Régularité, rigueur et souvenirs.

Il s’agit d’un article déjà mis en ligne  il y presque un an, mais quelque peu remanié.

Pour peu que la crise laisse la possibilité et l’autorisation de pratiquer les disciplines de combat, la régularité sera un élément déterminant dans cette pratique.

Davantage que la quantité de cours suivis par semaine, c’est la régularité qui prime pour réaliser des progrès. Un quotidien stressant (il ne l’a sans doute jamais été autant qu’en ce moment) ajouté parfois à une boulimie d’activités diverses ne facilitent pas la mise en place d’un rythme qui pourra pourtant s’avérer bénéfique sur bien des plans.

Lorsqu’il est possible de s’imposer une certaine rigueur, par exemple celle de fidéliser son entraînement sur les mêmes horaires, les résultats sont au rendez-vous ; pour progresser, mais aussi tout simplement pour adhérer à une forme de discipline, dans le but de prouver que nous sommes capables d’être soumis à quelques efforts qui ne ressemblent pas à d’extraordinaires contraintes. Au final ils nous offriront de belles autosatisfactions.

S’entraîner quand on le veut et s’entraîner quand on le peut, ce n’est pas la même chose. Comme expliqué plus haut, le stress du quotidien lié aux contraintes de certains métiers et aux obligations familiales sont des raisons recevables, mais lorsque l’on va s’entrainer parce que l’on a rien à faire de mieux, c’est regrettable ; certes nous sommes dans les loisirs mais nous pratiquons des disciplines particulières dans lesquelles « le mental » joue un rôle important, il n’est jamais inutile de le renforcer, ça peut servir dans notre quotidien.

La régularité est bonne pour l’esprit, mais aussi pour le corps. Celui-ci à une mémoire, il se souvient et lui imposer des irrégularités dans une pratique ne fera que semer le trouble, ce qui ne manquera pas de créer de néfastes désordres.

« Dans le temps », au célèbre dojo parisien de « La rue des Martyrs », il y avait cours de judo tous les soirs. Certains venaient les mardis et vendredis, d’autres les lundis et jeudis, ou encore les mercredis et samedis.  Chaque soirée avait sa spécificité. Et bien, il ne serait venu à l’idée de personne de manquer une seule de ces séances ou de la déplacer sur un autre soir, sauf nécessité absolue due à un souci de santé.  Il ne serait pas non plus venu à l’idée d’accepter une invitation ou d’organiser une réception chez soi lors de ces deux soirs. L’entraînement passait avant le reste.

A cette époque, ces réactions n’étaient peut-être pas le fruit d’une pleine conscience des bienfaits précités, mais sans aucun doute elles étaient dictées par une forme de respect plus important de la discipline que ça ne l’est actuellement ; ce n’est pas forcément la faute des pratiquants, mais d’une société qui nous abreuve immodérément de produits jetables.

C’est bien dommage, ce n’est certainement pas la meilleure façon pour s’immerger complètement  dans l’art martial. Le professeur possède aussi sa part de responsabilité, dans la mesure où c’est à lui de proposer des méthodes d’apprentissage et d’entraînement attractives qui donneront l’envie de persévérer, ainsi qu’une ambiance à la fois sérieuse et légère.
Finissons par une note positive en déclarant qu’une pratique, même «hachée » est préférable à aucune pratique et qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire et s’imposer une petite discipline, dans la mesure de nos possibilités.
Il n’a échappé à personne, surtout pas à moi, que cette année est particulière et que beaucoup de raisons ne favorisent pas la régularité, ni même la pratique et tout simplement l’inscription dans des disciplines dites de contact. Assister à cet état de fait en en ne disposant que d’une étroite marge de manœuvre, c’est difficile ! Espérons un coup de pouce du destin !

La photo d’illustration représente le dojo de la Rue des martyrs à Paris, au début des années 1960.

eric@pariset.net

La tenue

Après avoir évoqué le dojo il y a quinze jours, puis le professeur la semaine dernière, aujourd’hui intéressons nous à « la tenue ».

« L’habit ne fait pas le moine », un peu quand même.

Par facilité on l’appelle le « kimono », mais ce nom désigne plus spécifiquement un vêtement, très joli, par ailleurs.

Chaque art martial possède sa propre appellation pour désigner ce que l’on revêt dans un dojo ; parmi les plus répandues on trouve le judogi, le karategi, le keikogi. On évoque très peu le « jujitsugi ». Pour les principaux arts martiaux japonais  on peut le nommer « dogi ». En taekwondo, c’est le dobok. Quel que soit son nom, cette tenue est importante et ne saurait être négligée ; j’y vois plusieurs raisons.

