Un deuxième S, comme Stage et/ou Soulac

Le dernier article consacré à la lettre S de mon dictionnaire traitait du mot Samouraï. Rien ne m’interdit de proposer un deuxième article pour la même lettre ; aussi c’est S comme Stage, mais également S comme Soulac-sur-Mer que j’ai choisi. Les deux mots ayant été intimement liés vingt cinq années durant. (La photo d’illustration nous ramène au milieu des années 2000.)

J’aurai pu choisir S comme solidarité, mais cette denrée est devenue tellement exceptionnelle…

Revenons aux stages et à Soulac.

Les stages ont été des moments importants de ma vie, la station balnéaire de Soulac-sur-Mer également.

Dans le tiercé de mes activités professionnelles (en termes de temps passé)  les stages arrivent en deuxième position entre la dispense des cours et les démonstrations. Quant à Soulac-sur-Mer, pendant un quart de siècle je m’y suis rendu tous les étés, de 1986 à 2010.

Des stages, j’ai eu le plaisir de pouvoir en animer des dizaines, soit à titre privé ou dans un cadre fédéral. Sur une demi-journée, une journée, un week-end ou bien une semaine, comme à Soulac, à Paris, en province et à l’étranger. Pour ceux qui se déroulaient en dehors de « mon territoire », c’était à chaque fois l’occasion de retrouver des habitués, mais aussi de faire de nouvelles connaissances qui, pour certaines, se sont perpétuées en relations durables.

Pour les pratiquants, le stage vient en complément d’un travail régulier effectué dans son dojo (lorsqu’il est ouvert) ; il permet de se faire plaisir en s’adonnant de façon intensive à son art et d’accélérer la progression. C’est un travail complémentaire sur le plan technique et physique, mais c’est aussi un engagement plus important qui démontre une implication qui ne l’est pas moins. Certes tout le monde n’a pas la possibilité de participer, en plus des entrainements hebdomadaires, à ces rassemblements. Ceux qui ne peuvent s’y consacrer ne sont pas pénalisés, ce sont ceux qui le peuvent qui sont favorisés.

Quant à S comme Soulac-sur-Mer, c’est avec un réel plaisir que je retournais chaque été dans cette belle et attachante station balnéaire de la Pointe de Grave dans le département de la Gironde. Stage et Soulac ont été associés pour le meilleur. Pouvoir passer des vacances, en profitant tout à la fois des bienfaits de l’océan dans un lieu de villégiature à taille humaine en pratiquant intensivement chaque jour sa discipline martiale ne peut être que bénéfique sur bien des plans : la santé, le moral et les progrès. Chaque année, il y avait un mélange de jujitsukas habitués et d’autres qui découvraient une des « perles du Médoc ». Le stage rassemblait des élèves mais aussi des professeurs venus de toute la France et de pays européens.

Pour les autres stages, ceux qui sont organisés en province et à l’étranger, ils permettent de découvrir de nouvelles contrées, de nouvelles personnes et ils sont l’occasion d’échanges passionnés sur le ju-jitsu, et lorsqu’il s’agit du ju-jitsu en France, il y a beaucoup à dire.

Après l’année 2010, étant « empêtré » dans une suite de graves problèmes qui devaient absolument être réglés et ne pouvant être sur tous les fronts, j’ai arrêté les rendez-vous girondins. J’avais pensé reprendre cet été, soit dix ans après, j’ai « malheureusement » été bien inspiré de ne pas donner suite…  Alors peut-être en 2021 !

eric@pariset.net

S comme Samouraï, bien évidement…

Pour la lettre S de mon dictionnaire c’est tout naturellement que je me suis arrêté à « Samouraï ».

Bien qu’en ce moment, même animé par l’esprit guerrier qui caractérisait ces hommes, nous ne pouvons que subir les évènements. Il est pourtant indispensable de les évoquer, ils ne pouvaient être absent de ce dictionnaire.

Comme pour chaque personnage ou élément qui compose ce dictionnaire, l’objectif n’est pas de faire un exposé sur le sujet, mais d’exprimer ce qu’il a représenté et représente pour moi.

Samouraï : ce mot je l’ai lu, entendu et prononcé un nombre de fois incalculable ; peut-il en être autrement dans la vie d’un pratiquant d’arts martiaux ? Ces valeureux guerriers sont indissociables d’une carrière consacrée aux disciplines de combat ; presqu’au point de souhaiter leur ressembler, non pas dans leur « métier », mais pour leur esprit ; acquérir cette farouche volonté, cette rigueur, cette efficacité et ce sens du raffinement dans le combat, et cet attachement à de belles valeurs, autant d’éléments qui ont participé à leur gloire et à leur histoire. Encore maintenant, Il n’y a pas plus beau compliment que celui de recevoir le qualificatif de samouraï. Non pas pour le maniement du sabre que nous ne portons plus, mais pour les valeurs exprimées ci-dessus.

Ceci étant, ne nous méprenons pas, ces hommes n’étaient pas des tendres et les combats qu’ils se livraient se finissaient par la mort d’un des deux protagonistes. Nous n’en sommes plus là, bien heureusement.

