E comme Enchaînement (première partie)

A la lettre E beaucoup de noms méritent une place dans mon dictionnaire des arts martiaux. Par exemple, E comme éducation. L’Education physique et mentale chère à Jigoro Kano qui, grâce à sa méthode de ju-jitsu devenue judo, proposait une « science du combat » mais aussi une « Ecole de vie » qui harmoniserait les rapports humains, améliorant ainsi la vie en société. Dans le même esprit il y a aussi E comme Educateur, ou Enseignant ; deux mots qui occupent une place prépondérante dans ma vie. Il est possible aussi d’évoquer le E d’Exigence, celle que l’on doit imposer à soi-même (avant de l’imposer aux autres). Mais aussi le E d’Excellence, vers laquelle chacun doit tendre, dans son métier et dans ses actes ; non pas dans un systématique esprit de compétition, mais simplement pour s’améliorer.

Après ces quelques beaux exemples, j’aborde le mot que j’ai finalement choisi de développer, à savoir «  Enchaînement ». Dans sa « coquille », ce mot peut d’ailleurs regrouper ceux évoqués plus haut. Puisque répéter des enchaînements contribue à l’éducation physique et mentale, ils sont transmis par un enseignant, ils sont éducateurs techniquement ; de plus on recherche l’excellence dans leur pratique et leur présentation, pour cela il ne faut pas être avare d’exigence.

Au travers de ce beau métier qui est le mien, j’ai toujours eu le souci d’apporter ma contribution à l’évolution qui doit être dévolue à toute science, mais – et j’insiste sur ce point – sans jamais trahir ni l’esprit, ni la forme, ni encore moins les traditions attachées à nos arts martiaux et en particulier à la sagesse de Jigoro Kano. Pour participer très activement à la diffusion de la méthode de ju-jitsu, au début des années 1980, j’ai ressenti le besoin de créer des enchaînements, sans avoir la prétention de rivaliser avec des « monuments » tels que les katas traditionnels, mais pour offrir une complémentarité.

Comme précisé plus haut, j’ai toujours été scrupuleux quant au fait de ne jamais trahir les fondamentaux, il n’a jamais été question non plus d’inventer des nouvelles techniques (ce serait prétentieux), ni remettre en cause les principes sur lesquels notre discipline a bâti ses spécificités. Cependant il est possible de peaufiner ce patrimoine en lui apportant le fruit de recherches personnelles.

Ainsi, grâce à une pratique intensive, mais aussi à la mission de transmission, j’ai eu le plaisir d’élaborer plusieurs enchaînements. Des créations qui s’apparentent à de véritables compositions, au même titre qu’un musicien assemble les notes pour créer une mélodie, et un écrivain les mots pour rédiger un roman.

A l’époque cela répondait à un réel besoin et permettait à la fois de proposer des méthodes d’entraînement novatrices, une forme de classification, des moyens d’évaluation et pour certains de ces enchaînements des démonstrations « clefs en main ».

Chaque enchainement possède son histoire et sa raison d’être. J’ai pu en élaborer personnellement six, et un autre en collaboration avec mon père (qui avait mis au point l’intégralité de la méthode « Atemi-ju-jitsu ». Il est toujours correct de rendre à César…).

L’histoire de ces créations a commencé avec les « 16 techniques », l’enchainement qui a connu un véritable succès et que je continue à faire pratiquer. Après il y a eu les « 16 Bis » et les « 16 Ter » dans lesquelles sont travaillées des ripostes plus élaborées en réponse aux attaques des « 16 de base ». Puis sont venues les « 16 contrôles » qui utilisent uniquement la famille des contrôle en clef sur les articulations, afin de proposer une maîtrise adaptée à certaines situations dans lesquelles il est souhaitable que l’issue ne soit pas « fatale ». Quant aux « 24 techniques » elles sont une présentation très concise et ordonnée des attaques les plus probables que l’on peut subir, avec comme réponses les principales techniques appartenant aux grands groupes. Dans cet enchaînement, que j’apprécie tout particulièrement, différents schémas et combinaisons de ripostes sont aussi évoqués. Enfin, en matière de création, il y a le « petit dernier » qui est une suite de quinze techniques, dans laquelle sont mis en exergue deux composantes de notre discipline : les atemi et les katame (les coups et les contrôles).  Je n’oublie pas les « 16 atemis », réalisés en collaboration avec mon père et dans lesquels l’accent est mis sur l’atemi-waza (le travail des coups), un secteur important en matière de défense, mais dans l’esprit du ju-jitsu, sachant que dans cette discipline les coups ne sont pas une finalité, mais le plus souvent une façon d’y parvenir.

D’autres enchaînements ont été déjà élaborés, bien qu’ils ne soient pas encore formalisés « sur papier » ou « en images » ; pour le moment ils sont «dans ma tête» ; il s’agit des « 16 enchainements» et des « 16 contres ». Il y en a aussi un autre que quelques élèves ont baptisé les « 16 extraordinaires » (en toute modestie).

Dans la seconde partie consacrée à cette lettre E, je reviendrai plus en détail sur l’ensemble de ces enchaînements.

(La photo d’illustration de cet article présente la couverture de la première édition du livre consacré à l’enchaînement des « 16 techniques » et au « Goshin-jitsu ». Ce devrait être en 1984.)

eric@pariset.net

D comme Dojo, première partie

Nous continuons la déclinaison de mon alphabet avec aujourd’hui la première partie de le la lettre D. D comme dojo, bien naturellement.