D’abord, chaque discipline sportive possède son « uniforme » ; il ne viendrait pas à l’idée d’un footballeur de se rendre sur un terrain de foot en judogi.

Ensuite, grâce à sa texture cette tenue est pratique et hygiénique. Elle est résistante aux différents assauts et autres sévices qu’on lui fait subir. Elle est hygiénique, elle permet d’absorber les litres de sueur produits lors des entraînements. Cette uniformité possède également comme vertu d’effacer toute distinction sociale. On ne frime pas vraiment dans un « gi ». Nous sommes tous égaux pour ces moments d’étude et de partage. Enfin, dans le combat rapproché elle évite une proximité qui peut  être rebutante pour certains et certaines.

Cette tenue, je la respecte au plus haut point ; n’est-elle pas mon principal « outil de travail » ? (quand on a du travail).  Elle est aussi  devenue au fil des années ma « deuxième peau ». Parfois elle a même été mon « bleu de travail », comme nous le verrons plus bas. Certains s’en affranchissent quelques fois,  c’est dommage, surtout dans des disciplines dites à traditions.

Au début des années 1970, à l’initiative du champion de judo néerlandais Anton Geesink, il y eut une tentative de kimonos de couleurs qui n’a pas vraiment connu le succès. Ensuite, au début des années 1990, le kimono bleu est apparu lors de certaines compétitions de judo, dans le but de facilité la compréhension des combats. Dans le même esprit, j’ai moi-même opté pour cette couleur dans mes démonstrations et dans des ouvrages. Quelques professeurs l’utilisent à l’occasion de leurs cours, cela a été mon cas durant quelques temps, pour « aérer » mes tenues de démonstration, à l’époque où j’en faisais. Une fois cette époque passée, je suis revenu à la pure tradition. Et puis un enseignant doit pouvoir se distingue davantage par son savoir et son aura que par sa tenue.

Dans cet article j’évoque les arts martiaux, mais d’autres sports de combats possèdent leur propre tenue (boxe, lutte, etc.) et continuent à l’arborer fièrement.

Enfin, l’utilisation de la « tenue de ville » (adaptée) pourra être considérée comme un complément à l’étude de la self-défense, dans des cours spécifiques. Ce pourra être aussi une approche et une étape avant de rejoindre le monde des budos.

En illustration, un kimono ayant appartenu à Jigoro Kano !

Une rentrée

Même si je ne participe pas à celle-ci, je sais ce que représente « la rentrée » pour tous les professeurs et notamment ceux qui enseignent les arts martiaux.

Je n’ignore pas que cette année, elle aura un goût particulier, elle sentira davantage le gel hydroalcoolique que la transpiration, pour peu que le masque nous permette de faire la distinction.
Cela ne m’empêche pas de ranimer quelques souvenirs d’une période à la saveur particulière.

A l’approche de chaque mois de septembre, ce sont des sentiments différents qui se mélangent : une  certaine mélancolie due à la fin des vacances, mais aussi le plaisir de retrouver amis et habitudes, celui de pouvoir à nouveau  revêtir le judogi et de fouler les tatamis, et puis il y a ce sentiment de revenir chargé d’énergie et de projets.

Chaque rentrée  est un nouveau départ, une nouvelle aventure. Pour les professeurs, c’est à chaque fois une remise en question ;  rien n’est jamais acquis.

Et puis, si c’est le moment de retrouver les fidèles, c’est aussi celui d’accueillir de nouveaux élèves. Que ce soit des enfants, des préados, des adolescents ou de jeunes adultes ou…des moins jeunes, pour peu que votre enseignement et que les créneaux horaires proposés s’adaptent  à toutes ces tranches d’âges et à toutes les conditions physiques.

Coté « anciens », pour ceux qui n’ont pas fait de stages d’été, c’est le moment de remettre le judogi, de retrouver des sensations et des courbatures dans les jours qui suivront.

Pour un dojo, chaque année se présente  la nécessité de renouveler près de  50% de l’effectif, puisque selon les statistiques, c’est environ le pourcentage d’abandon d’une saison à l’autre ; un vrai défi ! Espérons que ce  ne soit pas encore plus difficile cette année, avec les évènements que nous subissons depuis quelques mois.

Pour ceux qui souhaitent entrer dans le monde des arts martiaux se pose la question du choix de la discipline. Ce qui n’est pas une mince affaire. Les motivations sont importantes. Est-ce le coté utilitaire, l’aspect entretien  physique, l’interne, etc. ? Les disciplines sont nombreuses, le débutant à de quoi s’interroger !

Ceci étant, c’est bien souvent un ami ou un membre de la famille qui fait découvrir le lieu dans lequel il s’épanouit. La proximité est aussi souvent déterminante.  A l’inverse, la réputation d’un dojo, elle peut faire franchir de bonnes distances.

