D comme mes Dojos (Deuxième partie) Le Central

Le Central (ou dojo fédéral)

Nous sommes au tout début des années 1970, les entraînements de l’équipe de France de judo sont loin de bénéficier des infrastructures actuelles ; les judokas de l’élite s’entraînent principalement dans leur club respectif et quelques rassemblements se font dans le tout petit dojo de ce qui s’appelait l’INS (institut nationale des sports) avant de devenir l’INSEP. Sous la direction d’Henri Courtine le judo français prend un nouvel envol. Parmi les mesures indispensables il fallait mettre à la disposition des champions – et futurs champions – un « site » qui permettrait de les rassembler régulièrement pour des entraînements à la hauteur des ambitions nationales.

Dans le Xème arrondissement de Paris un très vaste local appelé « Le Central » était disponible. Cet endroit, fermé en 1968, avait ouvert ses portes au début des années 1920 ; un ancien hangar avait été transformé en salle de sports. Ce sont principalement des cours et des combats de boxe anglaise qui s’y déroulaient. Il y eut ensuite l’époque du catch, avec des combats mémorables durant lesquelles « l’Ange Blanc » terrassait le « Bourreau de Béthune », ou le « Boucher de la Villette », tout un programme ! Situé au 57 de la rue du Faubourg Saint-Denis dans un quartier populaire de Paris, qui ressemblait étrangement à celui de la Rue des Martyrs (se reporter à la première partie du dictionnaire consacré à la lettre D comme Dojo) le Central a donc été repris quelques mois après sa fermeture par la fédération de judo qui pouvait ainsi offrir aux membres de l’équipe nationale un lieu d’entraînement qui correspondait aux attentes. L’expérience n’a pas duré très longtemps, jusqu’en 1975, je crois. Il était compliqué d’y accéder pour des raisons de circulation, de stationnement, et puis la vétusté du lieu imposait beaucoup d’entretien. Avant d’intégrer définitivement l’INSEP, les entraînements de l’équipe de France ont fait un crochet de quelques mois au Cercle Hoche dans le VIIIème arrondissement ; cette expérience ne s’est pas inscrite dans la durée.

Il n’y a pas que l’attachement que j’avais pour ce quartier populaire devenu très « bobo », qui anime mes souvenirs. A cette époque les entraînements de l’équipe nationale étaient ouverts à tous les licenciés à partir de la ceinture marron. Il y avait notamment une séance chaque mercredi soir durant laquelle pouvaient s’affronter des anonymes aux champions de l’époque qui s’appelaient Coche, Auffray, Rougé, Mounier, Brondani, Vial, Feist, Noris, Clément, et bien d’autres encore. Les meilleures équipes du Monde ont foulé ce tatami, un des premiers, si ce n’est le premier, a être monté sur ressort ! D’éminentes personnalités (champions, experts, etc.) sont venues faire profiter, à des centaines de judokas, de leur expérience et de leurs connaissances.

Etant affecté au Bataillon de Joinville pendant mon service national, avec l’équipe militaire nous nous y rendions quatre fois par semaine. Autre avantage personnel, après mes douze mois d’armée, comme j’habitais un logement contigu au dojo de la rue des Martyrs, dans l’arrondissement voisin, je pouvais me rendre à pied aux entraînements ; pour un parisien, ce n’est pas négligeable. Cela me donnait l’occasion de traverser plusieurs fois par semaine une partie de ces deux arrondissements que j’apprécie tout particulièrement. Et puis ce local chargé d’histoire avait une architecture impressionnante.

Enfin, et c’est quand même pour moi l’essentiel, j’y ai appris énormément techniquement et je m’y suis renforcé considérablement physiquement et mentalement.

Aujourd’hui, dans ce quartier en pleine mutation, c’est une école de théâtre qui occupe les lieux

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D comme mes Dojos préférés (première partie)

Un DOJO n’est pas simplement un lieu où l’on transpire, c’est aussi un endroit dans lequel on s’inspire. Il doit y régner une ambiance particulière qui n’est pas celle d’une simple salle de sports, on doit y apprendre « quelque chose » de plus. C’est là que l’on est censé « trouver sa voie », celle qui permettra de s’élever sur un plan technique et mental, celle qui apprendra la vie. Les arts martiaux, enseignés et pratiqués comme ils doivent l’être, ne sont-ils pas considérés comme une « Ecole de vie » ? Malheureusement, ce n’est pas toujours la réalité quand certaines conditions n’existent pas. D’abord, et nous n’y pouvons rien, certains équipements municipaux sont destinés à plusieurs disciplines sportives autres que les arts martiaux, privant ainsi le lieu d’une certaine identité propice à l’étude bien particulière de nos disciplines. Ensuite il y a ce que l’on peut appeler « l’esprit », celui qui est inculqué par le « maitre des lieux », à savoir le professeur. C’est à lui qu’incombe la responsabilité de faire en sorte que les élèves trouvent leur voie, sur le plan technique, mais aussi sur le plan mental, comme indiqué plus haut. Trouver la voie, c’est trouver le chemin qui mène aux progrès techniques et à la sagesse comportementale. Faire de sa pratique quelque chose d’utile pour soi et pour les autres. Il ne suffit pas d’afficher le code moral sur un mur du dojo et être ainsi en paix avec sa conscience, il faut aussi le faire respecter. Le dojo, n’est pas un endroit dans lequel seront vénérés quelques divinités que ce soit, mais simplement un lieu où l’on applique les principes de politesse élémentaire et de respect vis-à-vis du professeur et des autres élèves, du plus gradé au moins gradé, mais aussi de l’espace dans lequel nous étudions. Le dojo est un lieu d’étude et de partage.

