Non opposition

Au cœur de l’été, cédons aux rediffusions. Cependant ce n’est jamais inutile de mettre en avant quelques principes de base de notre discipline ; la non opposition en est un.

« Surmonter l’habitude d’employer la force contre la force est une des choses les plus difficiles de l’entraînement du judo (et du ju-jitsu). On ne peut espérer progresser sans y parvenir ». Jigoro Kano

Il serait dommage d’oublier que la non opposition est « le principe de base » du ju-jitsu, notamment celui de l’École traditionnelle Yoshin Ryu (Ecole du cœur de saule), l’une de celles qui avait largement inspiré Jigoro Kano lorsqu’il a souhaité « ressusciter » notre art martial. Malheureusement, parfois on a tendance à l’oublier.

Avec la non-opposition, nous sommes en présence d’un principe d’une grande intelligence. Il mériterait de ne pas être utilisé que dans les affrontements physiques, mais aussi au quotidien.

L’opposition frontale ne peut donner raison qu’au plus fort physiquement et dans la société elle ne débouche jamais sur un accord constructif. N’allons pas jusqu’à mettre en avant le dicton populaire suivant : « il vaut mieux céder à l’âne que le tuer », mais on peut s’en inspirer.

Plusieurs principes sont attachés au ju-jitsu, mais celui de non opposition régit les autres : addition de forces, utilisation de celle de l’adversaire, action réaction, etc.

Ces principes ne sont applicables qu’en association avec celui de non opposition.

Il s’agit tout simplement de se retirer de la trajectoire d’une force qui avance sur nous.

Ensuite, première possibilité, sans s’en occuper davantage, la laisser s’éteindre dans le vide.

Autre possibilité (si l’on veut maîtriser celui qui attaque), celle qui consiste à conduire la force en question, en y ajoutant la nôtre ; ce sont les principes d’utilisation de la force de l’adversaire et de l’addition des forces.

On peut aussi y ajouter simultanément un obstacle, au niveau des jambes de l’attaquant, par exemple, afin de le faire chuter. Cette dernière description, sommaire j’en conviens, pourra servir de première explication pour une technique comme hiza-guruma. Autre exemple avec tomoe-nage où on sacrifie son corps au détriment de celui qui attaque. Comme le démontre la  figurine qui illustre cet article. Figurine réalisée en son temps par mon père, Bernard Pariset.

Ce principe général de non opposition n’est en aucun cas un signe de renoncement, mais tout simplement l’incarnation du bon sens.

Force contre force, c’est forcément…le plus fort qui gagne. Et puis, utiliser la force de l’adversaire en commençant par ne pas s’y opposer, c’est aussi un moyen de ne pas gâcher sa propre énergie.

Cette non opposition, comme indiqué en introduction de cet article, est également utile dans les rapports humains, c’est ce que prônait Jigoro Kano, lorsqu’il disait : « Le conflit se fait au détriment de tous, tandis que l’harmonie se fait au bénéfice de chacun ».

Avec un peu d’entraînement, ce principe qui permet de vaincre la force brutale donne la possibilité à tous de ne pas subir la loi du plus fort est, de mon point de vue, sans jeu de mot, la principale force du ju-jitsu.

Terminons cet article avec une dernière citation : «Qui apprend à céder est maître de la force ». Lao Tseu.

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Tel armurier, telle arme

Comme la semaine dernière,  c’est une belle petite histoire issue du savoureux livre « contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon » que je (re)propose aujourd’hui en guise d’article. Dans celle qui suit, il est question de l’esprit (le shin). L’aboutissement de notre travail semble, en effet, être le reflet de notre âme. Que cette lecture, au cœur de l’été,  entraîne une réflexion positive.

