Vaincre sans combattre

Cette semaine, à la place de l’article technique, c’est une petite histoire savoureuse extraite du recueil “Contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon” que je propose. Ce n’est pas une première, mais on ne s’en lasse pas. Et puis, peut-être que certains la découvriront avec délice.

L’art de vaincre sans combattre.

L’intelligence au service de la victoire. Un concept qui n’a pas d’âge, et pourtant…

« Le célèbre Maître Tsukahara Bokuden traversait le lac Biwa sur un radeau avec d’autres voyageurs. Parmi eux, il y avait un samouraï extrêmement prétentieux qui n’arrêtait pas de vanter ses exploits et sa maitrise du sabre. A l’écouter, il était le champion toutes catégories du Japon. C’est ce que semblaient croire tous les autres voyageurs qui l’écoutaient avec une admiration mêlée de crainte. Tous ? Pas vraiment, car Bokuden restait à l’écart et ne paraissait pas le moins du monde gober toutes ces sornettes. Le samouraï s’en aperçut et, vexé, il s’approcha de Bokuden pour lui dire : «Toi aussi tu portes une paire de sabres. Si tu es samouraï, pourquoi ne dis-tu pas un mot » ? Budoken répondit calmement :
-« Je ne suis pas concerné par tes propos. Mon art est différent du tien. Il consiste, non pas à vaincre les autres, mais à ne pas être vaincu. »
Le samouraï se gratta le crâne et demanda :
– « Mais alors, quelle est ton école ? »
– « C’est l’école du combat sans armes. »
– « Mais dans ce cas, pourquoi portes-tu des sabres ?
– « Cela me demande de rester maître de moi pour ne pas répondre aux provocations. C’est un sacré défi. »
Exaspéré, le samouraï continua :
-« Et tu penses vraiment pouvoir combattre avec moi sans sabre ? »
– « Pourquoi pas ? Il est même possible que je gagne ! »
Hors de lui, le samouraï cria au passeur de ramer vers le rivage le plus proche, mais Bukuden suggéra qu’il serait préférable d’aller sur une île, loin de toute habitation, pour ne pas provoquer d’attroupement et être plus tranquille. Le samouraï accepta. Quand le radeau atteignit une île inhabitée, le samouraï sauta à terre, dégaina son sabre, prêt au combat.
Budoken enleva soigneusement ses deux sabres, les tendit au passeur et s’élança pour sauter à terre, quand, soudain, il saisit la perche du batelier, puis dégagea rapidement le radeau pour le pousser dans le courant.
Budoken se retourna alors vers le samouraï qui gesticulait sur l’île déserte et il lui cria – « Tu vois, c’est cela, vaincre sans arme ! »

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Soulac 2023

Il y a tout juste un an, j’avais le plaisir d’annoncer le retour du stage de Soulac-sur-Mer pour le mois d’août 2022. Et cela après quelques années d’interruption. Aujourd’hui j’ai le plaisir de vous annoncer que l’édition 2023 aura lieu du 13 au 18 août prochains.

Soulac et le ju-jitsu, c’est une longue histoire. Elle a commencé en 1986, elle a duré jusqu’en 2010, soit vingt-cinq sessions. En 2011, j’avais donc décidé de faire une pause. L’été dernier nous retournions sur les bords de l’Atlantique.

Nous sommes dans le département de la Gironde, sur la Pointe de Graves. Venant du Sud de la France, on y accède en passant par Bordeaux qui se situe à 80 kilomètres. Venant du Nord, à partir de Royan, il faut emprunter le bac pour traverser l’estuaire de la Gironde jusqu’au Verdon qui se trouve à quelques kilomètres de Soulac.

Les grandes plages, l’océan, la forêt : Soulac, c’est la nature, mais aussi une ambiance familiale, une ambiance qui sied parfaitement au déroulement d’un stage de ce type. Vacances et ju-jitsu se marient à merveille pour une semaine inoubliable.

