Retour gagnant…

Le 30 juin 2015, le dojo de la Bastille changeait de direction, je passais le relais à une autre équipe. Plusieurs années d’un conflit inéquitable et épuisant contre une propriétaire et une copropriété m’avaient fait saisir l’occasion qui se présentait à moi, à savoir une pause et goûter au bonheur que procure un peu de temps libre. Cette décision, dictée par la sagesse, qui est une autre vertu des arts martiaux, avait malgré tout désorienté bon nombre de fidèles.

J’avais mis le cap sur la Provence, une région qui m’est chère et je pensais pouvoir faire profiter de mon savoir et de mon expérience les personnes intéressées par le ju-jitsu ; mais les choses ne se passent pas toujours comme nous l’espérons, c’est ainsi ! Cette situation m’a incité à déménager à nouveau, à prendre la direction du « Grand-Ouest », me permettant du même coup d’opérer un rapprochement familial et de découvrir les charmes du Marais-Poitevin.

De mes deux expériences provinciales, je retiens qu’il n’est pas facile pour un parisien de se faire accepter, lorsque l’on travaille dans certains secteurs. Il y a quelques craintes, peut-être légitimes, qui ne manquent pas de se manifester de la part de personnes solidement implantées et qui n’apprécient pas forcément – ce que l’on nomme de façon négative – un « parachutage ». Et puis, dans certaines régions la non-appartenance à l‘institution fédérale « officielle » est souvent rédhibitoire. Enfin, la jalousie est une valeur sûre.

Ne pouvant pas rester inactif, j’ai donc décidé de « boucler la boucle » et d’effectuer un retour sur la capitale dès le mois de septembre prochain. Pour commencer, c’est au travers de deux soirées par semaines dans un club de l’Est parisien que j’aurai le plaisir de rassembler les fidèles qui, pour certains, n’attendent que cela !

Ce sera un réel plaisir de retrouver des étudiants convaincus, mais aussi d’initier des néophytes à notre belle discipline – le ju-jitsu – empreinte d’une richesse technique exceptionnelle, de fortes valeurs mentales et qui offre un engagement physique complet, contrôlé et adapté.

En attendant  de nouvelles « aventures martiales » et ce retour que je n’imagine pas autrement que gagnant, je souhaite à tous un bel été et de bonnes vacances à ceux qui auront la chance d’en bénéficier.

Les personnes intéressées peuvent me contacter par mail ou par téléphone. Les cours qui commenceront le 28 août s’adressent aux débutants, aux pratiquants d’autres disciplines et bien évidemment à tous les jujitsukas.

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H comme Honneur

Nous arrivons à la lettre H de mon dictionnaire, H comme Honneur.

Pour les samouraïs il s’agissait d’une valeur qui n’avait pas de prix ; presque systématiquement sa perte les conduisait à l’acte ultime, le hara-kiri ou seppuku. Il est vrai que leur rapport à la mort était différent de celui qui est le nôtre. Il n’empêche, l’honneur est une des plus fortes valeurs que nous nous devons de défendre, à fortiori pour un pratiquant d’arts martiaux. Elle est inestimable et ne pas la respecter, surtout pour un éducateur, c’est commettre une faute inqualifiable.

Même dans notre beau pays, et jusqu’au siècle dernier, lorsque l’on estimait qu’il était bafoué, il était fréquent (et autorisé) de demander réparation à l’occasion d’un duel à l’épée ou au pistolet.

La définition qu’en donne le Larousse est la suivante : « Ensemble de principes qui incitent à mériter l’estime de soi et des autres ». Quels sont ces principes ? Et quelle est l’estime la plus précieuse, entre celle que l’on a de soi et celle que les autres nous portent ?