Pour ma part, deux mots me viennent spontanément à l’esprit pour les qualifier (et qualifier un « samouraï des temps modernes ») : courage et respect.

Le plus célèbre d’entre eux est incontestablement Miyamoto Musashi (1584-1645), grâce à son parcours, ses combats et ses écrits. On ne peut qu’encourager la lecture du « Traité des cinq roues ». Dans ce recueil, le samouraï philosophe fait état des cinq éléments qui représentent la nature entière : Terre, Eau, Feu, Vent, Vide. Il invite à transposer l’art de l’épée ; de l’appliquer à la vie quotidienne et qu’il devienne un art de vivre.

Je conclurai par une petite histoire : « Trois mouches » (déjà publiée sur mon blog). Réalité ou légende ? Peu importe, elle est savoureuse et démontre que parfois on peut vaincre sans combattre.

Trois mouches.

Dans une auberge isolée, un samouraï est installé, seul à une table. Malgré trois mouches qui tournent autour de lui, il reste d’un calme surprenant. Trois rônins entrent à leur tour dans l’auberge. Ils remarquent aussitôt avec envie la magnifique paire de sabres que porte l’homme isolé. Sûrs de leur coup, trois contre un, ils s’assoient à une table voisine et mettent tout en œuvre pour provoquer le samouraï. Celui-ci reste imperturbable comme s’il n’avait pas remarqué la présence des trois rônins. Loin de se décourager, les rônins se font de plus en plus railleurs. Tout à coup, en trois gestes rapides, le samouraï attrape les trois mouches qui tournaient autour de lui, et ce, avec les baguettes qu’il tenait à la main. Puis calmement, il repose les baguettes, parfaitement indifférent au trouble qu’il venait de provoquer parmi les rônins. En effet, non seulement ceux-ci s’étaient tus, mais pris de panique, ils n’avaient pas tardé à s’enfuir. Ils venaient de comprendre à temps qu’ils s’étaient attaqués à un homme d’une maitrise redoutable. Plus tard, ils finirent par apprendre, avec effroi, que celui qui les avait si habilement découragés était le fameux Miyamoto Musashi.

eric@pariset.net

Suite du dictionnaire avec la lettre Q comme Qualité.

La qualité, c’est ce que nous cherchons à améliorer chez nous, c’est ce que nous aimons trouver chez les autres et ce que nous sommes en droit d’attendre de la part des différents services qui peuplent notre quotidien. C’est aussi l’objectif à atteindre dans l’accomplissement d’un métier, pour ceux qui ont la chance d’assurer une profession que l’on peut qualifier de directement utile. Tout métier est utile, mais pour certains la reconnaissance est plus concrète. Dans le domaine de la médecine, dans celui de la recherche, dans le secteur de l’éducation et de l’enseignement (j’en oublie sans doute). Après, l’amélioration de la qualité de la vie passe par les loisirs, pour ceux qui ont la chance de pouvoir s’en offrir, et au travers desquels nous allons nous exprimer, nous détendre et faire des découvertes enrichissantes intellectuellement et artistiquement.

Lorsque l’on a la chance d’enseigner les arts martiaux, nous nous situons à la fois dans l’éducation et dans les loisirs. C’est aussi un métier à forte responsabilité puisqu’il s’agit d’inculquer des techniques de combat qui permettent dans des situations extrêmes « d’anéantir » un adversaire. Un haut niveau d’exigence doit être imposé, pour le moins. La conscience professionnelle, dont est pourvue la grande majorité des enseignants, impose une responsabilité, celle d’être irréprochable techniquement et pédagogiquement, mais aussi et surtout dans le comportement.

Dans mon « dico », l’évocation de cette lettre Q pour Qualité est l’occasion de mettre en avant celles qui me sont chères, qui m’apparaissent prioritaires. Les qualités vers lesquelles ont doit tendre. Pour chacune d’elles, j’ai choisi quelques mots afin de donner une définition personnelle très concise qui, à l’occasion d’un ouvrage plus étoffé, pourra être davantage développée. La politesse : pour bien commencer toute relation et vivre harmonieusement. L’honnêteté : afin de pouvoir évoluer en confiance. Le respect : indispensable pour le bien-être de la société. Cette qualité est en liaison directe avec la politesse. Le respect des personnes. Sans ce respect, il n’y a plus rien. La volonté : pour réaliser. Le courage : pour surmonter les obstacles qui ne manquent pas de se dresser devant nous au cours de l’existence, pour peu que l’on ait eu l’opportunité, le courage et les compétences pour entreprendre. La solidarité : pour une entraide indispensable dans certaines circonstances.La reconnaissance : pour ne pas oublier. La reconnaissance du ventre, mais aussi celle du cœur. La fidélité : aux personnes, aux principes et aux convictions. L’intelligence : c’est utile ! Enfin, je n’oublie pas l’honneur, la plus digne des qualités, surtout dans nos arts martiaux.

