Nage-waza, techniques de projections

Après avoir évoqué l’atemi-waza la semaine dernière, place au nage-waza (techniques de projections).

Les projections sont un domaine majeur, que ce soit en judo (qui pourrait l’ignorer), mais aussi en ju-jitsu self défense (qui pourrait remettre en cause leur efficacité, mis à part ceux qui ne les maîtrisent pas).

Elles sont  nombreuses, elles permettent de répondre à beaucoup de situations et tous les gabarits peuvent s’y exprimer ; il y en a pour les grands et pour les petits. Elles offrent une multitude de combinaisons, d’enchaînements, mais aussi un esthétisme incontestable pour beaucoup d’entre elles. A l’occasion de mes démonstrations les projections occupaient une place importante ; elles ont largement contribué à l’aspect spectaculaire de ces prestations. Enfin nous trouvons beaucoup de plaisir dans leur réalisation.

L’efficacité, l’esthétisme et le plaisir éprouvé lors de leur pratique sont les trois raisons qui me font aimer ce domaine qu’est le nage-waza.

Les projections peuvent être tout à la fois efficaces et esthétiques. Leur maîtrise parfaite demande beaucoup de travail, de persévérance et de rigueur, mais quelle merveilleuse récompense que celle de réaliser un bel uchi-mata, par exemple. Coté efficacité, elle est incontestable, à moins de n’avoir jamais chuté et par conséquent ne pas pouvoir imaginer les conséquences d’une « réception » sur un sol dur.

Toujours concernant l’efficacité, le principal intérêt des projections, en plus du corps à corps où elles sont indispensables, réside dans le fait qu’elles ont été conçues pour être appliquées en utilisant des principes et des mécanismes qui ne demandent (à l’origine) que peu ou pas de force, répondant ainsi à une des maximes de Jigoro Kano « minimum d’effort et maximum d’efficacité ». Cela permet aux plus petits de se débarrasser des plus grands. Pour cela il faut juste être en capacité d’exécuter le bon geste au bon moment, cela s’acquiert à force de répétitions. Le premier de ces principes consiste à utiliser la force de l’adversaire. Il y en a d’autres comme celui de l’addition des forces, de bascule au-dessus du centre de gravité, de supprimer des points d’appui, etc.

L’utilisation des projections sera différente selon que l’on se situe dans le domaine du ju-jitsu self défense ou en opposition lors de randori ou compétition de judo.

En matière d’auto-défense l’application se fera la plupart du temps directement. Exemple : l’adversaire vous pousse, vous appliquez hiza-guruma. Pour les néophytes, il s’agit d’une projection qui consiste à « offrir » le vide devant celui qui porte l’attaque, en ajoutant à sa poussée une traction dans la même direction, tout en lui « barrant » le bas de son corps au niveau des jambes (une sorte de « croche patte amélioré »). Toujours en self défense, elles s’enchaînent parfaitement après un coup (atemi). On trouve beaucoup de parallèles entre les coups et les projections au niveau de la « forme de corps », cela ajoute à leur combinaison.

Dans le randori et à fortiori en compétition de judo, les deux protagonistes maîtrisant d’une part l’art des projections et d’autre part s’attendant à tout moment à devoir faire face à une attaque de ce type, la concrétisation se fera avec les notions d’enchaînements, de confusions, de contre prises, etc. Pour maîtriser parfaitement ce domaine un jujitsuka ne devra pas négliger l’ensemble des méthodes d’entraînement qui permettent d’envisager des réactions de la part du partenaire.

Enfin, concernant l’aspect ludique (à l’entraînement évidemment) il est bien réel, à condition qu’il soit partager avec un partenaire qui « parle la même langue ». C’est-à-dire qu’il soit dans le même état d’esprit axé sur l’initiative, la construction d’enchaînement et non pas dans l’opposition systématique.