Les principes, d’abord. Dans le code moral du judo-ju-jitsu affiché dans tous les dojos (mais pas toujours appliqué) on peut lire à propos de l’honneur : « C’est être fidèle à la parole donnée ». Cela m’inspire trois remarques. D’abord l’honneur devrait figurer en première place et non pas en quatrième, comme c’est le cas, ensuite il pourrait tout simplement s’appeler le Code d’honneur, il existe bien le Code d’honneur des samouraïs ! Enfin, même si la fidélité peut englober un ensemble de principes, on peut être plus généreux dans l’énumération des qualités qui correspondent à l’idée que l’on se fait de l’honneur. L’honneur, c’est aussi le respect des autres (ceux qui le mérite), de son métier, de ses convictions, du gout de l’effort et de la rigueur. Parfois il s’agit d’un dépassement de soi lorsque cela est nécessaire, notamment face à l’adversité. Effectivement, c’est aussi le respect de la parole donnée, un comportement dans lequel est exclue toute traitrise ou lâcheté.

Il ne faut pas confondre honneur et héroïsme. Se montrer héroïque mérite les honneurs, mais le bon accomplissement de notre vie quotidienne, sans faillir, est aussi « tout à notre honneur », comme l’accomplissement d’une mission qui nous a été confiée. L’honneur, c’est tout simplement pouvoir se regarder dans la glace en toute sérénité. Personne ne peut revendiquer la perfection, tout le monde a sa part d’ombre et ses défauts, mais il y a des actes et des agissements qui font baisser le front.

Ensuite, entre l’estime que l’on a de soi et celle des autres vis-à-vis de nous, quelle est la plus importante ? Sans hésiter, celle envers soi-même. Traiter avec sa propre conscience est difficile. Quant à l’estime des autres, cela dépend de « qui sont les autres » ; une simple remarque d’une personne que l’on respecte est mille fois plus importante que les déblatérations d’un individu que l’on méprise et/ou qui n’a rien accompli de convenable, ce qui va souvent de paire.

Pour conclure, je pense que la défense de son honneur ou de celle d’une personne que l’on aime, que l’on admire et que l’on respecte est un devoir.

Le but de cet article est de donner en quelques lignes mon avis sur une valeur qui mérite davantage de développement, ce qui ne manquera pas d’être fait à l’occasion de la parution future – du moins je l’espère – de « mon dictionnaire (complet) des arts martiaux ».

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La roulette japonaise

Cette semaine le thème du vendredi éponyme sera consacré aux méthodes d’entraînement. Il s’agit, au travers de multiples exercices, de se perfectionner et de se renforcer dans des domaines où l’acquisition technique est déjà plus ou moins réalisée. Le but n’est pas d’apprendre, mais d’essayer de faire encore mieux, en renforçant ou en affinant ses acquis.
Répétitions seul ou bien avec un ou plusieurs partenaires, exercices d’opposition codifiés servant au perfectionnement d’un mouvement ou d’une phase bien précise, ou plus largement encore d’un domaine qui compose notre art. Ainsi nous trouvons les uchi-komis (inlassables répétitions d’un mouvement ou d’une partie), les exercices d’opposition dans un domaine très précis et les randoris (sortes de combat avec de solides règles). Ces derniers constituant la phase ultime de ces fameuses méthodes. Mais toujours avec le souci du respect de la codification et par conséquent d’une opposition qui permet de s’affronter avec le moindre risque possible. Aujourd’hui intéressons-nous à cette catégorie. Il y a des randoris au sol, d’autres debout, dans le domaine des coups et dans celui des projections. Enfin, il y a le « randori de self-défense ». Celui-ci pouvant se pratiquer contre un ou plusieurs adversaires. Mais là encore ce sera la sécurité qui devra primer. Certains regrettent qu’il ne puisse pas y avoir une sorte d’affrontement total ; « comme dans la réalité », disent-ils. Je pense que pour la majorité, c’est en toute bonne foi qu’ils soutiennent cette hypothèse. Mais le problème est que la réalité, c’est la réalité ! Et l’entraînement sert à s’en approcher, mais en aucun cas à la remplacer ! Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il serait indispensable que les deux protagonistes soient dotés d’une bonne foi qui ne doit pas exister ? ou que très rarement ? chez le genre humain. Certes, les animaux arrivent à s’entraîner entre eux sans se faire mal et sans les interdits dont nous devons inévitablement nous affubler afin que les assauts et autres randoris ne tournent pas au massacre. Mais nous ne sommes que des humains et sans de stricts interdits les limites du raisonnable sont vite franchies. Tout cela pour répondre aux protagonistes du randori-où-tout-serait-permis, qui ne peut exister sans risques de graves blessures qui hypothèqueront la longévité d’une carrière que chacun espère la plus pérenne possible ! Le facteur chance aurait aussi un rôle â jouer dans des oppositions entre combattants de valeurs approchantes ; une sorte de « roulette japonaise ».
Conservons les méthodes d’entraînement qui permettent de s’affûter à l’aide d’exercices conventionnels et laissons le « tout est permis » au combat que l’on devrait mener uniquement en cas d’agression et en souhaitant que cela ne se présente jamais. Il est vrai que certains proposent malgré tout ce genre d’entraînement, mais est-ce vraiment comme dans la réalité ? Il y a forcément quelques interdits. Suffisamment pour que ce ne soit pas la réalité, mais pas assez pour que ce ne soit pas dangereux. Je sais que dans des termes approchant, le sujet a déjà été abordé sur ce blog, mais dans le domaine de l’information et de la prévention, là aussi, il ne faut pas hésiter à faire des « uchi-komis », c’est-à-dire des répétitions, quitte à… se répéter !