Des dojos, j’en ai fréquentés beaucoup, que ce soit pour me former, m’entraîner, transpirer et bien sûr enseigner. Dans le cadre du dictionnaire personnel dont l’ébauche est proposée au travers de ce blog, j’évoquerai les lieux qui m’ont le plus marqué.

Dans la « version longue » de ce dictionnaire qui devrait prendre la forme d’un livre, il sera aussi question de ceux dans lesquels j’ai exercé mon métier.

Sur ce blog, j’en évoquerai trois. En tout premier le « Club Français », le dojo de la Rue des Martyrs. J’entretiens le suspense concernant les deux autres que vous pourrez découvrir au fil des semaines.

Le Club Français (la Rue des Martyrs)

Le premier qui s’impose naturellement est donc celui de la Rue des Martyrs, « Le Club français ». Il a été fondé juste après la seconde guerre mondiale par Roger Piquemal, professeur de sports converti au judo. C’est dans cet endroit que j’ai revêtu mon premier judogi, que j’y ai appris mon métier et que j’ai commencé à l’exercer. Une bonne décennie plus tôt, c’est là qu’en 1947 mon père, Bernard, avait commencé lui aussi le judo, intrigué et fasciné qu’il était, comme beaucoup de ses contemporains, par cette lutte mystérieuse venue d’orient et grâce à laquelle les petits pouvaient faire tomber les plus grands.

Situé en plein centre de Paris, tout en bas d’une rue qui traverse une partie du IXème arrondissement pour se terminer presqu’au pied du Sacré-Cœur, le « Club Français » a été l’un des premiers clubs de judo et de ju-jitsu (on y enseignait également la self-défense !), mais aussi l’un des plus célèbres dans les années 1950 et 1960. Pas seulement au niveau des résultats sportifs mais aussi par rapport à la qualité de l’enseignement et aux nombreuses personnalités qui y ont été reçues et qui ont dispensé leurs connaissances, bref, pour l’ensemble de son histoire. Au commencement, il se nommait le Club Français de jiu-jitsu.

Il faut savoir qu’au début du XXème siècle, ce vaste local avait déjà été une salle de sport. Ce qui devait être, à l’origine, une cour commune à plusieurs bâtiments, puis un lavoir et/ou des écuries, est devenu   un endroit où l’on pratiquait de la « Culture Physique », mais aussi de la Boxe anglaise. Il n’y pas si longtemps le nouveau propriétaire de cette salle, devenue maintenant un cabinet d’architecte, a découvert qu’un ring de boxe y était installé au beau milieu. Quatre plaques de fer rivées dans le plancher et sur lesquelles devaient être fixés les poteaux qui formaient le carré en attestaient.

Au milieu des années 1980, alors que j’étais en plein cours, un beau matin une dame âgée qui se promenait dans le quartier, m’informait qu’avant la seconde guerre mondiale la salle appartenait à la famille Rotchild et que tout au fond, dans un espace clos, pour ne pas dire caché, étaient dispensés les tous premiers cours de judo en France. Cette dame m’avait également appris que l’appartement qui surplombait le dojo, et qui avait été successivement celui de Roger Piquemal, puis de mon père était une mezzanine qui accueillait les visiteurs. De cet endroit ils pouvaient assister aux entraînements en toute convivialité.

Abandonné durant le second conflit mondial, le local a été repris par Roger Piquemal en 1945. Il en a assuré la direction jusqu’en 1954, l’année de sa disparition. A compter de cette date, c’est mon père qui a pris le relais – et de quelle manière – jusqu’à sa propre disparition en 2004.

A partir de l’âge de cinq ans j’y ai commencé une pratique avec plus ou moins d’enthousiasme. Comme il s’agissait du métier de mon père et que je devais y voir une certaine forme d’obligation, je dois avouer que la passion n’était pas toujours au rendez-vous de ces séances, même si je faisais preuve de régularité.

Ce n’est qu’à l’adolescence que la plus grande partie de ma formation s’est faite. J’y ai exercé mon métier jusqu’en 1989 ; ensuite, j’ai souhaité diriger mes propres dojos.

La « Rue des Martyrs » a fermé ses portes en 2005, un an après la disparition de mon père. Ne bénéficiant pas d’issue de secours et devant l’impossibilité d’en créer une, il a fallu se faire une raison, face à des mesures de sécurité de plus en plus drastiques, le lieu ne pouvait plus recevoir du public. Plusieurs années après, je ne peux l’oublier.

Aujourd’hui, c’est une talentueux architecte qui a investi les lieux et installé ses bureaux et son appartement.

Comme indiqué plus haut, dans une version longue, je ne manquerai pas d’ajouter aussi bien la liste des personnalités qui ont fréquenté ce dojo, mais aussi celles qui ont dispensé leur savoir dans cet endroit qui mérite le qualificatif de « mythique ».

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Les sutemis

Ils sont l’illustration parfaite du principe de non-opposition et de celui de l’utilisation de la force de l’adversaire. Dans notre langue nous les appelons aussi les « techniques de sacrifices », dans la mesure où pour appliquer les principes en question il faut se placer au sol sur le dos, afin de faire passer l’adversaire par-dessus nous. Ce sont les sutémis, ils sont praticables par tous les gabarits, leur efficacité est redoutable. Tomeo-nage la fameuse « planchette japonaise » est le plus célèbre d’entre eux.

Il y a quelques mois j’avais déjà évoqué ces techniques, mais elles représentent tellement bien une des grandes idées de Jigoro Kano, qui est de savoir faire bon usage de sa propre énergie et surtout de celle de l’adversaire, qu’il me semble important d’insister, et de compléter le précédent article qui traitait du sujet. .