Quoiqu’il en soit, il ne faut pas hésiter à demander de participer à une séance d’essai, bien que je crois que cette année, pour cause de Covid, cela ne sera pas autorisé. Je ne sais d’ailleurs pas s’il sera même permit de regarder un cours, tout simplement. C’est dommage, parce qu’avant de s’engager pour un an, il est préférable d’essayer. Une raison supplémentaire d’être inquiet pour cette saison.

Revenons, sur le problème des abandons. Quelles  en sont les raisons ? Je ne les ai jamais vraiment quantifiées, mais les principales sont les suivantes : la lassitude, l’impression de s’être trompé, que ce qui est proposé par le dojo ne correspond pas à ce que nous attendions. Il y des motifs qui s’imposent, comme un déménagement, un changement de vie personnelle ou professionnelle. Et puis des plus graves avec de sérieuses blessures et bien évidemment la maladie. Enfin, il existe une autre raison, celle qui concerne ceux qui ne persistent en rien et qui abandonnent en tout. Ceux-là ne sont pas majoritaires, heureusement.  Enfin, sans user d’un esprit grinçant, on ne peut faire autrement qu’évoquer ceux pour qui le dojo a fermé pour cause de Coronavirus.

Espérons que la majorité de ces lieux de culture, d’éducation physique et mentale tiendront le coup, grâce à leur ancienneté.

A tous et à toutes, je souhaite une bonne rentrée. Pour les néophytes, si vous avez le désir d’entrer dans le monde des arts martiaux, c’est que vous faites preuve de bon goût ; si vous avez la chance de tomber sur un professeur qui répond à vos aspirations, vous ne pourrez que passer une excellente année et bien d’autres encore,  c’est l’objectif lorsque l’on commence l’étude et la pratique de nos disciplines !

eric@pariset.net

Sans blague…

Dans un récent entretien (Match du 20 août) le Président de la République a déclaré qu’il n’était pas possible de mettre un pays à l’arrêt. Sans blague ! C’est pourtant ce qui a été fait au mois de mars et je suis bien placé pour confirmer que c’est destructeur.

Surtout pour une toute jeune entreprise qui n’avait pas eu le temps de constituer des réserves, avec une propriétaire qui exigeait ses loyers, avec des mois de fermeture qui s’enchainaient (et donc des dettes de loyers qui s’amoncelaient) et l’absence totale de visibilité. Je n’oublie pas l’abandon de l’état et des assurances.

Je sais que tout cela appartient au passé, à un passé que certains jugent stérile et presque inconvenant  de ressasser ; facile à dire lorsque l’on n’est pas concerné directement par la violence de l’évènement. Tout cela ne s’efface pas quand les désastreuses conséquences sont vécues au quotidien.

Ne plus pouvoir exercer son métier est traumatisant et presque humiliant. Aux problèmes purement matériels s’ajoute l’aspect psychologique  qui ne peut qu’entraîner des effets négatifs sur le plan physique. Sans compter que presque six mois sans mettre le judogi, c’est un record personnel. L’impossibilité de pratiquer et d’enseigner un art qui a été toute ma vie et pour lequel j’ai sacrifié beaucoup, par choix et par passion, est un choc. Je n’oublie pas une douloureuse désorganisation de la vie privée.

Donc, par devoir et par nécessité, tournons-nous vers le futur, même s’il est incertain, surtout à quelques jours d’une rentrée qui s’annonce «spéciale».

Malheureusement, il est difficile d’évoquer l’avenir de notre société en générale et celui des arts martiaux en particulier, sans être perplexe. Depuis le mois de mars, nous sommes entrés dans  une autre vie, une drôle de vie que certains appellent « la vie d’après », je ne suis pas persuadé qu’elle sera meilleure !
Heureusement tous les secteurs d’activité, ne sont pas touchés de la même manière, mais je crains que le mien ait du mal à se remettre de cette crise, ou alors il faudra du temps.

Revenons à cet avenir pour lequel je ne peux éviter d’être inquiet, même si l’esprit combattif qui est le mien ne m’abandonne pas (mais pour quel combat et contre quel adversaire ?), certains évènements nous dépassent.

Manifestement je ne suis pas le seul à ressentir de l’inquiétude, puisque selon un sondage, 74% des français éprouvent ce sentiment au moment où j’écris ces lignes.