Justement, lors des randoris – une des principales méthodes d’entraînement de ce secteur – on s’attachera à favoriser un travail tout en souplesse, en déplacement, axé sur l’initiative davantage que sur la défensive. Le but étant de faire tomber l’autre, plutôt que de ne pas tomber. Les contre prises seront davantage envisagées en sen-o-sen (l’attaque dans l’attaque). Pour cela on utilisera la maîtrise technique, la vitesse, les fautes du partenaire, celles qui sont directes ou celles que l’on a provoquées à l’aide de feintes et de confusions. C’est une sorte de jeu dans lequel on trouve beaucoup de plaisir, de satisfaction, à la condition de ne pas être celui qui chute tout le temps ! Cela doit se concevoir sans aucune intention d’humilier le partenaire (encore moins de l’écraser) mais simplement de progresser.

Le nage-waza est aussi le secteur qui comporte le plus de techniques et par conséquent d’enchaînements et de combinaisons possibles.

C’est donc un domaine efficace, spectaculaire et enthousiasmant. Sans oublier le développement physique qu’il ne manquera pas d’apporter et l’épanouissement du à l’expression corporelle. Cependant, il faut répéter qu’il s’agit d’un secteur qui demande beaucoup de travail. Un travail largement récompensé.

Ippon-seoi-nage, sode-tsuri-komi-goshi, ko-uchi-gari et yoko-tomoe-nage sont les projections que j’affectionne tout particulièrement. Les initiés reconnaîtront ces grandes techniques.

Enfin, il aurait inévitablement manqué quelque chose à mes démonstrations si les projections  n’existaient pas !

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Atemi-waza : technique des coups

Aujourd’hui retour sur un article technique avec l’atemi-waza (la technique des coups). Il s’agit de  l’une des trois composantes du ju-jitsu. Pour rappel, les deux autres sont le nage-waza (la technique des projections) et le katame-waza (la technique des contrôles).

En ju-jitsu, l’atemi-waza possède la particularité de ne pas être (en principe) une finalité, mais un moyen d’y parvenir ; un « coup porté » offre un déséquilibre favorisant l’enchaînement avec une projection ou un contrôle, ou encore les deux.

Logiquement il compose la première partie d’une défense, puisqu’il s’utilise à distance. Un « enchaînement type », se déroulera de la façon suivante : coup, projection et contrôle. Mais ce n’est pas une règle absolue.

L’étude de l’atemi-waza est importante pour trois raisons essentielles.

D’abord pour son efficacité dans le travail à distance. Il est souhaitable d’avoir une bonne maîtrise dans ce domaine aussi bien pour se défendre que pour s’en défendre. Si mon partenaire ne maîtrise pas bien les coups, j’ai peu de chance d’apprendre à me défendre contre ceux-ci. On doit être capable de faire face aussi bien à des coups « sommaires » qu’à des coups « techniques ».

Ensuite, sa pratique est intéressante sur le plan physique, elle permet de travailler la souplesse, la vitesse, et dans les randoris (les exercices d’opposition codifiés) de parfaire sa condition physique. Sans oublier l’aspect ludique que l’on trouvera dans ces affrontements, pour peu qu’ils soient pratiqués avec un parfait état d’esprit.

Enfin, cette pratique procurera ce que l’on appelle le « sens du combat » : le coup d’œil qui favorise les automatismes  d’attaques et de défenses. Ce sens du combat qui peut se transposer d’une forme de science à une autre. Pour être précis, quelqu’un qui a des compétences dans le travail à distance, a de fortes chances d’en posséder aussi dans le corps à corps : savoir saisir le bon moment, l’opportunité.

On pourrait ajouter une quatrième raison de ne pas négliger l’atemi-waza avec l’aspect « expression corporel », grâce à l’esthétisme de certaines techniques. Je ne résiste pas à l’envie de proposer quelques mots du livre « Les chaussons de la révolution ». Certes il s’agit de Boxe Française que l’on appelle aussi la Savate, mais ces mots peuvent s’appliquer à l’ensemble des arts du combat. « Toute bonne technique est belle et gracieuse ; elle est une figure dessinée dans l’espace où efficacité et beauté ne font qu’un. » Marc-Olivier Louveau

Le livre dont la couverture illustre cet article contient différents chapitres qui traitent des méthodes d’entraînement spécifiques à cette composante, mais aussi un enchaînement appelé « les 16 atemis ». Cette « suite » propose 16 défenses sur des coups portés  à l’aide des bras et des jambes, avec des ripostes uniquement en atemi. Une des particularités de cette « sorte de kata » se trouve dans la compatibilité des techniques avec les autres composantes du ju-jitsu. Chaque défense doit pouvoir s’enchaîner avec une projection et/ou un contrôle.