Certaines de ces qualités sont innées, elles se cultivent et s’entretiennent ; d’autres s’acquièrent grâce à l’éducation et à la motivation fournie par l’éducateur, le professeur, l’entraîneur. On en revient toujours à l’éducation, ce socle indispensable à toute société civilisée, pour que cette société puisse s’élever sans risque de s’effondrer tôt ou tard. Cet article n’est sans doute pas d’une grande originalité, certains penseront qu’il s’agit là d’évidences, j’assume et je revendique le droit d’enfoncer ce clou, parce qu’il apparait que certaines de ces évidences, sont loin, même très loin d’être mises en valeur et donc d’être appliquées. (Certaines de ces valeurs sont affichées sur les murs des dojos ; parfois juste affichées…)

« En creux » de chacune de ces qualités on trouve les défauts, ceux que j’exècre : l’impolitesse, la malhonnêteté, l’irrespect, la mollesse, la couardise, l’égoïsme, l’oubli, la lâcheté, la trahison (celle-là, pour l’avoir beaucoup subie, je la connais bien), la bêtise et le déshonneur. Un sacré inventaire contre lequel il ne faut pas cesser de lutter, pour cela il faut être doté d’optimisme : une qualité indispensable

La lettre P comme…Bernard Pariset

Je profite de ce repos forcé pour continuer la « rediffusion » de mon dictionnaire des arts martiaux.

Aujourd’hui c’est de la lettre P de mon dictionnaire dont il est question. Pouvait-elle être consacrée à une autre personne que celle évoquée dans les lignes qui suivent ?

P comme Bernard Pariset

En 1947, un jeune homme de dix-sept-ans se présente devant le 11 de la rue des Martyrs, dans un des quartiers les plus attachants de la capitale, le IXème arrondissement. Sur le mur, à coté de la porte d’entrée, une plaque porte l’inscription : « Club français de jiu-jitsu ».

Le jeune homme s’appelle Bernard Pariset ; il a été mon professeur, mon mentor, mais aussi – et surtout – mon père.

Il était né à la fin de l’année 1929 à Pantin, en Seine-Saint-Denis et a passé son enfance dans le XIIème arrondissement. Sa préadolescence a été marquée par la seconde guerre mondiale et des difficultés à tenir en place.

Très vite s’est imposé le fait que rester assis toute la journée n’était pas vraiment pour lui ; il préférait les activités physiques, les randonnées dans la campagne, le camping sauvage, les baignades en rivière, c’était un amoureux de la nature. Doté d’une curiosité naturelle, toutes ces activités plutôt physiques, ne l’empêchaient pas de nourrir un esprit très vif. Cet amour de la nature a sans doute été une des raisons de son rapprochement avec une matière noble : le bois. En effet, il est devenu apprenti dans une ébénisterie. Il possédait un certain talent dans la sculpture. Les figurines de samouraïs et autres judokas et ju-jitsukas créées dans la dernière partie de sa vie, en attestent. Mais sa véritable passion c’était bien évidemment le judo.

D’un gabarit modeste et d’un tempérament bouillonnant, il avait entendu parler de « ce judo », cette lutte un peu particulière dans laquelle les petits pouvaient faire tomber les grands. Par la suite il ne s’est pas gêné pour prouver que c’était possible, et de quelle manière !

Dans ce dojo de la rue des martyrs, Il franchit rapidement les échelons et il en devient très vite la référence. En 1954, au décès de son professeur, Roger Piquemal, il en prend les commandes et cela jusqu’à sa disparition en 2004.

A ses débuts, de son propre aveu, sa technique était assez rudimentaire. Les règles d’arbitrage étant beaucoup plus « libres », les combats d’entraînement (les randoris) offraient une physionomie différente de celle qui existe actuellement. Attraper la jambe de l’adversaire et pousser jusqu’à ce qu’il chute lui plaisait beaucoup et lui convenait tout à fait. Le problème, qui n’en était pas un, c’est que très vite il n’y avait plus un combattant au club pour résister à cette technique rustre, mais incontestablement ravageuse. Ensuite, sa technique s’est adaptée à sa morphologie et aux besoins du « toutes catégories », avec ses redoutables « mouvements d’épaules » (comme on disait à l’époque pour désigner les seoi nage), et puis elle s’est très vite affinée dans tous les domaines. Le travail au sol est notamment devenu un secteur dans lequel il faisait référence.

Ses « spéciaux » et un tempérament de combattant hors du commun lui ont permis de se constituer un palmarès exceptionnel. Champion de France et d’Europe, demi-finaliste aux premiers championnats du Monde qui se déroulaient à Tokyo en 1958, autant de titres conquis en « toutes catégories » ce qui leur confèrent davantage de saveur et un incontestable respect, surtout lorsqu’on mesure à peine un mètre soixante dix.

Mais il n’a pas été qu’un champion d’exception, il a occupé aussi différentes fonctions au sein de la fédération de judo : conseiller technique, entraîneur national, directeur des équipes de France, membre de la commission nationale de grades. On lui doit aussi la remise en valeur du ju-jitsu au début des années 1970, ce qui n’est pas rien ! Il a aussi publié différents ouvrages sur le judo et évidement sur le ju-jitsu.

