Un peu de tenue…

kimono-jigoroPar facilité on l’appelle « kimono », bien que ce nom soit plus particulièrement réservé à un vêtement d’intérieur. Peu importe, que ce soit le judogi, le karatégi, le kékogi, et même le ju-jitsugi, il s’agit de la tenue d’entraînement de nos disciplines japonaises et il me semble souhaitable de la conserver. Non pas pour des raisons s’apparentant à un conservatisme psychorigide et encore moins de façon ostentatoire, tout simplement parce qu’il s’agit notre tenue traditionnelle liée à notre histoire. Même si elle a un peu évolué au niveau de sa coupe, de son épaisseur, parfois de sa couleur, il n’empêche que l’on ne peut déroger à la veste au pantalon et à la ceinture.

(En illustration, le fameux kimono d’entraînement de Jigoro Kano)

J’avais déjà évoqué ce dossier, mais devant une certaine tendance qui se voudrait évolutive et libertaire, ou même négligente, je trouve utile d’y revenir.

Tout d’abord l’uniformité de la tenue d’entraînement existe dans la plupart des sports et des activités. Nous n’allons pas à la piscine en judogi et les footballeurs ne s’adonnent pas à leur sport en tenue de ski. Cette uniformité appartient au patrimoine de chaque discipline, elle fait partie de son identité, elle a ses raisons d’être. A sa manière elle permet aussi d’abattre les barrières sociales. C’est également le cas dans les sports de combat, la tenue des boxeurs n’est pas identique à celle des lutteurs ni à celle des judokas. Cela pour insister sur le fait qu’il n’est pas question de remettre en cause les différentes façons de se vêtir, à chacun son identité et ses traditions. A ce titre, je ne vois pas pour quelles raisons nos disciplines qui se réclament de l’appellation « traditionnelle », ne respecteraient pas ces us et coutumes.

Que chaque méthode particulière au sein des disciplines défende sa tenue, rien de plus normal, mais il n’est pas nécessaire de le faire avec des arguments non crédibles d’efficacité, ceux liées à l’identité propre et à la singularité suffisent. La pratique en kimono n’est pas moins efficace que les autres. Si l’objectif est de coller au plus prêt à la réalité il faudra non seulement abandonner le kimono, mais aussi le T-shirt, le pantalon de survêtement (ou short/bermuda) et choisir le jean blouson baskets, ou encore opter pour le costume pardessus et chaussures de ville, même parfois pour le tailleur et les chaussures à talons. On ne trouve aucune de ces tenues dans les salles d’entraînement ni dans les dojos.

Concernant notre fameux kimono, il possède un avantage hygiénique non négligeable dans la mesure où il permet d’absorber des litres de sueur, il limite aussi quelque peu une proximité parfois gênante avec le partenaire et enfin grâce à son ampleur il offre la possibilité de s’entraîner dans de bonnes conditions. Ce qui présente une garantie de progrès et par conséquent d’efficacité.

Ne perdons ni notre identité, ni notre histoire, encore moins nos traditions. Respectons toutes les autres disciplines, mais commençons par respecter la notre !

Site du club ju-jitsu Eric Pariset : www.jujitsuericpariset.com

 

Les trois familles

webkanjiAu printemps dernier, le 19 mai exactement, sur ce même blog, j’avais mis en avant l’importance que représente la maîtrise des liaisons entre les différentes composantes du ju-jitsu. Bien gérer chacune de ces familles est essentiel, les enchaîner avec une parfaite fluidité l’est tout autant.

Aujourd’hui, l’objectif est de revenir sur chacun de ces groupes en les « explorant » un peu plus profondément. Je rappellerais qu’il s’agit de l’atemi-waza (le travail des coups), du nage-waza (le travail des projections) et du katame-waza (le travail de contrôles).

