1995. Reuilly, Bercy, Soulac, Montréal et fédération !

La semaine dernière j’évoquais l’année 1989, une année riche en événements et en émotions. Cette semaine je m’intéresse au cru 1995, très chargé en activités professionnelles.

En avril, mon dojo s’installait dans un nouveau lieu parisien : Boulevard de Reuilly. Il s’agit du XIIème arrondissement que je connais bien, à deux pas de la Rue Victor Chevreuil, là où, l’an dernier, mon dernier club a été terrassé par le virus.

Toujours au printemps de cette année 1995, je démontre  une nouvelle fois le ju-jitsu au festival de Bercy pour y présenter une prestation  que je considère comme l’une de mes plus abouties techniquement. Les invités spéciaux étaient les sumotori, mais d’autres experts, champions  et habitués des galas ont pu enrichir cette soirée par leur talent : Jean Frenette, Kim Silver, Christian Tissier, David Douillet, etc. Que ceux que j’oublie me pardonnent. C’est par une belle séance de dédicaces que s’est clôturée cette soirée.

Ensuite, durant l’été, nous avons fêté la dixième édition du stage de Soulac-sur-Mer, un rendez-vous à l’inaltérable succès. Pendant un quart de siècle, de 1986 à 2010, nous sommes restés fidèles à ce lieu. Il n’est pas impossible que nous puissions y organiser une session en 2022. Vraisemblablement, beaucoup de pratiquants ne seraient pas insensibles à cette initiative.

A l’automne c’est une traversée de l’Atlantique que j’effectuais en compagnie de mes partenaires du moment : Olivier Hermeline, André Ohayon et Laurent Rabillon. Nous étions invités à présenter notre démonstration à Montréal.  L’initiateur de ce projet n’était autre que Jean Frenette, le karatéka québécois, champions de katas artistiques. Quatre jours passés dans la « belle province » pour notre plus grand bonheur et pour la fabrique de solides souvenirs.

C’est aussi à la fin de cette année que, n’étant plus du tout en phase avec ses orientations prises en matière de ju-jitsu, je quittais la FFJDA. Je ne me résignais pas à l’abandon d’une forme de travail que j’avais apprise, enseignée et démontrée avec plaisir et avec un succès qui ne se démentait pas. A l’extérieur de cette institution j’ai pu continuer à enseigner un ju-jitsu aux techniques compatibles entre elles et aux formes de corps proches de celles qui animaient le fondateur du judo. Un paradoxe, mais c’est ainsi !

En résumé, ce fût une année bien replie, comme beaucoup d’autres, mais peut-être un peu plus !

1989

En tombant sur un « Karaté-Bushido » de 1989, j’ai eu l’envie de revenir sur cette année qui a particulièrement marqué  ma vie professionnelle et plus encore ma vie personnelle.

Après presque deux décennies  passées au club de la Rue des Martyrs sous la férule de mon père, s’est manifestée un besoin d’émancipation. L’association « père et fils » n’est pas toujours aussi facile que l’on pourrait l’imaginer. Si professionnellement elle est positive en termes de transmission du savoir-faire et de la complémentarité, elle peut s’avérer parfois plus compliquée sur d’autres plans, surtout lorsque les caractères sont assez semblables. A maintes occasions, j’ai vanté les qualités et les exploits de mon père dans sa vie et notamment sur les tatamis, mais ces exploits étaient le fait d’un fort caractère qui rendait parfois difficile d’être son fils unique.

C’est aussi cette année-là, le 15 août, que j’ai connu les joies de la paternité grâce  à une adorable petite fille, devenue depuis une maman qui m’a fait « triple papy ».

En 1989 j’ai donc quitté le 11 de la Rue de Martyrs où se trouvait un dojo qui a marqué l’histoire du judo français pour m’installer un peu plus haut dans le IXème arrondissement parisien. Un club de gym en perte d’activité était à vendre, ne restaient plus que les tatamis à poser, tout en bénéficiant de quelques installations qui complétaient la pratique des arts martiaux ; la principale discipline étant le ju-jitsu.

Cette année-là, je participais aussi, pour le quatrième fois, au festival des arts martiaux de Bercy organisé par la revue Karaté-bushido, les moines de Shaolin en étaient les invités exceptionnels. J’ignorais que j’aurais le plaisir et l’honneur de présenter entre 1990 et 2005 huit autres démonstrations, dans ce lieu qui devient une fois par an le plus grand dojo du monde.

