Trois mouches…

Voilà une petite histoire que j’ai déjà maintes fois publiée sans en éprouver la moindre lassitude, la preuve ! La dissuasion est une arme redoutable !

« Dans une auberge isolée, un samouraï est installé, seul à une table. Malgré trois mouches qui tournent autour de lui, il reste d’un calme surprenant. Trois ronins  entrent à leur tour dans l’auberge. Ils remarquent aussitôt avec envie la magnifique paire de sabres que porte l’homme isolé. Sûrs de leur coup, trois contre un, ils s’assoient à une table voisine et mettent tout en œuvre pour provoquer le samouraï. Celui-ci reste imperturbable, comme s’il n’avait même pas remarqué la présence des trois rônins. Loin de se décourager, les rônins se font de plus en plus railleurs. Tout à coup, en trois gestes rapides, le samouraï attrape les trois mouches qui tournaient autour de lui, et ce, avec les baguettes qu’il tenait à la main. Puis calmement, il repose les baguettes, parfaitement indifférent au trouble qu’il venait de provoquer parmi les rônins. En effet, non seulement ceux-ci s’étaient tus, mais pris de panique, ils n’avaient pas tardé à s’enfuir. Ils venaient de comprendre à temps qu’ils s’étaient attaqués à un homme d’une maîtrise redoutable. Plus tard, ils finirent par apprendre, avec effroi, que celui qui les avait si habilement découragés était le fameux Miyamoto Musashi.

Violence et non-violence…

En ouverture d’un modeste article consacré à la violence (écrit à l’aide de mots simples) et pour l’illustrer, j’ai pensé publier cette petite leçon.
« L’aîné d’une tribu indienne explique la vie à son petit fils : « tu vois, en chacun de nous, deux loups s’affrontent en permanence : il y a le loup de la haine, du pessimisme et de l’égoïsme ; et il y a aussi le  loup de l’amour, de l’optimisme et de la générosité ». L’enfant demande : « Et quel est celui qui l’emporte ? ». Le sage répondit : « celui que tu nourris » ! »

Cela va sans dire que, comme beaucoup, je milite pour l’éradication de la violence, ce fléau qui enlaidit notre société. Il n’a cessé d’exister, les racines du mal sont profondes et les raisons multiples. Cependant il n’est pas interdit d’espérer, tout comme il n’est pas question d’abdiquer.

Il ne s’agit pas d’un exposé sur les origines et les causes des différentes formes de violences, je me limiterai à mon domaine de compétence et à l’impact positif que mon métier se doit d’apporter à la société. J’en profite pour rappeler qu’il n’existe pas que la violence physique, certaines violences mentales peuvent parfois être aussi redoutables.

Chaque professeur, quelle que soit la discipline qu’il enseigne, a un rôle majeur à jouer. Dans cette lutte, l’éducation est fondamentale, elle permet de prendre le mal à la racine. Certes, cela s’inscrit sur du long terme, mais cet enjeu le mérite.

Les professeurs d’arts martiaux ont une responsabilité encore plus importante dans la mesure où ils enseignent des techniques de combat, certaines à l’issue pouvant être fatale. Elles devront donc être considérées et enseignées avant tout comme des armes de dissuasion et utilisées exclusivement en dernier recours.

C’est toute la difficulté de la transmission de nos disciplines ; elle doit se faire dans un but éducatif et non destructif (bien que, comme indiqué plus haut, ce soit la vocation de la plupart des techniques). On ne répond pas à la violence par la violence. Cette affirmation pourra être considérée comme une sorte de poncif par certains, mais elle est pourtant vraie. Je sais que cette phrase a été dite et écrite à de nombreuses reprises. Il n’est jamais inutile « d’enfoncer le clou ».

Certains pensent que de tels propos sont empreints d’un angélisme inadapté, d’une naïveté déconcertante ou même de laxisme. Ceux-là ne peuvent pas être considérés comme des éducateurs responsables.

Etre contre la violence n’est pas forcément faire preuve d’inconscience ; lorsque l’on est agressé violemment, il faut être capable de riposter efficacement, avec un niveau technique et mental qui permet d’agir rapidement, mais avec nuance – dans la mesure du possible, sans ignorer les notions de légitime défense et de respect de la vie.

Il est navrant de constater que certaines méthodes de combat peuvent être utilisées à de mauvaises fins, ou enseignées de façon brutale, violente. Heureusement, il s’agit du fait d’une minorité de personnes ne pouvant être considérées ni comme des budokas, ni comme des enseignants.

Dans leur immense majorité, les professeurs de nos belles disciplines sont conscients de l’enjeu, ils ne se comportent pas comme des destructeurs, mais comme des éducateurs.

Le dojo !

Un DOJO n’est pas simplement un lieu où l’on transpire, c’est aussi un endroit dans lequel on s’inspire. Il doit y régner une ambiance particulière qui n’est pas celle d’une simple salle de sports, on doit y apprendre « quelque chose » de plus.

C’est le lieu dans lequel  on est censé « trouver sa voie » (traduction de dojo), c’est-à-dire le chemin. Le chemin de la sagesse, de la tolérance, de la détermination, bref le chemin de l’existence.

La voie qui permettra de s’élever sur le plan technique, mais aussi sur le plan mental. Les arts martiaux, enseignés et pratiqués comme ils doivent l’être, ne sont-ils pas des « Écoles de vie » ?