L’atemi-waza regroupe les coups qu’il est possible de donner avec les bras et avec les jambes, (moins glorieux, mais existant quand même, ceux portés avec la tête). Ils sont principalement utilisés debout, mais peuvent l’être également au sol. En ju-jitsu (j’évoque ici l’art martial et non pas la version combat sous forme d’affrontements directs) il existe deux spécificités. D’abord – s’agissant aussi d’une méthode de self-défense – les coups interdits dans les boxes traditionnelles sont étudiés. Ils le sont avec contrôle, heureusement. Ensuite, les atemi ne représentent pas une finalité, à l’inverse des disciplines qui se limitent aux techniques dites « poings-pieds ». Dans notre art, les coups ont pour rôle d’arrêter l’adversaire, de le déséquilibrer favorablement au profit d’une projection, d’un contrôle ou bien des deux. Cela signifie qu’ils doivent être utilisés avec des attitudes (des gardes) compatibles avec les autres composantes du ju-jitsu. Ils peuvent servir, le cas échéant, de « contrôle final », même s’il ne semble pas souhaitable d’abuser de l’image d’un adversaire frappé à terre. L’étude de l’atemi-waza, permet de progresser dans l’art de donner des coups, mais aussi et – même surtout – dans l’art de ne pas en recevoir. Par conséquent la maitrise de l’esquive ne devra pas être négligée. Si l’atemi-waza est pratiqué avec contrôle, et donc avec un bon état d’esprit dans lequel le contrôle sera la priorité, il permettra – en plus d’acquérir de l’efficacité dans le travail à distance -, de parfaire sa souplesse, sa tonicité et sa vélocité, sans oublier sa précision, essentielle dans bien des domaines, mais peut-être encore plus particulièrement dans celui-ci.

Le nage-waza, par définition se pratique debout, puisque son but est de projeter, de faire chuter, de mettre à terre quelqu’un qui est…debout. C’est le domaine le plus vaste en nombre de techniques. Régit par des principes dans lesquels la technique prime, il demandera beaucoup de patience et participera ainsi activement à une bonne formation mentale. Ce qui n’est jamais inutile. Sur le plan de l’efficacité, le nage-waza est redoutable dans le domaine du corps à corps. Soit après un déséquilibre obtenu par un atemi, soit sur une attaque directe, opportunité au cours de laquelle la force de l’adversaire sera utilisée (le principe de base du ju-jitsu dont la traduction signifie « technique de la souplesse » dans le sens de l’adaptabilité physique et mental), mais aussi en cas d’attaque surprise telle qu’une saisie par l’arrière. Sur le plan corporel ce secteur développera de multiples qualités, dont une bonne coordination entre les membres supérieurs et les membres inférieurs.

Enfin, le katame-waza. Il s’agit là aussi d’un domaine important et pour plusieurs raisons. D’abord, il est très souvent la finalité d’une défense, ensuite parce qu’il donne la possibilité de maîtriser une personne sans forcément mettre ses jours en danger (ce qui est à prendre en considération sur le plan de la légitime défense). Dans ce groupe, on y trouve trois « sous-groupes » : les clefs, les étranglements et les immobilisations. Lorsque l’on évoque les contrôles on pense assez naturellement au travail au sol (le ne-waza), ce qui est le cas en judo, mais dans le ju-jitsu bon nombre de clefs et d’étranglement s’appliquent également debout. Leur assimilation nécessitera aussi d’être armé de patience afin de saisir toutes les subtilités qui existent dans certaines clefs ; celles-ci demandant beaucoup de précision. C’est un secteur plus technique que physique, ceci étant les pratiquants qui connaissent les randori au sol dont le but est de faire abandonner son partenaire à l’aide de ces contrôles, savent de quoi il est question en matière de débauche d’énergie !

Lorsque vous avez assimilé ces trois groupes et que vous êtes en mesure de les enchaîner avec une parfaite fluidité, sans temps morts entre chaque secteur, vous êtes un parfait ju-jitsuka.

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Gilbert Gruss

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Je ne connaissais pas personnellement Gilbert Gruss. Mais depuis longtemps sa réputation dépassait largement le monde du Karaté. C’est avec tristesse que j’ai appris sa disparation la semaine dernière. Sans doute l’un des derniers Samouraïs, le monde des budos est en deuil.

Il avait commencé la pratique du Karaté dans les années mille neuf cent soixante à une époque où « l’art de la main vide » arrivait dans notre pays et provoquait une grande curiosité : « Quelle était donc cette discipline qui vient rivaliser avec le Judo ? » C’était l’époque où la question la plus posée était la suivante : « Du judo et du karaté, quel est le plus efficace ? » Ensuite l’intérêt qui lui a été porté n’a jamais faibli.