Un peu plus tard, au cœur de l’été et sous ma responsabilité, se déroulait la IVème édition du stage de Soulac-sur-Mer. Vingt et une autres allaient suivre jusqu’en 2010.

Je n’oublie pas les stages et les  démonstrations en province et à l’étranger, autant de déplacements qui  garnissaient copieusement l’agenda.

En termes d’émotions positives, certaines années comptent davantage que d’autres, ce fût le cas pour 1989, surtout un certain 15 août. Ces émotions sont autant de souvenirs gravés dans la mémoire du cœur.

Tourner la page pour en ouvrir d’autres !

Aujourd’hui  je « fête » deux anniversaires qui en termes de souvenirs sont aux antipodes, bien qu’intimement liés.

Il y a deux ans, jour pour jour, je signais le bail du local de la Rue Victor Chevreuil à Paris, pour y ouvrir un nouveau dojo. Après une période passée en province et un indispensable repos, j’avais décidé de « remonter » à Paris afin de repartir au combat. Certes,  à un âge qui correspond davantage à celui de la retraite, mais il y a des métiers où il est difficile de s’y résoudre. Dans ce nouveau dojo j’avais mis beaucoup d’espoirs et d’énergie. Même si dans chaque entreprise privée il y a toujours une part de risques, ceux-là étaient calculés, je ne partais pas dans l’inconnu. C’était sans compter avec un évènement planétaire que personne n’avait pu deviner : ce que nous allions vivre était inédit.

Un an après, il y a donc précisément douze mois, le virus balayait tous les espoirs, l’énergie et les économies mises dans cette nouvelle entreprise. Un dojo privé, s’il offre une grande liberté d’entreprendre, implique des frais de fonctionnement importants, ne serait-ce qu’avec le loyer (surtout dans la capitale). Le dojo étant trop jeune pour avoir eu le temps de constituer un « trésor de guerre » et pour profiter des quelques aides allouées, face à une propriétaire intraitable, la rupture du bail s’est imposée.

Je ne suis pas un cas isolé, beaucoup d’entreprises (les plus jeunes et les plus modestes) ont mis « la clé sous le porte » (une expression qui n’avait jamais été autant prononcée). D’ailleurs l’euphorie de ces derniers jours, grâce au retour à une « vie presque normale » ne doit pas nous faire oublier ceux qui sont restés sur le « bord du chemin ». Surtout que, sans jouer les oiseaux de mauvaise augure, ce n’est sans doute pas fini, bien malheureusement.

Maintenant, il est inutile de ressasser le passé, il faut regarder devant. A titre personnel, n’ayant plus d’outil de travail, ce ne sera évidemment pas simple.  En effet il n’est plus possible matériellement d’envisager une réouverture. Aussi il faudra de l’imagination et de l’énergie pour trouver des solutions de remplacement. Il n’est pas question de baisser les bras. Bien que meurtri par la violence des événements, l’esprit cogite à 100%, il est accompagné d’une solide volonté.

L’enchaînement des 24 techniques

Dans le livre bleu, récemment évoqué, il y a un enchaînement  que j’affectionne particulièrement. Je veux parler des « 24 techniques ». Je suis fier d’avoir été à leur origine.

Cette suite est représentative de l’art que j’enseigne, elle peut être utile pour démontrer un ju-jistu complet, efficace et spectaculaire, mais avant tout il s’agit d’un outil  de travail au service des enseignants et des élèves.

Les quelques lignes qui suivent présentent cet enchaînement, mais juste avant je voulais  évoquer le plaisir que l’on retire de telles créations.

J’ai toujours ressenti le besoin de créer. Non pas pour « inventer » des techniques, mais tout simplement essayer d’assembler harmonieusement celles qui appartiennent au très riche patrimoine de ma discipline et proposer ainsi  des « outils » qui permettent de varier les méthodes d’entraînement, que ce soit en matière d’efficacité en self-défense, d’épanouissement physique et/ou tout simplement pour se faire plaisir. Sans oublier la possibilité d’utiliser ces enchaînement pour faire connaître un art martial qui le mérite.

Dans la plupart des arts martiaux les enchaînements ont toujours existé, on les appelle les « kata », ce qui peut se traduire par « formes imposées ». Je n’ai jamais eu la prétention d’accoler cette appellation à mes créations, mais juste de participer au développement de mon art.

Présentation des « 24 techniques ».

Les 24 techniques ont été créées dans le but de proposer le plus possible de situations d’attaque et de mettre en face à la fois un maximum de techniques de riposte mais aussi  de combinaisons dans les enchaînements. Coups, projections et contrôles peuvent se marier  de façon presque infinie.