Dans leur exécution, non seulement on ne s’oppose pas, mais à la force de l’adversaire on y ajoute la nôtre. Ce qui fait que même étant dénué de puissance, il suffit de « conduire » celle de l’opposant. A partir de là, « tout le monde peut faire tomber tout le monde ». Nous sommes au cœur de l’efficacité du ju-jitsu tel qu’il doit être enseigné et pratiqué. Certes sans action offensive de l’adversaire, il est impossible d’appliquer ces principes d’addition de force, mais le ju-jitsu (bien présenté) a toujours revendiqué le titre de méthode de défense et non pas d’attaque.

En judo, avec l’avènement de la compétition et des catégories de poids, certaines projections ont dû être adaptées, c’est le cas des sutemis ; dans la mesure où, à technique (presque) équivalente et à poids égal, les principes de base n’ont plus les même effets, y compris celui de la surprise pour la personne qui en agresse une autre et qui n’envisage pas forcément que celle-ci puisse se défendre en utilisant de telles techniques. Le meilleur exemple d’adaptation, pour lequel on peut presque utiliser le terme de nouvelle technique, s’appelle tomoe-nage avec l’apparition du yoko-tomoe-nage. Cette dernière forme ne trouvant sa raison d’être que dans les randoris et les compétitions de judo. Il n’existe pas vraiment d’applications en self-défense. Une analyse plus profonde de cette belle technique pourra faire un beau sujet par la suite.

Il y a donc des différences techniques mais aussi d’utilisation selon que l’on se trouve dans le cadre de la (self) défense ou bien dans celui du judo.  Ne serait-ce que dans la rue, sur un sol dur, nous nous placerons sur le dos qu’en dernière analyse, lorsque la poussée est tellement forte que nous sommes déjà en déséquilibre et que l’application de techniques, comme hiza-guruma par exemple, qui nous laisseraient debout n’est plus possible. A l’inverse, en judo les sutémis peuvent être pratiqués directement, comme toute autre technique.

Il existe aussi les « makikomi », ils sont un peu les « cousins éloignés » des sutemis. Littéralement, il s’agit de techniques d’enroulement. Le corps de Tori venant au contact de celui d’Uke pour l’entraîner avec lui jusqu’au sol. La différence essentielle réside dans le fait que pour les sutemis, il y a séparation des corps durant l’action et que pour les makikomi, c’est l’inverse, l’efficacité se réalisant dans le plus étroit contact entre les deux protagonistes (au profit de Tori, évidemment, qui emmène le corps d’Uke avec le sien dans une synergie rotative). Le point commun étant que dans les deux cas l’idée est d’entraîner l’adversaire au sol en y allant soi-même.

La maitrise de ces « techniques de sacrifices » requiert de la patience, comme toutes les autres, mais leur parfaite exécution, qui donne l’impression d’agir sans presqu’aucun effort et même de façon un peu magique, procure une joie supérieure à celle ressentie dans la réalisation des autres projections. C’est en tout cas mon sentiment.

Je profite de cette occasion pour signaler que les sutémis seront au programme – entre autres thèmes – du prochain stage à Paris (Montreuil, précisément) le 10 mai, le jour de l’Ascension.

En attendant, certains vont pouvoir profiter de congés, bonnes vacances à eux et bon courage à tous les autres.

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C comme Henri Courtine

Aujourd’hui, dans le cadre du projet de dictionnaire c’est la lettre C que j’aborde : C comme Henri Courtine.

Ce choix s’impose à moi, sans la moindre des hésitations. Parmi les personnalités qui auront marqué mon existence, Monsieur Courtine arrive en deuxième position, juste après mon père. Ils étaient d’ailleurs les meilleurs amis dans la vie et les meilleurs adversaires sur les tatamis le temps de leurs carrières de compétiteurs. Il est difficile d’évoquer l’un sans l’autre. Avec dans la vie des personnalités aussi différentes que complémentaires et sur les tatamis des styles qui l’étaient tout autant, ils ont marqué le judo français.

Retracer l’exceptionnelle carrière de Monsieur Courtine se fera aisément par l’intermédiaire d’Internet ; au travers de ces lignes mon intention est de dresser un portrait dans lequel seront évoqués les sentiments personnels que j’éprouve pour une personne à laquelle je voue admiration et respect. La reconnaissance étant une denrée assez rare, je ne m’en prive pas.

On peut quand même brièvement rappeler l’impressionnant parcours de cet homme. D’abord sur le plan sportif ; il a été champion de France toutes catégories, champion d’Europe, demi-finaliste au 1er championnat du Monde toutes catégories à Tokyo en 1956. Ensuite durant une exceptionnelle carrière de dirigeant, il a été entraîneur national, Directeur technique national puis Directeur de la FFJDA, Directeur sportif de la Fédération internationale de judo et Directeur du haut-niveau au Comité National Olympique Français. Il a été nommé au grade exceptionnel de 10ème dan en 2008 ce qui fait de lui le plus haut gradé français. Avec mon père ils ont été les premiers 6ème dan, il en fût de même pour chaque dan jusqu’au 9ème qui leur avait été décerné en 1994 (dix ans avant la disparition de mon père).

Etant forcément mon aîné, mais aussi vis-à-vis de la hiérarchie et surtout par rapport au respect qui est le mien à son égard, le mot amitié me semble quelque peu familier. Pourtant, grâce à la complicité qui le liait à mon père, j’ai eu la chance de très bien le connaître, mais pour moi il est Monsieur Courtine, bien qu’il soit aussi un peu un « père spirituel ».