« Le sabre est l’âme du samouraï », nous dit l’une des plus vieilles maximes du Bushido, la Voie du guerrier. Symbole de virilité, de loyauté et de courage, le sabre est l’arme favorite du samouraï. Mais dans la tradition japonaise, le sabre est plus qu’un instrument redoutable, plus qu’un symbole philosophique : c’est une arme magique. Il peut être maléfique ou bénéfique selon la personnalité du forgeron et du propriétaire. Le sabre est comme le prolongement de ceux qui le manient, il s’imprègne mystérieusement des vibrations qui émanent de leur être. Les anciens Japonais, inspirés par l’antique religion Shinto, ne conçoivent la fabrication du sabre que comme un travail alchimique où l’harmonie intérieure du forgeron est plus importante que ses capacités techniques. Avant de forger une lame, le maître armurier passait plusieurs jours à méditer, puis il se purifiait en procédant à des ablutions d’eau froide. Revêtant des vêtements blancs, il se mettait alors au travail, dans les meilleures conditions intérieures pour donner naissance à une arme de qualité. Masamune et Marasama étaient d’habiles armuriers, qui vivaient au début du XIVe siècle. Tous deux fabriquaient des sabres d’une très grande qualité. Murasama, au caractère violent, était un personnage taciturne et violent. Il avait la sinistre réputation de forger des lames redoutables qui poussaient leurs propriétaires à de sanglants combats ou qui, parfois, blessaient ceux qui les manipulaient. Ces armes, assoiffées de sang, furent rapidement tenues pour maléfiques. Par contre, Masamune était un forgeron d’une très grande sérénité qui se livrait à un rituel de purification pour forger ses lames. Elles sont considérées aujourd’hui comme les meilleures du pays. Un homme, qui voulait tester la différence de qualité entre les modes de fabrication des deux armuriers, plaça un sabre de Marasama dans un cours d’eau. Chaque feuille dérivant à la surface, qui touchait la lame, fut coupée en deux. Ensuite, un sabre fabriqué par Masamune fut placé dans le cours d’eau. Les feuilles semblaient éviter la lame. Aucune d’elles ne fut coupée, elles glissaient toutes, intactes, le long du tranchant comme si celui-ci voulait les épargner. L’homme rendit alors son verdict : « La Murasama est terrible, la Masamune est humaine »

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Trois mouches…

La période estivale favorise la manifestation d’une dose de légèreté. Ce qui n’empêche pas la réflexion. La preuve avec cette petite histoire qui se substitue à l’article hebdomadaire. Je l’ai souvent publiée, sans en éprouver la moindre lassitude ! La dissuasion est une arme redoutable, et elle ne provoque aucunes mauvaises conséquences !

« Dans une auberge isolée, un samouraï est installé, seul à une table. Malgré trois mouches qui tournent autour de lui, il reste d’un calme surprenant. Trois ronins  entrent à leur tour dans l’auberge. Ils remarquent aussitôt avec envie la magnifique paire de sabres que porte l’homme isolé. Sûrs de leur coup, trois contre un, ils s’assoient à une table voisine et mettent tout en œuvre pour provoquer le samouraï. Celui-ci reste imperturbable, comme s’il n’avait même pas remarqué la présence des trois ronins. Loin de se décourager, les ronins se font de plus en plus railleurs. Tout à coup, en trois gestes rapides, le samouraï attrape les trois mouches qui tournaient autour de lui, et ce, avec les baguettes qu’il tenait à la main. Puis calmement, il repose les baguettes, parfaitement indifférent au trouble qu’il venait de provoquer parmi les rônins. En effet, non seulement ceux-ci s’étaient tus, mais pris de panique, ils n’avaient pas tardé à s’enfuir. Ils venaient de comprendre à temps qu’ils s’étaient attaqués à un homme d’une maîtrise redoutable. Plus tard, ils finirent par apprendre, avec effroi, que celui qui les avait si habilement découragés était le fameux Miyamoto Musashi.

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Les mots

« Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde. » Albert Camus

Les mots ont leur importance et c’est sur quelques termes employés dans ma profession que je souhaite revenir, mais aussi sur l’aspect éducatif en général qui doit y être attaché.

En effet, dans mes articles et surtout dans mes cours j’insiste sur la mission éducative qui est celle des professeurs, telle que je la conçois. Notamment pour que chaque enseignant prenne sa part de responsabilité dans la lutte contre la violence.