Pour faciliter la mémorisation, l’enchaînement se divise en huit séries de trois attaques : défenses sur tentative de saisie, sur coups de poing, coups de pied, saisies avec bras tendu, saisies « corps à corps », couteau, bâton et menaces de revolver. Dans les ripostes on retrouve  les grandes projections, les principaux coups et contrôles. L’accent devra être mis sur la liaison de ces éléments, la fluidité dont il faudra faire preuve pour une réelle efficacité.

Le plaisir éprouvé dans cette forme de  création – qui consiste à assembler harmonieusement les techniques – peut s’apparenter à celui que doit éprouver  un peintre à marier les couleurs, à celui d’un compositeur avec les notes de musique  ou encore à l’écrivain avec les mots.
Il y a trois phases : la recherche, la création et ensuite la satisfaction de la « chose » aboutie. Les trois sont enthousiasmantes.

L’enchaînement  pourra être utilisé tel qu’il est, mais il sera également possible de se servir de sa structure en proposant des attaques similaires avec des ripostes différentes au travers desquelles les élèves pourront laisser libre cours à leur imagination. En résumé, il constitue une base de travail que j’espère utile.
En illustration : la couverture et trois extraits du livre dans lequel est proposé cet enchaînement (parmi d’autres thèmes également développés).

La défense dans la ville

Dans cette période d’activité inexistante pour notre secteur et d’avenir incertain, il reste l’évocation de bons souvenirs. C’est ce que je propose aujourd’hui avec « La défense dans la ville «, en nous plongeant vingt-cinq-années en arrière.

Cela se passait en 1986. Au sein de la FFJDA la mise en place de la revalorisation du ju-jitsu portait ses fruits. Les stages de formation des professeurs se succédaient à un bon rythme, j’avais eu l’honneur et le plaisir d’encadrer les premiers, notamment à Chamonix en 1982.

Une commission technique fédérale avait été créée et de nombreuses sections ju-jitsu voyaient le jour avec chacune d’elles un nombre impressionnant de nouveaux adhérents. L’idée avait alors germé de proposer une série destinée à « vulgariser » le ju-jitsu en le présentant sous sa forme très utilitaire ; on m’avait confié la conception de vingt-six clips de six minutes, chacun destiné à passer à une heure de bonne écoute sur une grande chaîne de télé. Grâce à Christian Quidet, éminent journaliste sportif, c’est « Antenne 2 » devenu ensuite « France 2 » qui avait accepté le projet.

A chaque épisode était présentée une agression en extérieur, puis l’étude technique de sa riposte en dojo. Enfin nous retournions en extérieur pour voir l’agressé venir à bout de son agresseur et cela grâce à la riposte apprise et répétée.

Le tournage s’était étalé sur environ six mois, de septembre 1986 jusqu’en février 1987. Les épisodes étaient proposés pendant l’émission « Stade 2 » que l’on pouvait voir le samedi après-midi.

A l’occasion du lancement de la série, une émission spéciale avait été prévue, c’était au mois de mars 1987. Une bonne demi-heure de direct, juste avant la diffusion du premier épisode ; ça commençait bien.

Sur le plan purement pratique, l’idée était de montrer diverses formes d’agressions et différents profils « d’agressés ». Défenses sur coups de poing et coups de pied, sur saisies, au sol, contre armes. Tout cela présenté par des hommes, des femmes, des jeunes et des moins jeunes. Les séquences se déroulaient dans la rue, mais aussi en pavillon, en appartement, au DAB d’une banque, dans un square, à la terrasse d’un café (à l’époque ils étaient ouverts), etc. Sans oublier des scènes tournées dans le métro.

Malheureusement les téléspectateurs n’ont pu assister à la totalité des épisodes, la diffusion s’est arrêtée brutalement après le sixième épisode, pour des raisons qui restent obscures ; sans doute le succès remporté par l’émission dérangeait certains.

Dommage, en effet, Jean Pucci et son équipe de techniciens de l’image et du son avaient réalisé une série de très haute qualité. Grâce aux réseaux sociaux j’ai pu conserver d’excellents contacts amicaux avec le réalisateur.

la photo d’illustration est extraite d’un numéro de « Karaté-Bushido » de l’année 1987

« Essentiel »

Ce qui est certain, c’est que ce n’est ni de la faute des bistrots, ni des restaurants, ni des cinés, ni des théâtres, ni des salles de sport, ni des dojos, si nous sommes contraints à un troisième confinement !