Je suis inquiet aussi pour la discipline que je pratique et enseigne depuis des décennies.  Et si, avec les autres arts martiaux et sports de combat, elle était reléguée au rang d’espèce « en voie de disparition » ? Je ne pense pas exagérer, je regarde les informations. On nous dit à longueur de journée qu’une deuxième vague semble inévitable. Imaginons un seul instant qu’une nouvelle fermeture administrative frappe certains établissements recevant du public ! Les salles de sports et surtout les dojos seront forcément concernés. Les clubs qui ont pu résister à la première vague, grâce à leur ancienneté et qui espéraient vivre une rentrée « normale », auront du mal à résister à un deuxième assaut.
Même en excluant le scénario d’une nouvelle fermeture,  l’inquiétude face au virus, entretenue par un climat anxiogène comme on n’en n’a jamais connu, entrainera inévitablement des abandons et un nombre beaucoup moins important de nouvelles inscriptions.
Qu’en sera-t-il de l’exception accordée à certaines disciplines par rapport au port du masque ? Avec cette obligation qui se généralise, l’exception tiendra-t-elle encore longtemps ?  Que se passera-t-il alors à ce moment là ? Sachant que cette mesure est tout simplement incompatible avec une pratique de nos activités.

Et puis, sera-t-il possible d’appliquer le protocole sanitaire imposé ? Est-ce que tous les dojos en auront les moyens humains et matériels ? Enfin, ne manquera pas de se poser un problème de responsabilité que certains élus ou dirigeants ne souhaiteront peut-être pas assumer.
Par leurs vertus éducatives qui ne sont plus à prouver, les arts martiaux ont pourtant plus que jamais, leur place dans notre société qui ne souffre pas que du virus.

A  titre personnel, pour le moment, aucune décision ne peut être prise. Comme beaucoup, je ne peux qu’attendre (Il est des moments de la vie où une reconversion professionnelle ne semble pas réaliste, quoique !).

Alors, il faudra patienter et se nourrir d’espoir, tout en ne pouvant éviter de ruminer à propos de ces derniers mois vécus – pour certains – avec un fort sentiment d’injustice, puisque, me concernant, il s’agit, ni plus ni moins, d’une perte d’exploitation qui n’est pas indemnisée. C’est violent, brutale et inacceptable.

Espérons aussi que la gestion actuelle de cette crise réponde à une logique et que la nouvelle vie qui nous est imposée et dans laquelle les barrières sociales sont devenues la règle ne détruise pas le « vivre ensemble ». Il me semble que la méfiance, pour ne pas employer le mot de peur, ait envahit le quotidien de bon nombre d’entre nous.
Il nous faudra donc être armés de patience, d’espoir et de courage (les samouraïs n’en manquent pas) mais aussi parfois d’une certaine perspicacité pour deviner vers quoi
« on nous conduit ».

eric@pariset.net

Z comme Z (suite et fin du dictionnaire)

Aujourd’hui, avec la lettre Z, nous arrivons à la fin de mon dictionnaire.

Cela aurait pu être Z comme Zorro, un des héros de mon enfance, celui qui combattait la tyrannie et l’injustice, mais nous sommes un peu éloignés des arts martiaux, bien que ce justicier masqué pratique l’escrime, une discipline noble dans laquelle l’esprit chevaleresque n’est pas éloigné de celui qui animait l’âme des samouraïs et qui continue d’animer celle de beaucoup de pratiquants d’arts martiaux.

Plus terre à terre (c’est le cas de le dire), j’aurais pu choisir Z comme zoories ; ces chaussures qui ne pas assez utilisées dans les dojos pour circuler en dehors des tatamis ; question d’hygiène et d’éducation.

Il aurait pu être question de la fameuse position « zenkutsu dachi » qui a fait souffrir plus d’un karatéka à ses débuts.

En fait, j’ai choisi Z comme Zen. Un mot qui nous apaise rien qu’à le lire, l’entendre, ou l’écrire. « Rester zen » ! Cette expression populaire qui, dans une version simplifiée, signifie « rester tranquille ».

Une bonne dose de mysticisme entoure cette pratique issue de la religion bouddhiste. Des cours existent, mais chacun doit pouvoir appliquer sa propre « zenitude » qui consiste à apaiser l’esprit, et de ce fait le corps, ne serait-ce qu’en relativisant certains évènements qui nous assaillent, en leur donnant l’importance qu’ils méritent. Facile à dire, souvent moins facile à appliquer, surtout depuis quelques mois.

Chacun trouvera sa façon de faire, seul ou accompagné. Cette pratique interne est un excellent complément à celle des arts martiaux, qui doivent être considérés comme les arts de l’esprit, davantage que ceux de la guerre. Sagesse et art martial sont indissociables (lorsque leur pratique est autorisée).

