Même si régulièrement sur ce blog je relativise l’importance que certains attachent aux grades, il n’empêche qu’un professeur ne reste pas insensible lorsque ses élèves obtiennent un succès dans ce domaine et franchissent ainsi un palier. Il s’agit de la concrétisation de progrès liés à la fois à des compétences et surtout au travail. Sur ce dernier point, il y a une certaine forme de sacrifice, car il est indispensable d’y consacrer du temps, beaucoup de temps. Et quel que soit le résultat, c’est déjà louable. Ce n’est d’ailleurs pas donné à tout le monde, dans la mesure où nous menons, pour certains, une vie compliquée, surtout dans les grandes agglomérations. Cela se conçoit parfois au détriment d’autres activités. Et là, il s’agit de choix que certains ne peuvent pas faire et que d’autres ne veulent pas faire. Il est incontestable que certaines contraintes familiales, professionnelles et d’éloignements ne sont pas compatibles avec un tel investissement. Mais ce n’est pas le cas pour tout le monde et un effort pourrait être fourni. Déjà dans la mesure où les répétitions ne sont pas éternelles. Ensuite je reste persuadé qu’un petit peu d’organisation temporaire permettrait de trouver le temps utile à la préparation du grade supérieur. Encore une fois, il s’agit de choix personnels et je ne me permettrai que de proposer et non d’imposer, ni même de stigmatiser. Peut-être juste d’influencer !
Bref, dimanche dernier, à Nantes, l’EAJJ (rattachée à la FEKAMT) organisait un passage de ceinture noire 1er et 2e dan « atémi-ju-jitsu ». Le club présentait quatre candidats : trois pour la ceinture noire et un pour le deuxième dan. Je suis très heureux de pouvoir annoncer qu’il s’agit d’un « carton-plein ». Quatre sur quatre, rien à dire. Les autres élèves du club l’ont appris dès dimanche après-midi sur les réseaux sociaux, mais ceux qui ne sont pas partisans de ces formes de communication ne sont peut-être pas en possession de l’information et puis il est bon aussi d’y revenir un peu plus en détail. Les nouveaux promus sont Marine Gérard, Marianne Thévin et Dimitri Opotchinski pour la ceinture noire et Philippe Cerchiario pour le deuxième Dan. On ne peut mieux faire, félicitations à tous les quatre. Cela va mettre juste un peu plus de pression pour les prochains candidats au mois de juin à Léognan.
À plusieurs reprises, j’ai fait état de la forme d’engagement que revêt le port de cette ceinture noire. D’une certaine façon, et pour reprendre une formule bien connue, elle confère davantage de devoirs que de droits. Exemplarité, transmission, entraide, etc. Et surtout le droit d’être modeste.
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Ouverture d’esprit
Il n’est pas donné à tout le monde de posséder une ouverture d’esprit suffisante à l’exercice de certaines professions. Une élève du club déménage et souhaite s’inscrire dans un dojo de sa nouvelle ville pour continuer sa pratique du ju-jitsu commencée plusieurs années auparavant dans mon dojo. Elle est ceinture bleue, montre sa carte de club et demande si elle peut porter son grade. Réponse du professeur : non. Pourquoi, interroge l’élève, un peu dépitée ? Parce que nous ne faisons pas partie de la même fédération. Cela dépasse le simple manque d’ouverture d’esprit et de tolérance, cela mérite un autre qualificatif que mon éducation m’empêche d’écrire. Au-delà de qualités techniques et pédagogiques qu’il paraît indispensable de posséder pour accomplir ce beau métier qui est celui de professeur, il est tout aussi indispensable de faire preuve d’un minimum de psychologie. Ce n’est assurément pas le cas ici. En faisant subir les conséquences de querelles intestines bien souvent dictées par la jalousie à une élève en la « dégradant » (le mot prenant d’ailleurs tout son sens), sans même avoir pris la peine de la regarder travailler, le professeur commet une faute dont il ne doit pas mesurer les conséquences. Il faut que certains comprennent enfin que les problèmes de rivalités entre les écoles et les fédérations sont dépassés et que, surtout, c’est le cadet des soucis de l’immense majorité des pratiquants. De tels comportements vont à l’encontre des préceptes des grands maîtres, tel Jigoro Kano, qui prêchaient l’entraide mutuelle et la tolérance. Certes, il existe des fédérations qui ont pour mission de développer et d’organiser la discipline dont elles ont la charge, mais les professeurs jusqu’à la ceinture noire ont l’entière responsabilité de leur enseignement. Bien sûr, ils doivent le calquer sur les programmes de grades que leur propose leur fédération, mais n’existe-t-il pas d’autres moyens d’amener le nouvel arrivant, qui dispose d’un bon bagage technique, vers le programme propre au club que celui de le dégrader brutalement au risque tout simplement de le décourager ?
