le Dojo de la rue des Martyrs

img001Il est des lieux que l’on ne peut oublier facilement, tout d’abord, parce qu’ils nous ont concerné personnellement, qu’ils ont été la scène d’événements importants et parce qu’ils ont marqué une époque en étant associés à des aventures particulières. Le dojo de la rue des Martyrs en fait partie en ayant grandement participé, dans notre pays, au développement des arts martiaux en général et du judo et du ju-jitsu en particulier.

Cela fera deux ans que cet endroit mythique a été contraint  de devoir fermer ses portes, pour cause de non conformité avec une législation évoluant toujours afin de garantir le maximum de sécurité dans les lieux public.

Ci-dessus en compagnie de

mon père, à l’âge de 5 ans,

à la porte du dojo

À l’occasion de ce triste anniversaire, j’ai souhaité retracer brièvement son histoire.

Serpentant dans un des quartiers les plus attachants de la capitale, la rue des Martyrs relie le bouillonnant

quartier des affaires du 9e arrondissement à la butte Montmartre.

C’est dans le bas de cette rue très étroite ou règne encore l’esprit village en plein centre de Paris, que cette salle de sport de l’entre-deux-guerres – après avoir été un lavoir ou/et des écuries – est devenu officiellement en 1944, un des premiers dojos de Paris et de France. Nous devons ce fait à Roger Piquemal – un des premiers professeurs de judo français -, qui donna tout naturellement à son club le nom de « Ju-jitsu club français », « Ju-jitsu club de France » étant déjà « pris » par le club que dirigeait Maître Kawashi, l’inventeur des ceintures de couleurs, et qui avait surtout introduit le judo et le ju-jitsu en Europe. Donc, le professeur Piquemal, champion de France des professeurs (ce challenge existait à cette époque) développa une équipe de judo qui  devait – dans les années 50 et 60 – donner à ce club l’un des plus beaux palmarès du judo français, dont les titres de Champion de France et Champion d’Europe des clubs à plusieurs reprises. Les finales des championnats de France opposant bien souvent l’équipe première  à l’équipe seconde. C’est en 1947, qu’un jeune homme de 17 ans franchit les portes du dojo pour enfiler son premier kimono. Il s’agissait de Bernard Pariset. Il allait, entre autres, contribuer à l’élaboration de ce palmarès. Après avoir gravi les échelons, en 1954, à la disparition de Roger Piquemal, il assura la direction technique, et en 1960, le club français passait sous sa seule responsabilité et ce jusqu’à la fin de sa vie en 2004, associant de façon indélébile son nom à celui de ce club mythique.

Entre temps, de nombreuses personnalités ont foulé les tatamis de ce lieu hors du commun : parmi elles, Maître Moshizuki (un des tout derniers « presque encore samouraïs »), qui a d’ailleurs été hébergé dans l’appartement situé au-dessus du club. Ce lieu a été aussi un temps, le centre d’entraînement de l’équipe de France de judo, et a vu les premiers pas du karaté en France, sous l’impulsion du célèbre Jacques Delcourt, etc. Bref, un lieu extraordinaire, dans lequel j’ai mis mon premier kimono en 1958, étudié les arts martiaux, appris mon métier de professeur, formé bon nombre de ceintures noires, mis au point des dizaines de démonstrations et dépensé des centaines de litres de sueur. Par ailleurs, il serait intéressant de pouvoir calculer le nombre de pratiquants – de France et du monde entier – qui ont mis au moins une fois les pieds sur ces célèbres tatamis.

Chacun comprendra que  c’est la « mort dans l’âme » que j’ai été obligé de me soumettre à la dure réalité en juillet 2005.

Mais, pour conclure avec optimisme je peux affirmer que d’une certaine façon, c’est grâce à la « rue des Martyrs » et à l’expérience que j’y ai acquise  que l’histoire peut continuer à la « Bastille ».

3 réflexions sur « le Dojo de la rue des Martyrs »

  1. Ayant été membre de ce club pendant une dizaine d’années, je souhaite juste vous remercier pour cette page d’histoire.

    Sébastien

  2. Bonjour,
    souvenirs de mes 10 ans, je me souviens de Bernard en 1953 je crois . j’habiter en face rue des martyrs. Ensuite ,j’ai terminé au Central Judo club de la rue de Montorgueil. Avec Jean Gilet. Fin du judo 1960.Embarquement Alger 26 mois.

  3. Bonjour,
    Une récente balade rue des Martyrs m’a fait réaliser que le dojo avait fermé ses portes. Tristesse… Recherche Google et je tombe sur cette page, déjà ancienne. Juste un mot, que vous lirez peut-être, pour vous dire que j’ai gardé un merveilleux souvenir de mes années de cours (et de stages le week-end), à la fin des années 70’s – début des 80’s. Vous-même, qui aviez convaincu mon père pourtant très réticent à l’idée que je pratique un sport « violent » (il avait assisté à la fin de l’un de vos cours avec des enfants et avait beaucoup apprécié la discipline et le sens du respect dont vous faisiez preuve, tout comme votre courtoisie et votre sérieux durant la conversation qui s’en était suivie) ; Mme Pariset, qui nous laissait tous admiratifs par sa gentillesse, sa beauté et… son efficacité dans les cours d’auto-défense ; les différents professeurs, tous très attachants ; etc.
    Bref, ce petit mot de remerciement un peu tardif mais sincère. All the best !
    Pascal

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