Pour conclure cet article et à l’attention de ceux qui seraient intéressés par cette pratique, je conseille le beau petit livre « zen », de Maxence Fermine aux éditions « Michel Lafon poche ».

eric@pariset.net

Bloc notes estival et de circonstances…

Bloc notes amère-acide
La rentrée « masquée », ou pas ?
Dans quelques semaines, ce sera la rentrée. Depuis le 11 juillet, la pratique des sports de combat est autorisée, mais il ne sera  pas facile de convaincre les élèves (et futurs élèves) qu’il n’existe aucun danger à s’affranchir du masque lors des entraînements qui se déroulent dans un espace clos, alors que l’objet  en question (le masque) va devenir obligatoire, même à l’extérieur pour des raisons de sécurité ! Que penser et que faire ? Sachant que cela parait difficile, si ce n’est impossible de pratiquer masqué.
Historique
Revenons sur cette  autorisation  effective, qui date du 11 juillet. Depuis la mi-mars et avec les vacances scolaires qui voient la fermeture de la plupart des clubs, ce sera au final presque six mois sans entraînement ! Ce n’est jamais arrivé depuis que le judo (le premier art martial asiatique introduit en France) existe dans notre pays, c’est-à-dire  au cœur des années 1930. C’est donc historique. Même durant les deux pandémies précédentes, la grippe asiatique de 1957 et celle de Hong-Kong en 1969, mais aussi la seconde guerre mondiale, avec toutes ses horreurs,  les activités continuaient, notamment les activités sportives. Pendant le second conflit mondial, non seulement les clubs de judo  existant restaient ouverts, mais il y en a même qui voyaient le jour. Ce fût le cas du « Club Français de Jiu-jitsu », un dojo mythique qui me tient particulièrement à cœur et pour cause, c’est là que mon père débutait  en 1947 et que j’ai porté mon premier kimono en 1958. Si ce dojo n’avait pas vu le jour, peut-être que c’est un autre destin que j’aurais connu, une autre activité professionnelle et finalement, avec un peu de chance, un métier qui n’aurait pas été sacrifié et massacré.
Mauvaise pioche
Enseigner les arts martiaux avec le statut de travailleur indépendant, voilà deux mauvais choix. Cependant, comme indiqué plus haut il s’agit d’une première, il fallait être un très grand devin pour savoir qu’une telle interdiction dévastatrice nous serait un jour imposée.
Violence
Toujours dans le même registre. Alors que l’on parle de violence physique, à juste titre, il ne faudrait pas ignorer une autre forme de violence, la violence psychologique et ses effets tout aussi dévastateurs. Seulement ils sont moins visibles, puisque c’est à l’intérieur que ca se passe.  Prenons un exemple (que je connais bien) : lorsque du jour au lendemain vous perdez votre outil de travail et par conséquent votre travail, qu’avec un statut d’indépendant vous ne bénéficiez pas du chômage et que les aides et dédommagements  sont ridicules, et bien, c’est d’une violence inouïe ! Il faut être bien éduqué mentalement pour ne pas être en proie à des réactions en phase avec ce que vous subissez et être combatif pour repartir tout seul à l’assaut. Ces dispositions psychologiques positives relèvent  des gènes, de l’éducation et d’une pratique des arts martiaux dans un environnement sain. Espérons  que nos disciplines, dotées de fortes valeurs éducatives et utiles à notre société bien malade, survivront  aux difficiles traitements imposés, et que la « deuxième vague » dont on nous parle â longueur de journée ne viendra pas leur donner le coup de grâce.
eric@pariset.net

Y comme Yamashita et Yama-arashi…

 

 

 

 

 

 

 

Aujourd’hui c’est de la lettre Y de mon dictionnaire dont il est question. Pour l’illustrer, j’ai choisi un personnage illustre et une technique de projection particulière.

Y comme Yamashita Yasuhiro. Voilà un champion de judo exceptionnel. Tout champion est exceptionnel, mais celui-ci un peu plus. Il effectua une fabuleuse carrière dans la catégorie des poids lourds et en « toutes catégories » (épreuve dont on peut regretter la disparition) ; il réalisa, entre autres exploits, celui de rester invaincu  neuf années durant, entre 1977 et 1985 en alignant 203 victoires consécutives et 7 victoires partagées.

Redoutable aussi bien au sol que debout, il était animé d’un véritable esprit de samouraï, comme en témoigne sa victoire aux Jeux Olympiques de Los Angeles en 1984 ; alors blessé, c’est pour ainsi dire sur une jambe qu’il a réussit à venir à bout de ses derniers adversaires et par « ippon », s’octroyant ainsi un fabuleux sacre olympique. Aujourd’hui il occupe d’importantes fonctions au sein de la fédération internationale de judo.