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Stade Pierre de Coubertin
Avant de se dérouler dans la salle de Bercy, évoquée la semaine dernière sur ce blog, les grandes manifestations avaient lieu au stade Pierre de Coubertin dans le XVIe arrondissement parisien, Porte de Saint-Cloud exactement. Du nom du rénovateur des Jeux olympiques, ce stade inauguré en 1937 pour l’exposition universelle, et reconstruit en 1946, recevait les grandes compétitions de judo, de karaté et les galas d’arts martiaux, mais aussi bien d’autres sports comme l’escrime, le tennis, le basket, le hand, la boxe, etc. De taille bien plus modeste, il accueille environ 4 000 spectateurs contre 14 000 pour Bercy. Les « gladiateurs » bénéficient d’une meilleure communion avec le public.
Le stade existe toujours, il a même été agrandi et rénové en 1991 et des manifestations, plus modestes, mais néanmoins importantes, continuent d’y être programmées.
J’ai un peu la nostalgie de cet endroit. Est-ce parce qu’il correspond au début de ma carrière, ou pour les raisons de proximité avec le public, évoquées plus haut. Peut-être un peu les deux. Et puis, je crois surtout que cet endroit est chargé de belles histoires. Des exploits qui correspondaient au début du sport et que l’on ne retrouvera peut-être plus quand trop de professionnalisme tue une certaine spontanéité. Cependant, il faut se rendre à l’évidence et ne pas sacrifier une évolution indispensable sur l’autel des souvenirs. A l’inverse, il ne faudrait pas oublier les moments qui ont compté, autant que les lieux dans lesquels ils s’y sont déroulés.
Coubertin, pour les pratiquants parisiens, c’était aussi l’endroit où se passaient les compétitions départementales. Etant licenciés dans la capitale, nous avions cette chance. Certes, c’était le plus souvent dans l’un des deux courts annexes, mais quand même, c’était Coubertin. Et puis, encore bien plus loin, c’est là où mon père a réalisé de grands exploits dans les années 1950, entre autres sa fameuse victoire sur Anton Gessink, en finale des championnats d’Europe toutes catégories, en 1955. Pour moi et de façon plus anecdotique, il y eut cette fois où, tout gamin, je m’étais perdu dans les méandres du stade qui me semblait être un labyrinthe bien plus grand que l’univers. Moins loin, dans les années 1970, j’ai assisté à un nombre impressionnant de compétitions nationales et internationales. Notamment le premier tournoi de Paris de judo en 1971. Et puis, c’est là que j’ai réellement commencé ma carrière de démonstrateur, en 1977. C’était en septembre, les championnats du monde de judo devaient se dérouler à Barcelone au pays Basque espagnol. Les événements politiques du moment ont amené les organisateurs à les annuler. La fédération française de judo, pour pallier l’absence de promotion que représente une telle compétition, surtout en début de saison, avait décidé d’organiser une soirée de remplacement en proposant un France-Japon. Pour étoffer le programme, quelques démonstrations avaient été prévues. C’est à cette occasion que j’ai effectué ma première grande prestation. Et c’était donc au stade Pierre de Coubertin. Autant d’excellents souvenirs, tant professionnels que personnels. Pour finir sur un autre registre, tout en restant dans l’activité sportive, il est quand même intéressant de noter qu’au début du siècle dernier, au moment du grand mouvement en faveur du sport qui se dessinait un peu partout, c’était plutôt dans les quartiers « favorisés » de la capitale qu’avaient été construis les principaux lieux de rencontres sportives. Coubertin, Roland-Garros. Comme quoi le sport semblait, dans un premier temps, réservé à une élite. Les choses ont heureusement évolué.