Aujourd’hui, c’est la première partie de l’article que je propose. En effet, en plus de ma conception du dojo de manière générale, j’ai choisi trois lieux qui m’ont particulièrement marqué. Je commencerai avec la Club Français de la Rue des Martyrs.

Un DOJO n’est pas simplement un lieu où l’on transpire, c’est aussi un endroit dans lequel on s’inspire. Il doit y régner une ambiance particulière qui n’est pas celle d’une simple salle de sports, on doit y apprendre « quelque chose » de plus. C’est là que l’on est censé « trouver sa voie », celle qui permettra de s’élever sur un plan technique et mental, celle qui apprendra la vie. Les arts martiaux, enseignés et pratiqués comme ils doivent l’être, ne sont-ils pas considérés comme une « Ecole de vie » ? Malheureusement, ce n’est pas toujours la réalité quand certaines conditions n’existent pas. D’abord, et nous n’y pouvons rien, certains équipements municipaux sont destinés à plusieurs disciplines sportives autres que les arts martiaux, privant ainsi le lieu d’une certaine identité propice à l’étude bien particulière de nos disciplines. Ensuite il y a ce que l’on peut appeler « l’esprit », celui qui est inculqué par le « maitre des lieux », à savoir le professeur. C’est à lui qu’incombe la responsabilité de faire en sorte que les élèves trouvent leur voie, sur le plan technique, mais aussi sur le plan mental, comme indiqué plus haut. Trouver la voie, c’est trouver le chemin qui mène aux progrès techniques et à la sagesse comportementale. Faire de sa pratique quelque chose d’utile pour soi et pour les autres. Il ne suffit pas d’afficher le code moral sur un mur du dojo et être ainsi en paix avec sa conscience, il faut aussi le faire respecter. Le dojo, n’est pas un endroit dans lequel seront vénérés quelques divinités que ce soit, mais simplement un lieu où l’on applique les principes de politesse élémentaire et de respect vis-à-vis du professeur et des autres élèves, du plus gradé au moins gradé, mais aussi de l’espace dans lequel nous étudions. Le dojo est un lieu d’étude et de partage.

Des dojos, j’en ai fréquentés beaucoup, que ce soit pour me former, m’entraîner, transpirer et bien sûr enseigner. Dans le cadre du dictionnaire personnel dont l’ébauche est proposée au travers de ce blog et sur les réseaux, j’évoquerai les lieux qui m’ont le plus marqué.

Dans la « version longue » de ce dictionnaire qui devrait prendre la forme d’un livre, il sera aussi question de ceux dans lesquels j’ai exercé mon métier.

Dans cette première version, j’en évoquerai trois. En tout premier le « Club Français », le dojo de la Rue des Martyrs. J’entretiens le suspense concernant les deux autres que vous pourrez découvrir au fil des semaines.

Le Club Français (la Rue des Martyrs, la photo d’illustration représente le dojo dans les années 1950)

Le premier qui s’impose naturellement est donc celui de la Rue des Martyrs, « Le Club français ». Il a été fondé juste à la fin de la seconde guerre mondiale par Roger Piquemal, professeur de sports converti au judo. C’est dans cet endroit que j’ai revêtu mon premier judogi, que j’y ai appris mon métier et que j’ai commencé à l’exercer. Une décennie plus tôt, c’est là qu’en 1947 mon père, Bernard, avait commencé lui aussi le judo, intrigué et fasciné qu’il était, comme beaucoup de ses contemporains, par cette lutte mystérieuse venue d’orient et grâce à laquelle les petits pouvaient faire tomber les plus grands.

Situé en plein centre de Paris, tout en bas d’une rue qui traverse une partie du IXème arrondissement pour se terminer presqu’au pied du Sacré-Cœur, le « Club Français » a été l’un des premiers clubs de judo et de ju-jitsu (on y enseignait également la self-défense !), mais aussi l’un des plus célèbres dans les années 1950 et 1960. Pas seulement au niveau des résultats sportifs mais aussi par rapport à la qualité de l’enseignement et aux nombreuses personnalités qui y ont été reçues et qui ont dispensé leurs connaissances, bref, pour l’ensemble de son histoire. Au commencement, il se nommait le Club Français de jiu-jitsu.

Il faut savoir qu’au début du XXème siècle, ce vaste local avait déjà été une salle de sport. Ce lieu qui devait être, à l’origine, une cour commune à plusieurs bâtiments, puis un lavoir et/ou des écuries, est devenu   un endroit où l’on pratiquait de la « Culture Physique », mais aussi de la Boxe anglaise. Il n’y pas si longtemps le nouveau propriétaire de cette salle, devenue maintenant un cabinet d’architecte, a découvert qu’un ring de boxe y était installé au beau milieu. Quatre plaques de fer rivées dans le plancher et sur lesquelles devaient être fixés les poteaux qui formaient le carré en attestent.

Au milieu des années 1980, alors que j’étais en plein cours, un beau matin une dame âgée qui se promenait dans le quartier, m’informait qu’avant la seconde guerre mondiale la salle appartenait à la famille Rothschild et que tout au fond, dans un espace clos, pour ne pas dire caché, étaient dispensés les tous premiers cours de judo en France. Cette dame m’avait également appris que l’appartement qui surplombait le dojo, et qui avait été successivement celui de Roger Piquemal, puis celui de mon père, était une mezzanine qui accueillait les visiteurs. De cet endroit ils pouvaient assister aux entraînements en toute convivialité.