Ceinture Noire 9ème dan, Gilbert Gruss a participé très largement au développement de sa discipline, d’abord en tant que compétiteur, et de belle manière, puisqu’il a été champion d’Europe en individuel et champion du Monde par équipe. Equipe dans laquelle se trouvait un certain Dominique Valéra. C’était en 1972 à Tokyo. Ensuite, il consacra le reste de sa carrière à la divulgation de son art en défendant très fermement ses convictions personnelles. .

Bien que n’ayant pas eu la chance de le rencontrer directement et même lors de mon « passage » à la FEKAMT (Fédération européenne de karaté et d’arts martiaux traditionnels) , dont il était le directeur technique, en plus des compétences techniques, je retiendrai la passion qu’il avait mit au service de son art dans sa vie de compétiteur, de professeur, mais aussi pour son ouverture en direction des autres arts et tout simplement sa conception personnelle de « l’art martial ». Mes plus sincères condoléances à sa famille, ses proches, mais aussi à la grande famille du karaté.

 

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Les 16 enchaînements, suite et fin.

yoko-gerRetour à un article très technique avec la suite – et la fin – de nos 16 enchaînements. Pour rappel il s’agit de proposer une alternative à de possibles réactions du partenaire sur les défenses appartenant à nos 16 techniques traditionnelles. Il y a quinze jours nous avions abordé les six premières. Vous pouvez les retrouver sur ce blog à la date du 8 septembre.

Aujourd’hui nous poursuivons et concluons.

7ème technique : A partir de la position « sur le dos » Tori tente de renverser Uke vers l’arrière. Sur la résistance de celui-ci Tori saisit le bout de la manche gauche avec sa main droite et place sa main gauche sur le devant de la cheville droite d’Uke. D’une action coordonnée de la main droite qui tire vers le bas et l’intérieur, de la main gauche qui pousse sur le devant de la cheville et du pied droit qui agit à la façon d’un tomoe-nage, Tori fait basculer Uke par-dessus lui.

8ème technique : Sur l’avancée d’Uke, Tori tente de l’arrêter avec un yoko-geri à droite en direction de la poitrine. Uke pare le coup avec son avant-bras gauche au niveau du mollet, vers l’intérieur. Tori reprend son équilibre en posant son pied droit. Il enchaîne immédiatement avec ushiro-geri-keage et uchi-mata.

9ème technique : Sur la saisie de cheveux, Uke résiste pour ne pas subir la tentative de torsion de poignet que Tori tente de lui faire subir. Sans relâcher la saisie de la main d’Uke, Tori glisse sa jambe gauche devant lui pour se mettre à plat dos et appliquer ainsi une forme de sutemi. Une fois sur le dos, en roulant sur sa droite il administre une redoutable torsion de poignet à Uke qui n’a d’autre issue que celle de se dégager en chute avant.

10ème technique : Sur la saisie de coté Tori tente d’appliquer o-goshi (ou uki-goshi), Uke esquive sur sa droite. Tori revient au contact d’Uke et, cette fois, lui applique Harai-goshi, empêchant ainsi toute récidive d’esquive.

11ème technique : Sur l’attaque en coup de poing circulaire Tori applique une esquive rotative et avant qu’il puisse conclure avec ko-soto-gari, Uke réagit et enchaîne avec ura-uchi à gauche. Tori bloque le coup avec ses avant-bras, porte ura-mawashi-geri à droite au niveau de l’abdomen et conclut avec hara-gatame sur le bras gauche d’Uke.

12ème technique : Tori a été déséquilibré et se retrouve sur le dos face à Uke. Il tente de le faire passer par-dessus lui avec un renversement à l’aide de ses jambes. Sur la résistance de son adversaire il change de direction et, toujours en se servant de ses jambes, il repousse Uke et le renverse sur l’arrière. En gardant le contact il peut enchaîner pour se retrouver « à cheval ».

13ème technique : Uke est placé derrière Tori qui tente de l’arrêter avec ushiro-geri à droite. Uke esquive le coup de pied en se déplaçant sur sa droite et se positionne devant Tori (pour lui saisir la tête avec son bras gauche, par exemple). Immédiatement Tori vient au contact avec le dos d’Uke pour lui appliquer ushiro-goshi.