L’éducation se fait aussi par les mots employés. Consciemment ou inconsciemment ils imprègnent l’esprit. Ils peuvent être utilisés très sérieusement, mais aussi parfois avec un peu d’humour.

A l’aide de cet article je me permets d’enfoncer le clou, dans la période que nous traversons, cela ne semble pas inutile.

Malheureusement au regard de certaines personnes les arts martiaux « traînent » une réputation de violence. Parfois  nos disciplines sont considérées comme des accélérateurs de violence, alors que cela doit être tout le contraire. Ce qui est le cas lorsqu’elles sont démontrées et enseignées dans les « règles de l’art ».

En tout cas, ce n’est ni ma façon de concevoir nos disciplines, ni ma façon de les enseigner ; heureusement je ne suis pas le seul, mais il nous faut être vigilants. Cela commence par le respect des règles attachées au comportement dans un dojo : la tenue, le salut, l’hygiène, etc. Mais aussi la ponctualité, la régularité dans la mesure du possible, le respect du partenaire, l’entraide mutuelle, bref le Code moral, que parfois on regarde sans y prêter l’attention nécessaire.

Revenons à la force des mots. Premier exemple avec la carte professionnelle sur laquelle est inscrit « Educateur sportif » et non pas « destructeur sportif ». Les arts martiaux sont faits pour s’élever, non seulement techniquement et physiquement, mais aussi mentalement. Apprendre à prendre de la hauteur.

On peut sourire en utilisant une expression amusante, mais parlante, en indiquant que nous ne sommes pas dans un dojo pour « en prendre », mais pour « apprendre ».

On peut jouer avec les mots en affirmant que nous ne sommes pas là non plus  pour apprendre à détruire, mais « pour construire » un système de défense. Nuance importante. Dans cette construction, on enseigne aussi à « se maîtriser pour mieux maîtriser ».

A l’inverse il n’est pas nécessaire d’utiliser des formules trop « savantes », compréhensibles uniquement par ceux qui les énoncent.

La pratique du sport, en particulier celle des arts martiaux, doit apprendre à apaiser d’éventuelles colères, à les retourner en énergie positive, au service d’une construction et non pas d’une destruction.

Il n’est pas admissible que l’enseignement dispensé exacerbe une violence que chaque personne possède plus ou moins intrinsèquement. Dans ce cas là, d’ailleurs, on ne peut pas parler d’enseignement.

Il y a les mots, mais il y a aussi le comportement. Sur un tatami, le professeur doit veiller à ce que les élèves ne confondent pas détermination et agressivité. Cette nuance, les professionnels de l’enseignement sont en capacité de la faire respecter. C’est une de leur mission, peut-être la première.

Alors continuons à apporter notre pierre à un édifice en demande de reconstruction.

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Bilan d’une saison particulière

Une saison s’achève, c’est le moment d’en faire le bilan et de se souvenir des principaux faits qui l’ont marquée.

Après le stage de Soulac en août 2022 et notre retour dans la station balnéaire, une nouvelle aventure commençait.

En effet, l’opportunité de reprendre mon métier s’est présentée après plus de deux années de disette causée par la crise sanitaire. Deux années durant lesquelles je n’ai bénéficié d’aucune aide, en tout cas pas de la part de ceux qui auraient pu le faire, et où j’ai même dû affronter quelques hostilités et autres bâtons dans les roues.

Aussi, en septembre, grâce à Eve Bourreau, talentueuse karatékate au caractère très affirmé, une porte s’est ouverte à l’IME de Niort. J’ai pu proposer deux cours adultes et deux cours enfants par semaine. Bien évidemment, ce n’est pas suffisant, mais cela permettait de remettre le pied à l’étrier. Dans un autre registre, fin septembre, j’ai eu l’immense joie de retrouver Yannick Viaud avec lequel j’avais passé un an au Bataillon de Joinville en 1973. Nous avons refait le monde le temps d’un repas. Yannick est un judoka d’une technicité remarquable.