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Le rôle de Uke

Littéralement Uke signifie « celui qui subit ». Mais son rôle ne se limite pas à cette traduction, loin de là. Les pratiquants connaissent bien l’existence de ces deux personnages qui interviennent systématiquement dans les katas et autres exercices imposés et qui se nomment Tori et Uke. Ils sont les acteurs indissociables de nos séances d’entraînements, ils se fondent en nous à tour de rôle et deviennent au fil des années nos plus fidèles compagnons. Certains donnent une traduction très globale et simpliste de ces deux illustres personnages : Tori serait le gentil et Uke le méchant. C’est assez réducteur, surtout pour Uke. En effet, son rôle est capital. D’abord, pas d’Uke, pas de Tori. Pas d’action d’Uke, pas de réaction de Tori. De mauvaises attaques de la part d’Uke entraînent un mauvais apprentissage pour Tori. Lors de l’exécution d’un enchaînement pour un passage de grade ou bien une démonstration, son rôle ne se limite pas à celui d’un sac de riz que l’on envoie valdinguer à satiété. C’est lui qui donne le départ et puis le « tempo » de l’exécution. D’une certaine façon, il impose le rythme et peut relancer un Tori victime d’un éventuel « coup de mou ». Certes, aux yeux d’un public de néophytes, Tori a le beau rôle. Il se défait des attaques du « félon » d’Uke. Je suis bien placé pour le savoir. Mais j’ai eu aussi l’occasion de « jouer » les Uke, ainsi je peux affirmer que non seulement il est indispensable mais que son rôle est noble. On se confie corps et âme à une personne qui devra, grâce à nous, démontrer ses qualités techniques et surtout, surtout faire preuve de contrôle et de respect envers celui sans qui rien ne serait possible.

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Une belle leçon

« La meilleure utilisation que l’on puisse faire d’un sabre, c’est de ne pas l’utiliser. » En cette période plus calme qui peut aussi être propice à la réflexion, je ne résiste pas à citer à nouveau Jigoro Kano. Et pour illustrer cette maxime, j’ai pensé proposer une petite histoire issue du recueil Contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon.  Bonne lecture et… bonne réception !

Le célèbre maître Tsukahara Bokuden traversait le lac Biwa sur un radeau avec d’autres voyageurs. Parmi eux, il y avait un samouraï extrêmement prétentieux qui n’arrêtait pas de vanter ses exploits et sa maîtrise au sabre. A l’écouter, il était le champion toutes catégories du Japon. C’est ce que semblaient croire tous les autres voyageurs qui l’écoutaient avec une admiration mêlée de crainte. Tous ? Pas vraiment, car Bokuden restait à l’écart et ne paraissait pas le moins du monde gober toutes ces sornettes. Le samouraï s’en aperçut et, vexé, il s’approcha de Bokuden pour lui dire :

— Toi aussi tu portes une paire de sabres. Si tu es samouraï, pourquoi ne dis-tu pas un mot ?