Malheureusement ce livre qui date de 1985 est épuisé, mais sa réédition est toujours envisagée. (En attendant il est possible de faire quelques copies, renseignements par M.P.)

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Soulac 2024 : une semaine « vacances et ju-jitsu » ?

Cette semaine l’article est consacré à l’éventualité de reconduire l’été prochain le stage de Soulac-sur-Mer. Cela dépendra de l’écho obtenu par cette annonce. N’hésitez pas à vous manifester dès que possible.

Quelques mots sur ce rendez-vous.

En 2022, j’ai renoué avec une tradition, celle du stage estival  à Soulac-sur-Mer. De 1986 à 2010, c’est-à-dire  durant vingt-cinq ans, la station balnéaire située au Nord de la Gironde a accueilli des jujitsukas venus de France et d’Europe pour associer ju-jitsu et vacances le temps d’une semaine.

En 2010 différentes raisons m’avaient  conduit à mettre « sur pause » cette belle habitude. Mais en 2022, nous avons repris le chemin de la Pointe de Grave pour le plus grand bonheur des participants. Il en a été de même l’été dernier.

Avant de décider la reconduction de ce rendez-vous l’été prochain, j’ai préféré faire un petit sondage en interrogeant tous ceux qui ont marqué ces derniers temps leur intérêt pour le ju-jitsu que j’enseigne.

Donc, si une semaine sur les bords de l’Atlantique vous tente (du 11 au 16 août 2024), que ce soit pour vivre une première expérience, qui ne vous décevra pas, ou pour récidiver, merci de me le faire savoir dès que possible, disons au plus tard au mois de janvier. Mail, texto, message privé, etc.

Le stage de Soulac-sur-Mer, c’est une semaine durant laquelle ju-jitsu et vacances se marient à merveille. Trois heures de pratique le matin – une petite heure en extérieur et le reste dans le magnifique dojo de la ville – et les après-midi intégralement consacrés aux vacances.

Côté ju-jitsu, c’est une façon de s’immerger intensivement dans l’art martial, de le découvrir de façon différente et donc complémentaire à la pratique habituelle.

Quant à Soulac, ce n’est pas un hasard si nous y sommes retournés durant tant d’étés.

Que ce soit en célibataire ou en famille, c’est la certitude d’une semaine qui comblera tout le monde. La station balnéaire est en parfaite harmonie avec l’ambiance qui correspond à un stage de cette nature. Nous sommes dans une cité balnéaire à taille humaine. Soulac offre de nombreuses activités secondaires, beaucoup d’espace et puis l’Océan Atlantique et ses kilomètres de plages de sable fin et toutes ces magnifiques villas à l’architecture si particulière. Soulac permet tout à la fois de se distraire et de se reposer. Adultes et enfants, stagiaires ou accompagnateurs seront comblés.

Je suis bien évidement à votre disposition pour tout renseignement complémentaire qui pourrait guider votre choix.

Vous pouvez découvrir Soulac sur le site de la ville. A bientôt !

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C’est compliqué de faire simple

Cette contradiction n’en est pas vraiment une. Mon professeur (qui était aussi mon père) me répétait souvent : « divise par deux l’intensité technique de ce que tu prévois d’enseigner et ça risque encore d’être dix fois trop difficile ».

Certes, il s’agit d’une formule, elle vaut ce que valent les formules ; elles sont là pour forcer le trait. Il n’empêche que la première qualité d’un enseignant est de se mettre au niveau de ses élèves et que cette évidence n’est pas toujours la règle.

Parfois il y l’envie de « montrer trop » sans que les étudiants aient le temps de digérer, ou le besoin de montrer « trop difficile » sans que l’élève possèdent les outils indispensables à l’assimilation ; ou encore les deux. Avant d’apprendre à plonger, il faut savoir nager.

Faire simple dans le contenu et dans l’expression. L’essentiel n’est pas ce que l’on montre, mais ce que les élèves retiennent.