En octobre, le fait marquant aura été l’organisation d’une Master Class self défense à Chauvigny dans la Vienne. A l’initiative d’Yves Vanduren, professeur de karaté, j’ai participé à l’encadrement de ce rassemblement qui a réuni plus de soixante stagiaires le temps d’un dimanche. Christian Panatoni pour le karaté-défense et Stéphane Pescher pour le SOG close combat étaient mes deux « collègues » tout au long de cette journée parfaitement réussie.

En novembre deux stages ont été organisés : à Paris où je me rends environ une fois par mois et à Léognan en Gironde, un endroit dans lequel j’ai mes habitudes et où je suis toujours bien reçu par Nicole et Michel Dourthes, les dirigeants emblématiques du club et Christian Walgraeve le professeur.

En décembre, un mois traditionnellement assez calme, un seul stage était au programme, à l’IME de Niort.

L’année se finissait avec la satisfaction d’avoir repris une activité régulière, d’avoir retrouvé mon métier, non sans mal, et de partager mon expérience.

En janvier : un stage à Paris et une première avec un rassemblement dans le magnifique dojo tout neuf du G.R.Kudo à Fontenay-le-Comte.  Merci à Gwen Raguenault pour son accueil.

Février est aussi un mois calme, vacances d’hiver obligent. Juste un stage à Niort au « Club sojjok kwan » que Manuel Baptista avait mis gentiment à notre disposition.

En mars, trois stages au programme : Léognan, Paris et Aire-sur-l’Adour où je me rendais pour la première fois. Ce fût le fait marquant de ce mois de mars. En effet, Michel Perez avait réussi à rassembler une soixantaine de stagiaires venus d’horizons différents, pour une première ce fût une première parfaitement réussie.

Avril et mai ont été particulièrement calmes, vacances et ponts en sont les raisons, exception faite avec un stage le 14 à Paris.

En juin, en plus des rendez-vous de Paris et de Niort, il y a eu une autre première avec le stage de Chevreuse, dans les Yvelines. Là aussi, ce fût une belle réussite. C’était aussi l’occasion de retrouvailles très sympathiques avec Marc Houget, un judoka au palmarès enviable et qui propose un ju-jitsu que je connais bien.

A noter que début juin, un article consacré à l’attitude au dojo à explosé les compteurs de ma page Facebook en termes de « personnes touchées ». Comme quoi rien n’est perdu.

J’en profite pour remercier tous ceux qui m’ont aidé et qui m’ont soutenu après cette terrible crise sanitaire qui ne m’a pas épargné. Il y a encore des gens pour qui l’entraide reste une valeur sûre, des personnes qui ont aussi une mémoire qui n’est pas sélective. Je sais aussi que beaucoup auraient souhaité m’aidez, mais ne savaient pas comment faire, je les remercie aussi, à l’impossible nul n’est tenu. J’ignore tous ceux qui auraient pu me venir en aide et qui se sont abstenus.

J’en profite pour rappeler que les cours se poursuivront au moins jusqu’au 11 juillet à l’IME. Si des personnes veulent nous rejoindre pour une soirée ou deux, elles seront les bienvenus. Nous devrions reprendre les cours à l’IME la dernière semaine du mois d’août.

N’oublions pas non plus le stage de Soulac-sur-Mer du  13 au 18 août.

A tous, je souhaite un très bel été.

(Ci-dessous,, quelques photos pour retracer une saison. Davantage de photos et de vidéos souvenirs dans les prochains jours)

Savoir chuter

J’ai pensé donner une suite à l’article de la semaine passée (mes premiers pas en ju-jitsu) en insistant sur l’importance de l’apprentissage des chutes.

Dans la plupart des arts martiaux, notamment en ju-jitsu, apprendre à chuter est une nécessité. C’est également utile dans la vie courante. C’est une sorte d’assurance. Certes, nous ne tombons pas à longueur de journée, mais beaucoup de fâcheuses conséquences pourraient être évitées avec un minimum de maîtrise du « savoir tomber » en limitant les dégâts ; sur la neige, la glace ou tout simplement après avoir perdu l’équilibre.