Bokuden répondit calmement :

— Je ne suis pas concerné par tes propos. Mon art est différent du tien. Il consiste, non pas à vaincre les autres, mais à ne pas être vaincu.

Le samouraï se gratta le crâne et demanda :

— Mais alors, quelle est ton école ?

— C’est l’école du combat sans arme.

— Mais dans ce cas, pourquoi portes-tu des sabres ?

— Cela me demande de rester maître de moi pour ne pas répondre aux provocations. C’est un sacré défi.

Exaspéré, le samouraï continua :

— Et tu penses vraiment pouvoir combattre avec moi sans sabre ?

— Pourquoi pas ? Il est même possible que je gagne !

Hors de lui, le samouraï cria au passeur de ramer vers le rivage le plus proche, mais Bokuden suggéra qu’il serait préférable d’aller sur une île, loin de toute habitation, pour ne pas provoquer d’attroupement et être plus tranquille. Le samouraï accepta. Quand le radeau atteignit une île inhabitée, le samouraï sauta à terre, dégaina son sabre, prêt au combat.

Bokuden enleva soigneusement ses deux sabres, les tendit au passeur et s’élança pour sauter à terre, quand, soudain, il saisit la perche du batelier, puis dégagea rapidement le radeau pour le pousser dans le courant.

Bokuden se retourna alors vers le samouraï qui gesticulait sur l’île déserte et il lui cria :

— Tu vois, c’est cela, vaincre sans arme !

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Ambiance vacances et ju-jitsu

Une ambiance de vacances pour ce billet conçu au milieu de l’été. Vacances et stages pour être plus précis. Durant plusieurs années, le mois d’août et parfois le mois de juillet ont vu se dérouler une semaine d’entraînement intensif, soit à la campagne dans le Lot-et-Garonne, ou bien au bord de la mer, principalement sur l’Atlantique, mais aussi sur les rivages méditerranéens. Sans oublier les périodes à la montagne, quand il s’agissait de stages fédéraux.
Il y a eu tout d’abord Beauvallon-sur-Mer, dans le golf de Saint-Tropez. Ensuite le Temple-sur-Lot et enfin Soulac-sur-Mer. Je n’oublie pas Chamonix, dont j’ai assuré la direction pendant plusieurs années, et qui relevait de l’initiative de la Fédération de judo, à l’époque où existait une osmose entre nous.
À quoi sert un stage ? Pourquoi ces différents sites ? Et pour finir, pour quelles raisons n’y en a-t-il plus de depuis quatre ans et pourrions-nous espérer une reprise ? Voilà les questions qui reviennent souvent, alors, je vais tenter d’y répondre.
L’utilité d’un stage est double. Se perfectionner et se divertir. Je parle pour les « amateurs » dans la mesure où pour les professionnels et/ou les sportifs de haut niveau la motivation se situe exclusivement dans le perfectionnement. Le perfectionnement, justement, à l’aide d’une pratique quotidienne intensive, il est quasiment assuré. Par contre, les deuxième et troisième jours sont redoutables au niveau fatigue et courbatures, pour le moins ! Les progrès réalisés le sont sur le plan technique et sur celui de la condition physique. Mais survient aussi et surtout un regain d’intérêt envers la discipline. En effet, il existe une véritable immersion et elle est abordée de façon différente et complémentaire à celle de la saison. Et puis, c’est l’occasion de rencontres avec des pratiquants d’horizons divers. Sur le plan des loisirs, le plaisir est réel quant à l’implication totale dans un domaine que l’on affectionne et puis on reste dans un environnement et une ambiance « vacances ».
Concernant les lieux, le premier stage, en 1977, s’est déroulé tout naturellement au camp du Golf-Bleu, en face de Saint-Tropez. Les non-initiés pourront s’instruire à l’aide du billet publié le 27 juin 2008 et connaître la fabuleuse histoire de cet endroit unique qui a su laisser de fantastiques et inoubliables souvenirs dans l’esprit de ceux qui s’y sont rendus. Ensuite il y a eu le Temple-sur-Lot au début des années 1980. La pleine campagne au bord du Lot, au milieu des arbres fruitiers, des canards, des oies et des pruneaux. Au goût de certains, cela relevait un peu trop de la nature et les activités de loisirs complémentaires n’étaient pas assez nombreuses, pour ne pas dire inexistantes. Cependant, cela permettait de se reposer ! Parallèlement, il y a eu les stages fédéraux.  C’est ainsi que plusieurs années de suite, la ville de Chamonix nous accueillait. Faisant découvrir les bienfaits de la montagne en été. Les stages fédéraux ont déménagé et moi je n’ai pas suivi le changement d’orientation imposé par la Fédération de judo en matière de ju-jitsu. Arriva ensuite Soulac, après une recherche active en direction de toutes les stations balnéaires allant de la pointe Bretagne au Pays basque. Soulac a été la première à répondre et surtout, la cité médocienne proposait une infrastructure capable de recevoir un tel rassemblement. C’est ainsi qu’à partir de 1986 et pendant vingt-cinq étés, et même parfois quelques printemps, nous nous sommes rendus dans cette station balnéaire située au-dessus de Bordeaux, à l’extrémité de la pointe de Grave. En vingt-cinq années, beaucoup de stagiaires sont passés et beaucoup de souvenirs sont restés ! Je n’oublie pas non plus un petit retour sur la côte d’Azur, plus précisément à Ramatuelle en 2009.
Et puis, depuis 2010, plus rien. Tout simplement parce qu’il existe des périodes de la vie où il est nécessaire de ne pas trop se diversifier, et aussi de se reposer, tout simplement. Mais comme dans la vie tout est bien souvent une question d’organisation ou plus exactement de réorganisation, il n’est pas exclu que l’aventure puisse se poursuivre sur l’un des beaux rivages de notre pays.
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Le judo est-il (encore) un art martial ?