Les qualificatifs concernant cet homme au charisme exceptionnel et qui me viennent à l’esprit sont nombreux. L’intelligence, bien sûr, l’élégance – dans la vie et sur les tatamis -, la rigueur avec lui-même et envers les autres, le travail, le courage et un redoutable sens de l’organisation. Il est pourvu d’un bon sens qui évite toute perte de temps et, justement, d’une capacité d’analyse et d’action aussi rapide qu’étaient ses balayages sur les tatamis.C’est aussi une personne pleine d’humour, et aussi et surtout un affectif qui a su préserver sa vie personnelle.

Tout au long de ma vie, j’ai eu la chance de le côtoyer à de nombreuses reprises dans le cadre du judo, mais pas uniquement ! La première fois c’était au célèbre « Camp du Golf bleu » à Beauvallon-sur-Mer, dans le Var. J’avais trois ans. Avec mon père, il dirigeait le stage international de judo durant lequel, pendant deux mois, les meilleurs judokas mondiaux se retrouvaient avec leur famille pour des sessions d’une semaine, ou plus, dans ce centre qui était également un lieu de villégiature. Les familles Courtine et Pariset s’y installaient pour tout l’été et cela jusqu’à ma préadolescence. Nous prenions les repas ensemble et l’hébergement se faisait dans des paillottes, presque mitoyennes, au confort pour le moins spartiate ; toutes ces conditions de promiscuité créaient des liens privilégiés.

Ensuite, j’ai effectué mon entrée dans le secondaire à l’Ecole Saint-Michel de Picpus dans le XIIème arrondissement de Paris ; parmi les activités sportives proposées, il y avait le judo et le professeur était…Henri Courtine. C’est sous son contrôle que j’ai obtenu ma ceinture marron. Ce n’est pas donné à tout le monde d’avoir sur son passeport sportif les ceintures de couleurs signées par Bernard Pariset et Henri Courtine. Ils étaient aussi d’excellents professeurs à la pédagogie innée.

Plus tard, et durant plusieurs saisons j’ai été licencié au prestigieux Stade Français; il occupait la présidence de la section judo-ju-jitsu et entre autres bons souvenirs qui ont marqué cette période du début des années 1980, il y a celui d’une finale aux championnats de France par équipes « excellence ».

Enfin, alors qu’il était directeur de la FFJDA, j’ai participé à différents travaux (stages, supports techniques, commissions techniques, etc.) pour la réhabilitation du ju-jitsu. Il avait donné « carte blanche » à mon père lorsque celui-ci, au début des années 1970, lui avait exposé le projet de la mise en place d’une méthode de self-défense (l’atemi ju-jitsu), en parallèle de la progression française de judo. Initiative qui avait pour objectif d’ajouter une corde à l’arc des professeurs. On connait malheureusement la suite qui (n’) a (pas) été donnée à cette entreprise, mais ceci est une autre histoire.

Aujourd’hui, tout en restant très attentif à ce qui se passe dans le monde du judo, il prend une retraite que l’on ne peut qualifier que de « méritée », sur les bords de la Méditerranée, dans le magnifique département du Var, une région pour laquelle, lui et moi vouons la même passion.

Au travers de ces quelques lignes, je suis très fier d’exposer l’admiration qui est la mienne à son égard. Il y a des hommes qui marquent l’histoire, mais qui par leur exemplarité occupent aussi une part importante de votre vie.

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B comme Bercy

Aujourd’hui, c’est la lettre B de mon dictionnaire qui est abordée. Comme je l’avais expliqué il y a quinze jours, en alternance avec les articles habituels, je proposerai  sur ce blog un résumé de ce que représente chaque mot ou nom qui me sont venus spontanément à l’esprit en déclinant l’alphabet.  Un ouvrage plus détaillé sur chacune des lettres étant en préparation.

Donc, j’ai choisi B comme Bercy. Je n’ignore pas que cette salle, inaugurée en 1984, a troqué son appellation – « qui sentait bon un quartier populaire de la capitale » – pour une autre largement plus commerciale. En vérité son nom originel était « le Palais-Omnisport de Paris-Bercy », le POBP.

Dans cette salle, à la capacité d’accueil de 14 000 spectateurs, se déroule tous les ans le « festival des arts martiaux » organisé par le magazine Karaté-Bushido. C’est en 1986 qu’à eu lieu la première édition du plus grand rendez-vous mondial en la matière.

En 35 éditions (avec celle du week-end dernier) tous les arts martiaux ont été présentés, les meilleurs experts et champions ont foulé le tatami de cette salle qui devient, le temps d’une soirée, le plus grand dojo du Monde.

Cet endroit a sa place dans mon dictionnaire parce qu’il revêt un caractère particulier ; il a fait partie des grands moments de ma carrière, il a contribué à affirmer ma notoriété.  J’ai eu la chance et l’honneur d’y démontrer le ju-jitsu à douze reprises.

Mes « années-Bercy » qui vont de 1986 à 2005 (ma dernière participation), m’ont permis de rassembler de nombreux souvenirs que je qualifierai d’excellents.

Pour être prêt le jour J, la préparation commence bien avant la date de l’évènement. Il y a d’abord les heures de répétitions sur plusieurs semaines, après avoir travaillé longuement sur la conception de la démonstration.  Il faut à chaque fois faire preuve d’originalité tout en présentant un ju-jitsu efficace et spectaculaire. Le stress  monte en puissance au fur et à mesure que la date approche ; il y a la hantise qu’un problème surgisse, une blessure par exemple, ce qui est arrivé en 1998 avec un ménisque du genou en manque de coopération. Enfin arrive le grand jour, avec cette fois un hyper-stress dans les heures qui précédent. Lorsque l’on est derrière le rideau juste avant d’entrer dans l’arène, la tension est à son comble.