Beaucoup aurait aimé pouvoir assister à une confrontation entre cette légende et une autre du nom de  Teddy Rinner ; nous ne pourrons que l’imaginer.

Y comme Yama-Arashi. Il s’agit d’une technique particulière. D’abord par sa traduction qui signifie « tempête sur la montagne » ; les japonais savent avec talent allier efficacité et poésie. Ensuite, elle n’est pour ainsi dire plus enseignée, ni utilisée, ceci explique sans doute cela. On pourrait simplifier sa description en la comparant à une sorte d’eri-seoe-nage (bien que le pouce qui saisit le revers se place vers le bas et non pas vers le haut) pour la partie supérieur du corps et d’ harai-goshi pour le bas. Elle fût inventée par Shiro Saigo, élève de Jigoro Kano.

Ces anciennes techniques, même si elles ne sont plus pratiquées, ne doivent pas pour autant être oubliées, elles sont en quelque sorte un trésor inestimable que nous nous devons de préserver.

eric@pariset.net

Avoir 15 ans en 1969…

J’ai eu 66 ans avant-hier et je préfère « fêter » cet âge là en 2020  que célébrer  mes quinze ans !

Mes quinze  ans, je les ai eus en 1969, l’année durant laquelle la « Grippe de Hong-Kong » sévissait. Ce virus avait fait un million de victimes sur la planète et 40 000 en  France. Pourtant, je n’en conserve aucun souvenir et je ne suis d’ailleurs pas le seul dans cet état amnésique ! Et pour quelles raisons ? Sans doute l’absence de réseaux sociaux, de chaînes d’infos en continue et une conception du rapport à la vie (et à la mort)  différent ! Sans oublier le fameux principe de précaution tétanisant.

Toujours est-il que la vie continuait. En France, le général De Gaule quittait le pouvoir, Pompidou s’installait à L’Elysée, le Premier Ministre Chaban-Delmas nous proposait sa « nouvelle société ». Le Concorde effectuait son premier vol, Gainsbourg déclarait cette année « année érotique », Hallyday chantait « Que je t’aime »… Et puis, et surtout le 21 juillet, « On a marché sur la Lune ».

Effectivement, la vie continuait ! La vie sportive notamment. Les clubs d’arts martiaux fonctionnaient (avec accès aux vestiaires, question d’hygiène). Si tel n’avait pas été le cas, on peut légitimement se demander si nous n’aurions pas été privés du formidable essor que nos disciplines ont connu à partir du début des années 1970 et jusqu’à maintenant, et si – à titre personnel – j’aurais pu effectuer le parcours qui fût le mien. En fait, chacun pouvait continuer à préparer son futur métier et à travailler pour lui-même et pour la société ! Continuer à enseigner pour ce qui concerne les professeurs d’arts martiaux, continuer à partager et à éduquer !

Quels souvenirs conserveront les actuels adolescents de cette année 2020 ? De leurs quinze ans, du lycée, des sorties entre copains et des premiers émois d’amoureux « masqués » ? Mais aussi d’un épouvantable confinement durant lequel nos rues ressemblaient à des lendemains d’apocalypse, fréquentées par quelques personnes qui se croisaient avec un laissez-passer en poche et  des regards suspicieux au dessus du masque (pour ceux qui pouvaient s’en procurer). Sans oublier l’apparition d’horribles formules qui ne favorisent pas le « vivre-ensemble » comme « distanciation sociale » et « gestes barrières ».

Certes en 1969, des gens mourraient de la pandémie, comme c’est le cas à chaque fois dans ce genre de situation dramatique, comme ça l’est cette année et comme ça l’est (tout simplement si je puis dire) chaque jour, quelque soit la période. La différence, lors des autres épidémies, c’est que des pans entiers de la société n’avaient pas été sacrifiés et détruits et que la vie de ceux qui étaient épargnés n’avait pas été massacrée d’une autre manière. Enfin, pas toutes les vies ; pas celles, par exemple,  des donneurs d’ordres qui ont leur salaire à la fin du mois.

Le Président a affirmé que (comme je l’ai déjà récemment fait remarquer) les dirigeants avaient préféré la santé à l’économie ; ce qui n’empêche pas, ni de nouvelles victimes, ni l’épidémie de repartir (d’après ce qu’on nous dit). Mais, tout le monde n’a pas bénéficié du même « traitement économique » ! Ils ne sont pas majoritaires ceux qui ont tout perdu, ou presque ;  heureusement, mais ceux-là se posent légitimement la question suivante : si un seul décideur ou un seul ministre ou encore un membre du fameux Conseil scientifique, était privé du jour au lendemain (je dis bien du jour au lendemain) de la totalité des ses revenus et même davantage, comment réagirait-il, comment agirait-il ? Prendrait-il les mêmes décisions ? Et resterai-il longtemps « sur la touche » ?