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Bercy
Samedi et dimanche derniers avait lieu le tournoi de Paris de judo (le Roland-Garros de la discipline) et le week-end prochain, le magazine Karaté bushido proposera la version 2014 du Festival des arts martiaux. Ces événements ont en commun les disciplines de combat, mais il existe un autre point qui les rassemble ; tous les deux se déroulent à Bercy. Cette salle, dont la capitale peut être fière, fête ses trente ans. Pour l’occasion, le Palais omnisport de Paris-Bercy, son premier nom, va s’offrir un lifting. Ainsi, il sera fermé d’abord six mois cette année, il rouvrira en octobre pour le tennis et quelques autres rendez-vous, puis à nouveau une fermeture durant quelques mois, pour ouvrir ? tout beau tout neuf et encore plus vaste ? courant 2015. C’est la raison pour laquelle le Festival des arts martiaux a été avancé au mois de février, alors qu’il se tient traditionnellement en avril.
Tout le monde s’est habitué à cet endroit, mais il faut savoir qu’à son ouverture en 1984, il s’agissait d’un événement exceptionnel. La capitale française s’offrait la plus grande salle couverte de la planète.
À l’origine, il s’agissait essentiellement de proposer un palais des sports qui devait accueillir les manifestations sportives, mais très vite il est également devenu une salle de spectacle et de concert.
En 1984, chaque discipline sportive, par l’intermédiaire de sa fédération, s’est vu proposer une « soirée inauguration ». Pour la première fois, les principales fédérations d’arts martiaux s’étaient entendues pour offrir au public un spectacle commun. La FFJDA (judo – ju-jitsu), la FFKAM (karaté) et les deux fédérations d’aïkido. En additionnant les disciplines principales avec les affinitaires, cela suffisait largement à la composition d’un solide plateau.
J’ai eu le plaisir et l’honneur d’en être et j’ai eu le privilège de clôturer la soirée.
Nous étions, loin, mais très loin des spectacles proposés actuellement. Notamment en ce qui concerne la mise en scène. Pourrions-nous imaginer, à l’heure actuelle, trois heures et demie de démonstrations sans la moindre note de musique ni d’effets de lumière ? C’était pourtant le cas en ce soir d’avril 1984.
Il est bien dommage que l’expérience de l’association des trois fédérations ne se soit limitée qu’à une seule soirée. Mais c’est un autre débat que celui du rôle exact de ces institutions.
Le sujet du jour étant Bercy, il faut savoir qu’à partir de 1986, ce sont des initiatives privées qui ont pris en charge l’organisation du festival annuel. Tout d’abord la revue Bushido en 1986, 1987 et 1988. En 1989, le magazine Karaté rachetait son concurrent, devenait Karaté Bushido et prenait la main sur une organisation qui allait devenir la référence mondiale en la matière.
Le spectacle a évolué et chaque année les organisateurs essaient de faire preuve d’originalité. Je ne sais pas exactement combien de disciplines ont été présentées depuis la création, mais vraisemblablement bien davantage que nous aurions pu l’imaginer. Il faut avouer aussi que parfois, certaines détonnaient et étonnaient par leur originalité.
Il n’est pas aisé de trouver le juste milieu pour présenter une démonstration qui se doit de rassembler trois critères : d’abord respecter l’esprit et la forme de la discipline, ensuite, être « attractif » pour le néophyte et enfin, ne pas tomber dans un numéro ou seul le spectaculaire primera.