Malheureusement, ce n’est pas toujours la réalité, parfois les conditions ne sont pas réunies. D’abord, et nous n’y pouvons rien, certains équipements municipaux sont destinés à plusieurs disciplines sportives, autres que les arts martiaux, privant ainsi le lieu d’une certaine identité propice à l’étude bien particulière de nos disciplines.

Ensuite il y a ce que l’on peut appeler « l’esprit », celui qui est inculqué par le « maître des lieux », le professeur. C’est à lui qu’incombe la responsabilité de faire en sorte que les élèves trouvent leur voie, sur le plan technique, mais aussi sur le plan mental, comme indiqué plus haut.

Trouver la voie, c’est trouver le chemin qui mène aux progrès techniques et à la sagesse comportementale. Faire de sa pratique quelque chose d’utile pour soi et pour les autres. Il ne suffit pas d’afficher le code moral sur un mur du dojo et être ainsi en paix avec sa conscience, il faut aussi le respecter et le faire respecter.

Le dojo, n’est pas un endroit dans lequel seront vénérées quelques divinités que ce soit, mais simplement un lieu où l’on applique les principes de politesse élémentaire et de respect vis-à-vis du professeur et des autres élèves, du plus gradé au moins gradé, mais aussi de l’espace dans lequel nous étudions. Le dojo est un lieu d’étude, de partage et de respect.

C’est au professeur qu’incombe la responsabilité de faire respecter tous ces éléments. Comme arriver à l’heure, saluer en entrant dans le lieu, ne pas se déplacer pieds nus en dehors du tatami, veillez à ce que les « dogis » soient propres, saluer son partenaire dans une tenue correcte avant et après chaque changement, communiquer à voix basse, voilà quelques « bases » qui ne sont pas toujours respectées.

Dans un climat général qui se dégrade, avec notamment des actes inqualifiables, les professeurs d’arts martiaux sont investis, de par la nature de ce qu’ils enseignent, d’une responsabilité peut-être plus importante !

Ce serait incompréhensible qu’un professeur d’arts martiaux – dans lesquels la rigueur est l’une des principales vertus – ne se comporte pas de façon exemplaire et ne fasse pas respecter quelques règles élémentaires.

Plus qu’ailleurs, chez nous, l’exemple vient d’en haut !

D’abord s’amuser…

Encore une rediffusion qui ne me paraît pas superflue. Il s’agit juste de mon point de vue.

Je ne suis pas contre la compétition, mais contre les excès qui parfois l’accompagnent.
Avec un père au palmarès exceptionnel, il serait presque indécent de dénigrer cette forme d’expression, d’autant que, même si les circonstances ne m’ont pas permis de faire de même, j’ai pu apprécier le goût particulier de ces affrontements jusqu’au niveau national.

Ceci étant, il est dommage qu’un énorme pourcentage de l’enseignement dispensé, notamment dans les dojos, soit axé principalement et parfois exclusivement  sur ce que l’on appelle « la compète », au détriment des autres facettes offertes par nos disciplines et qui ont aussi et surtout une vocation éducative dans bien des domaines.

Me vient à l’esprit une scène banale dans laquelle la maman d’un enfant se renseigne auprès d’un responsable de club en vue d’une prochaine inscription. Le responsable en question lui fournit les renseignements et conclut : «nous ferons tout pour qu’il aille en compétition et qu’il rapporte des médailles ». Ce à quoi la maman répond : «non, il ne veut pas gagner, mais juste s’amuser ».  On oublie souvent cette notion de jeu, pourtant basique, chez les enfants mais aussi chez les adultes ! Tout comme on oublie qu’il n’est pas nécessaire de rajouter immédiatement une pression avec des objectifs à atteindre, l’école et la société en fournissent déjà.

Est-ce que tout est fait pour satisfaire ceux qui viennent  pour s’amuser, se défouler, s’exprimer physiquement, apprendre une technique juste pour le plaisir de la réaliser et de l’améliorer, passer les ceintures, maîtriser la défense personnelle,  tout en sachant se contrôler, connaître et respecter les règles de bonne conduite en société avec le Code moral, bref pratiquer un « loisir éducatif et récréatif » ?  Tout cela sans subir de pression ou encore  une sorte de stigmatisation qui pousse  à l’abandon si l’on n’adhère pas à cette  « championnite aiguë ».

Peut-être y aurait-il davantage de pratiquants si toutes les facettes des arts martiaux étaient systématiquement proposées.  C’est d’autant plus regrettable que cette course aux médailles   s’accompagne – parfois – d’excès et de l’absence de précautions  qui devraient être attachées à une pratique pour les enfants. Faire perdre du poids avant une compétition, par exemple.  Tout cela pour la photo d’un dirigeant dans la presse locale du lundi.

La compétition doit être proposée mais pas imposée, d’autant qu’elle ne peut être qu’une étape. Or, si on ne s’est  consacré qu’à cet aspect, une fois  que l’âge à partir duquel on ne peut plus participer à ces affrontements est atteint, c’est l’abandon qui survient inévitablement.

Il y aurait beaucoup à dire et à écrire sur ce que l’on pourrait appeler le « revers de la médaille », à savoir les conséquences néfastes de la compétition, mais comme il est toujours préférable de terminer sur une note positive, on peut le faire en affirmant que celle-ci apporte beaucoup de satisfactions (surtout à ceux qui gagnent) et qu’elle permet, à condition que le parcours soit bien encadré, de vivre une très belle expérience ! (J’évoque les disciplines dans lesquelles la compétition est possible.)