On ne peut évoquer ce fantastique parcours sans rappeler qu’avec Henri Courtine ils ont été les premiers 6ème dan en 1968. Il en a été de même du 7ème au 9ème dan. Ils étaient les meilleurs adversaires sur les tatamis de compétition et les meilleurs amis dans la vie. Leurs styles différents et leurs caractères aux antipodes ont été d’une exceptionnelle complémentarité, pour servir et marquer de leurs empreintes le judo français.

Durant toute sa carrière il ne s’est jamais détaché de la base, puisqu’il n’a cessé de s’occuper de son club de la rue des Martyrs (que l’on ne peut s’empêcher de lui associer totalement). Ce qui a permis à des centaines de pratiquants de profiter d’une pédagogie aussi pragmatique qu’efficace. Sous sa houlette le « Club Français » s’est constitué en judo un palmarès impressionnant par équipe ; l’équipe A étant à plusieurs reprises confrontée à l’équipe B en finale du championnat national ; le club est aussi devenu champion d’Europe par équipe. Le dojo n’a pas manqué non plus de produire de belles individualités.

Le fait de ne jamais quitter cette base que représente un club dans lequel se côtoient des pratiquants de tous âges et de toutes conditions sociales, de s’occuper aussi bien des ceintures blanches que des plus hauts gradés, tout cela lui permettait d’être à l’écoute de tous et d’observer ainsi l’ensemble des motivations. Faire le constat, par exemple, que si les titres glanés apportaient du prestige, ce n’était pas forcément ce qui intéressait le « samouraï de base ». Celui-ci étant souvent, par exemple, attiré par l’aspect self-défense.

En dehors des tatamis, il n’était pas dénué de passion. L’équitation était son deuxième centre d’intérêt, à tel point que dans ce département de l’Yonne qu’il aimait particulièrement, il s’est occupé durant de nombreuses années d’un centre équestre.

Dans la vie, beaucoup de choses l’intéressaient, même s’il posait sur les soubresauts de notre société un regard circonspect et parfois navré. Il était pourvu d’un bon sens désarmant et sa liberté d’action était son bien le plus précieux ; il a toujours refusé les contraintes que pouvaient imposer des organisations trop rigides dans leur fonctionnement. Il avait aussi comme caractéristique un « esprit de conquête » qui le faisait toujours aller de l’avant.

Diminué physiquement en avançant en âge, il « payait » les excès d’une carrière sportive durant laquelle il ne s’était jamais ménagé, il n’a pas voulu envisager de finir sa vie sans pouvoir vraiment la vivre… Il était parfois excessif ! Il l’a prouvé malheureusement une dernière fois le 26 novembre 2004, avant de rejoindre « le jardin du souvenir »  des samouraïs.

Ci-dessous, quelques citations que nous lui devons. Humoristique : «Les catégories de poids ont été inventées pour mettre les poids lourds à l’abri des plus légers ». Compatissant (s’adressant à une personne de grande taille) : «Vous êtes grand, mais ce n’est pas de votre faute ».  Il était aussi très bavard et dans les réunions, c’était très drôle de l’entendre demander à ses interlocuteurs, qui ne pouvaient pas « en placer une », de bien vouloir le laisser s’exprimer.

Il avait aussi un sacré caractère, je suis bien placé pour le savoir, cela n’a pas été tous les jours facile d’être le fils unique de Bernard Pariset, mais est-ce possible de faire une telle carrière sans caractère ?

En janvier 2005, la fédération de judo lui a rendu un bel hommage lors de la cérémonie des vœux. A cette occasion « l’immense » (dans tous les sens du terme) Anton Geesink s’était déplacé et avait pris la parole pour un discours des plus émouvants. En 2006 le ministère des sports l’a promu « gloire du sport». Hommage et récompense amplement mérités.

Sur la photo d’illustration, nous sommes en 1958 à Tokyo, Bernard Pariset se fait remettre des mains du fils de Jigoro Kano son diplôme de demi-finaliste aux championnats du Monde toutes catégories

eric@pariset.net

O comme Opposition, plus exactement Non Opposition

Aujourd’hui on s’arrête à la lettre O comme Opposition et plus exactement la non-Opposition, principal symbole de notre discipline.

Surmonter l’habitude d’employer la force contre la force est une des choses les plus difficiles de l’entraînement du judo (et du ju-jitsu). On ne peut espérer progresser sans y parvenir. Jigoro Kano

Il serait dommage d’oublier que la non-opposition est « le principe de base » du ju-jitsu, notamment celui de l’Ecole traditionnelle Yoshin Ryu (Ecole du cœur de saule), l’une de celles qui avait largement inspiré Jigoro Kano lorsqu’il a souhaité « ressusciter » notre art martial. Malheureusement certains ont tendance à l’oublier.

Avec la non-opposition, nous sommes en présence d’un principe d’une grande intelligence. Il mériterait de ne pas être simplement utilisé dans les affrontements physiques, mais aussi dans le quotidien. L’opposition frontale ne peut donner raison qu’au plus fort physiquement et dans la société elle ne débouche jamais sur un accord constructif. N’allons pas jusqu’à mettre en avant le dicton populaire suivant : « il vaut mieux céder à l’âne que le tuer », mais on peut s’en inspirer.