C’est l’occasion d’aborder le ju-jitsu d’une façon différente, de s’immerger dans l’art martial intensément, de se perfectionner techniquement et de se faire ou refaire une parfaite condition physique. Les entraînements ont lieu le matin, l’après-midi étant libre ; nous sommes aussi en vacances ! La baignade, le repos, mais également les activités proposées par la station. Impossible de s’ennuyer pour les accompagnateurs.

Soulac, c’est aussi un ensemble de magnifiques villas au style si particulier.

Comme cela se passe au mois d’août, il est prudent de ne pas tarder pour les réservations concernant l’hébergement.
Le plus simple, c’est  de se renseigner auprès de l’office du tourisme : camping, chambres chez l’habitant, locations de vacances et gîtes, chambres d’hôtes, hôtels, villages vacances, résidence de tourisme, air de camping-car, etc.

Comme indiqué plus haut, nous sommes dans une cité  balnéaire à dimension humaine, on peut tout autant s’y amuser que s’y reposer en famille.

Je reviendrai régulièrement sur ce stage, les brochures sont disponibles et dès à présent, vous pouvez me contacter pour obtenir toutes les informations que vous souhaiteriez.

A noter que le stage est ouvert à tous les pratiquants d’arts martiaux.

Je ne cache pas ma joie d’avoir pu renouer avec ce rendez-vous. D’après les échos qui  me parviennent  régulièrement, je ne suis pas le seul à conserver d’inoubliables souvenirs de ces étés soulacais.

A très vite.

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Premier bilan

Après les deux premiers mois de cette nouvelle saison, j’ai voulu établir un premier bilan.

Il y a quelques semaines commençait enfin un processus de reconstruction. A la suite de deux ans et demie sans travail, et ayant perdu un outil de travail « exécuté » par la gestion de la crise sanitaire, j’ai  pu reprendre une petite activité professionnelle grâce à quelques personnes pour qui l’expression « entraide mutuelle » n’est pas que virtuelle. Après deux ans et demi d’incertitude et d’angoisse du lendemain, j’ai bénéficié de quelques moyens pour repartir au combat. Malgré tout, il ne faut pas être un grand analyste pour deviner que cinq heures de travail par semaine et un stage de temps en temps, ce n’est pas suffisant. Même si l’ouverture de la section ju-jitsu à l’Institut Médico Educatif de Niort est un succès quant au nombre d’inscriptions réalisées.

Bien évidemment je me réjouis de ces bons débuts et j’en profite pour remercier tous ceux qui m’ont rejoint sur les tatamis. Cependant, pour le moment tout du moins, cela ne remplace pas le club qui fonctionnait à temps complet et rien ne semble vouloir compenser l’investissement qui y fût réalisé en 2019. Investissement intégralement perdu et non indemnisé, ni par les assurances, ni par l’état.

La situation reste sensible. Je ne fais pas l’aumône, je désire juste travailler, à un âge qui a dépassé largement celui du départ à la retraite, mais il y a deux raisons à cela  : l’obligation et la passion.

L’obligation au regard de la misérable retraite des indépendants et la passion dans la transmission d’un enseignement qui me semble utile.

Donc, depuis deux ans et demi, je me bats de deux façons ; d’abord en mettant toute mon énergie dans la reconstruction de ce qui a été massacré, mais aussi en continuant à dénoncer une injustice flagrante et en demandant réparation pour recréer une entreprise.

Si quelques donneurs de leçons bien à l’abri du besoin, quelle que soit la situation, sont agacés par mes propos qu’ils jugent redondants, ce n’est pas grave.  Ils ne sont pas obligés de me lire. S’ils le font, qu’ils se posent simplement la question quant à la réaction qui pourrait être la leur après deux années et demie sans travail et sans indemnités, et les innombrables cruelles conséquences. Donc, pour ce qui concerne la deuxième partie de mon combat et en l’absence de réponse à mon dernier courrier adressé à la Présidence de la République au mois de juillet de cette année, je persiste et en signe un nouveau. Une fois de plus je réclame que soit acté le fait que tous les petits entrepreneurs n’ont pas été indemnisés à l’issue de la crise sanitaire, contrairement à ce qui est affirmé, et pour savoir comment faire pour remédier à cette injustice.