À titre personnel, j’y ai participé à douze reprises, avec à chaque fois la même envie de démontrer notre ju-jitsu du mieux que je le pouvais. Et aussi avec un trac identique, tout du moins avant le spectacle. J’ai effectué bon nombre de démonstrations dans diverses salles en France ainsi qu’à l’étranger, et je peux attester que Bercy est incontestablement la plus impressionnante lorsque l’on se retrouve au milieu, sous les projecteurs. Mais, de fait, que de moments exaltants, de souvenirs excellents et irremplaçables qui ne quitteront jamais mon esprit !
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Parents et ceintures
A l’approche des congés scolaires de février, avant lesquels les premiers passages de ceinture de la saison pour les enfants vont avoir lieu, je suis une nouvelle fois amusé de constater que ce sont les parents les premiers à s’en inquiéter. En ce moment, les questions tournent essentiellement autour de ce sujet. Curieusement, les enfants eux-mêmes semblent beaucoup moins sensibles à ce qu’ils ressentent peut-être comme une pression supplémentaire. Ils ne sont pas complètement détachés de ce système, loin s’en faut ; ils sont très fiers d’arborer une nouvelle ceinture plus foncée, mais finalement une certaine relativité les habite. Ils ressentent peut-être le besoin de laisser les challenges à l’école et souhaitent tout simplement se diversifier et s’amuser. Réaction on ne peut plus saine, d’ailleurs. Ceci étant, on ne peut en vouloir aux parents d’être rassurés quant aux progrès de leurs enfants et d’être fiers de leurs exploits. Je ne peux qu’inviter les personnes intéressées par ces fameux grades à retrouver un article que j’avais consacré au sujet le 21 novembre dernier sur ce blog. Je rappellerai que chez nous, l’obtention des ceintures est basée sur un ensemble de critères tels que l’assiduité, le comportement général au sein du dojo, les progrès en habileté et bien sûr la connaissance globale des grandes techniques. En résumé, il s’agit davantage d’un contrôle continu que d’un examen couperet.
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Sondage de janvier
Le sondage du mois de janvier demandait aux internautes de désigner la discipline qu’ils considéraient comme la plus complémentaire au ju-jitsu. Ainsi étaient proposés le judo, le karaté et l’aïkido.
Une grande majorité s’est prononcée pour le judo avec 42 % des suffrages. Viennent ensuite l’aïkido avec 33 % et le karaté qui recueille 25 %. Il n’y a rien de surprenant à ce que le judo arrive en tête si l’on considère l’aspect historique. On n’échappe pas à son destin ! Effectivement ju-jitsu et judo sont intiment liés. Dans un précédent billet consacré à Jigoro Kano, le sujet à été largement abordé. La première place du judo relève donc d’une certaine logique. Maintenant, est-ce un choix pragmatique ou bien celui du cœur ? Telle que la question était posée, j’opterai pour la première hypothèse. La deuxième place de l’aïkido pourrait paraître plus surprenante, mais si on y regarde de plus près, pas tant que cela. Sur le plan historique, un lien très intime existe de façon incontestable. À partir de l’ancien ju-jitsu a été créé le judo, mais une autre branche a donné naissance à l’aïkido. Il y a eu une phase intermédiaire appelée aïki-jitsu. Sur le plan technique, on retrouve beaucoup de similitudes, en l’occurrence sur certains contrôles en clefs au bras. Le goshin-jitsu en est un parfait exemple. Et puis, le principe de non-opposition et d’utilisation de la force de l’adversaire est un bien commun aux deux disciplines. L’aïkido en a fait sa principale base de travail. Il ne faut pas non plus oublier que, comme nous, il s’agit d’un art martial à but non compétitif. Le karaté ferme la marche, avec malgré tout un score honorable qui montre que le travail des atemis (les coups) ne doit pas être négligé. Même s’il est vrai que le combat se termine bien souvent « au contact », il commence à distance.