Maintenant, il n’est pas toujours évident de satisfaire tous les niveaux lorsqu’ils sont rassemblés dans un seul cours. Surtout si l’effectif n’est pas assez important pour créer des ateliers. Il faut pourtant que chacun travail son programme.

Se trouver dans une telle situation, et la gérer, demande un minimum d’organisation. J’y reviendrai à l’occasion d’un autre article.

Aujourd’hui, imaginons un groupe de débutants. C’est sans doute un des cours les plus difficiles à dispenser. Enseigner à des gradés, pour peu que l’on possède un bagage technique correct, est plus facile et d’une certaine façon plus gratifiant.

Tout au long de ma carrière j’ai éprouvé de plus en plus de plaisir à initier et à enseigner à des personnes qui débutent. D’abord ils sont « vierges » de toutes (éventuelles) mauvaises habitudes, ce qui n’est pas rien et ils ont soif de découvertes. Ensuite, il faut s’astreindre à une indispensable patience, trouver les « trucs et astuces » pédagogiques qui facilitent l’acquisition. Tout au long de la leçon, il faut faire preuve d’un savant dosage dans les intensités techniques et physiques. Simplifier et non pas compliquer. S’adapter à l’âge, à la condition physique (surtout si elle est inexistante ou presque).

Les débutants d’aujourd’hui seront les confirmés de demain, donc le professeur a une responsabilité immense. Il ne doit pas les décourager avec un enseignement inadapté.

J’ai connu des professeurs qui avouaient ne pas avoir les clefs et la patience nécessaires pour s’occuper des débutants. Chacun possède ses spécialités, mais si un jour on veut enseigner à des ceintures noires, il faut d’abord que les ceintures blanches aient été bien formées.

Quant aux confirmés, il faut être en mesure de ne pas les lasser et leur donner l’envie de persévérer.

S’adapter et donc ne pas décevoir, ne pas décourager ceux qui ont fait l’effort de franchir les portes d’un dojo. Déjà, avant l’inscription il faut découvrir précisément ce que la personne est venue chercher et le cas échéant la réorienter, chaque art martial possédant ses spécificités. Et puis, si l’enseignant et le dojo doivent plaire à l’élève, l’élève doit aussi plaire au dojo.

En conclusion, s’il est essentiel de s’occuper de tous les échelons, il est indispensable de bien s’occuper des débutants. Un dojo, c’est comme une population, s’il n’y a pas de renouvellement, c’est fatalement l’extinction.

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Choisir

Nous sommes encore en début de saison et il se peut qu’il y ait des personnes qui ne se sont pas encore décidées à franchir les portes d’un dojo.

Pour une pratique optimale et qui s’inscrit dans la durée, il faut réunir trois conditions. D’abord trouver la bonne discipline, ensuite un bon professeur, enfin être déterminé.

La bonne discipline c’est celle qui nous convient. Comment le deviner ? En l’essayant bien sûr, on dit souvent que la première impression est la bonne. Cependant, avant d’entrer dans un dojo, on possède déjà sa petite idée. Soit on est attiré par l’aspect sportif, soit par le côté traditionnel ou encore le « tout utilitaire », et dans ce domaine il y a beaucoup d’offres. D’ailleurs est-ce la demande qui fait l’offre ou le contraire ? Je reviendrai sur cet aspect la semaine prochaine.

Ensuite, une fois que le choix est fait, il faut trouver le bon professeur. Là aussi, la première impression est la bonne, mais lorsqu’on débute, nous ne sommes pas toujours qualifiés pour juger des compétences et des qualifications de celui-ci. La réputation et l’avis des élèves doivent être pris en considération ; à la condition que les habitués soient en phase avec ce que l’on recherche. Un professeur pourra être un très bon formateur de champions, mais si vous êtes venus pour de la self-défense… A noter que parfois, c’est le professeur qui détermine le choix d’une discipline.