Cette fois, j’espère recevoir une réponse satisfaisante.

Quant au bilan purement pratique et technique, il y aura eu l’ouverture de deux cours pour les enfants et trois pour les adultes à l’IME de Niort, les mercredis et vendredis, avec une fréquentation plus importante que prévue. Un stage à Paris, avec le plaisir de retrouver des anciens élèves, mais aussi la capitale qui évoque tant de souvenirs. Et puis il y a eu la Masterclass le 23 octobre à Chauvigny dans la Vienne, magnifiquement organisée par Yves Vanduren, en compagnie de Christian Panatonini et Stéphane Pescher. On tâchera de vite oublier la triste annulation du stage de Colomiers, faute de carburant !

Par contre, je n’oublierai pas les touchantes retrouvailles avec Yannick Viaud autour d’un bon repas !

La deuxième partie du trimestre s’annonce tout aussi dynamique avec des cours qui sont entrés  dans les habitudes de beaucoup, mais aussi avec la programmation de trois stages. A Paris, à Léognan et à Aire-sur-l’Adour. Peut-être également à Niort.

Que les fidèles se rassurent, l’espoir et la combativité sont toujours d’actualité !

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Petite histoire

Cette semaine, à la place de l’article technique, une petite histoire savoureuse extraite du recueil « Contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon ».

L’art de vaincre sans combattre. L’intelligence au service de la victoire. Un concept qui n’a pas d’âge, et pourtant…

« Le célèbre Maître Tsukahara Bokuden traversait le lac Biwa sur un radeau avec d’autres voyageurs. Parmi eux, il y avait un samouraï extrêmement prétentieux qui n’arrêtait pas de vanter ses exploits et sa maitrise du sabre. A l’écouter, il était le champion toutes catégories du Japon. C’est ce que semblaient croire tous les autres voyageurs qui l’écoutaient avec une admiration mêlée de crainte. Tous ? Pas vraiment, car Bokuden restait à l’écart et ne paraissait pas le moins du monde gober toutes ces sornettes. Le samouraï s’en aperçut et, vexé, il s’approcha de Bokuden pour lui dire : «Toi aussi tu portes une paire de sabres. Si tu es samouraï, pourquoi ne dis-tu pas un mot » ? Budoken répondit calmement :

-« Je ne suis pas concerné par tes propos. Mon art est différent du tien. Il consiste, non pas à vaincre les autres, mais à ne pas être vaincu. »

Le samouraï se gratta le crâne et demanda :

– « Mais alors, quelle est ton école ? »

– « C’est l’école du combat sans armes. »

– « Mais dans ce cas, pourquoi portes-tu des sabres ?

– « Cela me demande de rester maître de moi pour ne pas répondre aux provocations. C’est un sacré défi. »

Exaspéré, le samouraï continua :

-« Et tu penses vraiment pouvoir combattre avec moi sans sabre ? »

– « Pourquoi pas ? Il est même possible que je gagne ! »

Hors de lui, le samouraï cria au passeur de ramer vers le rivage le plus proche, mais Bukuden suggéra qu’il serait préférable d’aller sur une île, loin de toute habitation, pour ne pas provoquer d’attroupement et être plus tranquille. Le samouraï accepta. Quand le radeau atteignit une île inhabitée, le samouraï sauta à terre, dégaina son sabre, prêt au combat.

Budoken enleva soigneusement ses deux sabres, les tendit au passeur et s’élança pour sauter à terre, quand, soudain, il saisit la perche du batelier, puis dégagea rapidement le radeau pour le pousser dans le courant.

Budoken se retourna alors vers le samouraï qui gesticulait sur l’île déserte et il lui cria – « Tu vois, c’est cela, vaincre sans arme ! »

Les liaisons

Voilà un sujet qui me tient particulièrement à cœur, à savoir les liaisons que l’on trouve en ju-jitsu.