14ème technique : Sur la menace de couteau Tori porte mikazuki-géri et tente kote-gaeshi. Uke résiste, sur cette réaction Tori pivote sur sa droite et sans relâcher le poignet d’Uke il lui administre waki-gatame à gauche.

15ème technique : Sur le coup de bâton en diagonal, Tori esquive en passant sous le bras armé, il porte yoko-geri à droite et tente de conclure avec o-soto-gari. Pour ne pas subir la projection Uke lève sa jambe, Tori va chercher l’autre jambe pour lui faucher au niveau de la cuisse.

16ème : Uke menace Tori avec son revolver. Simultanément Tori esquive en reculant le pied droit, pare vers le bas avec sa main gauche et porte uchi-oroshi à droite au visage. Il tente de conclure avec la torsion de poignet sur l’arrière (variante de kote-gaeshi. Dès qu’il sent une résistance il peut – à la façon de la défense sur couteau – tout de suite réagir sur sa droite et appliquer moune-gatame qui est une sorte de variante de waki-gatame se réalisant à l’aide de la poitrine sur l’articulation du coude.

Comme je l’avais indiqué lors du précédent billet consacré à cet enchaînement (qui s’adresse plus spécialement aux initiés), pour le moment il n’existe pas de support technique. Cela rend plus délicat son étude, mais c’est aussi une façon de solliciter la réflexion et de réclamer un petit effort d’analyse. Je suis à la disposition de ceux qui souhaiteraient une explication complémentaire. Et puis, peut-être aurons-nous le plaisir de nous retrouver cette saison sur des tatamis de façon à disséquer cet enchaînement qui enrichit (encore) un peu plus le patrimoine technique – déjà très vaste – de notre ju-jitsu.

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Le kumi-kata

KUMIKATA2Cet article fait suite à celui posté la semaine dernière sur ce blog ainsi qu’aux réactions engendrées.

A l’occasion des épreuves de judo des Jeux Olympiques de Rio, Il a beaucoup été question du kumi-kata et notamment durant la finale de Teddy Riner. Finale à l’issue de laquelle notre héros national est entré dans la légende et dans le club très fermé des judokas doubles médaillés olympiques.

Ce que l’on nomme kumi-kata, est tout simplement la saisie du judogi. La plupart des techniques du judo debout se réalisant à partir de ce que l’on appelle aussi « la garde » (Bien que certaines projections puissent se pratiquer « à la reprise ».) Il y a différentes façons de prendre ce kumi-kata ; chaque combattant ayant ses préférences, celles-ci correspondent aux techniques favorites et à son propre « système d’attaques ». Cela signifie qu’en judo on a tout intérêt à assurer sa prise de judogi favorite et à l’inverse d’empêcher l’adversaire d’imposer la sienne. Mais les règles d’arbitrage en vigueur sanctionnent certaines actions qui tendent à faire lâcher la garde de son adversaire, on comprend aisément l’importance que revêt cette première phase.

C’est ainsi que souvent, lors des compétitions et avant toute projection, on assiste à de belles empoignades, celle-ci ayant pour but d’imposer sa saisie favorite. Pour les non-initiés cela prend certaines fois des allures de « bagarres de chiffonniers ».

L’importance donnée à cette phase du combat induit quelques effets néfastes. Le premier consiste à ne plus utiliser ce que l’on appelle « l’attaque à la reprise » (évoquée plus haut.) En effet, la meilleure façon d’empêcher d’être verrouillé serait – aussi – d’attaquer immédiatement. Il existe des techniques adaptées à cette situation, même si, encore par la faute de nouvelles règles, l’arsenal en la matière se réduit ; interdiction du morote-gari et du kata-guruma, par exemple. Ensuite cela favorise inévitablement les plus forts physiquement : essayez donc d’imposer votre kumi-kata à Teddy Riner ! Quid du principe d’utilisation de la force de l’adversaire ? Et enfin comme nous avons pu le constater, la stratégie qui consiste à faire obtenir des pénalités à son adversaire en l’empêchant de prendre sa garde, – donc d’attaquer – est bien souvent abusive ! De tels comportements nous éloignent de l’esprit du judo qui doit être en priorité basé sur l’attaque. De plus, soit dit en passant, l’aspect self-défense, devient inexistant si l’on se doit d’imposer son kumi-kata avant de projeter son agresseur.