Enfin, être déterminé. Savoir que la progression dans les disciplines de combat est associée à une régularité, davantage que dans d’autres activités. Par exemple, pour ceux qui ne sont intéressés que par l’aspect utilitaire, il n’y a pas de miracle, du style « la méthode en dix leçons ». Les automatismes font partie de l’efficacité, or il n’y pas d’automatisme sans répétition. Quant à ceux qui sont attirés par le côté traditionnel, il y a tellement de choses à découvrir qu’une pratique trop en pointillé n’apportera pas grand-chose. Enfin, ceux qui ont choisi l’aspect sportif, encore davantage que dans d’autres sports, la régularité est indispensable. Dans un sport de combat, on attaque et on se défend. Attention, je n’ai pas dit « on défend », j’ai dit « on SE défend ». Prendre un but au Foot, ce n’est pas pareil que prendre un direct en pleine face ou un uchi-mata mal contrôlé.

En conclusion il faut d’abord essayer, rien ne vaut l’expérience personnelle, même juste le temps d’une séance. Ne serait-ce que pour savoir si l’état d’esprit qui règne dans le lieu est en phase avec celui que l’on souhaite trouver.

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Ce métier que j’aime

Dans le prolongement de l’article de la semaine dernière consacré à la conscience professionnelle, j’ai voulu aborder ce que j’appelle « mon métier » et la passion qui l’entoure.

C’est toujours mieux d’aimer son métier et d’ailleurs je préfère ce mot à celui de travail. Un métier on l’a souvent choisi. Parfois il s’est imposé et nous l’avons apprivoisé.

Même si j’ai effectué beaucoup de démonstrations pour promouvoir ma discipline, ma tâche principale a été, et est toujours, l’enseignement.

Si j’aime ce métier, c’est pour quelques raisons ; la principale étant le partage d’un art avec lequel je me suis tout de suite senti en phase, bref un art qui me va bien.

Ceci grâce à sa pluralité technique, à ses principes de bases comme celui de l’utilisation de la force de l’adversaire, aux mécanismes naturels, bref une discipline intelligente pour peu qu’elle soit enseignée dans le respect de ses fondamentaux.

Un art dans lequel il est davantage question de maîtriser que d’exterminer, dans lequel la finesse technique prend le pas sur la brutalité.

Et puis, justement, une discipline dans laquelle l’éducation physique et mentale est incontestable. Mais aussi dans laquelle « on s’amuse », nous sommes également dans le loisir. On s’amuse et on progresse continuellement, pour l’efficacité, mais tout simplement pour éprouver la satisfaction procurée par les progrès. Ce qui est bon pour la tête est bon pour le corps et le contraire.

J’aime ce métier parce qu’il permet la rencontre et les échanges entre toutes les classes sociales et rien n’est plus agréable de voir un jeune employé tutoyer un cadre supérieur quinquagénaire, pour le conseiller et le rassurer lors d’une première séance.

J’aime ce métier parce que j’enseigne à des pratiquants de tous âges, de toutes conditions physiques, auxquels il faut savoir s’adapter.

J’aime ce métier pour l’entraide qui règne dans un dojo, mais aussi à l’extérieur grâce à de solides relations nouées dans le dojo en question.

J’aime ce métier quand certains élèves me confient que la pratique leur a apporté énormément dans leur quotidien, en dehors des tatamis et même « beaucoup plus » que ce qu’on peut imaginer. Je n’irais pas jusqu’à dire qu’on possède le pouvoir de changer la vie (comme dans la chanson de Jean-Jacques Goldman) mais un peu quand même. Bref, être utile. Et tout simplement constater le plaisir éprouvé par un pratiquant à la recherche de la finesse technique et plus encore lorsqu’il s’en approche. µ

J’aime mon métier car, ayant eu la chance que ce soit mon unique activité professionnelle, j’ai pu m’y consacrer pleinement. Ce qui, il faut l’admettre, est de plus en plus rare, ceci est un autre sujet.

J’aime mon métier parce qu’il consiste à enseigner une discipline qui a su traverser les siècles, avec des hauts et des bas, renaissant toujours des ses cendres. Il n’est pas question d’obstination, juste de bon sens et de fidélité en ce qu’on croit, surtout lorsque c’est juste. Enseigner une discipline d’une telle richesse technique, cela me semble intemporel. Tout comme partager des valeurs utiles à la société dans son ensemble. Et puis, en le diffusant, rendre au ju-jitsu ce qu’il m’a donné.