Dans le numéro d’été de l’excellente revue L’Esprit du judo, dirigée par le non moins excellent Emmanuel Charlot, la question « le judo est-il (encore) un art martial ? » fait la une.
D’une certaine façon, la réponse est dans la question ou tout du moins, dans la façon de la poser. Mais immédiatement, on pense à la question qui devrait suivre : si la réponse est non, qu’est-il devenu, alors ? Un sport ? Cela ne peut osciller qu’entre ces deux hypothèses, art martial ou sport. Mais, à mes yeux, une troisième question surgit : le sport de l’époque de Kano était-il le même que le sport de maintenant ? Large débat là aussi !
La lecture de ce dossier très complet éclairera le lecteur et je me permets juste de donner mon opinion.
De façon directe, je répondrais non, le judo n’est plus un art martial,  mais, ce n’est pas si simple. A l’origine, son fondateur, Jigoro Kano, le considérait comme tel. Un héritage des méthodes de combat, dont il avait souhaité faire sa synthèse personnelle. Ceci étant, il n’était pas contre l’aspect sportif, mais à son époque, comme évoqué plus haut, la notion de sport n’était pas la même que de nos jours. D’ailleurs le sport n’existait pas vraiment. A notre époque, il y a sport et sport. Il y a le sport qui est considéré comme un entretien physique ayant pour simples buts le loisir et l’amélioration corporelle et il y a celui de la recherche de la performance avec parfois ses dérives et ses excès.
Je pense qu’il est ce que le professeur dispense dans ses cours. Il peut être un art martial si l’enseignant ne se limite pas à la simple étude des techniques autorisées en compétition.  Si tel est – malheureusement – le cas, il ne s’agit que d’un simple sport. Mais lorsque, au contraire, le maître des lieux prend soin d’élargir son enseignement à tout ce qui compose le judo originel, il contribue à faire durer le classement de celui-ci dans la famille des arts martiaux. Cette analyse peut paraître quelque peu rapide et simple (pour ne pas dire simpliste) aux yeux de certains, mais pour être tout à fait sincère, il s’agit de la volonté de simplifier l’analyse qui donnera envie – ou pas – d’aller plus loin dans la réflexion et la recherche d’informations pouvant  contribuer à cette analyse.
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Un beau métier