Sur le plan de l’efficacité pure, il est nécessaire de bien savoir chuter sur un tatami, dans la mesure où certaines ripostes imposent des projections, or pour être efficace il faut répéter et pour répéter il faut que le partenaire sache chuter.

Certains sont réfractaires aux chutes, mais peut-être ont-ils connu de mauvaises expériences avec des apprentissages « rugueux ». Une étude progressive est indispensable.

Enfin, savoir chuter c’est pouvoir se perfectionner dans le domaine des projections, un domaine efficace (nous l’avons évoqué plus haut) mais grâce auquel on pourra tout simplement s’exprimer physiquement et dans lequel la joie d’une belle expression corporel ajoutera du plaisir à la pratique.

Fiche technique.

On distingue les chutes sur l’arrière et les chutes sur l’avant.

Dans chacune de ces catégories, il y a la chute qui se pratique sur un tatami et celle « en situation », c’est à dire en dehors du dojo, si par malheur elle survient sur un sol dur : accident, maladresse, ou agression. Dans cette dernière situation il faudra tout à la fois se relever sans dommages et être opérationnel immédiatement.

Dans les deux cas de figure (dojo et « situation ») il faut préserver deux parties essentielles, la tête et les articulations des membres supérieurs. Pour la tête il suffira de « la rentrer », menton dans la poitrine. Pour les bras, sur un tatami on frappe au sol « bras tendus » paume de main vers le bas, pour à la fois protéger les articulations et répartir l’onde de choc, le bras devenant une sorte de paratonnerre. Sur un sol dur on se limite à ce que les bras soient tendus vers l’extérieur, ce qui évitera une luxation et/ou une fracture. Donc, si on est bousculé et que l’on perd l’équilibre sur l’arrière, on essaie de rouler sur une épaule, pour protéger la tête,  en ayant préalablement plié une jambe, ceci afin de se retrouver le plus vite possible debout face à un éventuel adversaire (photo 1).

Concernant la chute avant, il faut se servir du bras avant comme d’une roue et d’un amortisseur. Là aussi il est indispensable de protéger la tête avant tout et ensuite les articulations et notamment l’épaule. En dojo après avoir roulé, on se réceptionne jambes tendues et parallèles. Dans la réalité, à la réception, on plie une jambe pour se retrouver face à l’endroit d’où l’on vient, face à un agresseur qui nous aurait poussé dans le dos (photo 2).

Il existe aussi la chute avant, dans laquelle on se réceptionne face au sol, en se servant des bras uniquement comme amortisseurs.

Tout cela est un peu technique, rien ne remplace la pratique.

(Les photos qui présentent les « chutes en situation »sont extraites du livre « Ju-jitsu-Défense personnelle ». Édition parue en 2000.)

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Premiers pas en ju-jitsu

Cette semaine, c’est une fiche technique très simple sur le ju-jitsu que je propose en guise d’article.

Pour les plus anciens, il est toujours utile de se rafraîchir la mémoire. Pour les néophytes, il est encore plus important de s’informer.

Le ju-jitsu se compose de techniques de coups (atemi-waza), de projections (nage-waza) et de contrôles (katame-waza).

Ses principes de base sont la non opposition et l’utilisation de la force de l’adversaire ; de façon directe ou en utilisant le principe d’action réaction.

L’atemi-waza, le travail des coups, aura davantage pour objectif de déséquilibrer que d’être une finalité.

Pour projeter un adversaire on utilise plusieurs mécanismes. La bascule au-dessus du centre de gravité, la suppression d’un point d’appui,  empêcher l’adversaire de reprendre l’équilibre sur l’avant. Et tout simplement en utilisant la force de l’adversaire.

Les contrôles (katame-waza) ont une importance majeure dans la mesure où ils permettent de maîtriser quelqu’un sans forcément mettre ses jours en danger.

En ju-jitsu toutes les défenses sur toutes les situations d’attaque sont étudiées,  debout et au sol, à mains nues ou bien armées.

On travaille également sur des situations de défense contre plusieurs adversaires.