On va m’opposer que mes propos sont l’émanation d’une rancœur, que je fais partie de ceux qui sous-estiment de façon irresponsable la gravité de ce virus et que, pourquoi pas, je serais un adepte de l’existence d’un complot mondial.
Autant répondre par avance.

Concernant le premier point, il ne s’agit pas de rancœur, juste d’une forte incompréhension et d’un ébahissement sans limite sur une autre forme de violence que représente cette décision brutale prise le 16 mars, sans appel et  aux allures de couperet. Sans oublier les nombreux revirements, aussi rapides que troublants.

Sur la deuxième point, je ne sous-estime absolument pas la gravité de la maladie, mais mes craintes sont les mêmes que face au chauffard qui peut m’emplafonner en pleine ligne droite, que de succomber à une grave maladie, à un accident cardiaque, à une attaque terroriste ; je me souviens de 2015 où par deux fois je me suis trouvé exactement à deux minutes des drames, etc.
Bref, je n’ignore pas que je vais mourir un jour, ce qui ne me réjouit pas, d’ailleurs ! Non, c’est plutôt la gestion brutale de cette crise qui m’interpelle.

Enfin, concernant le troisième point, je ne suis pas forcément un adepte de la théorie du complot, mais cela ne m’empêche pas de m’interroger, sans forcément avoir une opinion tranchée sur le fait de savoir s’il s’agit de manipulation, d’hystérie ou d’incompétence ?

A propos d’hystérie,  je suis effaré par une couverture médiatique absolument disproportionnée et qui ne manque pas d’entretenir  une véritable psychose et une angoisse permanente. Tout cela  dans une ambiance au travers de laquelle une méfiance générale s’installe et qui va durablement modifier nos relations sociales.

Je suis attristé par ce que nous vivons, c’est pour cela que je ne suis pas mécontent que mon adolescence, cette période de la vie durant laquelle se bâtit l’adulte que l’on deviendra, n’ait pas connu ce que nos jeunes connaissent aujourd’hui.

L’humanité a vécu d’horribles périodes, entre les pandémies, les guerres, les séismes et autres catastrophes, mais est-ce bien raisonnable d’affirmer que notre situation actuelle pourrait être pire en se référant à ces catastrophes  passées ?

D’abord, nous devons toujours rechercher le meilleur pour notre vie quotidienne en société, ensuite nous ignorons la gravité de ce qui nous attend. On nous le répète à longueur de temps et cela se confirme  un peu plus chaque jour : nous allons connaitre une  terrible crise économique qui imposera à certains  des conditions de vie dont ils ne pourront  se satisfaire au motif qu’il y aura eu peut-être pire avant.

Justement, je sais que le bien le plus précieux reste la santé et je suis heureux que malgré les épreuves, je dois un peu près encore en bonne santé  ! Je sais aussi  que certaines situations peuvent altérer cet état, aussi je déplore la brutalité et l’inégalité  avec lesquelles cette crise est gérée.

J’en profite aussi pour souligner qu’il y a des affirmations plus faciles à tenir lorsque l’on n’est pas directement concerné !

Pour conclure et à propos des années qui passent, puisqu’il est question d’anniversaire, je citerai Jean d’Ormesson : « cela ne me dérange pas de vieillir, c’est encore la meilleure façon de ne pas mourir » !

eric@pariset.net

Suite du dictionnaire avec le X comme boXe…

Certes, le mot boxe ne commence pas par un X, mais c’est bien cette consonne qui « claque » parmi les trois autres lettres. Et puis, pour l’illustrer au sein de mon dictionnaire des arts martiaux, il n’est pas facile de trouver des personnages et des éléments qui débutent par ce X en question. A moins d’inverser le dernier mot  d’arts martiauX.

J’ai pratiqué la boxe française et j’ai obtenu le brevet d’état en 1978. Je me suis entrainé à la boxe américaine chez Dominique Valéra, à l’époque où « le King » était installé rue de Chatillon dans le XIVème arrondissement. C’est le regretté Richard Dieu qui le secondait. La boxe américaine, c’était le nom que l’on attribuait aussi au Full Contact avant qu’il devienne le kick-boxing.

Aujourd’hui il existe différents types de boxe, avec des appellations diverses et parfois originales. De la boxe thaïlandaise à la boxe chinoise, sans oublier bien évidemment la plus connue, à savoir la boxe anglaise, que l’on surnommait aussi « le Noble Art » au début du XXème siècle. Certains proposent des variantes sous l’appellation de boxe-défense, gym-boxe, etc. Ces différentes boxes connaissent un franc succès depuis quelques années.