Les deux moments vraiment très forts sont « pendant et juste après ». Chacun a ses propres réactions face à ce que l’on peut considérer comme une confrontation. J’ai toujours été surpris qu’une fois monté sur le tatami le stress s’évapore comme par miracle, et heureusement. L’inquiétude que l’on ressent juste avant n’est pas uniquement due à la peur de ne pas bien faire, mais que surgisse un souci quelconque, qu’un grain de sable vienne enrayer la machine ; un trou de mémoire, une blessure ou bien encore un problème avec la musique. J’évoque ces exemples pour la bonne raison que ce sont trois cas de figures auxquels j’ai été confronté. Dans la version longue  de ce dictionnaire je ne manquerai pas de les expliquer dans le détail.

Une fois la démonstration exécutée, il y a cette incroyable sensation de soulagement. Si le spectacle a remporté le succès escompté et que l’on sort sous les applaudissements, une incroyable sensation de soulagement nous envahit, celle du contrat rempli, du métier bien fait. S’ensuivent des moments de douce béatitude. La tension retombe.

Lorsque la prestation s’effectue en première partie du spectacle, après une douche salvatrice et réparatrice, on rejoint le hall et si, comme ce fût le cas à plusieurs reprises, le club dispose d’un stand, on ne boude pas le plaisir procuré par la séance d’autographes. C’est là aussi un grand moment.

Quant aux souvenirs qui restent des démonstrations auxquelles j’ai pu assister, je n’évoquerai que les bons. Si globalement le spectacle a toujours été de qualité, sur plus de trente ans on ne peut éviter quelques ratés et mauvais excès. Heureusement la mémoire est sélective et l’on ne retient souvent que le meilleur. Parmi ce « meilleur » il y a eu 1989. J’ai l’impression que cette année a marqué un tournant. D’une suite de démonstrations d’arts martiaux très épurées lors des premières éditions, on passait à un réel spectacle, tout en conservant un esprit martial. C’est à cette occasion que la France découvrait le québécois Jean Frenette,  époustouflant dans un superbe kata artistique. Tout au long de ces années, je me souviens aussi des prestations toujours impeccables de Christian Tissier en aïkido, des moines de Shaolin, des karatékas d’Okinawa, de Sylvain Guintard marchant sur les braises, de Dominique Valéra toujours très convaincant, etc. Je n’oublie pas non plus les interventions, disons « originales » de Jean-Claude Van Damme. J’ai aussi une pensée pour la Canne française, un art bien de chez nous, démontré à plusieurs reprises et de belle manière par Fred Morin et son équipe.

Concernant le jugement que je porte sur mes propres prestations, l’édition 1995 a ma préférence sur le plan technique ; du point de vue du spectacle, c’est l’année 2000 que je place en tête ; on m’avait confié la charge de proposer en quelques tableaux la fameuse « Légende du Grand Judo », qui avait en son temps fait l’objet d’un très beau film relatant une période de la vie de Jigoro Kano durant laquelle, s’inspirant de différents styles de ju-jitsu, il  crée sa propre Ecole qu’il appelle JUDO. Il ignorait sans doute qu’à notre époque le sport prendrait l’ascendant sur la méthode d’éducation physique et mentale qu’il préconisait, mais c’est une autre histoire.

Aujourd’hui, pour retrouver ces passages à Bercy, il reste les vidéos qui permettent de les revivre, sans aucune nostalgie. Ils font partie des grands moments de ma carrière. J’ai participé à de nombreux galas en France et à l’étranger, mais aucun endroit ne procure de telles sensations, que ce soit le trac avant, la pression pendant et l’immense satisfaction juste après.

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Jiu-jitsu : la défense du faible…

Aujourd’hui, c’est la réponse à une question posée par un pratiquant résidant en Belgique qui fera office de billet hebdomadaire.

Bonsoir Monsieur Pariset,Puis-je vous demander votre avis sur un sujet qui fait « parler » en ce moment ?Pensez-vous que le Jujitsu doit se « moderniser » en faisant ressortir un peu plus son aspect « self-défense » ? Quand je dis moderniser je ne veux pas oublier la tradition, mais étant donné la dérive de notre monde et les agressions de plus en plus courantes que ce soit sur les femmes, les hommes ou même les plus jeunes ; beaucoup se dirigent vers les « nouveaux » sports de combat du style Krav Maga, Penchak Silat…et notre ju-jitsu commence à perdre de sa popularité.Je me pose donc la question, faut-il tout en gardant la tradition enseigner plus sur le coté self-défense du Ju-jitsu ?  Bien à vous. David Lobrie

On pourrait répondre de façon résumée en affirmant que non, le ju-jitsu ne doit surtout pas évoluer (par rapport à sa conception et à sa vocation première évidemment !). Ce sont les dérives et/ou déviances dont notre belle discipline est la victime depuis des années qui ont conduit à cette situation et aux nombreuses confusions qui en résultent. Mais il me semble qu’il est utile de développer quelque peu !

Il suffit de pratiquer et surtout d’enseigner le ju-jitsu en respectant sa vocation première, c’est-à-dire la self-défense ; « la défense du faible contre l’agresseur » comme l’indique l’ouvrage rédigé par Monsieur Feldenkrais dans la première partie du XXème siècle et dont la couverture nous sert d’illustration. Ou encore visionner l’excellent film d’Akira Kurosawa réalisé en 1954 « les 7 samouraïs » qui raconte comment au Moyen-âge, la tranquillité d’un petit village japonais est troublée par les attaques répétées d’une bande de pillards et comment Sept samouraïs sans maître acceptent de défendre les paysans impuissants … et de les former aux techniques de défenses….