Plusieurs principes sont attachés au ju-jitsu, mais celui de non-opposition, régit les autres : addition de forces, utilisation de celle de l’adversaire, action-réaction, etc. Ces principes ne sont applicables qu’en association avec celui de non-opposition.

Il s’agit tout simplement de se retirer de la trajectoire d’une force qui avance sur vous. Ensuite – première possibilité – sans s’en occuper davantage, la laisser s’éteindre toute seule en allant mourir dans le néant. Autre possibilité (si l’on veut maîtriser celui qui attaque), celle qui consiste à conduire la force en question, en y ajoutant la notre ; ce sont les principes d’utilisation de la force de l’adversaire et de l’addition des forces. On peut aussi y ajouter simultanément un obstacle, au niveau des jambes de l’attaquant, par exemple, afin de le faire chuter. Cette dernière description, sommaire j’en conviens, pourra servir de première explication pour une technique comme hiza-guruma, permettant de bien la comprendre et de bien l’assimiler ; il s’agit là d’un exemple dont je me suis déjà inspiré.

Ce principe de non-opposition n’est en aucun cas un signe de renoncement ou de lâcheté, mais tout simplement l’incarnation du bon sens. Force contre force, c’est forcément…le plus fort qui gagne. Et puis, utiliser la force de l’adversaire en commençant par ne pas s’y opposer, c’est aussi un moyen de ne pas gâcher sa propre énergie.

Cette non-opposition, comme indiqué en introduction de cet article, est également utile dans les rapports humains, c’est ce que prônait Jigoro Kano, lorsqu’il disait : « Le conflit se fait au détriment de tous, tandis que l’harmonie se fait au bénéfice de chacun ».

Ce principe qui permet de vaincre la force brutale, qui avec un peu d’entraînement donne la possibilité à tous de ne pas subir la loi du plus fort est, de mon point de vue, sans jeu de mot, la principale FORCE du ju-jitsu.

Terminons cet article avec une dernière citation : «Qui apprend à céder est maître de la force » Lao Tseu.

Un deuxième N, comme Nage-waza…

Un deuxième N pour mon dictionnaire,

Après le ne-waza (travail au sol), j‘évoquerai donc le nage-waza. En effet il me semble impossible d’ignorer ce domaine majeur qui est au moins aussi important que le travail au sol et qui m’a apporté beaucoup de plaisir, que ce soit dans l’apprentissage, le perfectionnement et l’exécution. De plus ces deux domaines sont complémentaires et compatibles

La famille des projections est une composante incontournable du judo mais aussi du ju-jitsu. Que ce soit en compétition de judo, ou dans le domaine de la self-défense, les affrontements commencent debout. En judo, ne sont utilisées que les projections ; en ju-jitsu on y ajoute les atemis (les coups) lorsque l’on est « à distance » et les projections sitôt le contact établit. Elles sont donc incontournables. Et puis, à l’occasion de mes nombreuses démonstrations, les projections occupaient une place prépondérante ; elles ont largement contribué à l’aspect spectaculaire de ces prestations.

L’efficacité, l’esthétisme et l’aspect ludique sont les trois raisons qui me font aimer ce domaine majeur qu’est le nage-waza.

Les projections peuvent être tout à la fois efficaces et esthétiques. Leur maîtrise parfaite demande beaucoup de travail, de persévérance et de rigueur, mais quelle merveilleuse récompense que celle de réaliser un bel uchi-mata, par exemple. Coté efficacité, elle est incontestable, à moins de n’avoir jamais chuté et par conséquent ne pas pouvoir imaginer les conséquences d’une « réception » sur un sol dur.

Toujours concernant l’efficacité, le principal intérêt des projections réside dans le fait qu’elles ont été conçues pour être appliquées en utilisant des principes et des mécanismes qui ne demandent que peu ou pas de force. Leur parfaite exécution répondant ainsi à une des maximes de Jigoro Kano « minimum d’effort et maximum d’efficacité ». Pour cela il faut juste être en capacité d’exécuter le bon geste au bon moment, cela s’acquiert à force de persévérance. Le premier de ces principes consiste à utiliser la force de l’adversaire. Il y en a d’autres comme celui d’addition de forces, de bascule au dessus du centre de gravité, entre autres.

L’utilisation des projections sera différente selon que l’on se situe dans le domaine de la « self-défense » ou en opposition lors de randori (exercice libre d’entraînement) et de compétition de judo. En matière d’auto-défense l’application se fera la plupart du temps directement. Exemple : l’adversaire vous pousse, vous appliquez hiza-guruma. Pour les néophytes, il s’agit d’une projection qui consiste à faire le vide devant celui qui porte l’attaque, en ajoutant en même temps à sa poussée une traction tout en lui « barrant » le bas de son corps au niveau des jambes (une sorte de « croche patte » très amélioré). Dans le randori et à fortiori en compétition de judo, les deux protagonistes maîtrisant d’une part l’art des projections et d’autre part s’attendant à tout moment à devoir faire face à une attaque de ce type, la concrétisation se fera avec les notions d’enchaînements, de confusions, de contre-prises, etc. Il n’empêche que pour maîtriser parfaitement l’art des projections un ju-jitsuka ne devra pas négliger l’ensemble des méthodes d’entraînement qui permettent d’envisager des réactions de la part de l’opposant.