Fermé durant le second conflit mondial, le local a été repris par Roger Piquemal en 1944. Il en a assuré la direction jusqu’en 1954, l’année de sa disparition. A compter de cette date, c’est mon père qui a pris le relais – et de quelle manière – jusqu’à sa propre disparition en 2004.

A partir de l’âge de cinq ans j’y ai commencé une pratique avec plus ou moins d’enthousiasme. Comme il s’agissait du métier de mon père et que je devais y voir une certaine forme d’obligation, je dois avouer que la passion n’était pas toujours au rendez-vous de ces séances, même si je faisais preuve de régularité.

Ce n’est qu’à l’adolescence que la plus grande partie de ma formation s’est faite. J’y ai exercé mon métier jusqu’en 1989 ; ensuite, j’ai souhaité prendre mon indépendance.

La « Rue des Martyrs » a fermé ses portes en 2005, un an après la disparition de mon père. Ne bénéficiant pas d’issue de secours et devant l’impossibilité d’en créer une, il a fallu se faire une raison, face à des mesures de sécurité de plus en plus importantes, le lieu ne pouvait plus recevoir du public. Plusieurs années après, je ne peux l’oublier.

Aujourd’hui, c’est une talentueux architecte qui a investi les lieux et installé ses bureaux et son appartement.

Comme indiqué plus haut, dans une version longue, je ne manquerai pas d’y ajouter la liste des personnalités qui ont fréquenté ce dojo, mais aussi celles qui ont dispensé leur savoir dans cet endroit qui mérite le qualificatif de « mythique ».

eric@pariset.net

Les 16 atemis

Voilà un enchainement très simple, pas simpliste, juste simple, accessible à tous les niveaux.

Pour les esseulés d’un sévère confinement, groupe auquel j’appartiens, chaque technique pourra être travaillée et répétée en solo ; la vidéo attachée à cet article pourra y aider.

Créer au début des années 1980, au moment de la « relance » du ju-jitsu dans notre beau pays, les techniques sont, pour beaucoup, inspirées du Kime-no-kata et du Goshin-jitsu. Le but était de proposer un enchaînement 100% atemi-waza (travail des coups), mais dans l’esprit du ju-jitsu, les techniques devant être compatibles avec les projections et/ou les contrôles.

En dehors de sa simplicité, cet exercice présente quelques particularités.

D’abord il s’exécute à partir de positions naturelles, on ne se met pas « en garde » ; il est utile de pouvoir réagir alors que rien ne laisse à penser qu’Uke va porter une attaque.

Ensuite, comme dans certains katas, les techniques se travaillent à droite puis à gauche.

Enfin, par rapport au jury, Tori et Uke changent de place entre chaque mouvement, dans le but de reprendre des distances et rendre l’exercice plus dynamique.

Bon entraînement et à bientôt pour étudier cet enchainement tous ensemble.

eric@pariset.net  . .

A comme Arts Martiaux

Avec l’inévitable prolongement du confinement qui va nous être imposé dés ce soir, l’inquiétude ne faiblit pas. L’inquiétude par rapport au virus, l’inquiétude par rapport à notre capacité à supporter cet enfermement et enfin, l’inquiétude par rapport à l’avenir et à la possibilité de nous reconstruire ; il va falloir un sacré mental et une sacrée volonté. Les pratiquants d’arts Martiaux n’en sont pas dépourvus, mais là, il va falloir se surpasser.

Pour se nettoyer un peu l’esprit et revenir à ce qui nous rassemble, j’ai pensé proposer à nouveau mon dictionnaire des arts martiaux.
Le moment est sans doute opportun pour faire partager à nouveau, dans des définitions un peu remaniées, mes coups de cœur et mes passions pour des personnalités, des événements, des lieux et tout ce qui est attaché à une vie de pratique et de partage.

Aujourd’hui, logiquement nous commençons par…le début !
A, comme Arts martiaux…On ne peut mieux faire !
Les arts martiaux ont occupé, et occupent toujours, une partie considérable de ma vie, ils sont mon métier, mais aussi ma passion. Et même si je me suis spécialisé dans l’un d’entre eux, le ju-jitsu, j’ai aussi eu la possibilité de pratiquer le judo bien sûr, mais aussi, le karaté et l’aïkido, sans oublier la boxe française que je considère comme « notre art martial ».

Dans « art martial », il y a d’abord le mot art. La première définition proposée par le Larousse est la suivante : «Aptitude, habilité à faire quelque chose » ; cela est explicite et me convient. Ensuite, il y a le mot martial. Toujours dans le même dictionnaire (en première définition): «Qui manifeste des dispositions belliqueuses ». Ah ! Pour belliqueux on trouve : «qui aime la guerre et cherche à la provoquer » ! Donc un raccourci logique donne pour art martial : « art de la guerre », mais la provocation en moins, puisque le principe est de combattre quand n’existe plus d’autres solutions, le bagage technique représentant avant tout une force de dissuasion. C’est  la conception que j’en ai.

Bien que « tombé dedans » tout petit, s’il n’avait été question que de guerre, je n’aurais pas persévéré. Nous ne sommes plus au temps des samouraïs qui se trouvaient en situation quasi permanente de survie, les combats se finissant bien souvent pas la mort d’un des deux protagonistes ; ces valeureux combattants ont disparu tout en léguant un mythe puissant et les valeurs qui y sont attachées, celles du code du bushido. Gardons les principes de courage, d’honnêteté, de fidélité, de tout ce qui fait le code d’honneur pour les mettre au service d’une éducation physique et mentale. La sagesse que l’on retrouve dans certains contes que je me plais de proposer régulièrement sur mon blog, est un des éléments qui m’anime et motive ma pratique et mon enseignement, peut-être encore davantage avec le temps.