Pour bien pratiquer le ju-jitsu il est indispensable de maîtriser les « ukemis » les brises chutes. Sur l’arrière et sur l’avant. C’est indispensable lors des répétitions, mais également dans la rue lorsque l’on dérape sur un sol glissant, ou bien que l’on « s’emmêle les crayons ».

Il existe beaucoup d’écoles et de styles de ju-jitsu, celui que je pratique et enseigne est à but non compétitif, de façon à ce qu’il conserve son aspect traditionnel et l’ensemble des ses techniques originelles.

En effet, la compétition impose (à juste titre) un règlement qui sclérose quelque peu la discipline. Si certaines combinaisons et techniques sont retirées, c’est qu’elles sont dangereuses. De fait, cela signifie qu’elles sont efficaces en self défense ; c’est dommage de ne plus les étudier. Maintenant chacun opte pour ses préférences, il ne s’agit que d’un point de vue renforcé par une longue expérience.

Le ju-jitsu est une méthode de self défense efficace pour peu que le pratiquant s’y astreigne de façon régulière. C’est aussi un art martial porteur de fortes valeurs éducatives, c’est également et tout simplement un « art de vivre » qui apporte un bien être physique et mental.

Cet ensemble ne manque pas de contribuer à une meilleure vie en société. D’autant que l’appartenance à une « famille », comme celle des arts martiaux impose (normalement) le respect des consignes élaborées par cette famille.

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Attitude au dojo

De temps en temps il n’est pas inutile de revenir et de rappeler que le dojo est un lieu d’étude dans lequel certaines règles doivent être respectées, pour le bien être de tous.

Pour une vie en société en bonne harmonie, loin des incivilités et de cette violence qui ne cessent de gangrener notre société.

Tout d’abord, l’hygiène. Les tenues doivent être propres, les corps aussi, cela semble être la moindre des choses, mais parfois…Les ongles sont coupés courts. On ne doit pas marcher pieds nus en dehors du tatami. N’oublions pas que lors du travail au sol, nous sommes très près…du sol !

Ensuite la politesse. On doit saluer le tatami avant d’y monter et – normalement – le dojo en y entrant. Il en est de même avec les partenaires successifs, avant et après chaque échange. Qui plus est dans une tenue correcte et ne pas se contenter d’un vague mouvement de la tête. On ne retire pas sa veste de judogi sur le tatami.

On devra être ponctuel, sauf cas de force majeure et/ou impératif professionnel. Dans ce cas on informe le professeur. Si on est en retard, on attend sur le bord du tatami un signal de celui-ci avant d’y monter. Lorsqu’on doit le quitter, on l’informe également.

On évite de parler trop fort, on communique discrètement avec son partenaire et bien évidement on ne s’exprime pas pendant les explications du professeur.  On peut se désaltérer pendant le cours, juste après une explication du professeur, par exemple.

L’entraide mutuelle est sacrée, les plus anciens aident les moins anciens. On doit se souvenir que l’on a tous été débutant. Et dés la deuxième séance, on en connait un peu plus que celui qui en est à sa première, on peut déjà lui donner quelques conseils.

Enfin, on est attentif aux informations données par le professeur. Notamment lorsqu’il signifie, à l’aide du « maté », la fin d’un randori. C’est une question de respect des consignes, du partenaire, mais aussi de sécurité.

Toutes ces recommandations ont pour unique but que se déroulent les cours dans une parfaite harmonie. La recherche de l’acquisition et du perfectionnement technique ainsi que l’engagement physique doivent se dérouler dans la convivialité. Aucune violence ne doit être tolérée. Combattre la brutalité que certains portent en eux sera un objectif à court terme.

Il ne s’agit pas d’être un « Père Fouettard », mais simplement d’assumer son rôle d’éducateur. Avec un minimum de rigueur, cette rigueur qui impose des efforts, qui fait qu’on ne fait pas n’importe quoi, n’importe comment, et qui  permet un mieux vivre en société et donc de pratiquer, de progresser et de se défouler physiquement et mentalement, tout en s’amusant : nous sommes également dans le loisir.

En toute chose, il faut chercher le bon équilibre. Une discipline de fer ne fera que rebuter, à l’inverse le laxisme sera contreproductif et dangereux, encore davantage dans nos disciplines.