Les fidèles de ce blog connaissent mon attachement à la reconnaissance du métier d’enseignant et cela quelle que soit la matière ou la discipline enseignée. Chaque secteur à sa spécificité, certains   ? que je connais bien   ? sont plus contraignants physiquement, d’autres sont entourés d’une responsabilité on ne peut plus importante. C’est le cas, il me semble, des professeurs des écoles (les instits). La lourde tâche de réussir la construction de solides fondations sur lesquelles toute une vie devra s’appuyer leur incombe. Enthousiasmant, mais terriblement stressant, surtout quand ce métier est parfois stigmatisé et souvent dévalorisé, comme c’est le cas depuis plusieurs décennies. Ceci étant, il serait peut-être trop simple et trop rapide de faire quelque amalgame que ce soit avec l’horrible drame qui s’est déroulé la semaine passée à Albi, mais c’est peut-être le moment pour rendre hommage à cette profession et pour saluer ses mérites, surtout à une époque où les fondamentaux de notre société sont en mal de repère et tout simplement d’existence.  
Autre réflexion, toujours à propos d’enseignement. Et dans un registre beaucoup plus agréable, mais en parfaite osmose avec le sujet précédent. La semaine passée, j’ai pu m’apercevoir que la reconnaissance professionnelle était une chose, mais que la reconnaissance   ?  mutuelle   ?  de valeurs humaines en était une autre et peut-être encore plus importante. Créer de tels liens grâce à notre dojo n’est pas une moindre fierté. C’est là que l’art martial prend toute sa valeur. Au-delà d’un accomplissement personnel, il permet aussi d’améliorer le quotidien des humains grâce à un relationnel apaisé, empreint de respect mutuel et de valorisation de sentiments affectifs puissants.   
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Les classiques de fin de saison

Une saison se termine, laissant place à une interruption toute relative pour ce qui nous concerne, puisque le club assurera une permanence pour les adultes durant cet été. Mais pour bon nombre d’entre vous ce sera le moment de savourer des vacances vraisemblablement méritées.
A cette période, inévitablement, une activité comme la nôtre voit refleurir certains faits. Cela va du sentiment du travail accompli, jusqu’à des événements précis propres à ce moment comme les départs annoncés pour la saison prochaine. Mais il y en a bien d’autres.
Prenons le cas des animations proposées aux enfants, avec à l’occasion d’une coupe technique ou d’une petite compétition, un classement qui est prétexte à créer une saine émulation. Invariablement, chaque année, le même scénario se présente, il y aura un ou plusieurs parents qui demanderont pourquoi leur enfant n’a pas eu de coupe. Il semble tellement évident que le principe de la coupe, c’est qu’il n’y en a pas pour tout le monde, il n’empêche que le même genre de réflexion s’impose. Il s’en dégage un mélange d’étonnement et de découragement. Étonnement qu’un adulte puisse formuler ce genre de réflexion et découragement quant à l’éducation qu’il peut en découler. Le simple fait de monter sur un tatami et de disputer une coupe technique ou une compétition est déjà un fort investissement personnel et pour certain une première victoire sur soi-même, celle qui est essentielle. « Se surpasser plutôt que dépasser ». Mais tout le monde ne bénéficie pas du  minimum de psychologie qui devrait être imposé. Le summum s’étant présenté l’an passé, lorsque la maman d’un élève, qui avait pourtant terminé troisième, m’a affirmé que comme sa progéniture n’avait pas gagné, elle en déduisait que son enfant n’était pas fait pour cette discipline et qu’à ce titre il était sans doute préférable qu’il ne persiste pas.
Heureusement, ce n’est pas le fait d’une majorité.
Dans la case des mauvaises nouvelles  de ce mois de  juin, comme indiqué plus haut, il y a les élèves qui nous quitteront pour cause de déménagement, souvent liés à des mutations professionnelles. Même si cela s’avère presqu’inévitable, on ne s’y fait pas facilement. Et puis, il y a tous ceux qui ne reprendront pas le chemin du dojo pour des raisons personnelles : situation familiale, santé, lassitude, etc., les motifs sont nombreux.
Dans la colonne des satisfactions, toujours côté enseignant, existe donc le plaisir du travail accompli qui se manifeste par le constat de progrès réalisés au cours de la saison, enfin pour tous ceux qui ont voulu – ou pu  –  faire preuve de régularité. Notamment cette année, au club, avec sept  nouvelles ceintures noires et un nouveau 2e Dan. Et puis, en juin et juillet il y a les premières demandes d’information pour la rentrée. C’est la perspective du plaisir de pouvoir proposer à nouveau une activité qui satisfera grands et petits, sportifs ou pas et je n’oublie pas que cela entraîne inévitablement  un brassage social que tout sport et tout art martial permet et qui voit des personnes de conditions sociales différentes et exerçant divers métiers s’entraîner ensemble et lier parfois de solides amitiés qui n’auraient sans doute pas vu le jour sans inscription au dojo. La qualité des relations humaines qui se créent dans ce lieu n’est certainement pas l’élément le moins important de ce beau métier qui est le mien.
À nouveau, je souhaite un bel été à toutes et à tous et bon courage pour ceux qui ne prendront pas ou peu de congé. Comme énoncé la semaine dernière, ils auront en compensation le dojo à leur disposition.
Site du club de ju-jitsu Éric Pariset : www.jujitsuericpariset.com 