Maintenant, on me dira que le marché économique qui entoure le sport de haut-niveau  est important et générateur de richesses, d’emplois, etc., ce qui est vrai, mais ce qui est vrai aussi, c’est que dans ce domaine  les excès ne manquent pas ; ceci est un autre sujet à propos duquel nous pourrons débattre.

L’importance du premier professeur…

Après le choix d’une discipline, l’importance du premier professeur

La semaine dernière j’évoquais le choix d’une discipline, mais le choix du professeur est tout aussi important. Ceci étant, à moins que beaucoup de changements s’opèrent au sein du club, le professeur est un peu « l’âme du dojo » et parfois même une « marque de fabrique ».  Choisir une discipline et un dojo, c’est aussi choisir un professeur.

Cet article vient en complément de celui de la semaine dernière, en insistant cette fois, sur l’importance du premier professeur. Il s’agit d’un article déjà proposé, mais quelque peu remanié.

Démontrer parfaitement une technique est une chose,  qu’elle soit assimilée par les élèves, en est une autre. « L’essentiel n’est pas ce que l’on enseigne, mais ce que les élèves apprennent ». Cette citation d’André Giordan (dont vous trouverez le parcours sur Internet) est éloquente. Un cours n’est pas un show et les explications se doivent d’être concises et ne pas se transformer en un discours interminable. Il y a des professeurs dotés d’une excellente technique mais qui sont incapables de la transmettre. A l’inverse, il y a des professeurs qui sont en capacité de transmettre des éléments qu’ils ne maîtrisent pas forcément parfaitement, cela s’appelle la pédagogie. Démonter est une chose, transmettre en est une autre.

Comment savoir si l’enseignant d’un dojo est compétent et s’il nous conviendra ? Un néophyte est forcément privé de moyens d’évaluation.  Il y a la réputation, mais encore faut-il que l’enseignant et son enseignement correspondent à ce que nous recherchons. Un professeur peut former d’excellents champions, mais si l’objectif est de trouver une pratique utilitaire ou essentiellement tournée vers le loisir,  ces compétences là ne seront pas utiles.

Si c’est  un ami qui nous conduit dans son dojo, ce qui est souvent le cas, il est préférable (là aussi) que les aspirations de cet ami soient en concordance avec les nôtres. Il faudra donc souvent  s’en remettre à la première impression et surtout ne pas avoir peur d’échanger avec le professeur et avec quelques habitués du dojo avant de s’engager.

Le métier de professeur, quelle que soit la discipline enseignée (français, mathématiques, chant, danse, arts martiaux, etc.) est un des métiers les plus beaux mais aussi les plus difficiles. Lors des confinements que l’on nous a infligés, certains parents, obligés de faire la classe à leurs enfants, ont pris conscience de cette réalité. Certes, chacun son métier et on peut opposer à cette affirmation que c’était difficile pour eux dans le mesure où ce n’est pas le leur, mais quand même…!

L’une des principales qualités d’un professeur qui s’adresse à différentes populations, comme c’est souvent le cas dans les arts martiaux, c’est d’être capable de s’adapter à l’âge et au niveau technique des élèves. Et en particulier aux débutants (qui sont les ceintures noires de demain).

J’ai déjà insisté sur ce point essentiel, celui du premier professeur. J’avais même cité en exemple l’ex-danseuse étoile, Marie Agnès Gillot, résidant à Paris mais qui accompagnait son fils chaque semaine en Normandie pour qu’il commence la danse avec celui qui avait été son premier professeur.

Son rôle est déterminant, c’est lui qui construit les fondations, qui nous fournit les bases. Donc, au moment de commencer, il est préférable de ne pas se tromper. Les mauvaises habitudes se prennent plus vite que les bonnes et elles sont tenaces.

Souvent la qualité du professeur se juge à celle de ses élèves (il y a aussi des exceptions).

Dans notre domaine, le professeur est un passeur de technique, mais il est aussi le transmetteur des fortes valeurs attachées aux arts martiaux, notamment ce fameux « Code moral », souvent affiché, pas toujours appliqué !

Avec le temps on se souviendra que c’est à ce premier professeur que l’on doit d’être le pratiquant que l’on est devenu ; il nous a fait découvrir et aimer une discipline et un art dans lequel nous nous épanouissons.

A titre personnel, j’ai eu la chance de bénéficier en tout premier de l’enseignement de mon père, Bernard Pariset. La chance : pas uniquement parce qu’il s’agissait de mon père, mais parce qu’en plus d’être un grand champion, il était un excellent enseignant doté d’une pédagogie naturelle dans laquelle s’exprimait une redoutable force de persuasion, mais aussi une façon extraordinaire de rendre les choses évidentes.

Le choix

Nous sommes encore à la rentrée, les portes des dojos sont ouvertes à nouveau, enfin !
Il y a ceux qui reprennent une pratique qui les passionne, ils étaient impatients de remettre le kimono (bien que ce ne soit le nom exact de la tenue que nous revêtons pour pratiquer, nous l’utilisons par facilité). Et puis, il y à ceux qui vont commencer leur « carrière de samouraï » et qui sont hantés par une multitude de questions au moment du choix. Certains ont déjà « trouver leur voie », souvent sur les conseils d’un proche, mais il y a les autres, ceux qui hésitent encore.