Les règles d’arbitrage dont il est question ci-dessus en vigueur de puis plusieurs saisons  et qui ont déjà fait couler beaucoup d’encre (et de sueur) avaient pour objectif de favoriser l’initiative, il n’est pas certain que celui-ci soit atteint. C’est pour cette raison qu’il ne faut pas trop en vouloir aux combattants, ils tentent de s’adapter. Les enjeux sont importants, ils récompensent, entre autres, des années d’efforts. Malheureusement, il n’y a pas que dans ce domaine où les athlètes sont victimes de systèmes qui les dépassent, mais ceci est une autre histoire…

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Un « o-goshi à la bordelaise ».

BJJ%20O%20Goshi« Un o-goshi à la bordelaise » (et mes rapports avec le judo).

Pour le judo, les Jeux Olympiques sont terminés et le bilan est finalement bon, bien davantage que l’on pouvait le redouter à mi-parcours. Teddy Riner n’a pas failli, il faut reconnaitre qu’il possède une marge de sécurité par rapport à ses adversaires, et une belle surprise nous a été faite grâce à Emilie Andéol. N’oublions pas les autres médaillés. Les judokas français nous ont rarement déçus dans les grandes occasions.

J’ai pensé que c’est le bon moment pour évoquer mes rapports avec le judo. En effet, certains sont étonnés que bien que ju-jitsuka (et à l’extérieur de la FFJDA), je me passionne pour cette discipline (le judo), notamment au travers de partages réguliers – sur le célèbre réseau social – de belles phases techniques réalisées en compétition et que – par exemple – j’évoque les J.O. Autre étonnement lorsque l’on constate que je pratique et enseigne un ju-jitsu que certains appellent « très judo » et cela en étant également en dehors de la fédération…de judo ! La vie n’est pas avare en paradoxe.

Avec un père judoka au palmarès et aux états de services conséquents, il ne pouvait pas vraiment en être autrement. C’est donc par le judo que j’ai commencé ma pratique des arts martiaux à l’âge de cinq ans. Par la suite je me suis spécialisé en ju-jitsu, tout en ayant jamais cessé d’être judoka. D’abord par plaisir. Ensuite pour l’intérêt que représente la finesse de certaines techniques. Mais aussi grâce à la stratégie qu’il faut mettre en place lors des combats ou des randoris (exercices d’entraînement). Enfin parce que dans ce « sport de combat » il n’y a aucune atteinte à l’intégrité physique, la violence en est bannie. Cela n’empêche pas, loin de là, un véritable engagement physique.

Ju-jitsu et judo sont de la même famille, l’un a donné naissance à l’autre. Ils ne sont pas adversaires, ils sont complémentaires. Ils ne se nuisent pas l’un l’autre, bien au contraire. Certes, Il existe des différences dont la principale réside dans le fait que le premier est un art martial et le second un sport de combat. Au début des années 1970, lorsque la méthode « atémi-ju-jitsu » a été mise au point, c’était précisément l’objectif que de proposer une « voie » différente de l’aspect compétition en offrant une forme de retour aux sources et à l’aspect self-défense. Cette méthode était « calquée » sur la progression du judo, afin de faciliter la tâche des enseignants. Les élèves pouvant pratiquer l’un ou l’autre des deux aspects, ou encore en changer sans difficulté. Cela permettait de conserver « tout le monde à la maison ». Ce n’était pas très compliqué à comprendre, mais malheureusement certains ont vu dans le ju-jitsu une concurrence au judo, ce qui était stupide dans la mesure où les objectifs n’étaient pas les mêmes. Par contre, développer l’aspect compétition en ju-jitsu a été une double erreur . Premièrement cela dénature l’art martial, celui-ci devant rester à but non-compétitif et deuxièmement, pour le coup, cela a créé une vraie concurrence avec les compétitions de judo !

Pratiquer les deux est souhaitable, pas indispensable, mais inévitablement un bon enseignement du ju-jitsu permettra de découvrir et de se perfectionner dans toutes les projections qui composent le patrimoine du judo.