J’aime encore davantage mon métier quand on me laisse l’exercer !

Enfin, j’aime ce métier parce que même si, avec le temps, les capacités physiques s’amenuisent, il n’en est rien pour la passion de transmettre, bien au contraire.

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Trois mouches…

La période estivale favorise la manifestation d’une dose de légèreté. Ce qui n’empêche pas la réflexion. La preuve avec cette petite histoire qui se substitue à l’article hebdomadaire. Je l’ai souvent publiée, sans en éprouver la moindre lassitude ! La dissuasion est une arme redoutable, et elle ne provoque aucunes mauvaises conséquences !

« Dans une auberge isolée, un samouraï est installé, seul à une table. Malgré trois mouches qui tournent autour de lui, il reste d’un calme surprenant. Trois ronins  entrent à leur tour dans l’auberge. Ils remarquent aussitôt avec envie la magnifique paire de sabres que porte l’homme isolé. Sûrs de leur coup, trois contre un, ils s’assoient à une table voisine et mettent tout en œuvre pour provoquer le samouraï. Celui-ci reste imperturbable, comme s’il n’avait même pas remarqué la présence des trois ronins. Loin de se décourager, les ronins se font de plus en plus railleurs. Tout à coup, en trois gestes rapides, le samouraï attrape les trois mouches qui tournaient autour de lui, et ce, avec les baguettes qu’il tenait à la main. Puis calmement, il repose les baguettes, parfaitement indifférent au trouble qu’il venait de provoquer parmi les rônins. En effet, non seulement ceux-ci s’étaient tus, mais pris de panique, ils n’avaient pas tardé à s’enfuir. Ils venaient de comprendre à temps qu’ils s’étaient attaqués à un homme d’une maîtrise redoutable. Plus tard, ils finirent par apprendre, avec effroi, que celui qui les avait si habilement découragés était le fameux Miyamoto Musashi.

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Le salut

C’est avant tout un signe de politesse, une marque de respect et une tradition qui ne doit jamais  être sacrifiée. C’est aussi un moment de brève et intense concentration  avant une démonstration, une répétition ou un combat. Et puis, un temps de courte réflexion dans l’instant qui suit ces exercices.

Dans les arts martiaux japonais, le salut est emprunté aux coutumes du pays. C’était tout simplement dans le quotidien la façon de se dire bonjour.

Nous utilisons le salut principalement de deux façons. Debout ou à genoux. Logiquement, avant et après avoir effectué un travail debout, on salue debout ;  il en est de même pour le travail au sol. Dans certains katas ce rite se pratique à genoux et debout pour d’autres.

Au début et à la fin d’un cours, face aux professeurs, il s’exécute  en principe en position agenouillée, mais rien ne s’oppose à ce qu’il soit réalisé debout (surtout si le professeur a mal aux genoux). La position des élèves les plus hauts gradés est toujours sur la droite.

S’il est incontournable, il doit se faire en respectant une bonne attitude. Il ne doit pas être bâclé. Tout d’abord, les protagonistes adoptent une tenue correcte, même après un combat. On prend le temps de se rhabiller, on ne salue pas débraillé. D’autre part, il ne s’agit aucunement de se satisfaire d’un vague mouvement de tête. On prend son temps pour incliner le buste vers l’avant, les mains glissant le long des cuisses en position debout et elles seront posées sur le sol dans la position agenouillée.

Entre élèves et après un travail ou un randori, il se suffit à lui-même. D’autres marques, ne sont pas indispensables, si sympathiques soient elles !

Il est de coutume également de pratiquer le salut en entrant dans le dojo. Il est vrai que cette tradition se perd, elle est remplacée par un seul salut, celui que l’on exécute  avant de monter sur le tatami. Mais l’un n’empêche pas l’autre.

Cet article permet aussi de rappeler que si certains rituels ne sont pas respectés dans nos disciplines à traditions, où le seront-ils ?

Encore une fois, il en est de la responsabilité du professeur. Il est aussi un passeur de valeurs, pas uniquement de techniques.