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Europe 1
La semaine dernière, j’ai eu le plaisir et l’honneur de participer sur Europe 1 à une émission consacrée à la self-défense. C’était mardi 21 janvier entre 15 h 00 et 16 h 00. J’ai eu droit à une intervention téléphonique en direct pour parler, bien évidement, de ju-jitsu et fournir ainsi aux néophytes quelques infos pratiques. En studio, l’invité était Eric Benhamou, professeur de krav-maga. Il est vrai que cette discipline surfe sur une belle vague depuis quelques années. Loin des querelles de chapelles qui pouvaient exister il y a une époque, il faut reconnaître l’ouverture d’esprit de certains experts qui ont comme principal soucis de faire progresser leurs élèves, et qui tiennent des propos raisonnables par rapport à un sujet qui ne doit pas être traité de façon radicale. Ce qui n’est pas encore tout à fait le cas de toutes les pratiques et de tous les « experts ». Nous avons également pu bénéficier de l’intervention de l’avocat de la station sur la notion de légitime défense. Des émissions comme celle-ci, on en souhaiterait davantage.
Vous pouvez retrouver l’émission par l’intermédiaire du lien ci-dessous.
http://www.api.europe1.fr/podcast/mp3/385/1778197/podcast.mp3
Jigoro Kano
Il ne sera fait offense ni aux judokas ni aux ju-jitsukas en leur épargnant le récit de la vie de Jigoro Kano, que chacun pourra retrouver sur Internet.
La vocation première de ce billet consiste à faire partager le sentiment que j’éprouve à propos de cet homme qui a su, par l’intermédiaire de la restauration d’un art martial tombé en désuétude, nous proposer à la fois une discipline physique et mentale, une méthode de défense, mais plus encore une école de vie ; à savoir le ju-jitsu moderne qu’il a appelé « judo ». Certains vont se demander pourquoi en tant que ju-jitsuka, je fais l’apologie du judo et de son créateur ?
Le judo imaginé et créé par Kano était un peu différent du sport qu’il est essentiellement devenu. Jigoro Kano n’était d’ailleurs pas opposé aux compétitions, seulement il les considérait comme une étape dans la vie d’un budoka. Passer de l’appellation ju-jitsu à celle de judo répondait à deux nécessités. La première, parce que le mot ju-jitsu était usé et qu’il n’était pratiqué que par quelques personnes peu recommandables. La seconde motivation résidait dans la volonté d’élargir le champ d’actions en passant de technique (jitsu) à voie (do). A propos d’appellation, l’histoire « repasse les plats », puisque dans les années 1970, la remise à l’honneur de notre méthode est passée par une appellation originale (atémi ju-jitsu) loin du mot judo, catalogué sport de compétition. Mais, ce qui est intéressant, ce n’est pas le flacon, mais le contenu. Poursuivre le travail sur les principes que Kano a su mettre en avant et sous quelque appellation que ce soit reste l’essentiel.
Concrètement, les réalisations que je retiens, et dans l’ordre d’importance, sont les suivantes : tout d’abord, d’un gabarit plutôt frêle, il a forcément conservé et développé les premiers principes de base, à savoir la non-résistance, l’utilisation de la force de l’adversaire et l’addition de forces, sans oublier le principe d’action-réaction. Ensuite, il a procédé à l’épuration des anciennes techniques en ne conservant que celles qui correspondaient à deux critères : efficacité et sécurité. Il a tout de suite compris que la première règle pour pouvoir progresser, c’est d’être en capacité de pratiquer, ne pas être continuellement blessé par des entraînements sauvages. Il était soucieux de préserver l’intégrité physique. Et puis, sa grande idée a été de ne pas se satisfaire d’une simple méthode de combat ou de défense, mais de proposer, par son intermédiaire, une élévation du corps et de l’esprit, une méthode d’éducation globale, avec une rigueur, dans la tenue à respecter au dojo, dans l’exécution de certains rites, dans le respect mutuel, etc. Faire du judo était pour cet homme un principe, un précepte. Cela ne se limitait pas à évoluer physiquement sur un tatami. Pour Kano, l’on pouvait faire du judo dans la vie de tous les jours. Dans la conduite de ses affaires, dans ses relations familiales et sociales. Tout comme dans un combat de judo, l’affrontement force contre force reste stérile, un parallèle est aisément transposable dans nos relations quotidiennes. De bonnes relations doivent être accompagnées de souplesse comportementale. Ensuite, ne surtout pas oublier l’un de ses « slogans » : « Entraide et prospérité mutuelles », celui-là reste intemporel ! Enfin sa définition du grade : Shin-gi-tai. Elle n’est pas le fruit du hasard. Shin l’esprit, la réflexion, c’est ce que nous conservons le plus longtemps. Gi la technique, nous pouvons la pratiquer de façon relativement durable, surtout lorsqu’elle est « intelligente ». Enfin, tai le corps (le physique, en fait), ce qui est le plus éphémère.