Ces quelques lignes sont à nouveau l’expression non pas d’un découragement, mais d’un sentiment d’étonnement, pour ne pas dire davantage. Pour plusieurs raisons déjà maintes fois évoquées, mais de plus en plus difficiles à supporter, notamment dans notre secteur.

D’abord pour les professeurs, surtout lorsqu’il s’agit de la principale activité professionnelle. L’impossibilité d’exercer son  métier pendant plus d’une année n’est pas sans conséquence. Ce n’est pas non plus sans conséquences pour les élèves privés d’une éducation physique et mentale (dont les bienfaits ne sont plus à prouver ) et de l’apprentissage de techniques qui permettent d’acquérir une inestimable confiance en soi et les moyens de pouvoir éventuellement faire face à une agression.

L’étonnement devient de plus en plus difficile à supporter quand en même temps nous assistons à quelques aberrations, notamment dans les transports, obligeant un nombre important de gens à s’affranchir quotidiennement des « gestes barrières » au motif qu’il est indispensable de pouvoir se rendre sur son lieu de travail, alors que pour les mêmes gestes barrières  d’autres professions sont proscrites.

Le ressentiment est d’autant plus profond quand profession rime avec passion et que chaque jour, chaque semaine, chaque mois qui passent abiment un peu plus nos arts martiaux.

Sans aucun doute,  un jour la reprise se fera. Mais plusieurs questions s’associent  à cette affirmation. D’abord quand ? Ensuite dans quel état ? Sur le plan quantitatif, ce seront plusieurs années de retour en arrière. Financièrement, que ce soit pour les fédérations, les clubs et les professeurs, ce sera compliqué, pour le moins. A cela s’ajoute l’interrogation par rapport à la motivation. Il faut espérer qu’elle sera toujours là, tant au niveau des élèves que des acteurs qui entourent le monde des arts martiaux et plus largement de tout le sport. Un exemple : est-ce que l’envie d’être professeur d’arts martiaux  animera toujours un nombre suffisant de pratiquants, permettant ainsi la pérennité de nos disciplines ? La motivation nécessaire à l’acquisition  de diplômes qui demandent une importante préparation sera-t-elle toujours au rendez-vous ? En clair, existera-t-il encore l’envie de devenir professeur, face à un avenir incertain ? (Concernant le virus, certains commencent à évoquer la possibilité d’une quatrième vague.)

Et puis, comme indiqué plus haut, pour beaucoup de professeurs, l’enseignement rime avec passion. La passion de la transmission, de l’éducation, et même de la création ; en être privé depuis si longtemps et sans horizon est tout simplement destructeur sur bien des plans.

En aucun cas il ne s’agit de se montrer défaitiste, mais juste réaliste.  Il ne faut pas se voiler la face, ce sera difficile. Ne pas l’ignorer est aussi une façon de bien préparer un retour sur les tatamis que nous espérons tous le plus proche possible.

A plusieurs reprises je n’ai pas manqué d’insister sur le fait que nous sommes des combattants, « on ne lâche rien » selon l’expression consacrée, mais sans cesser de faire remarquer que pour combattre il faut un adversaire identifiable et un arbitre compétent ! Est-ce le cas ?

Ces quelques paragraphes paraîtront peut-être redondants à quelques-uns qui ne sont pas concernés, mais ils souhaitent participer, malgré le peu d’armes dont nous disposons, à faire en sorte que nos disciplines ne soient pas sacrifiées. Elles sont d’une grande utilité, elles sont « essentielles » à une vie meilleure en société, elles ne sont pas qu’un simple loisir (ce qui est important aussi).

Atemi-waza

Retour à « la technique » avec un article consacré à l’atemi-waza (le travail des coups), l’une des trois composantes du ju-jitsu, les deux autres étant le nage-waza (le travail des projections) et le katame-waza (le travail des contrôles).

En ju-jitsu l’atemi-waza possède la particularité de ne pas être une finalité, mais un moyen d’y parvenir ; un « coup porté » permet un déséquilibre favorisant l’enchainement avec une projection ou un contrôle, ou encore les deux.

Logiquement il compose la première partie d’une défense puisqu’il s’utilise à distance. Un « enchaînement type », se déroulera de la façon suivante : coup, projection et contrôle. Mais ce n’est pas une règle absolue.

Son étude est importante pour trois raisons essentielles.

D’abord pour son efficacité dans le travail à distance. Il est souhaitable d’avoir une bonne maitrise dans ce domaine aussi bien pour l’utiliser que pour s’en défendre.