Je vois donc trois grandes raisons au mal que vous évoquez. Tout d’abord, le ju-jitsu est victime de dérives, ensuite (ce qui fait partie de ces dérives) de certaines façons de l’enseigner. Enfin, il lui manque une organisation au plus haut niveau.

Premièrement, à propos de dérive, le développement de l’aspect compétition en est une belle illustration. En effet, il retire automatiquement de la valeur en matière de self-défense, dans la mesure où pour des raisons de sécurité (souhaitables) les techniques les plus dangereuses, donc les plus efficaces en matière de défense, sont exclues. A cela il faut ajouter que, bien souvent, lorsqu’il s’agit de compétition, une forme d’élitisme s’installe au détriment de ceux qui ne sont pas intéressés par cet aspect. Autres dérives, avec des postures (les gardes) adoptées dans certaines façons de pratiquer ; elles ne sont pas naturelles et incompatibles avec l’efficacité en situation réelle. A ces dérives on peut ajouter l’existence d’un nombre important de styles et d’écoles de ju-jitsu qui pour certaines n’ont en commun que le…nom, ce qui ne manque pas de semer la confusion.

Deuxièmement, la façon dont le ju-jitsu est enseigné, ce qui est en liaison avec la première cause. A partir du moment où existe la compétition dans une discipline, beaucoup de professeurs ont tendance à limiter leurs enseignements aux seules techniques qui y sont autorisées. Sans tenir compte de la vocation première de l’art martial en question. On peut aussi ajouter un manque de formation qui concerne une partie des enseignants, ce qui amène naturellement le troisième point.

Donc, et enfin, ce troisième point qui concerne l’absence d’une structure forte au niveau national pour fédérer, organiser et promouvoir.

Face à ce constat quels sont les remèdes ? Une grande et vraie structure indépendante, mais cela a déjà été tenté à plusieurs reprises, il s’agit d’un travail colossal, surtout que, en ce qui concerne la France, une structure – la FFJDA – possède déjà la délégation ministérielle qui lui permet de gérer la discipline dont elle a la charge. Est-ce fait correctement ?

Fort de ce constat, à court terme, que peuvent faire les enseignants du « ju-jitsu originel » ? Pour ma part, même si cela peut paraitre désuet, j’opte tout bonnement pour le bon sens qui consiste à enseigner le ju-jitsu selon sa vocation première (venir à bout d’un agresseur plus fort que soi).  Et puis, expliquer aux élèves et futurs élèves que le ju-jitsu, s’il est enseigné comme il doit l’être, est une méthode de self-défense complète, composée de toutes les défenses répondant à toutes les formes d’agressions, qu’il existe des principes de bases qui permettent aux plus faibles de triompher des plus forts, que le travail des coups et l’étude des points vitaux font partie de l’enseignement. Certes, cela prend du temps, mais il n’y a pas de méthodes miracles qui permettent de savoir « se défendre en dix leçons » et de toutes les façons, l’invincibilité n’existe pas.

J’ai conscience que parfois (et même souvent) le « faire-savoir » est plus important que le « savoir faire ». Avec une bonne communication, c’est surtout plus facile, certaines méthodes l’ont bien compris.

Il faut garder espoir ; le ju-jitsu existe depuis des lustres, il en a vu d’autres et tel le Phénix, il renait toujours de ses cendres. Peut-être, et même sûrement, afin de souligner l’aspect utilitaire il faut accoler plus systématiquement le mot self-défense à celui de ju-jitsu. Ou encore, à l’instar de l’ouvrage présenté, ne pas hésiter à utiliser des formules qui captent l’attention.

Concernant les solutions, quelques uns ont fait le choix d’enseigner le ju-jitsu sous un autre nom, cela se passe de commentaires.

Maintenant, il y aura toujours des gens pressés et d’autres qui prennent leur temps, il y aura toujours des personnes préférant les « fast-foods » aux bons petits plats. Ce qui n’empêche pas certains de changer d’avis, par la suite. L’important est de croire en ce que l’on fait, et surtout de bien le faire.

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Nouveau rendez-vous

Les rendez-vous parisiens se déplacent un peu à l’Est pour devenir  « montreuillois », du nom des habitants de la commune de Montreuil, qui est la deuxième ville la plus peuplée du département auquel elle appartient, la Seine-Saint-Denis. C’est également la cinquième de l’Ile-de-France. Appelée aussi Montreuil-sous-Bois (quand il y avait des bois, sans doute), la ville est limitrophe du XXème arrondissement parisien, son accessibilité est très facile ; avec le métro par la ligne 9, station Robespierre, en voiture par la sortie périphérique Porte de Montreuil.   Ce petit cours de géographie pour présenter l’endroit où se déroulera le 24 mars le prochain stage.

Un nouveau lieu et un nouveau créneau. Un nouveau lieu avec aussi un beau et grand dojo pour bénéficier davantage d’espace. Mais aussi un autre moment du week-end, peut-être plus adapté, ce qui permettra d’élargir le cercle des habitués.

Au programme de ce premier rendez-vous, des enchaînements « très ju-jitsu » dans lesquels seront proposées des techniques assez avancées. Quand je parle d’enchaînement « très ju-jitsu » c’est pour insister sur le fait que tous les secteurs de notre discipline seront évoqués : coups, projections, contrôles, travail debout et au sol, etc.

Je n’oublie pas les méthodes d’entraînements parmi lesquelles on retrouvera le « randori de situation ».

Ce stage est ouvert à tous les pratiquants d’arts martiaux ; il est quand même conseillé de maîtriser quelque peu l’art de la chute.

J’espère que cette première édition rencontrera le succès, il n’est pas trop tard pour se décider.