L’offre est importante et un débutant ne sait pas forcément sur quels critères se baser pour s’engager toute une saison et sûrement davantage, c’est ce qu’il faut souhaiter. D’autant que dans nos disciplines, normalement, nous nous engageons à long terme, même si malheureusement c’est de moins en moins le cas ; papillonnage et zapping prenant le pas sur rigueur et persévérance !

En premier lieu, il y a les motivations : la self-défense, le sport loisir, l’entretien physique, etc. Ou même une méthode plus « interne ». Avoué ou pas, l’aspect utilitaire reste une motivation importante.

Certains « experts » en manque de reconnaissance n’hésitent pas à se réclamer d’une formule magique, même parfois de la méthode qui rend invincible ; heureusement beaucoup n’ont pas cette prétention, ils sont réalistes et empreints de l’humilité indispensable à tous les vrais professeurs d’arts martiaux.

Comme je l’ai souvent rappelé, il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises disciplines, mais tout simplement des professeurs plus ou moins compétents. Une bonne discipline mal enseignée n’apprendra rien à l’élève, au contraire elle construira de mauvaises fondations et donnera de très mauvaises habitudes, certaines étant difficilement réversibles.

C’est donc davantage sur le choix de l’enseignant, qu’il faut se tourner. Sa réputation, bien sûr, due à son parcours et à la qualité des élèves formés ; j’avais déjà évoqué il y a quelques semaines l’importance du premier professeur. Mais, on ne peut pas plaire à tout le monde, c’est pour cette raison qu’il faut se déplacer et demander à faire une ou deux séances à l’essai. Simplement pour constater si, oui ou non, l’ambiance dans laquelle se déroule l’enseignement nous correspond.

Donc, plus que le choix d’une discipline, c’est le choix d’un dojo – et de son enseignant – qui est déterminant.

Se pose aussi la question de la fréquence hebdomadaire à laquelle on doit s’astreindre. Là encore, il s’agit de s’adapter en fonction de plusieurs critères ; l’éloignement et la disponibilité personnelle, en font partie. Plus que la quantité, ce sera la régularité qui primera. Essayer, si possible de venir au(x) même(s) horaire(s) et de façon régulière ; éviter de « sauter » une ou plusieurs semaines. Certains prétendent qu’un seul entraînement hebdomadaire n’est pas suffisant, je pense qu’il est préférable de ne venir qu’une fois par semaine plutôt que zéro fois ; même si une fréquence de deux séances hebdomadaires est idéale. Au-delà il faut être semi-professionnel ou professionnel.

Bonne rentrée à tous et bonne saison dans un bon dojo….avec un bon professeur, tant qu’à faire !

Judo et ju-jitsu

A l’aube d’une nouvelle saison pour les clubs qui auront la chance de pouvoir reprendre, j’ai pensé livrer quelques réflexions issues de quelques années  d’expérience. Cela dans un long article !

Il n’est pas indispensable de pratiquer les deux pour être bon dans l’un ou dans l’autre, mais nul ne peut contester que le ju-jitsu et le judo soient intimement liés et qu’ils puissent être complémentaires à la condition d’être compatibles, nous y reviendrons plus bas. Jigoro Kano ne s’est-il pas inspiré de certaines écoles de ju-jitsu pour mettre au point sa méthode qu’il a nommé judo ?

Beaucoup plus tard dans notre pays,  au tout début des années 1970, à l’initiative de mon père, Bernard Pariset, le ju-jitsu (quelque peu oublié)  fût réhabilité et  remis en valeur au sein de la fédération de judo. Il n’était pas question de mettre en place une concurrence au judo, mais une complémentarité évidente. L’objectif était de revaloriser  un  aspect du judo qui avait été délaissé et qui  pourtant est à son origine, à savoir l’aspect utilitaire. Il s’agissait tout simplement de proposer un « plus ». Une corde supplémentaire à l’arc des professeurs qui souhaitaient élargir leurs possibilités d’accueil dans les dojos, c’était une simple réappropriation.

A cette époque, le judo connaissait un important développement, mais l’aspect  sportif  prédominait. Dans l’enseignement, les autres secteurs étaient quelque peu délaissés, ce qui excluait une bonne partie d’une population à la recherche d’un art martial axé sur la self-défense. Celle-ci se tournait alors vers d’autres disciplines.

L’objectif  était tout simplement de réhabiliter et de se réapproprier des techniques qui avaient été délaissées.  Au sein même de la fédération, cela n’a pas toujours été bien compris. Il a fallu que l’initiateur de cette remise en valeur bénéficie de l’écoute et de la confiance d’Henri Courtine, le Directeur technique national de l’époque, pour que ce projet aboutisse.

Par leurs histoires, le judo et le ju-jitsu sont donc intimement liés,  ce qui entraîne forcément  une indiscutable  complémentarité technique. Ils forment d’ailleurs un ensemble et s’il y a deux appellations, c’est pour souligner des spécificités qui ne sont pas antagonistes.

Ceci étant, il existe  différentes  méthodes et écoles de ju-jitsu. Elles  possèdent chacune leur identité, parfois bien différentes les unes des autres. Celle dont il est question, appelée « atemi ju-jitsu »,  avait pour objectif d’être interchangeable  avec le judo. C’est-à-dire que  le professeur  pouvait enseigner sans difficulté, s’il le souhaitait, le judo et le ju-jitsu et les pratiquants avaient la possibilité de passer  de l’un à l’autre. Le mot « atemi » avait été associé pour signifier la remise en valeur de techniques qui appartenaient par le passé au « patrimoine » judo-ju-jitsu.