Ensuite, son étude sera intéressante sur le plan physique, elle permet de travailler la souplesse, la vitesse, et dans les randoris (les exercices d’opposition codifiés) de parfaire sa condition physique. Sans oublier l’aspect ludique qu’apporteront ces affrontements pour peu qu’ils soient pratiqués avec un parfait état d’esprit.

Enfin, il procurera ce que l’on appelle le « sens du combat » : le coup d’œil favorisant les automatismes  d’attaques et de défenses.

Le livre dont la couverture illustre cet article contient différents chapitres qui traitent des méthodes d’entraînement spécifiques à cette composante, mais aussi un enchaînement appelé « les 16 atemis ». Cette « suite » propose 16 défenses sur des coups portés  à l’aide des bras et des jambes, avec des ripostes uniquement en atemi. Une des particularités de cette « sorte de kata » se trouve dans la compatibilité des techniques avec les autres composantes du ju-jitsu. Chaque défense doit pouvoir s’enchaîner avec une projection et/ou un contrôle.

Malheureusement ce livre est épuisé, mais sa réédition est toujours envisagée.

Petite philosophie des arts martiaux

Voilà un petit livre empli d’une grande sagesse.  Je ne peux que le recommander aux pratiquants d’arts martiaux, mais aussi à tous les autres. Ils découvrirons  – si ce n’est déjà fait – que ces disciplines ne se limitent pas au développement physique et à la science du combat.

Il y a quatre ans, sur Facebook et sur mon blog, je lui avais déjà consacré un article, je me permets de le publier à nouveau. Il est toujours d’actualité et peut-être encore davantage.

« L’auteur de ce livre édité en 2006, André Guigot, Docteur en philosophie, explique que l’éducation du corps passe par l’éducation de l’âme, corps et âme étant inséparables. Mais il est aussi question d’un travail en harmonie avec son entourage. « L’amour de la sagesse ne s’oppose pas à l’art du combat. Dès l’origine, que l’on peut situer en Inde puis en Chine il y a plus de cinq mille ans, l’histoire des arts martiaux se confond avec une recherche de paix et d’harmonie avec soi-même et le monde extérieur ». Ainsi commence ce recueil rempli d’informations et de sagesse.

Cela nous rappelle forcément le grand principe de Jigoro Kano qui, au travers de son judo (un ju-jitsu féodal adapté aux évolutions de la société), proposait une méthode d’éducation physique et mentale. A l’aide d’exercices corporels représentant des techniques de combat, l’objectif tend à renforcer son corps non pas pour devenir meilleur que les autres mais devenir meilleur soi-même, ce qui est une belle nuance. L’étude de techniques de défenses (efficaces) était un prétexte à une quête plus large.

Sur le thème de la violence, l’auteur nous explique que celle-ci n’est pas un état naturel chez l’homme, mais qu’elle découle d’une frustration et qu’une pratique sereine et apaisée des techniques de combat participe à la disparition de l’agressivité. De plus, il affirme que la violence et la bêtise sont contraires à l’art du combat. Il évoque les hiérarchies superficielles qui perdent leur sens lorsqu’on revêt une tenue identique pour tous. Le respect qui ne doit pas être le fruit de la crainte mais celui de la reconnaissance. Les grades, avec cette belle phrase : « C’est l’homme, ou la femme, qui donne de la valeur à son grade, pas l’inverse ». Il évoque « l’art de l’évasion » (l’esquive) et celui de la souplesse (il s’agit là de la souplesse comportementale – l’utilisation de la force de l’adversaire) avec la présentation de l’aïkido, de l’aiki-jitsu et du judo. Le comportement en dojo, dans lequel « on n’entre pas comme dans un magasin, ni tout à fait comme dans un centre d’entraînement sportif ». La compétition, qui n’est pas indispensable et qui, pour les compétiteurs, doit être considérée comme un simple moment dans la vie. L’esthétisme, que l’on peut associer à une parfaite maîtrise physique et donc à l’efficacité, ne serait-ce que par la précision que cette qualité impose. Le plaisir dans la pratique et dans la satisfaction de sa propre évolution.

Bien d’autres thèmes sont abordés, tous plus intéressants les uns que les autres, comme l’émergence de certaines pratiques dites « modernes ».