Certes, tous ce qui est énoncé ci-dessus peut paraître banal à l’heure actuelle, puisque beaucoup de disciplines sportives ont tenté de s’en inspirer. Mais à l’époque, cela était sacrément novateur. Et puis, aujourd’hui ces principes sont-ils vraiment appliqués par tout le monde, dans tous les sports et à commencer par le premier concerné ?
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Le plus fort ?
Dans le sondage de janvier, actuellement en ligne sur le site du club, nous demandons aux internautes de désigner la discipline qu’ils pensent être la plus complémentaire au ju-jitsu. Le résultat sera délivré à la fin du mois. Cette question m’a rappelé un vieux débat qui agitait les passions et animait les discussions dans les années 1960, au travers de la question suivante : quelle est la discipline la plus efficace, le judo ou le karaté ? A cette époque, il n’y avait que ces deux arts martiaux de connus en France. Aujourd’hui la situation est bien différente ; il y a pléthore de styles de combats, d’écoles, de sous-écoles, etc. Chaque année, d’ailleurs, le festival de Bercy nous en sort une de son tatami !
A l’époque vers 1960, le judo régnait en maître, bien installé depuis près de deux décennies. Mais le karaté déboulait en Europe, décidé à damer le pion à ce grand frère. Ce dernier avait résolument opté pour une option ultra-sportive, délaissant ainsi l’aspect self-défense que le karaté s’appropriait résolument. C’était le combat de la discipline du corps à corps contre celle des atémis (les coups). Chacun défendait sa chapelle de façon partisane et même parfois puérile. Je me souviens de discussions sans fin dans la cour de récréation. Les techniques n’étant pas les mêmes, la comparaison n’avait peut-être pas lieu d’être. Cependant la question existait ; émanation d’un besoin sécuritaire. Si on voulait y répondre franchement, ce ne serait pas facile. En vérité cela dépend du niveau du pratiquant. Mais à grade équivalent, quelle serait la finalité ? Interviennent à ce moment les qualités personnelles, techniques, physiques et stratégiques. Il est évident que si le judoka reste à distance, il n’opte pas pour la bonne option, si le karatéka laisse le judoka venir au contact, il perd pour ainsi dire toute issue favorable.
A l’heure actuelle, la situation est différente, la plupart des disciplines tentent de se diversifier afin d’élargir leur panel technique. Et puis, en tant que pratiquants de ju-jitsu, nous sommes bien placés pour ne pas ignorer que l’idéal se situe au travers d’un art où tout est étudié. Maintenant, chacun a ses préférences qui conduisent tout naturellement vers telle ou telle discipline.
Quant à l’aspect purement utilitaire évoqué plus haut, depuis plusieurs années, il a fait éclore bon nombre de disciplines qui se réclament toutes plus ou moins de la panacée en oubliant tout simplement que, d’une part de nouvelles techniques ne peuvent être perpétuellement inventées et que d’autre part, ce ne sera que par l’acquisition de celles existantes et davantage encore par leur répétition que viendra l’efficacité. Pour conclure, je citerais à nouveau une phrase d’un professeur qui se nomme André Giran : « L’essentiel, ce n’est pas ce que l’on enseigne, mais ce que les élèves apprennent. » Cela reste valable pour n’importe quelle matière, n’importe quel sport et n’importe quel art martial.