L’aspect utilitaire, la self-défense, représente sans aucun doute un intérêt majeur ; faire en sorte que chacun puisse acquérir une technique protectrice et une confiance en lui, semble une évidence ! Et puis, la notion d’affrontements très codifiés lors des séances d’entraînement pouvant s’apparenter à une forme de jeu est un autre aspect que je retiens. Elle permet de s’engager tout en ne dramatisant pas la situation, ce qui est sain. « Nous nous sommes bien amusés » est une phrase que mes élèves connaissent bien et que j’utilise volontiers, avec facétie, après un randori.

Dans une version plus fouillée que j’espère publier à l’occasion d’un dictionnaire complet de mes préférences, à la lettre A comme Arts martiaux, je ne manquerai pas d’étoffer le contenu de ce court billet et de donner mon sentiment sur chacune des principales disciplines, mais aussi sur les personnalités marquantes. Ce sera aussi l’occasion de proposer les nuances que je mets entre arts martiaux et sports de combat. Et tout simplement d’exprimer mon sentiment sur l’évolution de nos disciplines. Je ne manquerai pas d’évoquer celles que j’aurais bien aimé pouvoir pratiquer, comme le Kendo, et plus largement traiter les techniques plus anciennes, ainsi que les nombreux « Styles et Ecoles » attachés à certaines disciplines, comme le ju-jitsu.

En conclusion et en un résumé on ne peut plus court, les arts martiaux sont pour moi des méthodes de combats entourées de fortes valeurs éducatives, physiques et mentales. A notre époque l’art martial est devenu une « Ecole de vie ».

eric@pariset.net   www.jujitsuericpariset.com

Pâques sans dojo

Hier matin, muni de mon autorisation de promenade d’une heure (sans boulets aux pieds, ni menottes aux poignets), je suis passé au dojo pour voir si tout allait bien et pour constater qu’il n’y avait (toujours) pas de courrier. Que pouvait-il s’y passer, d’ailleurs au dojo ? Que pouvais y trouver mis à part de la tristesse et quelques fantômes s’affrontant dans d’improbables randoris ? Alors, ce sont les images retraçant les débuts de ce club qui me sont apparues, y compris celles des semaines qui ont  précédé l’inauguration ; elles sont des moments privilégiés, chargées  de l’excitation qui accompagne la réalisation d’un beau projet !
Il y a déjà beaucoup à raconter en partant du 15 mai de l’an passé, alors que je m’apprêtai à mettre un point final à des recherches qui n’aboutissaient pas, jusqu’au 16 mars dernier, date qui allait entrer dans l’histoire de France puisque ce jour là, c’est un incroyable et effroyable traitement inédit qui allait nous être imposé.
Durant ces dix mois, que d’événements ! Avec notamment la plus grande grève des transports français qui, concernant le club,  a mis à mal les possibilités d’entraînement, mais aussi de beaux moments d’émotions, avec l’inauguration le 28 juin en pleine canicule, les premières séances dans lesquelles se mélangeaient anciens élèves ravis de retrouver « leur ju-jitsu » et novices découvrant une belle discipline. Je n’oublie pas les stages, le pot de fin d’année, et bien d’autres moments chaleureux. Je ne manquerai pas de les raconter en détail très prochainement. J’espère vivement que nous en vivrons d’autres, quand nous sortirons de ce cauchemar.
Malgré les circonstances, je souhaite à toutes et à tous un bon week-end Pascal.

Confessions

Certains s’habituent à ce confinement, ce serait mentir d’affirmer qu’il en est de même pour moi et sans doute pour d’autres ; par conséquent je n’ajouterai pas un mensonge supplémentaire en affirmant que tout va bien, des mensonges, des incohérences et autres annonces non suivies des faits, nous n’en manquons pas ces derniers temps.

C’est toujours une étrange ambiance qui règne dans les rues de nos villes pétrifiées et plus largement dans nos vies abîmées. Nous voilà au début de la quatrième semaine de confinement et à l’extérieur c’est encore un silence assourdissant qui nous empoigne, lorsque nous sortons quelques minutes pour éviter, en plus, de mourir de faim. A l’intérieur l’inquiétude ne nous lâche pas, avec des infos toujours angoissantes sur fond de matraquage anxiogène et culpabilisant.

Certes, il semble que n’existaient pas d’autres solutions (?) en dehors de ce confinement absolument surnaturel aux conséquences ravageuses.

Je n’ai pas honte d’avouer que je ne le vis pas facilement ; assurément je ne dois pas être le seul, mais il y a sans nul doute plus à plaindre que moi. D’ailleurs certains témoignages relatant des événements du passé  nous demandent de relativiser notre situation, mais est-il sain de se satisfaire d’une souffrance au prétexte qu’il y a pire ? Il y a toujours pire malheur, mais le malheur n’est pas un but en soi ; le combattre certainement, s’y complaire sûrement pas.

Je vis mal ce moment, pour plusieurs raisons qui sont davantage liées à une certaine incompréhension, qu’à une forme de désespérance.