 

T comme Technique

Dans mon dictionnaire des arts martiaux (qui finira par paraître), à la lettre T, j’ai choisi le mot « Technique ».

C’est un mot employé couramment par les professeurs d’arts martiaux. En tant que nom, pour désigner ce que nous enseignons, mais aussi comme adjectif, lorsque nous évoquons certaines qualités.

Nous appelons les « techniques » ce qui constitue l’ensemble de nos transmissions  : techniques debout, au sol, de percussions, de base, avancées, supérieures, etc. Mais on les retrouve aussi dans les katas pour lesquels la nomenclature est organisée de la façon suivante : 1ere technique, 2ème technique, etc. Et plus particulièrement dans le ju-jitsu que j’enseigne, pour désigner des enchaînements comme celui des « 16 techniques », par exemple !

Mais comme indiqué en introduction, nous employons aussi ce terme comme adjectif pour souligner des qualités. Les qualités techniques de telle ou telle personne, c’est d’ailleurs très valorisant d’être qualifié de bon technicien.

C’est plus particulièrement ce deuxième aspect, celui de l’adjectif que je retiens pour cet article.

La recherche de la perfection technique est une des motivations importantes pour un pratiquant de budo, c’est peut-être aussi ce qui différencie l’art martial d’une simple lutte. La quête du geste parfait exécuté avec précision au bon moment est primordiale ; pour l’efficacité, mais aussi pour la satisfaction que représente un beau geste, à l’instar de celui du patineur ou du gymnaste, ou encore quand un sculpteur, un peintre ou un écrivain réalise une belle œuvre.

Dans nos disciplines cette finesse technique (garantie d’efficacité) sera prioritaire par rapport aux qualités physiques, puisque celles-ci déclinent fatalement plus vite avec l’âge.

Le but est donc d’élever son propre niveau technique lorsque l’on est étudiant, puis celui de ses élèves quand on enseigne.

Retrouver dans les élèves la « patte » technique d’un professeur, c’est pour lui une belle récompense, encore davantage lorsque, sans connaître l’identité de l’enseignant, il sera reconnu au travers des qualités d’un élève.

Que ce soit pour désigner un programme, ou des qualités, le mot technique est donc un des mots les plus utilisés sur un tatami, mais il est aussi omniprésent dans l’esprit de tous les pratiquants quand il s’agit de s’approcher de l’excellence… Technique.

Le pari du vieux guerrier…

C’est avec beaucoup de plaisir que je publie, de temps à autre, une histoire issue du recueil de Pascal Fauliot « Contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon ». Ces petites histoires nous offrent une belle matière à réflexion et nous rappellent que nos disciplines ne sont pas que de simples activités physiques.

 Le pari du vieux guerrier.

Le seigneur Naoshige déclara un jour à Shimomura Shoun, l’un de ses vieux samouraïs : « La force et la vigueur du jeune Katsushige sont admirables pour son âge. Quand il lutte avec ses compagnons il bat même les plus âgés.

Bien que je ne sois plus tout jeune, je suis prêt à parier qu’il ne parviendra pas à me vaincre », affirma le vieux Shoun.

Naoshige se fit un plaisir d’organiser la rencontre qui eut lieu le soir même dans la cour du château, au milieu d’un grand nombre de samouraïs. Ceux-ci étaient impatients de voir ce qui allait arriver à ce vieux farceur de Shoun .

Dès le début de la rencontre, le jeune et puissant Katsushige se précipita sur son frêle adversaire et l’empoigna fermement, décidé à n’en faire qu’une bouchée. A plusieurs reprises, Shoun décolla du sol et faillit aller rouler dans la poussière ; cependant, à la surprise générale, il se rétablissait à chaque fois au dernier moment.

Exaspéré, le jeune homme tenta à nouveau de le projeter en y mettant toute sa force mais, cette fois, Shoun profita habillement de son mouvement et c’est lui qui réussit à déséquilibrer Katsushige et à l’envoyer au sol.

Après avoir aidé son adversaire à demi inconscient à se relever, Shoun s’approcha du seigneur Naoshige pour lui dire : «Etre fier de sa force quand on ne maîtrise pas encore sa fougue, c’est comme si on se vantait publiquement de ses défauts. »