C’est au professeur que revient la responsabilité de diffuser ces consignes et recommandations (et de les faire respecter).

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Le bon vieux ju-jitsu

Un commentaire sur une de mes vidéos mise en ligne il y a quelques jours, évoquait « Le bon vieux ju-jitsu ». A un moment, j’ai fait un parallèle avec un titre de notre regrettée idole « Le bon temps du Rock’n Roll ». Que l’auteur de ce commentaire se rassure, loin de moi de l’avoir mal pris, au contraire.

Cela m’a inspiré quelques réflexions.

Oui, je suis fidèle à ce ju-jitsu que je pratique et enseigne depuis des décennies, sans jamais le renier, ce qui ne m’a pas empêché, dans le cadre d’une formation professionnelle complète, de pratiquer d’autres disciplines institutionnelles.

Le ju-jitsu a su traverser les siècles et, même s’il a connu des périodes de repli, il a toujours su renaître des ses cendres, il est intemporel, inoxydable. Il sait faire le dos rond face aux assauts de nouvelles méthodes (de toute façon nous avons tous deux bras deux jambes et c’est la façon dont on s’en sert qui fait la différence), il a pour lui la force de sa vérité. Beaucoup d’écoles existent, certaines fantaisistes, d’autres un peu contraires à l’esprit de base, il faut savoir faire le tri.

Cette pluralité de styles existait déjà au temps de Jigoro Kano, quand il a décidé de faire une synthèse pour créer sa propre école qu’il appela « judo ».

Pour ma part, je reste attaché à un style d’une richesse et d’une finesse technique exceptionnelles,  développant un état d’esprit constructif. Tous ces éléments sont autant de raisons qui font que ma fidélité lui est acquise et c’est toujours avec la même passion que je l’enseigne. Et pourquoi renier ce que l’on aime ?

Il n’est pas question d’immobilisme, moi-même, en son temps,  j’ai participé à des évolutions dans ma discipline, mais toujours à partir des mêmes racines techniques, des mêmes principes et du partage des mêmes valeurs. Je n’ai jamais confondu évolution et régression.

L’évolution, par définition, doit se faire dans le bon sens, non pas à rebours. Il y a des principes et des techniques qui doivent être respectés, faute de perte d’identité et de qualités.

Maintenant chacun est libre de pratiquer ce qui lui convient et d’enseigner en fonction de ses aspirations et… de ses compétences. A condition que cet enseignement soit éducatif, et non pas destructif.

Sur ce sujet, je suis inflexible : c’est l’éducation qui prime (éducation physique et mentale). J’ai quelques formules que mes élèves connaissent bien, elles valent ce qu’elles valent, mais elles ont le mérite d’être explicites. En voici quelques-unes : « sur ma carte professionnelle est inscrit éducateur sportif et non pas destructeur sportif ». « On est ici pour apprendre et non pour en prendre ». « Il faut construire un système de défense, plutôt que de se limiter à détruire ». « Apprendre à maîtriser en se maîtrisant ». Ce sont des formules avec des mots, et les mots ont leur importance, surtout lorsqu’il s’agit de transmission au service de l’éducation.

Autre réflexion à propos d’une question récurrente, à savoir « quelle est la méthode de self défense la plus efficace » ?  Si on me pose la question, je ne vais pas répondre que ce n’est pas la mienne. Je répondrais que tout d’abord c’est une méthode qui envisage le plus de réponses possibles à un maximum de formes d’agressions. Ensuite cela dépend évidemment qui l’enseigne et qui la pratique.

Pour ce qui me concerne, j’attache autant d’importance à l’éducation physique et mentale qu’à l’éducation utilitaire. Une bonne condition physique ne nuira pas en cas d’agression, et en plus elle permet de vivre en meilleure santé. Et une éducation mentale dans laquelle on trouvera certaines valeurs, aidera à ne pas faire n’importe quoi, à se maîtriser dans toutes les circonstances, mais aussi à se soumettre à quelques efforts et s’imposer une certaine rigueur dans la pratique, synonyme de résultats dans bien des domaines. Par exemple la recherche du détail, de la finesse technique, sans se satisfaire du minimum.

