaux) solides et qui a fait ses preuves au cours des siècles, s’impose comme une garantie. Le système de grades qui s’y attache est plus important qu’il n’y paraît. Pas simplement pour gravir ces échelons ? ce qui de toutes les façons représente toujours une satisfaction ?, mais parce qu’ils sont forcément attachés à une méthode, à un programme, à une progression. Et puis, ils seront autant d’objectifs générateurs de motivation, donc de régularité.

Pour moi, cette année, il s’agira d’une rentrée… sans rentrée et cela pour la première fois depuis quarante années ! Un arrêt qui ne sera vraisemblablement pas définitif, et durant lequel je pourrai m’occuper de ju-jitsu de manière différente. Cela n’empêche pas une certaine nostalgie à ce moment de l’année si particulier, où l’on retrouve avec un immense plaisir les anciens et où de nouvelles vocations vont voir le jour sous notre responsabilité ; elles seront autant de nouvelles relations, riches dans leur diversité. Et puis, pour un enseignant, parmi les moments gratifiants de ce métier, il y a celui de constater les progrès de ses élèves au fil des mois et des saisons.

Alors, excellente rentrée à toutes et à tous !

 

Atémi-waza

unnamedLa rentrée est là et avec elle le probable retour sur les tatamis pour (presque) tout le monde ; c’est l’occasion de revenir sur quelques aspects techniques de notre discipline. Aujourd’hui, j’ai choisi l’atémi-waza (le travail des coups).

Cet été, certains ont pu tester une approche, disons différente de notre discipline (c’était aux dojos de l’été, pour ne pas les nommer). Certains comptes rendus m’ont inspiré le sujet de ce billet.

Le travail des coups représente une composante importante de notre discipline, mais ce n’est pas la seule. Surtout, elle ne représente pas une finalité et son étude doit être faite selon certains critères.

Ci-dessous, le développement de ces trois points.

Premier point, le ju-jitsu est composé de trois grandes familles de techniques : le travail des coups (l’atémi-waza), le travail des projections (nage-waza) et le travail des contrôles (katame-waza). Chaque pratiquant possède ses préférences ainsi qu’un domaine dans lequel il se sent davantage à son aise. Question d’affinités, mais aussi et surtout d’aptitudes personnelles. Il n’empêche qu’aucune de ces trois composantes ne doit être négligée.

Deuxième point, dans notre art et à l’inverse de certaines disciplines, les coups ne doivent pas être considérés comme une finalité mais un moyen d’y parvenir. Exemple d’un enchaînement type : coups pour déséquilibrer, projection pour amener au sol et contrôle pour finaliser. Ce n’est pas systématique, mais cela répond à une logique de distance et pourrait d’ailleurs faire état d’une forme de chartre, de méthodologie fixant notre discipline.

Enfin, troisième point et pas le moindre, l’étude des coups se fera sans perdre de vue qu’ils doivent être compatibles avec les autres composantes. Par exemple, la garde (la posture) doit donner la possibilité de porter un coup, enchaîné avec une projection. Par conséquent, pour une bonne fluidité dans les liaisons, synonyme de rapidité, donc d’efficacité, la garde doit être compatible avec les différentes composantes : une garde trop basse (sur les jambes) limitera forcément la réalisation de certaines projections.

Voilà une mise au point qui a comme simple but de rappeler que notre discipline possède une identité et une histoire colossale, il serait invraisemblable de ne pas les respecter. Cela n’enlève rien à l’utilité et à l’efficacité d’autres arts martiaux et à l’intérêt qu’ils suscitent auprès de leurs fidèles, mais lorsque l’on pratique un art comme le ju-jitsu, il n’est pas question de le transformer, au risque de lui faire perdre aussi son âme ! Evoluer, oui, transformer au risque de dénaturer, non !

Enfin et ce sera le tout dernier point, il faut prendre en compte qu’une utilisation excessive des coups et notamment dans certaines situation comporte un risque en terme d’image pour ces techniques.