En restant dans ce domaine et en rapport avec le titre de cet article, dernièrement on a beaucoup parlé de « l‘o-goshi de la jeune femme bordelaise ». En effet, celle-ci a réussi à projeter un agresseur avec cette technique qui signifie grande bascule de hanche. Preuve en est que les projections ont une efficacité redoutable, cela accrédite le billet publié sur ce blog il y a une quinzaine de jour. Qui pouvait d’ailleurs en douter ? J’émettrai deux réserves concernant les commentaires qui ont fait suite à ce fait divers. D’abord, certains ont critiqué l’agressée qui n’aurait pas été capable de se maîtriser en projetant son agresseur(?!). Deuxièmement, la jeune femme déclare que de ce fait, elle va se remettre à la pratique du judo ou plutôt d’une autre discipline qui revendique la simplicité dans l’apprentissage des techniques de survie, mais dans laquelle… o-goshi n’existe malheureusement pas. Dommage !

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Le secret de l’efficacité

 

muso_attackVacances pour certains, reprise pour d’autres, de toutes les façons en ce moment l’activité est réduite (sauf à Rio) et l’ambiance reste estivale. Le corps se repose un peu, mais l’esprit peut continuer à fonctionner et la petite histoire que je vous propose y contribuera. Petite histoire toujours extraite du livre « contes et récits des arts martiaux ». Bonne lecture.

Le secret de l’efficacité

Devenu un expert et un professeur renommé dans l’Art du sabre, Ito Ittosai était cependant loin d’être satisfait de son niveau. Malgré ses efforts il avait conscience que depuis quelques temps il ne parvenait plus à progresser.

Dans son désespoir, il décida de suivre l’exemple de Bouddha. Les sutras rapportent en effet que celui-ci s’était assis sous un figuier pour méditer avec la résolution de ne plus bouger tant qu’il n’aurait pas reçu la compréhension ultime de l’existence de l’univers. Déterminé à mourir sur place plutôt que de renoncer, le Bouddha réalisa son vœu : il s’éveilla à la suprême Vérité. Ito Ittosai se rendit donc dans un temple afin de découvrir le secret de l’Art du sabre. Il consacra sept jours et sept nuits à la méditation.

A l’aube du huitième jour, épuisé et découragé de ne pas en savoir plus, il se résigna à rentrer chez lui, abandonnant tout espoir de percer le fameux secret.

Après être sorti du temple, il s’engagea dans une allée boisée. A peine avait-il fait quelques pas que, soudain, il sentit une présence menaçante derrière lui. Sans réfléchir il se retourna en dégainant son arme.

C’est alors qu’il se rendit compte que son geste spontané venait de lui sauver la vie : un bandit gisait à ses pieds, sabre en mains.    

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Teddy Riner, J.O. et projections.

jo-2016-teddy-riner-porte-drapeau-de-la-france-rioNotre pays et la délégation française aux jeux olympiques de Rio se sont dotés d’un superbe porte-drapeau en la personne de Teddy Riner. C’est une consécration pour l’athlète mais aussi pour le judo. A noter qu’il existe deux précédents pour la discipline avec Angelo Parisi en 1984 à Los Angeles et David Douillet en 2000 à Sydney.

Cette information m’a donné l’envie d’évoquer un groupe de techniques que j’apprécie particulièrement et qui est commun au judo et au ju-jitsu, je veux parler des projections, le nage-waza. Le ju-jitsu étant à l’origine du judo les techniques de cette « famille » sont absolument les mêmes sur la forme, mais avec une finalité différente. Identiques dans la forme et avec le même but, à savoir : « faire chuter l’autre ». L’adversaire en compétition de judo, le partenaire à l’entraînement (pour les deux disciplines) et un éventuel agresseur en cas de fâcheuse rencontre. Certes, dans ce domaine, quelques adaptations propres à la compétition ne peuvent être appliquées  A l’inverse, elles ne sont pas semblables dans l’esprit, dans la mesure où d’un coté nous sommes en présence d’un sport et de l’autre d’un art martial à but non-compétitif, tout du moins pour la forme de ju-jitsu que je pratique et enseigne.

Les projections demandent sans doute beaucoup plus de travail que les autres secteurs, peut-être même quelques prédispositions naturelles. Il ne faut pas être avare d’heures d’apprentissage, de répétitions, de transpiration, mais aussi parfois d’abnégation. Un peu de talent ne gâchera rien. Le tout devant être entouré par un bon enseignement. Mais elles procurent aussi énormément de satisfactions. Par exemple, chercher la finesse d’une technique en supplément de ses principes de bases et la maîtriser ! Cela relève de la quête du graal.