Des efforts ont été faits pour que ces disciplines soient avant tout, éducatives et non pas destructives. L’art et la manière de ne pas recevoir les coups de l’adversaire, surtout lorsqu’ à l’entraînement il devient « partenaire ».

Comme dans beaucoup de domaines et sans doute encore davantage dans les arts martiaux et les disciplines de combat, le professeur est déterminant, pour ses qualités techniques et pédagogiques, mais aussi et surtout pour l’état d’esprit qu’il installe lors des séances.

Les techniques utilisées sont de véritables armes (naturelles, mais armes quand même) cela peut donc rapidement dégénérer et devenir l’école de la violence. A fortiori dans les arts qui utilisent les « frappes ». Physiquement, mais aussi moralement, il peut y avoir de gros « dégâts ». Recevoir un « direct » en pleine figure n’entraînera peut-être pas plus de traumatismes physiques qu’un uchi-mata non contrôlé, mais psychologiquement, être atteint au visage (à la tête qui est en quelque sorte le « poste de commandement »), est plus difficilement acceptable. Il n’y a qu’à constater les expressions du visage lorsque c’est le cas. Sans compter que le cerveau – pour ceux qui sont dotés de ce précieux attribut – est un organe des plus fragiles et que la répétition des traumatismes à son égard entraîne fatalement des dommages irréversibles et dramatiques.

Dans mon enseignement je ne néglige aucune des trois composantes du ju-jitsu et l’atemi-waza (technique des coups) occupe la place qu’il mérite. Dans certaines séances un travail de renforcement à l’aide des gants – qui se rapproche de la boxe – est proposé. Une des spécificités du ju-jitsu réside dans le fait que « le coup » n’est pas une finalité, comme c’est le cas dans d’autres disciplines et notamment la boxe. Il faut donc en tenir compte lors de l’apprentissage et des entrainements.

Je vois plusieurs intérêts dans la pratique de la boxe (et de l’atémi-waza ) ; l’efficacité pour le travail à distance, pour arrêter ou déséquilibrer l’adversaire, mais aussi et surtout pour l’entraînement à ne pas recevoir les coups (esquives et parades). Ensuite, il y a incontestablement un travail « cardio » très complet, un apport de souplesse quand il est question des membres inférieurs et enfin je n’oublie pas deux aspects qui ne sont pas négligeables, à savoir l’expression corporelle et l’aspect ludique ; ce qui implique que la pratique doit être tout en contrôle, donc proposée intelligemment. Si tel n’est pas le cas, elle peut s’avérer destructrice et contre productive en terme d’éducation.

eric@pariset.net

 

Reprise…

On ne peut que se réjouir de la parution du décret qui autorise à nouveau – enfin – la pratique des sports de combat dans notre pays.

Malheureusement mon dojo parisien n’a pu se permettre d’attendre cette date qui signifie la fin d’une période aussi historique qu’inouïe.

Espérons que cette reprise sera complète et durable et que les contraintes sanitaires ne seront pas gênantes.

Tout comme il ne faudrait pas qu’une deuxième vague vienne la remettre en question ; on nous rebat les oreilles d’infos anxiogènes sur cette possibilité à longueur de journée.

Ensuite il serait souhaitable que les renouvellements d’adhésions ne soient pas encore moins importants que lors d’une saison « normale » ; chaque année 50 % d’adhérents ne reprennent pas le chemin du dojo. En début de saison, Il faut donc que ces abandons soient compensés par de nouvelles recrues. Celles-ci ne seront-elles pas frileuses par rapport à d’éventuels risques de contamination et/ou freinées pour des raisons économiques ?

Quant à mon dojo et sa triste fin, on me demande si je n’ai pas été trop vite ? A cela je répond qu’exerçant à titre privé avec un loyer parisien très important, je n’avais pas le choix. D’autant qu’il n’y a pas que le loyer et, comme expliqué plus haut, cette reprise risque d’être fragile. Surtout à Paris avec de grosses dépenses fixes et, par exemple, l’interdiction d’utilisation des vestiaires (en vigueur pour le moment) qui n’est pas compatible avec la vie d’une très grande ville. Imaginons un pratiquant en judogi dans le métro !

Il ne suffit pas d’avoir l’autorisation de reprendre. Ouvrir le dojo est une chose, avoir un nombre suffisant d’élèves pour faire face aux frais de fonctionnement et pouvoir « gagner sa vie » en est une autre !

Cette reprise, malgré des incertitudes fondées, est une excellente nouvelle pour tous les amoureux des arts martiaux. L’interdiction, en plus d’être frustrante physiquement, était dérangeante psychologiquement.

eric@pariset.net