Tout aussi instructives sont les nombreuses citations égrainées au fil des chapitres comme ce proverbe d’Okinawa (l’île qui a vu naître le karaté) : «La douleur fait penser l’homme. La pensée rend l’homme sage. La sagesse rend la vie acceptable ». On ne peut mieux conclure un article ! Bonne lecture. »

Une nouvelle petite histoirre

Dans le recueil de contes que j’évoquais le 19 février dernier, il y a un chapitre consacré à l’art de vaincre sans combattre. J’avais alors proposé une petite histoire savoureuse :« Trois mouches », aujourd’hui il est question d’un coq. Je vous laisse découvrir ou redécouvrir ce beau petit conte, riche en enseignement et tout aussi savoureux !

Laisser mûrir le coq
« Le roi de Tcheou avait confié à Chi Hsing Tseu le dressage d’un coq de combat prometteur, qui paraissait doué et combatif. Le roi était donc en droit de s’attendre à un dressage rapide… et il ne comprenait vraiment pas que dix jours après le début de l’entraînement il n’ait toujours pas eu de nouvelles des progrès du volatile. Il décida d’aller en personne trouver Chi pour lui demander si le coq était prêt.
– « Oh non, sire, il est loin d’être suffisamment mûr. Il est encore fier et coléreux », répondit Chi.
De nouveau dix jours passèrent. Le roi, impatient, se renseigna auprès de Chi qui lui déclara :
– « Le coq a fait des progrès, majesté, mais il n’est pas encore prêt car il réagit dès qu’il sent la présence d’un autre coq. »
Dix jours plus tard, le roi, irrité d’avoir déjà tant attendu, vint chercher le coq pour le faire combattre. Chi s’interposa et expliqua :
– « Pas maintenant, c’est beaucoup trop tôt ! Votre coq n’a pas complètement perdu tout désir de combat et sa fougue est toujours prête à se manifester. »
Le roi ne comprenait pas très bien ce que radotait ce vieux Chi. La vitalité et la fougue de l’animal n’étaient-elles pas la garantie de son efficacité ?! Enfin, comme Chi Hsing Tseu était le dresseur le plus réputé du royaume, il lui fit confiance malgré tout et attendit.
Dix jours s’écoulèrent. La patience du souverain était à bout. Cette fois, le roi était décidé à mettre fin au dressage. Il fit venir Chi et le lui annonça sur un ton qui trahissait sa mauvaise humeur. Chi prit la parole en souriant pour dire :
– « De toute façon, le coq est presque mûr. En effet, quand il entend chanter d’autres coqs il ne réagit même plus, il demeure indifférent aux provocations, immobile comme s’il était de bois. Ses qualités sont maintenant solidement ancrées en lui et sa force intérieure s’est considérablement développée. »
Effectivement, quand le roi voulut le faire combattre, les autres coqs n’étaient visiblement pas de taille à lutter avec lui. D’ailleurs ils ne s’y risquaient même pas car ils s’enfuyaient dès qu’ils l’apercevaient. »

Envoyé de mon iPhone

Recueil de contes !

Voilà un merveilleux recueil de contes, tous plus enrichissants les uns que les autres. Humour et leçons de vie pour le plus grand plaisir des lecteurs.
Ci-dessous un « petit échantillon » avec une courte histoire qui confirme le pouvoir de la dissuasion. (Cette histoire à déjà été proposée, il s’agit en quelque sorte d’une rediffusion, mais franchement on ne s’en lasse pas.)

Trois mouches

Dans une auberge isolée, un samouraï est installé, seul à une table. Malgré trois mouches qui tournent autour de lui, il reste d’un calme surprenant. Trois rônins entrent à leur tour dans l’auberge. Ils remarquent aussitôt avec envie la magnifique paire de sabres que porte l’homme isolé. Sûrs de leur coup, trois contre un, ils s’assoient à une table voisine et mettent tout en œuvre pour provoquer le samouraï. Celui-ci reste imperturbable, comme s’il n’avait même pas remarqué la présence des trois rônins. Loin de se décourager, les rônins se font de plus en plus railleurs. Tout à coup, en trois gestes rapides, le samouraï attrape les trois mouches qui tournaient autour de lui, et ce, avec les baguettes qu’il tenait à la main. Puis calmement, il repose les baguettes, parfaitement indifférent au trouble qu’il venait de provoquer parmi les rônins. En effet, non seulement ceux-ci s’étaient tus, mais pris de panique, ils n’avaient pas tardé à s’enfuir. Ils venaient de comprendre à temps qu’ils s’étaient attaqués à un homme d’une maîtrise redoutable. Plus tard, ils finirent par apprendre, avec effroi, que celui qui les avait si habilement découragés était le fameux Miyamoto Musashi.