Premièrement, comme indiqué plus haut, peut-être qu’avec davantage d’anticipation cette situation aurait pu être évitée et par là même l’extension de la maladie. Sans oublier qu’avec un service hospitalier abîmé comme il l’est depuis des années, il semble héroïque de combattre le mal.

Deuxièmement, à titre personnel, c’est seul que  j’assume cette épreuve, séparé de mes proches. Loin de moi l’exposition d’un larmoiement personnel indécent et d’un apitoiement déplacé sur mon sort. Il s’agit juste d’un fait. Et puis, on ne s’apitoie pas, on réagit. De la souffrance, il y en a au quotidien et depuis bien longtemps et dans beaucoup de secteurs. Il n’existe pas une famille qui n’ait pas traversé d’épreuves.

Troisièmement, existe l’inquiétude quant aux conséquences économiques. Elle est parfaitement fondée dans la mesure où il paraît inévitable que ces suites seront néfastes pour ne pas dire catastrophiques sur bien des plans, peut-être plus graves que le virus lui-même. C’est malheureusement les plus faibles et ceux qui sont dans les situations les plus précaires qui, une fois de plus, en pâtirons. Pour beaucoup il y a la peur de se retrouver sans travail, elle n’est pas honteuse. On peut ajouter à cela une suspicion quant à certaines promesses !

Quatrièmement, je suis plutôt un homme d’action qui n’aime pas trop « rester en place » et force est de constater que c’est assez compliqué en ce moment, même si je ne m’ennuie jamais, entre lecture, écriture, télé (sauf chaînes d’infos en continu), contacts via les différents moyens de communication. Je n’oublie pas un minimum d’activités physiques, forcément relativement minces dans un petit appartement. Nous n’avons pas tous les mêmes conditions de confinement. Être dans l’action, c’est aussi être utile, mais dans quel secteur ?
Et puis, il y a cette perte de liberté, peut-être indispensable (?) sur le fond, mais dérangeante dans la forme.

Enfin cinquièmement, cela peut paraître dérisoire, mais pour les confinés des villes et amoureux de la nature, il y a ce manque de verdure et de chlorophylle. Certains psychologues les jugent bénéfiques.

Il faut espérer sortir indemne (physiquement et surtout psychologiquement) de cet enfermement, surtout s’il  s’inscrit dans la durée. D’ailleurs, cette incertitude quand à une « remise en liberté » est un facteur négatif supplémentaire.

Je sais qu’au regard de ceux qui souffrent dans leur chair, ces remarques peuvent paraître décalées, c’est pour cette raison que je les pondère avec une expression positive en confiant que si j’ai quelque peu « fendu l’armure », c’est celle d’un samouraï qui – malgré tout –  ne renoncera jamais et ne sombrera pas dans un désespoir malsain. Que cette épreuve, une fois vaincue, puisse nous rendre plus forts, je l’espère ; différents, sans nul doute. J’espère surtout qu’elle nous attribuera un autre regard sur bien des personnes et modifiera certains comportements.

eric@pariset.net

Suite et fin du « tour de la semaines » du dojo

Lundi 30 mars

Le lundi.

Dans la suite de mon tour de la semaine du dojo, nous en sommes donc au lundi. Mais ce jour là, tout du moins cette saison, il n’y a pas de séance au planning. De ce fait, aujourd’hui, j’ai pensé proposer un article technique sur les ukemis (les chutes). Un article sur ce que l’on pourrait appeler « un fondamental ».
Dans la pratique de la plupart des arts martiaux et en premier lieu en ju-jitsu, apprendre à chuter est une nécessité absolue. C’est également utile dans la vie courante. C’est une sorte d’assurance. Certes, nous ne tombons pas à longueur de journée, mais beaucoup de fâcheuses conséquences pourraient être évitées avec un minimum de maîtrise du « savoir se rétablir » ; sur de la neige, de la glace ou tout simplement après s’être « emmêlé les crayons ».
Lors des entraînements, les « brises chutes » (les ukemis en japonais) permettent l’étude et les répétitions des projections sur un partenaire qui pourra chuter sans dommage. Sans cette maitrise les progrès sont forcément impossibles dans le domaine des projections. Par conséquent il ne faut pas les négliger. Certains y sont réfractaires, mais peut-être faut-il appliquer un apprentissage progressif ? Tout en sachant que malgré tout la meilleure façon d’appendre à chuter, c’est de…chuter.
On distingue les chutes sur l’arrière et les chutes sur l’avant.
Dans chacune de ces catégories, il y a la chute qui se pratique sur un tatami et celle « de situation », c’est à dire en extérieur, si par malheur elle survient sur un sol dur, par accident, maladresse ou causée par une agression. Dans cette dernière situation il faudra tout à la fois se relever sans dommages et être opérationnel immédiatement.
Dans les deux cas de figure (dojo et « situation) il faudra préserver deux parties essentielles, la tête et les articulations. Pour la tête il suffira de « la rentrer », menton dans la poitrine. Pour les bras, sur un tatami on frappera au sol « bras tendus » paumes de main vers le sol, pour à la fois protéger les articulations et repartir l’onde de choc. Sur un sol dur on se limitera à ce que les bras soient tendus, à ce moment là on évitera de frapper. Si nous sommes bousculés et que l’on perd l’équilibre sur l’arrière, on essaiera de rouler sur une épaule en ayant préalablement pliée une jambe, pour se retrouver le plus vite possible debout face à un éventuel adversaire (photo 1).
Concernant la chute avant, il faudra se servir du bras avant comme d’une roue et d’un amortisseur. Là aussi il sera indispensable de protéger la tête avant tout et ensuite les articulations et notamment l’épaule. En dojo après avoir roulé, on se réceptionnera jambes tendues et parallèles. Dans la réalité à la réception, on pliera une jambe pour se retrouver face à l’endroit d’où l’on vient, face à un agresseur qui nous aurait poussé dans le dos (photo 2).
Tout cela est un peu technique, rien ne remplace le tatami à condition de pouvoir y accéder. Ce qui, nous l’espérons tous, arrivera le plus rapidement possible.
(Les photos sont extraites du livre « ju-jitsu-Défense personnelle ». Édition parue en 2000.)