Simplement, pour que les deux soient complémentaires et compatibles, certaines conditions doivent être respectées,  ce n’est pas toujours  le cas.  Ce que j’expose est mon sentiment, un sentiment qui, au fil des ans, n’a pu que se renforcer et  se matérialiser par une constante satisfaction de mes élèves tout au long  des décennies consacrées à l’enseignement.

Le ju-jitsu que j’appellerai « traditionnel » peut être considéré de différentes façons. D’abord comme une discipline à part entière, ou encore comme une complémentarité au judo. Au même titre que l’inverse peut l’être tout autant. Mais le ju-jitsu doit rester un art martial à but non-compétitif, axé sur le self-défense et proposant des techniques interdites en judo, parce que trop dangereuses en opposition directe, mais terriblement efficaces en self-défense. Instaurer des compétitions d’affrontement direct en ju-jitsu est contre-nature, et de plus cela installe une concurrence directe avec le judo, c’était l’inverse de l’objectif initial (complémentaire, mais pas concurrent). Le ju-jitsu en compétition ce n’est plus du ju-jitsu. Je ne suis pas contre la formule, mais contre l’appellation. « Judo-boxe » ou « karaté-judo » seraient plus appropriés.  Il faut remarquer aussi qu’à partir du moment où des compétitions existent dans une discipline, les enseignants ont tendance à n’enseigner que les techniques autorisées par un règlement forcément restrictif.
Ensuite, si on souhaite que les deux soient –  et restent –  compatibles et complémentaires, il est indispensable que des attitudes comme la garde et les techniques communes (projections, clés, étranglements) soient les mêmes, ce qui malheureusement n’a plus été le cas à partir de 1995.

Cette compatibilité  entraîne trois conséquences positives. D’abord elle offre  une rapide adaptation pour les professeurs, ensuite les élèves peuvent  passer sans aucune difficulté de l’un à l’autre, enfin et ce qui n’est pas le moins important, cela  procure  une réelle efficacité  en matière de self-défense grâce à l’osmose entre les différentes composantes (coups, projections, contrôles). Cela n’a pas été le cas avec les compétitions techniques appelées « duo-system » dans lesquelles les pratiquants affichent des gardes très basses, incompatibles avec certaines grandes projections  du judo.

Développons ces trois points.

D’abord la facilité d’adaptation des professeurs. Quand la « relance » du ju-jitsu a été mise en place, il fallait les convaincre et leur faciliter la tâche en mettant à leur disposition  une méthode dans laquelle ils allaient pouvoir rapidement se reconnaître et donc s’adapter. En fait, c’est une sorte de calque qui leur a été proposé. Les projections, par exemple, peuvent être pratiquées dans la forme judo, à partir du kumi-kata, mais aussi dans leur expression ju-jitsu, sur une attaque de « rue » : un coup de poing, une saisie, etc. Bref, une agression. Ce qui est ni incongru, ni exceptionnel dans la mesure où toutes les projections de base trouvent leurs origines à partir d’attaques à mains nues ou bien armées. C’est en quelque sorte leur première raison d’être.
Deuxième point : la facilité à ce que les pratiquants passent  de l’un à l’autre, du judo au ju-jitsu, ou l’inverse (sans qu’ils en soient obligés, cela se faisant en fonction d’un ressenti), ce qui permet au professeur, comme indiqué plus haut de proposer deux aspects et d’élargir ainsi son champs d’action. Si les attitudes, sont radicalement différentes, par exemple une garde ju-jitsu très basse sur les jambes (comme dans le duo-systém »), les élèves rencontreront les plus grandes difficultés d’adaptation avec les grandes projections du judo, elles seront donc écartées de l’enseignement et de la pratique.
Troisième point : sur le plan de l’efficacité pure, cette osmose est indispensable. Prenons l’exemple d’un coup enchaîné avec une projection ; il est souhaitable que la position des jambes soit identique pour que l’enchaînement en question se fasse naturellement  et donc le plus vite possible. La rapidité étant un critère indispensable en matière d’efficacité ; pour cela il faut qu’existe une parfaite fluidité dans la liaison entre les différentes composantes. Et puis, ces attitudes de gardes très basses  ne se retrouvent  pas dans la rue.

Pour souligner cette indiscutable compatibilité, il est possible de faire un parallèle « coups/projections ». Exemple : mae-geri keage enchaîné avec o-soto-gari ; on trouve une similitude dans la façon de lancer la jambe pour donner le coup et dans la préparation de la projection. Un second exemple avec yoko-geri de la jambe avant enchaîné avec harai-goshi. La similitude se trouve dans la façon adoptée par  Tori pour se rapprocher d’Uke, en croisant  les pieds (le pied gauche  venant se placer derrière le droit, aussi bien pour le coup de pied que pour la projection).  On peut aussi trouver un parallèle dans la façon de lancer la jambe sur l’arrière avec ushiro-geri keage et la dernière phase d’un uchi-mata. De même qu’un gedan-geri ressemblera à un harai-tsuri-komi-ashi, en termes de forme de corps et donc d’efficacité dans la liaison.