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A comme arts martiaux

Il y a quelque temps un de mes anciens élèves, qui se reconnaitra, m’avait suggéré de réaliser un dictionnaire des noms et des mots qui ont marqué ma carrière. J’avais mis de coté cette idée, aujourd’hui elle me revient. Aussi, j’ai commencé à établir une liste alphabétique des personnes et des sujets qui me venaient assez spontanément.

La matérialisation de cette idée n’altérera pas la publication régulière d’autres articles, comme c’est le cas depuis de nombreuses années sur ce blog. Pour ce dictionnaire, toujours sur ce même moyen de communication, je donnerai une définition courte, étant entendu que par la suite, sera proposé un recueil dans lequel chaque sujet sera plus largement développé.

Aujourd’hui commençons donc par le début : la lettre A, comme Arts martiaux, on ne pouvait mieux commencer.

Grâce à de nombreux outils d’information chacun peut avoir accès à la définition et à l’histoire de ces arts de combat ; aussi, ce sera essentiellement mon interprétation personnelle qui sera proposée.

Tout d’abord, les arts martiaux sont une part importante de ma vie, ils sont mon métier. Et même si je me suis spécialisé dans l’un d’entre eux, le ju-jitsu, j’ai eu aussi la possibilité de pratiquer le judo bien sûr, mais aussi, le karaté et l’aïkido, sans oublier la boxe française que je considère comme « notre art martial ».

Dans « art martial », il y a d’abord le mot art. La première définition proposée par le Larousse est la suivante : «Aptitude, habilité à faire quelque chose » ; cela est explicite et me convient. Ensuite, il y a le mot martial. Toujours dans le même dictionnaire (en première définition): «Qui manifeste des dispositions belliqueuses ». Ah !  Pour belliqueux on trouve : «qui aime la guerre et cherche à la provoquer » ! Donc un raccourci logique donne pour art martial : « art de la guerre », mais la provocation en moins, puisque le principe est de combattre quand n’existe plus d’autres solutions, le bagage technique représentant avant tout une force de dissuasion. C’est, en tout cas la conception que j’en ai.

Bien que « tombé dedans » tout petit, s’il n’était question que de guerre, je n’aurais pas persévéré. Nous ne sommes plus au temps des samouraïs qui se trouvaient en situation quasi permanente de survie, les combats se finissant bien souvent pas la mort d’un des deux protagonistes ; ces valeureux combattants ont disparu, mais ils ont légué un mythe puissant et les valeurs qui y sont attachées, celles du code du bushido. Gardons les principes de courage, d’honnêteté, de fidélité, de tout ce qui fait le code d’honneur pour les mettre au service d’une éducation physique et mentale. La sagesse que l’on retrouve dans certains contes que je me plais de proposer régulièrement sur ce blog, est un des principaux intérêts qui m’anime, peut-être encore davantage avec le temps.

La self-défense – l’aspect technique – représente bien évidemment un intérêt majeur ; faire en sorte que chacun puisse acquérir une technique protectrice et une confiance en lui ! Et puis, la notion d’affrontements très codifiés lors des séances d’entraînement pouvant s’apparenter à une forme de jeu est un autre aspect que je retiens. Elle permet de s’engager tout en ne dramatisant pas la situation, ce qui est sain. « Nous nous sommes bien amusés » est une phrase que mes élèves connaissent bien et que j’utilise volontiers, avec facétie, après un randori.

Dans une version plus fouillée que j’espère publier à l’occasion d’un dictionnaire complet de mes préférences, à la lettre A comme Arts martiaux, je ne manquerai pas d’étoffer le contenu de ce court billet et de donner mon sentiment sur chacune des principales disciplines, mais aussi sur les personnes qui, de mon point de vue, les ont le mieux représentées. Ce sera aussi l’occasion de proposer les nuances que je mets entre arts martiaux et sports de combat. Et tout simplement d’exprimer mon sentiment sur l’évolution de nos disciplines. Je ne manquerai pas d’évoquer celles que j’aurais bien aimé pouvoir pratiquer, comme le Kendo, et plus largement traiter les techniques plus anciennes, ainsi que les nombreux « Styles et Ecoles » attachés à certaines disciplines, comme le ju-jitsu.

En conclusion et en un résumé on ne peut plus court, les arts martiaux sont pour moi des méthodes de combats entourées de fortes valeurs éducatives, physiques et mentales, à condition de respecter « réellement » leurs traditions.

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(Dé)formateurs…

Un formateur d’enseignants à l’occasion d’une séance qui n’hésite pas à utiliser un qualificatif déplacé pour interpeller et faire remarquer son retard à un futur professeur (quel exemple !), un autre (ou le même) qui informe les futurs enseignants qu’ils ne doivent pas espérer faire une activité professionnelle, même partielle, de la dispense de leurs savoirs et encore moins que celle-ci puisse un jour devenir leur métier (quelle motivation !). Voilà des faits qui sans doute ne reflètent pas une majorité, mais qui se sont déroulés dans un lieu où doivent être « formés » les futurs professeurs. Ceux qui dispenseront leurs connaissances techniques et qui donneront l’exemple en matière de politesse, de respect, bref d’éducation et à qui il reviendra donc la tâche de faire appliquer le fameux code moral affiché dans les dojos.