Tel armurier, telle arme

Pour ce nouveau billet, je ne résiste ni à l’envie ni au plaisir de vous proposer un petit conte. Il est issu d’un recueil que tout pratiquant devrait posséder comme livre de chevet. Il s’agit de Contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon. Ces contes et récits ont été réunis par Pascal Fauliot aux éditions Albin Michel.  Leur vocation est de faire passer à chaque fois un message, prouvant ainsi que les arts martiaux ne sont pas que des exercices techniques et physiques, mais bien davantage. Et que l’esprit qu’insuffle tout créateur dans quelque ouvrage que ce soit peut s’avérer lourd de conséquences. Bonne lecture !
« Le sabre est l’âme du samouraï », nous dit l’une des plus vieilles maximes du Bushido, la Voie du guerrier. Symbole de virilité, de loyauté et de courage, le sabre est l’arme favorite du samouraï. Mais dans la tradition japonaise, le sabre est plus qu’un instrument redoutable, plus qu’un symbole philosophique : c’est une arme magique. Il peut être maléfique ou bénéfique selon la personnalité du forgeron et du propriétaire. Le sabre est comme le prolongement de ceux qui le manient, il s’imprègne mystérieusement des vibrations qui émanent de leur être.
Les anciens Japonais, inspirés par l’antique religion Shinto, ne conçoivent la fabrication du sabre que comme un travail alchimique où l’harmonie intérieure du forgeron est plus importante que ses capacités techniques. Avant de forger une lame, le maître armurier passait plusieurs jours à méditer, puis il se purifiait en procédant à des ablutions d’eau froide. Revêtant des vêtements blancs, il se mettait alors au travail, dans les meilleures conditions intérieures pour donner naissance à une arme de qualité.
Masamune et Marasama étaient d’habiles armuriers, qui vivaient au début du XIVe siècle. Tous deux fabriquaient des sabres d’une très grande qualité. Murasama, au caractère violent, était un personnage taciturne et violent. Il avait la sinistre réputation de forger des lames redoutables qui poussaient leurs propriétaires à de sanglants combats ou qui, parfois, blessaient ceux qui les manipulaient. Ces armes, assoiffées de sang, furent rapidement tenues pour maléfiques. Par contre, Masamune était un forgeron d’une très grande sérénité qui se livrait à un rituel de purification pour forger ses lames. Elles sont considérées aujourd’hui comme les meilleures du pays.
Un homme, qui voulait tester la différence de qualité entre les modes de fabrication des deux armuriers plaça un sabre de Marasama dans un cours d’eau. Chaque feuille dérivant à la surface, qui touchait la lame, fut coupée en deux. Ensuite, un sabre fabriqué par Masamune fut placé dans le cours d’eau. Les feuilles semblaient éviter la lame. Aucune d’elles ne fut coupée, elles glissaient toutes, intactes, le long du tranchant comme si celui-ci voulait les épargner.
L’homme rendit alors son verdict : « La Murasama est terrible, la Masamune est humaine.
Il est sans doute inutile d’ajouter un commentaire.  
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