On peut aussi ajouter, ce qui n’est pas négligeable, l’apport qu’une  telle pratique du ju-jitsu pourra apporter aux judokas : les  enchaînements donneront le sens du timing, de la liaison et les randoris d’atémi renforceront le coup d’œil, les réflexes, la souplesse et la condition physique. Pour les ju-jitukas, une pratique très technique des projections du judo et du travail au sol sera d’une incontestable utilité. Enfin, pour tous il permettra d’acquérir ce que l’on appelle le « sens du combat ». Celui-ci se transpose d’une discipline à l’autre. Le coup d’œil, l’anticipation, certains automatismes, etc.

En résumé, pour un enseignant la maîtrise et l’enseignement des deux permettent de satisfaire un nombre important de pratiquants : de la petite enfance en quête d’une méthode d’éducation physique et mentale,  à l’adulte  à la recherche d’un art martial efficace et accessible quelque soit son âge et sa condition physique, en passant par un judoka souhaitant se réaliser temporairement  au travers de la compétition.

Tout cela devant s’effectuer en proposant, sans imposer.

Cette complémentarité semble tellement évidente qu’il est surprenant qu’elle ne soit pas suffisamment  comprise. Tout comme il est étonnant  et regrettable que le ju-jitsu le plus « compatible » avec le judo ne soit pas (ou très peu) enseigné au sein de la fédération de judo.
Il n’est jamais trop tard…

Eric Pariset
Professeur de judo et de ju-jitsu

La rentrée, quelle rentrée ?

Dans une semaine, ce sera la rentrée. Quelle rentrée, pour quelle saison ?

Sans faire preuve de pessimisme, juste de réalisme, il faut avouer que l’on risque de vivre une troisième saison compliquée, la rentrée ne va pas être facile. J’y vois trois principales raisons : l’incertitude, l’état des lieux et le potentiel. Les trois étant intimement liés.

D’abord l’incertitude. Malgré le vaccin, le passe-sanitaire, les gestes barrières, et autres sacrifices, nous ne sommes toujours pas sortis d’affaires.  Le doute qui plane à propos de cette quatrième vague, ne va pas favoriser les engagements pour une saison sportive et au moment où j’écris ces lignes l’assurance de pouvoir reprendre normalement n’est pas acquise, il règne une certaine confusion dans les consignes et on ne peut pas affirmer que la confiance se soit installer. On commence aussi à évoquer une cinquième vague !

Ensuite, lorsque l’on fait l’état des lieux, il faut reconnaître les dégâts. Il ne s’agit pas simplement de mots ou de pronostiques, mais de faits et les faits sont têtus ! Pour utiliser une expression à la mode : « c’est factuel » : des clubs  privés fermés définitivement, des structures municipales touchées avec des professeurs en mal de travail, des bénévoles démotivés (des sujets qui semblent être occultés) et la mise en place délicate de certaines règles liées au protocole sanitaire. Que ce soit pour les clubs municipaux ou, pire encore pour les dojos privés, être ouvert est une chose, avoir suffisamment d’adhérents pour le rester, en est une autre. Et puis, des chiffres circulent sur les pertes abyssales concernant les licences des grandes fédérations lors de la saison dernière. Qui pourrait s’en étonner, d’ailleurs ? Il faut aussi faire avec l’affrontement des pro-vaccins et des anti-vaccins ou anti-passe sanitaire qui s’est invité dans notre milieu.

Enfin, le potentiel, justement.  Comme déjà évoqué, est-ce qu’il y aura suffisamment de pratiquants pour que cette nouvelle saison soit viable (surtout pour les structures privées) ? Les nouveaux seront-ils au rendez-vous pour pratiquer des disciplines on ne peut plus « au contact » ?  Pareil concernant les réinscriptions, lorsque l’on sait qu’avant la pandémie, il fallait renouveler environ la moitié de l’effectif chaque année (moyenne nationale). Les abandons ont toujours été nombreux pour différentes raisons, bonnes ou mauvaises ! Enfin, il faut espérer ne pas être confronté à de nouvelles restrictions, prochainement.

Je ne souhaite qu’une seule chose, c’est de ne pas avoir raison. Ces quelques lignes n’ont pas pour vocation de décourager, mais simplement « d’envisager » de façon à ne pas être surpris et à continuer le combat, même s’il est inégal. Il faut espérer que le combativité, la volonté, les capacités d’adaptation aux situations périlleuses et bien d’autres qualités dont les pratiquants et les enseignants d’arts martiaux ne sont pas dépourvus, suffiront pour sortir de cette situation insupportable, qui n’en finit pas.

Alors, croisons les doigts et souhaitons-nous une bonne rentrée. Pour ce qui me concerne, sans lieu d’enseignement (viable), forcément elle aura le goût de l’amertume et du gâchis, sans pour autant perdre l’espoir et en estimant qu’il n’est pas possible d’en rester là, qu’une telle injustice ne peut pas gagner !

La loi du plus fort…et quelques autres réflexions. On continue parce que ce n’est pas fini

Loin de moi le désir de plomber l’ambiance estivale – elle n’est déjà  pas folichonne sur bien des plans, pas seulement sur celui de la météo -, mais juste l’envie d’exprimer quelques réflexions suite aux dégâts subis par certains depuis maintenant un an et demi.

N’ayant ni travail, ni vacances (forcément), je « bénéficie » donc d’un peu de temps libre, entre lecture, écriture, entraînement en solo et beaucoup de cogitations. Ceux qui soufflent à l’idée d’un article qu’ils jugeraient redondant, peuvent ne pas aller plus loin dans la lecture.