Enfin, concernant l’aspect ludique (à l’entraînement évidemment) il est bien réel. Nous sommes aussi dans le loisir et il ne serait pas sain d’être continuellement dans les conditions psychologiques identiques à celles d’une agression.

Lors des séances, le challenge réside donc dans le fait de faire tomber quelqu’un qui ne le veut pas ! Pour cela on utilisera la maîtrise technique, la vitesse, les fautes du partenaire, celles qui sont directes et celles que l’on a provoquées à l’aide de feintes et de confusions. C’est une sorte de jeu dans lequel on trouve beaucoup de plaisir, de satisfaction, à la condition de ne pas être celui qui chute tout le temps ! Cela doit se concevoir sans aucune intention d’humilier le partenaire (encore moins de l’écraser) mais simplement avec celle de progresser par rapport à soi-même.

Le nage-waza est aussi le secteur qui comporte le plus de techniques et par conséquent d’enchaînements et de combinaisons possibles. Enfin, chacun pourra quelque peu les adapter en fonction de son gabarit.

C’est donc un domaine efficace, spectaculaire et enthousiasmant. Sans oublier le développement physique qu’il ne manquera pas d’apporter et l’épanouissement du à ce qui est aussi une belle expression corporelle.

Ippon-seoe-nage, ko-uchi-gari et yoko-tomoe-nage sont les projections que j’affectionne tout particulièrement. Les initiés reconnaitront ces grandes techniques.

Enfin, il aurait inévitablement manqué quelque chose à mes démonstrations si ces techniques n’existaient pas !

eric@pariset.net

N comme Ne-waza, le travail au sol…

Mon dictionnaire des arts martiaux se poursuit aujourd’hui avec la lettre N. N comme Ne-waza (le travail au sol).

Voilà un secteur que j’affectionne particulièrement. L’hérédité, sans doute. On le retrouve en judo et en ju-jitsu, bien sûr.

C’est un domaine qui possède une richesse technique exceptionnelle, dans lequel on peut s’exprimer très longtemps, qui offre la possibilité d’aller au bout de l’effort et enfin il n’est pas dénué d’un certain aspect ludique qui ne gâche rien, bien au contraire.

L’objectif n’est pas de détailler sa composition technique mais, comme je le fais dans ce dictionnaire, c’est de revenir sur ce qui me plait dans ce domaine. Il est malgré tout utile de remarquer que le panel technique du travail au sol est impressionnant : clefs, étranglements, immobilisations et toutes les possibilités de combinaisons offertes.

Les détracteurs du travail au sol se plaignent d’une promiscuité qui peut paraître gênante, mais aussi du fait que l’on n’est jamais au sol dans la réalité. Les plus présomptueux affirment qu’ils ne laisseront pas le loisir à un agresseur de venir au contact. D’autre part, certains (sans l’avouer) trouvent qu’il n’est pas agréable, à l’entraînement, d’être souvent « en dessous », ce qui arrive lorsque l’on n’est pas à l’aise dans ce secteur. On touche là à un cercle vicieux dans la mesure où moins on le pratique, moins « on est bon », et moins « on est bon » moins on l’aime et donc moins nous sommes enclins à le pratiquer. Il n’y a qu’à renverser le problème en pratiquant davantage.

Je reviens sur les points forts de ce domaine, ceux que j’apprécie particulièrement. En plus d’une incontestable efficacité si l’on est amené au sol, il y a l’engagement total qu’il autorise à l’entraînement, la possibilité de s’y exprimer même en avançant dans l’âge et enfin l’aspect ludique.

Développons ces trois points. Tout d’abord, à l’entraînement, le ne-waza nous offre effectivement un engagement complet dans la mesure où il est possible d’aller au bout de l’action et de l’effort, sans qu’il y ait d’atteintes à l’intégrité physique du partenaire (si les deux respectent les règles préétablies). Il s’agit là d’une grande satisfaction.

Il est possible de s’y exprimer longtemps, même en avançant dans l’âge, puisque la stratégie et la technique sont plus importantes que la vitesse : « Le serpent n’avale pas la grenouille en une fois ».

Quant à l’aspect ludique, il est incontestable. Les joueurs d’échec affirment qu’ils y trouvent un parallèle. Il est intéressant, par exemple, de pouvoir préparer plusieurs « coups à l’avance », surtout dans la mesure où la vitesse n’est pas déterminante (à l’inverse du travail debout). On peut donc tranquillement tendre des pièges et malicieusement, comme le chat joue (cruellement, lui) avec la souris, prendre son temps et faire durer le plaisir jusqu’à ce que le partenaire tombe dans la toile d’araignée. Non, nous sommes ni dans les fables de La Fontaine, ni dans une animalerie, mais bien dans le ne-waza !