Maintenant, cela a été répété à maintes reprises, nous ne sommes pas tous égaux en situation de stress occasionné par une agression. Mais, il n’est pas question de provoquer un affrontement pour se tester. Même si certains prétendent que l’épreuve de la rue est la seule qui vaille !

J’ai raconté plusieurs fois que parmi mes élèves (de tous niveaux), il y a des hommes et des femmes qui se sont sortis de fâcheuses situations, sur des agressions diverses et cela suffit à me convaincre.

Maintenant, même si je connais des personnes qui s’en sont sortis avec peu de pratique, il est incontestable que c’est la régularité  et l’ancienneté qui offriront un maximum de chances.

Et puis, toujours à propos du ju-jitsu, j’aime bien la tenue qu’on appelle familièrement le kimono. Bien que judogi, kekogi, ou tout simplement dogi soient plus corrects. C’est mon « blanc de travail », pratique et hygiénique. Chaque sport a une tenue qui lui est propre et qu’il respecte.

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Shime-waza, le travail des étranglements

Retour sur un secteur important du ju-jitsu.

Pour les néophytes, le mot étranglement est souvent effrayant. C’est une peur bien légitime, puisque cela signifie la perte de connaissance si la technique n’est pas maitrisée. Les pratiquants ne ressentent  pas la même crainte, puisqu’avec une parfaite  maitrise technique et le respect des signes d’abandons, les étranglements peuvent être travaillés sans danger. Inutile de préciser qu’ils sont d’une redoutable efficacité.

Leur étude consiste à les appliquer, mais aussi à apprendre à s’en défendre. Que ce soit contre des étranglements « sommaires » ou très techniques.

Les étranglements se pratiquent essentiellement à l’aide des membres supérieurs, mais lorsqu’on se trouve au sol, ils peuvent aussi  s’appliquer avec les jambes ; exemple, le fameux sankaku-jime.

On peut les appliquer en étant de face ou placé derrière le partenaire et cela debout comme au sol.

Il y a les étranglements sanguins et les étranglements respiratoires. Les premiers empêchent l’arrivée du sang au cerveau (ce qui permet de savoir si nous sommes pourvus de cet « instrument »). Les seconds provoquent l’asphyxie en bloquant la respiration. Dans le premier cas on s’endort, dans le second on étouffe !

On trouve aussi deux groupes dans cette famille de techniques. Un premier dans lequel on applique l’étranglement « à mains nues » et un second où l’on utilise les revers d’une veste.

Il est évident que leur étude doit s’entourer de précautions et de mise en garde. Au signal d’abandon qui consiste à frapper deux fois au sol ou sur une partie du corps avec la paume de la main, ou avec le pied (kime-no-kata), l’exécutant doit immédiatement arrêter son action.

Dans la réalité, il faudra être en mesure de « doser » l’action en question. Celle-ci consistant à mettre hors d’état de nuire l’agresseur, sans mettre ses jours en danger, en évitant d’être obligé de recourir aux techniques de réanimation : les techniques apprises lors des cours de secourisme ou dans l’étude des fameux « kuatsu ». Durant toute ma carrière de professeur, je n’ai jamais eu à déplorer d’incidents majeurs. Il est arrivé que des personnes perdent connaissance, mais la retrouvent immédiatement.

S’ils sont terriblement efficaces, il faut souligner que les appliquer sur quelqu’un qui résiste, requiert une longue pratique. Une longue pratique qui fournira de l’efficacité, mais aussi et surtout une indispensable sagesse.

Comme la plupart des techniques pratiquées dans les arts martiaux, les étranglements sont dangereux, mais pas davantage qu’un coup porté sur un point vital ou bien qu’une projection au cours de laquelle la tête de celui qui chute heurte violemment un sol dur.

Encore une fois, c’est au professeur qu’incombe la responsabilité d’apprendre correctement les  techniques, en entourant leur apprentissage des indispensables consignes de sécurité.