Mardi 31 mars

Mardi
En attendant la reprise d’une activité qui commence sérieusement à nous manquer, nous continuons notre tour de la semaine en évoquant, jour par jour, les temps forts du dojo. Aujourd’hui nous abordons tout  naturellement le mardi.
Dans beaucoup de dojos, le mardi est traditionnellement un jour de fréquentation importante. Je l’ai constaté tout au long de ma carrière, sans jamais pouvoir fournir une explication rationnelle. Peut-être que le lundi permet de se « remettre » du week-end et que le mardi est le véritable premier jour de la semaine.
Durant cette  journée là, notre dojo propose trois séances. Une le midi et deux le soir. Cette saison, il faut l’admettre, les cours de la mi-journée ne rassemblent pas encore énormément d’élèves. Par contre, comme indiqué plus haut, les séances du mardi soir connaissent un beau succès.
A 19 h 00, ce sont plutôt les bases du ju-jitsu qui sont abordées. Le cours rassemble beaucoup de ceintures de couleur.
A 20 h 00, les ceintures foncées forment le « gros de la troupe ». Ce cours est dédié à tout ce qui touche la partie « corps à corps » du ju-jitsu, debout et au sol. Au sol on approfondit le travail à partir d’une situation, debout on décortique une grande technique. Les semaines d’avant le confinement nous avions passé sur le grille ippon-seoi-nage, tai-otoshi, uchi-mata et harai-goshi. Je fêterai le premier mardi en revenant sur deux de mes techniques préférées : ippon-seoi-nage, un « monument » du ju-jitsu et du judo et ko-uchi-gari, une technique tout en précision.
Vivement la reprise.

Mercredi 1er avril

Le mercredi…
On poursuit le tour de la semaine du dojo.
Le mercredi, dans tous les dojos de France c’est la journée des enfants. S’agissant de  notre première saison, il n’y a – pour le moment – qu’un seul cours à leur intention dans cette journée qui coupe la semaine et qui permet aux plus jeunes de se reposer de l’école pour se consacrer à une pratique physique dans le sport de leur choix (ou de celui de leurs parents). C’est la tranche d’âges des 7 à 10 ans que nous accueillons ce jour là. On peut déjà leur faire pratiquer beaucoup de techniques et la diversité du ju-jitsu leur convient parfaitement. Travail des « atemis » avec les gants, projections, travail au sol, mais aussi construction d’enchaînements qu’ils adorent étudier et démontrer. Et bien évidemment, les randoris, c’est à dire un travail d’opposition très codifié et strictement encadré, dans lequel l’aspect ludique n’est jamais absent. Depuis le mois de septembre les progrès sont là, c’est indiscutable. Une fois cette funeste période passée, il nous faudra rattraper le temps perdu. Il n’y aucune raison de ne pas y parvenir.
Le mercredi il y a aussi une deuxième séance ; celle-ci s’adresse principalement aux préados et adolescents, mais aussi à quelques adultes. Il s’agit d‘un cours de « boxe défense ». Travail tout en souplesse des membres supérieurs et inférieurs, pour un renforcement de la souplesse, de la tonicité, de la précision et du cardio. Après un bon échauffement assez ludique, on aborde une technique, puis des enchaînements « poings-pieds » ; enfin, quelques assauts pour un indispensable travail d’opposition codifiée et en déplacement. La séance se termine avec quelques défenses très simples sur différentes types de agressions. Tout cela dans une ambiance au travers de laquelle se marient l’indispensable concentration attachée à la
pratique d’une discipline de combat et la bonne humeur liée à un moment de loisir et de plaisir.

Jeudi 2 avril

Le jeudi
Aujourd’hui, c’est le dernier jour de notre « tour de la semaine du dojo » commencé vendredi dernier. Vous pouvez retrouver les autres journées dans les articles précédents.
Le jeudi, au dojo c’est le jour plus particulièrement consacré à l’atemi-waza, le travail des coups (exception faite pour la séance du midi).
Pour cela et durant une partie du cours on met un peu les gants ; de simples gants « toutes boxes ». Non pas pour se taper dessus, mais pour taper dessus (sur les gants), ce qui permet de travailler la précision et un léger contact pour quelques bonnes sensations.
Des petits assauts uniquement à base de poings permettent de s’échauffer d’une façon un peu différente, afin de mettre le corps dans de bonnes dispositions pour la suite de la séance. C’est aussi l’occasion, si cela se pratique intelligemment, d’inclure un agréable aspect ludique.
Ensuite, toujours en déplacement, un exercice « d’appel des coups », poings et pieds. Uke place ses gants en cible pour que Tori puisse répéter  différents atemi. C’est à Uke de « mener la danse » en diversifiant ses demandes, afin que Tori puisse répéter et diversifier ses techniques de percussion. Uke fera en sorte d’imposer des enchaînements cohérents.
Ensuite, en statique c’est le moment d’étudier, d’approfondir et de répéter une technique en particulier. Au restaurant il y a « le plat du jour », au dojo, c’est « la technique du jour ». En épluchant tel ou tel atemi, cela permet d’en travailler d’autres avec les enchaînements qui lui sont attachés.
Puis, sans les gants, on passe au travail de l’atemi du jour dans le cadre du ju-jitsu, en étudiant les enchaînements qui sont possibles avec les autres composantes ; projections et contrôles, différentes défenses, contre prises, etc.
Pour terminer la séance on remet les gants pour s’adonner à quelques assauts courtois  (comme on disait dans le temps). Façons de travailler les enchaînements, les défenses, la vitesse, le rythme et le cardio. Chacun a sa propre conception de cet exercice, me concernant, la priorité est donnée à la maîtrise, au contrôle, partant du principe que nous ne sommes pas là pour se faire mal, mais pour apprendre à ne pas se faire mal. Éducateur et non pas destructeur.