SI pour le néophyte le ne-waza n’offre pas beaucoup d’intérêt coté spectacle, en revanche un pratiquant confirmé appréciera l’évolution d’un combat, et pas seulement sa finalité, justement, mais les moyens (les techniques, les enchaînements) et la stratégie utilisés afin d’y parvenir.

A titre plus personnel, j’ai été très vite à bonne école ; en effet, mon père excellait dans ce domaine.

Dans chacun des trois grands groupes de techniques qui forment le ne-waza, mes préférences vont à juji-gatame pour les clefs, okuri-eri-jime pour les étranglements et kuzure-kami-shiho-gatame pour la famille des immobilisations. Les initiés s’y retrouveront.

Je pense que ce domaine mérite que lui soit associée l’appellation  de « science du combat ».

Cependant, il serait dommage de ne se consacrer qu’à ce secteur, si passionnant soit-il ! Pour un ju-jitsu complet, n’oublions pas les coups (atemi-waza) et les projections (nage-waza).

eric@pariset.net

La lettre M de mon dictionnaire…

Comme Thierry Lhermite, allias Popeye dans « Les Bronzés », l’explique si bien : « Mawashi-géri est un coup de pied circulaire, parce qu’il est…circulaire ». Voilà une pédagogie simplifiée ! Et puis : «  ça vient de très loin, du Japon ». Trêve de plaisanterie, sinon : « on me retire ma licence » ! Ce passage culte de la leçon de Karaté, du film qui ne l’est pas moins, nous apprend aussi qu’il est utile d’avoir une certaine souplesse pour pratiquer cet atemi et qu’un bon échauffement s’avère indispensable !

Plus sérieusement, revenons à mawashi-géri ce « coup de pied » qui en plus d’être efficace est esthétique. Il demande peut-être plus de travail et davantage d’habilité que d’autres atemis ; il a ma préférence, c’est pour cette raison que je lui réserve la lettre M de mon dictionnaire.

Une fois bien assimilé, son efficacité est incontestable, surtout lorsqu’il est utilisé dans des situations particulièrement adaptées : en décalé par rapport à la ligne des points vitaux, par exemple.

Ce « coup de pied » on le retrouve dans différents arts martiaux et disciplines de combat sous d’autres appellations, ne serait-ce que dans notre boxe française sous le nom de « fouetté ».

L’esthétisme qui émane de cette technique, correctement appliquée, est aussi une des raisons de mon choix. La beauté du geste (qu’elle soit physique ou mentale) ne me laisse jamais indifférent. Pour l’acquérir elle impose de la rigueur dans la recherche du moindre détail et dans les efforts à fournir. La satisfaction du travail accompli et les résultats seront la récompense. Il s’agit de la recherche du geste parfait dans lequel se conjuguent efficacité et esthétisme.

L’esthétisme que certains (dont je fais partie) apprécient, n’est certainement pas un gadget, comme indiqué plus haut ; il impose rigueur et travail, il différencie l’art martial de la simple méthode de défense. Les efforts que sa recherche impose seront autant de bienfaits pour l’efficacité. Sans cette quête « du beau », du geste parfait, je ne pense pas que j’aurais passé autant de temps sur les tatamis. A mon sens il s’agit d’une importante motivation qui vient s’ajouter aux autres : souplesse, approfondissement, recherche du détail, inlassables répétitions, etc. Autant d’éléments qui renforceront, de fait, l’efficacité. Et puis, à contrario (et n’en déplaisent à ceux qui critiquent cette recherche en arguant que seule l’efficacité compte et qu’il n’y a pas de temps à perdre en fioriture), ce n’est pas parce qu’une technique est esthétique qu’elle n’est pas efficace et à l’inverse (surtout lorsqu’elle est mal exécutée) ce n’est pas le manque d’esthétisme qui donne l’efficacité.

Enfin l’art martial ouvre d’autres horizons, d’autres perspectives, prioritairement en matière éducative ; comme j’aime l’affirmer, cette rigueur et ces règles imposées sur les tatamis pourront être transposées pour une vie sociétale harmonieuse.

Je précise à nouveau que le but de ce dictionnaire – que je me plais à réaliser – n’est pas de détailler les techniques élues, ou de faire une bio complète des personnalités choisies, mais d’expliquer pourquoi leur choix s’impose à moi ; ce qui m’a plu dans ces techniques et ces personnages et ce qu’ils m’ont apporté.

L comme Jean-Claude Leroy…un ami et bien plus !

Aujourd’hui je vous propose la suite de mon dictionnaire des arts martiaux avec la lettre L comme Jean-Claude Leroy.

A une époque où l’on efface encore plus vite que l’on encense, c’est faire preuve de la moindre des corrections que de ne pas oublier ceux qui vous ont marqué et aidé. C’est ce que je m’attache à faire avec mon dictionnaire personnel.