On poursuit avec un jeune enseignant, dont plus de la moitié d’un cours de judo destiné à des enfants se déroule avec un ballon de foot et qui propose un échauffement de quarante cinq minutes aux adultes (quelle formation a-t-il reçu ?, ou bien cède-t-il à une forme de facilité ?). On enchaîne avec un jury peu convaincant quant aux raisons qui l’ont amené à recaler deux candidats à un haut grade, si ce n’est que le partenaire était trop complaisant (!?). Il faut espérer que ces quelques faits, véridiques et navrants, soient minoritaires. Ils m’ont incité à revenir sur un sujet déjà abordé il n’y a pas si longtemps sur ce même blog, à savoir la formation des enseignants, c’est-à-dire ceux qui sont en charge, entre autres missions, de développer une activité qui se réclame aussi de valeurs éducatives exemplaires sensées nous distinguer d’autres pratiques plus « sommaires ». Je n’ignore pas une certaine récurrence sur le sujet, mais il y a des clous qui méritent d’être enfoncés et puis l’indignation est plus saine que la résignation.

C’est le professeur qui « fait » la discipline, il est le premier contact, le référent technique, mais aussi moral, l’exemple qui motive (ou pas) les futurs adhérents à devenir des pratiquants et (encore plus difficile) à le rester.  Il est censé posséder la connaissance technique et maîtriser les outils pédagogiques que lui avait légués en son temps son propre professeur. Le tout pourra être complété lors d’une formation pour la quête d’une qualification au cours de laquelle il serait habile de ne pas remettre en cause le professeur qui a été la référence, par des formateurs qui, pour certains, n’ont jamais fait l’expérience d’accompagner un pratiquant à partir de la ceinture blanche.

Un bon professeur se juge sur la durée, par la qualité de ses élèves, sa capacité à les motiver, pas simplement à ses prouesses techniques sur le tatami (quand il en est capable). Il ne doit pas céder à la tentation de s’intéresser uniquement aux meilleurs (au contraire) et à ne pas stigmatiser une catégorie par rapport à une autre ; bref, tout mettre en œuvre pour que la motivation reste intacte chez l’ensemble de ses adhérents.

A partir de ce constat, il ne faut pas s’étonner d’une baisse d’enthousiasme se concrétisant par moins d’adhésions. Aux raisons évoquées plus haut en rapport avec la formation des futurs professeurs et au manque de considération que ceux-ci peuvent ressentir, on peut y ajouter de fréquentes refontes des programmes liés à l’enseignements et aux passages de grades, des modifications régulières concernant les règles d’arbitrage (pour les compétiteurs), sans oublier une gestion de l’aspect utilitaire (le ju-jitsu) dans lequel règne une grande confusion, laissant ainsi la part belle à d’autres activités se réclamant de la self-défense.

Si l’on veut des résultats à la hauteur des ambitions, il faut que les acteurs principaux que sont les professeurs s’impliquent totalement, et cela passe par une formation adaptée, un statut revalorisé et une considération méritée.

Ayant mis de la distance depuis bien longtemps avec l’institution évoquée dans ces lignes, je ne suis pas directement concerné, mais simplement désolé !

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Une bombe à retardement

Ces périodes durant lesquelles certains ont la chance d’être en vacances sont propices à la publication de récits emprunts de sagesse et qui donnent à réfléchir. Celui-ci se nomme « Une bombe à retardement », il est issu du recueil « Contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon », dans lequel fourmillent de belles leçons.

« Depuis quelques semaines, un expert de boxe chinoise s’était installé dans un petit village isolé. Il commençait à s’y plaire car la crainte qu’il inspirait aux paysans lui permettait de se comporter en seigneur des lieux. Ce qu’il appréciait par-dessus tout, c’était de voir que personne n’osait lui résister, ni se trouver en travers de son chemin, jusqu’au jour où… un petit vieillard à barbe blanche, ne lui céda pas le passage et continua à marcher droit devant. Fidèle à son image de marque, l’expert essaya de bousculer le vieillard mais son corps poussa dans le vide car le vieil homme avait esquivé le geste. Furieux, le boxeur se jeta sur le vieux pour lui distribuer une série de coups. Dans la mêlée qui s’ensuivit, le vieillard tenta maladroitement de parer les coups et il réussit même à toucher légèrement la poitrine de la brute. Mais, ne faisant visiblement pas le poids, il finit par aller rouler dans la poussière. Satisfait de la correction, le champion laissa là le corps inanimé de ce vieil impertinent qui avait osé lui résister. Dès que la brute se fut éloignée, le petit vieux ouvrit un œil, puis deux, se releva, s’épousseta un peu et quitta le village d’un pas tranquille.

Plus les jours passaient, moins le boxeur se sentait en forme. Son corps s’affaiblissait, sa respiration et sa digestion devenaient difficiles et il avait des maux de tête de plus en plus fréquents.

Le jour arriva où, fiévreux et frissonnant, il du rester au lit. Il n’avait plus la force de bouger, il pouvait à peine parler.

Après avoir longuement réfléchi aux raisons de son état, il ne trouva qu’une explication probable : le léger coup que lui avait porté le vieillard avait certainement atteint un point vital et son effet avait agi à retardement. Comprenant finalement que c’était le vieil homme qui lui avait donné une leçon, il réalisa combien les apparences étaient trompeuses et combien, jusque-là, il avait vécu dans l’illusion de sa force. Pris d’un réel remord, il envoya chercher le vieillard pour lui demander pardon de son inqualifiable conduite et le remercier de lui avoir ouvert les yeux.

Le petit vieux, qui vivait dans un ermitage proche du village, ne tarda pas à arriver. Touché par le repentir sincère du voyou, il décida de le soigner lui-même. Après plusieurs séances de shiatsu (acupuncture digitale) et un traitement de plantes médicinales, le jeune homme fut remis sur pied. Habité d’un véritable besoin de reconnaissance, il supplia humblement le vieil ermite de l’accepter pour élève.

Il resta ainsi dans l’ermitage jusqu’à la mort de son Maître, et quand il redescendait dans le village, sa présence n’inspirait plus la crainte, mais un paisible respect.

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