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Au fil des mois et des émois !

Nous sommes au 2/3 de ce que l’on nomme la « saison sportive ». Ceci dans la mesure où l’on considère qu’une telle saison se finit le 30 juin et que par conséquent la suivante commence le 1er juillet.
Toujours est-il qu’ayant ouvert notre dojo le 1er juillet, nous sommes à quatre mois du premier anniversaire de ce lieu de partage !
Il n’est pas encore temps d’établir un bilan complet, mais simplement d’évoquer les points positifs et quelques autres.
En huit mois, beaucoup de choses se sont passées et diverses impressions et émotions ont pu s’exprimer.
D’abord il y a la joie liée à la réalisation d’un projet. Même si les difficultés sont importantes, les surmonter et aboutir sont autant de plaisir que seuls connaissent ceux qui ont la chance de pouvoir (ou de vouloir) le faire !
Chaque étape apporte ses propres sentiments. Du tout début de l’aventure lorsque l’on est dans la prospection avec les visites de locaux, jusqu’au tout premier cours que l’on assure, en passant par le suivi des travaux, notamment pour qu’il n’y ait pas de retard et que le dojo puisse être inauguré à la date prévue ; ce qui a été le cas au début du mois de juillet dernier.
Ensuite, même en plein été, tout va très vite, beaucoup de choses se passent ; des demandes de renseignements, des visites de curiosité, de politesse et d’amitié (qui font chaud au cœur et rendent insignifiantes les négligences et les coupables ingratitudes), les toutes premières séances dans lesquelles se mélangent novices et anciens ravis de retrouver « leur ju-jitsu », et je n’oublie pas la sueur sur tous les fronts, surtout l’été dernier ! Ensuite vient la rentrée, avec beaucoup de demandes de renseignements, d’initiations et d’inscriptions. Un brassage de population – aux niveaux techniques différents, représentant diverses professions, mais ayant en commun le désir de poursuivre ou de commencer la pratique d’un art martial accessible physiquement, et dans laquelle ne suinte aucune violence ! J’insiste sur ce point. En effet certains propos qui m’ont été rapportés sont édifiants ! Les mauvaises expériences sont légion et il est heureux qu’elles ne soient pas rédhibitoires pour la totalité de ceux qui les ont subies. Certaines pratiques font beaucoup de mal aux arts martiaux (et aux pratiquants) !
Une installation dans un nouveau quartier, même si celui-là ne m’est pas vraiment inconnu, ce sont de nouveaux voisins, une ambiance différente, de nouvelles habitudes, bref un environnement dans lequel il faudra se fondre.
Au bout de quelques semaines un rythme s’établit et l’on est heureux de voir s’élargir le cercle des élèves !
Certes, il ne serait pas objectif d’éluder les aspects négatifs, surtout que depuis le mois de décembre ils ne manquent pas. Des événements contre lesquels, tout du moins à notre modeste niveau, nous ne pouvons pas grand chose. D’abord la plus grande grève de l’histoire des transports en France et maintenant un virus « bizarre » ! Cela ne manque pas de perturber notre quotidien dans tous les domaines.
Quoiqu’il en soit, la volonté est une vertu qui ne manque pas à qui a consacré sa vie aux arts martiaux ; c’est dans cet état d’esprit que j’aborde la dernière partie de cette saison qui aura été celle d’un nouveau challenge que certains qualifiaient d’ambitieux (avais-je d’autres choix ?). Les obstacles sont faits pour être franchis et les problèmes pour être résolus. Lorsque l’on possède l’envie d’avancer et de créer, on avance deux fois plus vite. « Créer, c’est vivre deux fois ». Albert Camus.

eric@pariset.net  www.jujitsuericpariset.com

Randori

Il y a quelques semaines j’avais consacré un article aux méthodes d’entraînement. Parmi elles, il y a le randori, l’équivalent, en boxe, de l’assaut que l’on nommait aussi « l’assaut courtois », il y a un certain temps.

Le randori, ou l’assaut, c’est un peu la récompense de fin de séance. C’est le moment où l’on peut tester nos techniques dans un système d’affrontement très codifié et axé sur l’initiative, c’est-à-dire sur l’attaque ; l’aspect ludique ne doit jamais être absent de ces joutes respectueuses  avec lesquelles on perfectionne aussi la défense, puisqu’il est nécessaire de tenter d’esquiver les initiatives du partenaire.