Aujourd’hui je vous parle d’un temps que beaucoup ne peuvent pas connaître. C’était en février 1973, le Service national existait encore et je venais d’être incorporé au Bataillon de Joinville qui, comme son nom ne l’indiquait pas, était basé à Fontainebleau. Ce régiment réunissait des judokas en âge d’effectuer leurs obligations militaires et qui possédaient les qualités requises pour accéder à ce prestigieux groupe. C’est là que j’ai fait la connaissance de Jean-Claude Leroy, un des judokas le plus talentueux que j’ai connu et qui n’a pas eu le palmarès qu’il aurait dû conquérir.

Il était devenu un ami, et peut-être même, parfois un grand frère. Il était mon aîné de deux années et dans beaucoup de domaines il bénéficiait d’une expérience plus importante que la mienne. Ceci étant, je le dis avec humour et sympathie, il n’était pas forcément utile de suivre tous ses conseils, mais il allait de l’avant ; le problème c’est que l’énergie dont il disposait n’était pas assez canalisée.

Ce n’est que mon avis, mais il aurait pu (et dû) devenir notre premier champion du Monde de judo dans les années 1970. Un uchi-mata à gauche dévastateur, un panel impressionnant de techniques autour de ce « spécial », une vitesse exceptionnelle, un sens du combat développé à l’extrême, et une classe folle. En France il a battu les meilleurs de sa catégorie (les « légers », les moins de 63 kilos de l’époque), mais jamais dans la compétition qu’il fallait. Alors que lui a-t-il manqué dans sa conquête du graal ? Peut-être tout simplement l’envie ! Il aimait sans doute trop de choses dans la vie pour se consacrer à une seule. Et puis la beauté du geste lui importait davantage que les reflets de la médaille. Il préférait perdre en ayant tenté de « jolies choses », que gagner « aux pénalités ». Je l’évoque au passé, puisqu’il nous a quittés bien trop tôt au milieu des années 1990.

Né d’une mère vietnamienne et d’un père français il avait un physique fait pour les arts martiaux, surtout au cœur des années 1970, en pleine « période Bruce Lee ». Et comme entre autres qualités il maitrisait parfaitement l’atemi-waza (le travail des coups) grâce à une souplesse naturelle et à son sens du combat déjà évoqué plus haut (sens du combat qui est transposable dans toutes les arts martiaux), il n’aurait pas manqué de briller dans les autres formes d’opposition.

Après avoir passé presque tout notre Service national ensemble, nous avons continué à nous fréquenter ; il habitait dans le Val d’Oise et appartenait à un très grand club : le J.C.V.B. (Judo-Club-Villiers-le Bel). Il est venu enseigner quelques temps au dojo de la rue des Martyrs et surtout il était avec moi au début de l’aventure de l’atémi-ju-jitsu, puisque nous avions été, lui et moi, les deux « acteurs » du premier livre – produit par la F.F.J.D.A. – qui proposait la progression par ceintures. Nous avions réalisé aussi quelques documents vidéo. Puis, comme cela lui arrivait souvent, il disparaissait. C’est sans lui que j’ai continué la croisade pour cette méthode de ju-jitsu.

Le rythme de nos rencontres s’est étiolé au fil des ans ; seul, ce que l’on appelait à l’époque le « Tournoi de Paris » (grand rendez-vous annuel du judo) permettait de nous retrouver en tant que spectateurs attentifs, jusqu’à ce que la maladie nous sépare définitivement. La lettre L de ce dictionnaire ne pouvait que lui être consacrée.

Des mots et des maux

Certes nous faisons de substantielles économies. Plus de cafés, plus de restos, plus de cinés, plus d’achats de vêtements, plus de coiffeurs, etc. Bref, plus grand chose, que de l’indispensable, pour ceux qui le peuvent encore ! Je sais que certains achats précités ne sont pas des produits de premières nécessité (même s’ils permettent à beaucoup de gens de vivre) et qu’un nombre important de nos concitoyens ont appris à s’en priver depuis longtemps et bien avant le confinement. Ce qui n’est pas glorieux pour notre société.

D’ors et déjà, pour beaucoup, ces économies imposées depuis plusieurs semaines, se transforment en économies incontournables dans la mesure où d’abord, même si le déconfinement (partiel) se réalise lundi prochain, les secteurs précités (exemption faite pour les coiffeurs) ne lèveront pas le rideau et que lorsque ce sera le cas, beaucoup d’entre nous ne bénéficieront plus des moyens d’en profiter, ni pour les plus généreux de venir en aide aux plus nécessiteux, quand ils n’en grossiront pas les rangs.

Alors espérons un rapide retour sur un chemin qui nous ramènera à une vie (presque) normale, ce qui serait indispensable pour que cesse une altération inévitable de notre santé mentale et physique, avec des séquelles, sinon irréversibles, pour le moins difficilement réparables. Elles pourraient être gravement préjudiciables à l’énergie nécessaire à un rebond salvateur. Surtout que pour certains, il faudra vivre encore avec des carences en relations sociales, amicales et affectives qui pourraient être assassines !

Pour clore avec un soupçon d’espoir, croyons en l’entraide mutuelle, chère à Jigoro Kano, ainsi qu’en l’énergie du désespoir !

« Souvent le désespoir a gagné des batailles ». Voltaire

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