Oui, j’ai déjà traité le sujet à maintes reprises, mais lorsque l’on subit un tel préjudice sur une telle durée, on ne peut faire autrement que de continuer à réagir face à ce qui s’apparente à une forme d’injustice. Cela n’empêche pas d’agir et de chercher des solutions. Simplement pour le moment aucune n’est réalisable. Ce n’est ni par un manque d’inspiration, ni dû à l’absence de volonté, c’est une réalité ! (difficile à assumer.)

Avant d’envisager quelques possibilités, revenons un peu en arrière.
Un an et demi sans travail, certains attribuent cette situation au destin. C’est la vie, on me dit ! Il y a une part de vérité dans cette affirmation, mais juste une petite part. Ce virus qui nous est tombé dessus, certes c’est un peu comme la foudre qui s’abat de façon aléatoire. Mais j’y mettrai quelques objections.
D’abord, si l’être humain ne jouait pas un jeu dangereux avec « sa » planète, certaines catastrophes pourraient être évitées. Peut-être qu’il y a un peu de ça avec ce virus.
Ensuite, nous n’avons pas tous été touchés de la même manière et les conséquences n’ont pas été les mêmes. Il y a clairement une forme d’injustice dans la mesure où certains préjudices auraient pu, non pas être évités (quoique), mais partagés, pour que ce ne soit pas la loi du plus fort qui règne, une fois de plus.

Revenons sur l’iniquité qui caractérise cette crise. Comme dans toute catastrophe, il faut d’abord penser aux victimes. Cependant,  dans ce propos, j’évoque tous ceux qui n’ont pas contracté la maladie, c’est-à-dire la grande majorité de la population, et heureusement. Non, il s’agit des personnes que l’on appelle les « victimes collatérales ».
Dans cette crise sanitaire il y a trois grandes catégories (en matière de conséquences professionnelles, donc de survie). La première, la plus importante, regroupe tous ceux pour qui rien a changé, et tant mieux. Exception faite pour des restrictions dérangeantes sur le principe, mais l’essentiel, à savoir le travail, a été préservé. Certes, des mesures frôlant l’absurde, et même l’étant parfois complètement, ont été difficiles à accepter (nous en subissons encore quelques-unes). Il y a une deuxième catégorie qui rassemble ceux qui ont prospéré, le malheur des uns…on connaît la suite, tant mieux pour eux.  Enfin, la troisième catégorie, ceux qui ont tout perdu, je la connais bien. J’ajouterai quand même deux autres catégories. D’abord le personnel hospitalier, qui n’a rien perdu en termes de travail, mais qui par contre n’a compté ni ses heures, ni ses efforts, il est indispensable de continuer à leur rendre hommage ; à quand la revalorisation de cette profession ? Enfin, il y a ceux qui ont souffert dans leur métier, mais qui devraient s’en sortir, grâce à l’ancienneté de l’entreprise, grâce à des aides, ou tout simplement à de grosses réserves de trésorerie. Il faut toutefois espérer qu’il n’y ait pas de rechute.

Donc, étant de la catégorie de ceux qui ont tout perdu, ou presque (sauf le mental), je peux en parler en connaissance de cause. Ce qui me vient spontanément à l’esprit, c’est qu’une fois encore, la loi du plus fort s’impose. Prenons l’exemple des loyers, déjà évoqué. Les établissements privés recevant du public obligés de payer les loyers alors qu’ils n’avaient pas le droit d’exercer, cela au motif que les propriétaires en ont besoin pour vivre. Mais les petits entrepreneurs n’ont-ils besoin de rien pour vivre ? Non seulement ils n’avaient pas les recettes pour assurer leur gagne-pain, mais ils devaient s’endetter pour des années afin de payer les loyers en question. Il aurait fallu que le gouvernement impose une équité, ce qui n’a pas été fait.

Autre exemple avec les assurances qui ont refusé de prendre en charge ce qui pour certains est tout simplement une perte d’exploitation. Ceci au motif que ce n’était pas prévu dans les contrats. Là aussi, le gouvernement aurait pu intervenir. Il ne manque pas d’imposer sa loi dans de nombreux domaines…

Donc, une fois de plus, ce sont les plus petits qui trinquent, ce n’est pas nouveau, c’est une raison pour continuer à s’indigner. Ouvrons juste une parenthèse qui nous ramène sur les tatamis avec cette loi du plus fort (sur un plan physique) qui en son temps a conduit bien du monde dans les clubs de judo, quand celui-ci est apparu en France avec des techniques et des principes permettant à un plus faible de venir à bout d’un plus fort. Dommage que dans le contexte actuel, il soit impossible d’appliquer ces beaux principes. Ne pas s’opposer à la force brutale, dans cette situation, ce serait de trouver d’autres solutions que celle de vouloir à tout prix faire son métier, en opérant une reconversion, par exemple ! Sérieusement, est-ce envisageable, est-ce raisonnable, à un certain âge et surtout quand on aime un métier « utile » ? Alors, il faut attendre, s’armer de patience, c’est ce que l’on me dit. Mais cela va faire un an et demi et cela n’est pas fini, si l’on en croit les dernières informations. Donc, il faudrait mourir en silence, et bien non ! Pourtant, cette période dans laquelle ne cessent  de s’imposer angoisse et incertitude ne peut qu’être néfaste à une bonne santé mentale et physique, il serait temps que cela cesse. On a beau être résistant, nous ne sommes pas composés de fer inoxydable.