Certes, avec les catégories de poids les projections ont perdu un peu de leur caractère exceptionnel et même magique, par exemple lorsque dans les épreuves « toutes catégories » un combattant beaucoup plus petit projetait un adversaire beaucoup plus grand et beaucoup plus fort physiquement avec une superbe technique d’épaule. Il n’empêche que lorsque l’on assiste à une compétition certains « pions » nous offrent un spectacle dont on ne peut se lasser. D’abord, il y a de l’esthétique. Ensuite, lorsque l’on est pratiquant on mesure la somme de travail et de talent qu’il faut rassembler pour réaliser ce qui peut paraître assez naturel aux yeux d’un néophyte.

Côté entraînement et à l’occasion de la pratique du randori, faire chuter la personne qui est devant nous procure une très grande satisfaction, sans intention de l’humilier et encore moins de la blesser. S’y rencontrent alors la notion d’efficacité, avec celle d’une forme de jeux par la grâce d’un affrontement totalement dépourvu de violence et sans atteinte à l’intégrité physique (ces exercices se pratiquant sur un tatami et avec une personne maîtrisant parfaitement l’art de la chute.)

Quant aux projections et leur rapport avec la self-défense, il est indéniable qu’elles ont une efficacité phénoménale (imaginons un o-soto-gari, sans tatami et avec la complicité d’un rebord de trottoir.) Certes, comme expliqué plus haut, elles demandent davantage de travail, mais elles sont indispensables dans certaines situations, contre des saisies par exemple. Et puis, du travail et des répétitions il en faut dans tous les domaines et bien plus encore dans celui de l’auto-défense. « Apprenez à vous défendre en dix leçons » cela n’existe pas ! Une méthode dite simple et qui va à l’essentiel, pourquoi pas, mais on ne peut échapper d’une part à l’apprentissage de défenses sur toutes les formes d’attaques et d’autre part (au risque de me répéter) au fait que l’efficacité passe par l’apprentissage mais aussi et surtout par d’inlassables répétions.

A l’inverse, si on ne maitrise pas correctement « l’art de la projection » un complexe s’installera et entraînera une forme de rejet ainsi que des critiques injustes à son égard (il est plus facile d’incriminer l’outil que de se remettre en question.) Encore une fois, la solution à ce problème s’appelle le travail. « On ne peut rien contre l’entraînement ». Cette citation, maintes fois utilisée sur ce blog est un nouveau petit clin d’œil à un ancien élève qui se reconnaitra, il en est un bel exemple !!! N’oublions pas non plus la catégorie composée de ceux qui aiment faire chuter, mais qui n’aiment pas chuter, que ce soit en démonstration, à l’entraînement et bien évidemment en compétition. Il s’agit d’un sentiment assez naturel, mais, sans Uke (celui qui chute) pas de Tori (celui qui fait chuter.)

Pour conclure et en lien avec le début de cet article, je pense que nous souhaitons tous, judoka ou pas, amoureux des projections ou non, un nouveau sacre olympique à notre merveilleux champion pourvu d’une personnalité aussi forte que son o-soto-gari !

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Laisser mûrir le coq…

tatouage-coq-francais-tattooAu cœur d’un été qui ne nous laisse pas vraiment de répit, un nouveau petit récit toujours extrait du livre que j’affectionne tout particulièrement : « Contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon ». A méditer, selon l’irremplaçable formule !

Le roi de Tcheou avait confié à Chi Hsing Tseu le dressage d’un coq de combat prometteur, qui paraissait doué et combatif. Le roi était donc en droit de s’attendre à un dressage rapide… et il ne comprenait vraiment pas que dix jours après le début de l’entraînement il n’ait toujours pas eu de nouvelles des progrès du volatile. Il décida d’aller en personne trouver Chi pour lui demander si le coq était prêt.

– « Oh non, sire, il est loin d’être suffisamment mûr. Il est encore fier et coléreux », répondit Chi.