Malheureusement, trop souvent le randori  est quelque peu dénaturé et confondu avec le « shai », c’est-à-dire le combat, la compétition (en judo, par exemple). C’est dommage. Ceci étant tout dépend des objectifs, ceux-ci ne sont pas les mêmes selon que l’on se situe dans une pratique loisir ou bien à l’occasion d’entraînements  de haut-niveau ; même si à ce stade là il devrait -aussi – être indispensable de ne pas négliger cet exercice.

En ju-jitsu on peut le pratiquer dans le domaine des coups (atemi-waza), des projections (nage-waza) et du sol (ne-waza).

Le but du randori est avant tout de se perfectionner et d’essayer (en fonction du secteur dans lequel on souhaite le faire) de « passer » des techniques, d’aboutir et de résoudre différentes situations d’opposition ; pour les projections, de tenter de faire tomber un partenaire qui s’oppose intelligemment. C’est volontairement que j’utilise le mot de partenaire et non pas d’adversaire. Du latin par (avec) et ad (contre). C’est-à-dire que dans le randori, le partenaire travaille avec moi et non pas contre moi, il m’aide à progresser en proposant une opposition raisonnée, m’obligeant à travailler ma vitesse d’exécution, ma réactivité, ma condition physique, mais aussi – fatalement –  un système de défense axé exclusivement sur les esquives et non pas à l’aide de blocages qui annihilent toute initiative et par conséquent tout progrès. Imaginons deux joueurs de tennis à qui on « confisque » la balle !

Dans certains randori de projections ont peut même exclure toute technique de « contre direct » et n’autoriser que les contres répondant à l’appellation « go-no-sen » (l’attaque dans l’attaque). Le contre peut faire des dégâts physiques, mais aussi phycologiques en  limitant les initiatives de peur de subir un contre ravageur ; ce qui limitera obligatoirement les progrès.

Il y a très longtemps je bénéficiais de l’enseignement d’un professeur de boxe française, Marcel Le Saux, qui comparait l’assaut poing-pied à une conversation. Chacun s’exprimant à tour de rôle en développant ses arguments, évitant de parler en même temps et trop fort, pouvant couper la parole poliment si l’opportunité se présente, mais surtout en ne proférant ni invective, ni grossièreté. Belle métaphore.

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Souvenirs d’une belle préface

Christian Quidet (1932-2010) a été un très grand journaliste spécialisé dans le sport et notamment dans le judo. Dans les années 1970 il a beaucoup aidé cette discipline à franchir la barrière des médias.  Il a aussi occupé le poste de  directeur des sports sur « Antenne 2 », l’ancienne appellation de France 2, dans les années 1980. Nos disciplines martiales l’intéressaient au plus haut point, il leur a d’ailleurs consacré un magnifique ouvrage : « La fabuleuse histoire des arts martiaux ». En 1985, avant la parution de mon premier livre, je lui avais demandé s’il voulait bien m’honorer d’une préface ; il a accepté spontanément.  A  l’attention de ceux qui ne connaissaient pas ces quelques belles lignes, c’est avec plaisir que je les mets à nouveau  en ligne. D’autant plus que je trouve cette préface terriblement d’actualité.

     « La publication d’une progression française de ju-jitsu est un acte plus important qu’il n’y paraît. C’est la restauration, en France, du trésor des samouraïs qui, au fil de l’histoire, ont porté l’art du combat individuel à un degré de perfectionnement et de raffinement unique au monde.
       Cette version moderne de la self-défense japonaise, présentée par Eric Pariset, met à la disposition des éducateurs sportifs une méthode claire, précise et efficace.
       Elle offre à celles et à ceux qui s’en inspirent un bagage technique inestimable. Non pour leur apprendre à se battre mais pour dissuader les autres d’attaquer.
        C’est en ce sens que je crois beaucoup à la vulgarisation de la self-défense dans notre pays. Comme un remède à l’agressivité qui enlaidit notre société actuelle.
       Je félicite Eric Pariset de s’être intéressé et de s’être spécialisé dans le ju-jitsu qui est le meilleur complément à la pratique du judo.
       Le ju-jitsu ne doit pas être mis entre toutes les mains et ne peut être enseigné valablement que par ceux qui ont adhéré à l’esprit de son fondateur, le maître Jigoro Kano.
       Eric Pariset est de ceux-là. Il a été élevé dans une famille où les arts martiaux étaient considérés comme un Art et pratiqués comme une passion. Son père, Bernard Pariset, a participé au premier championnat du Monde au Japon en 1956 et a obtenu une superbe quatrième place. Plusieurs fois champion d’Europe il a légué, comme  les maîtres japonais d’autrefois, son savoir et sa sagesse à Eric.
      Ceinture noire, 5e Dan de Judo-Ju-Jitsu, Eric Pariset a été champion d’ile de France de Judo en 1983.
       Il s’est ensuite, spécialisé dans les démonstrations de Ju-Jitsu et de self-défense pour devenir, à   31 ans, le meilleur spécialiste français de cette discipline.
      « N’enseigne pas toute ta science à ton élève, qui sait s’il ne deviendra  pas un jour ton ennemi ».
       Fort heureusement, Eric Pariset n’a pas appliqué cette devise  chère aux anciens Maîtres d’armes japonais.
       Je l’en remercie et j’espère que vous serez nombreux à profiter de sa générosité.»

Christian Quidet.
Responsable du service des Sports d’Antenne 2*
Avril 1985.

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