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Soulac sur Mer
Le billet que vous trouverez ci-dessous était déjà écrit lorsque le week-end dernier les vagues submersibles ont attaqué Soulac. Manifestement les dégâts matériels sont importants. Nul ne doute que le courage des Soulacais permettra de remettre à neuf la station. Raisons de plus pour suivre mes conseils de fin d’article.
Janvier, c’est le mois des vœux (bonne année à toutes et à tous), et la période des bonnes résolutions. C’est aussi le moment de préparer les prochaines vacances d’été. En principe, c’était à cette période que les aficionados du ju-jitsu commençaient à s’occuper du stage estival. Plus bas, je reviendrai sur les raisons de la « suspension » de ce grand rassemblement qui se tenait à Soulac-sur-Mer en Gironde. Je tenais à évoquer ce lieu à l’occasion du premier billet de l’année.
Situé à l’extrémité de la « Pointe de Grave », langue de terre qui représente la rive gauche de la Gironde, Soulac-sur-Mer se mérite. En venant du nord de la France, le voyage peut se faire en effectuant le détour par Bordeaux, ou bien en empruntant le bac à Royan, pour une traversée de 30 minutes en direction du Verdon, avant d’atteindre Soulac une dizaine de kilomètres plus tard. Cela ne rebute pas les vrais amoureux de cet endroit qui a su conserver le charme quelque peu suranné des stations balnéaires du milieu du siècle dernier, tout en s’adaptant aux besoins de notre époque.
Ce préambule est à l’attention de ceux qui n’auraient pas encore la chance de connaître « la perle du Médoc ».
Les pins, l’océan, l’espace et un accueil très chaleureux, lors d’une visite de reconnaissance en 1985, ont été autant d’éléments qui ont fait que de 1986 à 2010, mes stages d’été s’y sont déroulés, sans aucune interruption. Au dos de la carte que j’ai le plaisir de mettre en accompagnement de ce billet, M. Xavier Pintât, sénateur maire de Soulac, m’a adressé ses vœux. Bien évidemment, je me suis empressé d’y répondre. Une nouvelle fois, comme c’est le cas depuis trois ans, il sera vraisemblablement déçu d’apprendre que nous ne serons pas au rendez-vous. Vous êtes nombreux à partager son sentiment.
Alors pourquoi, allez-vous dire ? Bonne question, à laquelle j’ai déjà répondu les années précédentes, mais pensons aux néophytes et rafraîchissons la mémoire des plus anciens.
Il ne s’agit pas d’infidélité, mais simplement de disponibilité. L’organisation d’un tel rassemblement représente une lourde tâche, elle se prépare plusieurs mois à l’avance. Ce qui a été réalisable toute une époque durant ne l’est pas forcément depuis trois ans. Les circonstances professionnelles et personnelles évoluent et réclament parfois de concentrer les efforts sur l’activité principale qui se trouve être, en l’occurrence, la gestion et l’animation du dojo parisien. Et puis, il y a des périodes qui réclament un peu plus de répit et le besoin de souffler. Ceci étant, le courant des événements peut faire que Soulac redevienne un projet et qu’il ne reste pas simplement un excellent souvenir. Excellent souvenir, Soulac le restera pour des centaines de stagiaires. Mais il n’est pas non plus exclu qu’un jour nous puissions nous retrouver à nouveau sur les bords de l’Atlantique pour une semaine de ju-jitsu-vacances inoubliable. En attendant, si vous souhaitez bénéficier d’un séjour tonique et reconstituant, loin des lieux dit « branchés », n’hésitez pas à prendre la direction du Médoc et sans modération.
Site officiel de Soulac-sur-Mer : www.soulac.com/