De nouveau dix jours passèrent. Le roi, impatient, se renseigna auprès de Chi qui lui déclara :

– « Le coq a fait des progrès, majesté, mais il n’est pas encore prêt car il réagit dès qu’il sent la présence d’un autre coq. »

Dix jours plus tard, le roi, irrité d’avoir déjà tant attendu, vint chercher le coq pour le faire combattre. Chi s’interposa et expliqua :

– « Pas maintenant, c’est beaucoup trop tôt ! Votre coq n’a pas complètement perdu tout désir de combat et sa fougue est toujours prête à se manifester. »

Le roi ne comprenait pas très bien ce que radotait ce vieux Chi. La vitalité et la fougue de l’animal n’étaient-elles pas la garantie de son efficacité ?! Enfin, comme Chi Hsing Tseu était le dresseur le plus réputé du royaume, il lui fit confiance malgré tout et attendit.

Dix jours s’écoulèrent. La patience du souverain était à bout. Cette fois, le roi était décidé à mettre fin au dressage. Il fit venir Chi et le lui annonça sur un ton qui trahissait sa mauvaise humeur. Chi prit la parole en souriant pour dire :

– « De toute façon, le coq est presque mûr. En effet, quand il entend chanter d’autres coqs il ne réagit même plus, il demeure indifférent aux provocations, immobile comme s’il était de bois. Ses qualités sont maintenant solidement ancrées en lui et sa force intérieure s’est considérablement développée. »

Effectivement, quand le roi voulut le faire combattre, les autres coqs n’étaient visiblement pas de taille à lutter avec lui. D’ailleurs ils ne s’y risquaient même pas car ils s’enfuyaient dès qu’ils l’apercevaient.

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A l’ombre des pins de Sainte-Maxime

JOA_6190 bisA l’ombre des pins, entourés d’oliviers, en compagnie des cigales et des écureuils avec d’un coté les premières collines du Massif des Maures se découpant dans un ciel à l’azur parfait, de l’autre un petit « aperçu mer ». Voilà décrit en quelques mots le cadre idyllique dans lequel nous avons évolué pour la partie extérieure de nos séances d’entraînement lors du stage de Sainte-Maxime. Le matin à 9 heures et à l’ombre des pins parasols, nous ne pouvions souffrir de la chaleur, il en était de même pour la suite des cours dans le très beau « dojo des Bosquettes » grâce à une clim salvatrice.

Une superbe ambiance entourait ce stage grâce à des stagiaires dotés d’une mentalité irréprochable d’une belle volonté et d’une grande gentillesse.

Au programme, les « 16 atémis » et leurs suites, « les 16 techniques », le nouvel enchaînement consacré aux atemi et aux katame (coups et contrôles), mais aussi beaucoup de techniques (de base et avancées), un travail sur les trois composantes du ju-jitsu, la construction d’enchaînements au travers desquels chacun pouvait faire état de ses préférences, mais aussi des randoris qui ont permis d’affûter les automatismes et de parfaire sa condition physique tout en prenant énormément de plaisir au travers d’exercices d’affrontement très codifiés qui savent préserver l’intégrité physique.

C’est une belle semaine qui s’achève, même si la fréquentation n’a pas été celle que l’on aurait pu espérer quantitativement parlant, mais il faut avouer que rien n’a été facile ces derniers temps. Il y a bien évidemment le climat particulièrement atroce dans lequel notre pays est plongé depuis des mois, ponctué par la tragédie qui s’est déroulée quelques jours avant notre rendez-vous dans la ville voisine de Nice. Mais il existe aussi des raisons personnelles sur lesquelles il n’est pas utile de revenir. Enfin, il s’agissait de renouer avec une manifestation qui n’était plus proposée depuis quelques années. Un nouveau départ est une formidable motivation.

Et puis, il y a ce qui est important et essentiel : la satisfaction affichée des stagiaires, les progrès qu’ils ont réalisé et à titre personnel la sensation d’avoir « bien fait son métier »

Je n’oublie pas (comment serait-ce possible ?) la belle surprise qui m’a été offerte par les stagiaires le jeudi midi, jour de mon anniversaire. Des moments privilégiés qui font chaud au cœur et qui rendent la vie plus douce. Merci à tous !

Le stage devrait bien se terminer ce midi autour de l’aïoli provençale !

La seconde période du stage de Sainte-Maxime commencera le 7 août pour se terminer le 12. Si pour certains, rien n’est encore prévu dans leur agenda…

Site ju-jitsu Eric Pariset : www.jujitsuericpariset.com