Consacrer l’essentiel de mon énergie à chercher des solutions, cela fait dix huit mois que je m‘y attèle,  à moins, comme évoqué plus haut, d’opérer une reconversion fantaisiste et très aléatoire, aucune ne se présente, ou plus exactement n’est réalisable pour le moment.

Nos disciplines ont été très abimées, nous ne sommes pas encore sortis de cette crise, l’avenir est incertain. Aussi, remonter une structure privée, même si j’en avais les moyens, c’est un risque que je ne reprendrais pas dans le contexte actuel. Demander des créneaux horaires dans ma nouvelle ville c’est fait, sans réponse pour le moment. Faire des stages encore faut-il qu’il y ait des stagiaires, les sections adultes qui n’ont pu proposer que deux mois de pratique à leurs élèves la saison dernière sont fortement abîmées.

Alors, même si l’utilité n’est pas flagrante, je ne peux m’empêcher de continuer à exprimer une saine et légitime colère, mais sans jamais baisser la garde, à l’instar des samouraïs !

25 étés à Soulac !

La semaine dernière, dans mon article hebdomadaire, j’évoquais  mes cinquante années de métier. Durant ce demi-siècle, entre autres rassemblements, j’ai organisé et dirigé pendant vingt-cinq ans un stage d’été à Soulac-sur-Mer, dans le Sud-ouest de la France, en Gironde précisément.

En ce début de mois d’août, j’ai pensé que c’était le bon moment pour revenir sur ces stages qui se déroulaient à ce moment-là de l’année.

Cette aventure avait commencé en 1986. Auparavant c’est dans le département de Lot-et-Garonne, au Temple-sur-Lot, que je me rendais pour ces rendez-vous qui marquent l’été. Les pratiquants d’arts martiaux connaissent  cet endroit, beaucoup d’experts sont venus dispenser leur savoir.

Si j’ai opté pour les bords de l’Atlantique en 1986,  c’est pour répondre à la demande d’un nombre important de stagiaires qui  venaient en famille ;  les accompagnateurs souhaitaient que leur soient proposées davantage d’activités pendant que le ju-jistuka, ou la ju-jitsukate,  suait sur les tatamis. Il faut avouer aussi  qu’en France,  à l’époque, nous étions davantage mer que campagne.

Donc, à l’automne 1985, j’ai envoyé une lettre à presque toutes les stations balnéaires de l’Atlantique pour leur exposer le projet. C’est Soulac qui a répondu en premier. Après un week-end de reconnaissance en octobre, j’ai opté pour cette belle petite citée. Je n’imaginais pas que nous y retournerions pendant un quart de siècle, sans aucune interruption.

Jean-François-Pintat, le Maire de l’époque, avant que ce soit son fils Xavier qui prenne la suite, a répondu à notre demande rapidement, mais encore fallait-il que j’ai un coup de cœur pour me décider, ce fût le cas. Je ne voulais pas d’une trop grande station balnéaire, nous en connaissons beaucoup de très belles, mais par nature, je préfère des endroits à l’animation mesurée.  Ce qui m’a plu à Soulac, c’est tout simplement la nature. D’un côté l’océan avec des kilomètres de sable fin et de l’autre, la forêt de pins. Au milieu, c’est plus un village qu’une ville : une ambiance familiale, beaucoup d’activités, mais comme indiqué plus haut, suffisamment de calme pour ceux qui viennent (aussi) pour se reposer. Je n’oublie pas une architecture remarquable avec les inimitables villas soulacaises, toutes plus belles les unes que les autres.

Concernant l’hébergement, les premières années, la presque totalité des stagiaires logeait au Centre Capdeville, un centre initialement réservé aux footballeurs. Il était dirigé par Christian Fétis, une personnalité du football français. Ensuite, c’est son fils Frédéric qui a repris les rennes. Nous sommes restés en contact, de solides rapports amicaux s’étaient installés entre nous. J’étais souvent invité à la table de la famille, pour mon plus grand plaisir, j’ai toujours été merveilleusement bien reçu.

La dernière édition du stage de Soulac a eu lieu en 2010. A cette époque la gestion de mon dojo parisien était assez « écrasante », et comme cela arrive dans la vie, j’avais besoin de faire une pause et de profiter de l’été, pour me reposer et reposer un peu le kimono (pour les puristes, je rappelle que j’utilise souvent ce mot qui n’est pas le mot exact, mais c’est celui-ci qui est communément utilisé, peut-être à tort).

Ces stages rassemblaient des jujitsukas venus de toute la France, mais aussi de l’étranger : Belgique, Suisse, Allemagne, Pays-Bas, et bien d’autres pays.

Beaucoup de souvenirs me reviennent à l’esprit en pensant à ces étés. En plus des séances en kimono avec un programme technique très copieux et une intensité physique conséquente, s’imposent les séances en extérieur au milieu des arbres, mais aussi au bord de l’océan. Arriver  à neuf heures du matin  et découvrir une plage déserte pour pratiquer  sur un sable adapté à notre activité grâce à la marée basse, il faut l’avoir fait au moins une fois.

Il n’est pas exclu de programmer une nouvelle édition l’année prochaine, en espérant que nous serons, à ce moment-là, sortis de cette situation qui, depuis le début, a plus particulièrement pénalisé nos belles disciplines.

A toutes et à tous, je souhaite un beau mois d’août, avec ou sans stage, avec ou sans vacances.