Le Ju-jitsu propose des techniques de coups, de projections et de contrôles : l’atemi-waza, le nage-waza et le katame-waza. L’étude et la maîtrise de ces trois composantes est indispensable, mais ce qui l’est tout autant, c’est la capacité à les enchaîner avec une parfaite fluidité. Exemple : bien maîtriser un mae-geri et un o-soto-gari est une chose, bien maîtriser l’enchaînement de ces deux techniques en est une autre. C’est ce qui représente une grande part de l’efficacité de cet art.

Le ju-jitsu n’est pas un « assemblage », c’est-à-dire un mélange de plusieurs disciplines, il est une entité, un bloc. Nous devons être en capacité de nous adapter immédiatement à une situation donnée, que ce soit à distance ou bien en corps à corps et surtout être capable de passer de l’une à l’autre. C’est le principe de ce que j’appelle « la liaison », cette liaison sur laquelle j’insiste et que j’aborde régulièrement dans mon enseignement.

Pour que cette liaison soit possible, certains impératifs doivent être respectés, comme la garde par exemple. Une garde trop basse sur les jambes ne permettra pas d’obtenir l’indispensable fluidité dans la liaison d’un coup avec une projection. Mais aussi – bien que soient indispensables les répétitions de techniques secteur par secteur, il faudra le plus souvent possible travailler des enchaînements dans lesquels nous trouverons au moins deux des composantes du ju-jitsu. Un coup enchaîné avec une projection, ou avec un contrôle, ou mieux encore, une liaison des trois composantes.

Ces enchaînements peuvent aussi se travailler sous forme d’uchi-komi (des répétitions sans chute) avec un partenaire. Mais aussi seul, « dans le vide ».

J’ai évoqué les liaisons « coups-projections », mais les liaisons «debout-sol », sont tout aussi importantes (on les retrouve également en judo). Enchaîner le plus vite possible, une projection avec une clef,  sera aussi important que maîtriser chacune des deux techniques en question. On devra pratiquer régulièrement des enchaînements dans lesquels on recherchera à ce qu’il y ait le moins de temps morts possible entre la projection et le contrôle.

L’étude et les répétitions d’enchaînements tels que les katas ou des exercices plus récents comme les « 16 techniques » doivent figurer régulièrement au programme des cours et pas simplement à l’approche des passages de grades, ce qui  malheureusement est parfois le cas.

Enfin, il est incontestable que chacun possède ses préférences, pour des raisons intrinsèques, ou par admiration. Cela n’interdit pas d’essayer de s’améliorer dans le ou les domaine(s) pour lesquelles les prédispositions naturelles ne sont pas au rendez-vous.

Alors, au travail.

Pour illustrer cet article et en guise d’exemple, la première technique des « 24 techniques » (en compagnie d’Alain Aden, en 1994.) Extrait du livre « Enchaînements de base et avancés ».

T comme mulTiple

T comme mulTiple :

Le 13 février dernier, sur mon blog et sur Facebook, j’avais consacré la lettre T de mon dictionnaire au mot TECHNIQUE ; c’est en effet un des plus utilisés par les professeurs d’arts martiaux. Mais, d’autres mots et noms qui m’ont marqué me sont venus à l’esprit. Voilà un petit florilège positif pour compléter la vingtième lettre de l’alphabet : Tatami, Travail, Transmission, Tori, Tani-otoshi, Tsubame-gaeshi, Tomoe-nage, Tchoulouyan, Tissier, Tomiki. En négatif, j’évoque la Trahison et les Traitres, qui – même s’ils ne sont pas majoritaires – sont toujours de trop ! Ci-dessous mes définitions.

T comme Tatami tout d’abord ; un élément sur lequel j’ai passé une grande partie de ma vie ; en tant qu’élève, professeur, compétiteur, démonstrateur. Les tatamis que j’ai commencé à fouler à l’époque où ils étaient composés de feutres recouverts de bâches aux teintes improbables, en passant par les premiers « vinyles » sur lesquels nous nous faisions de mémorables brulures, pour finir actuellement par des éléments bien adaptés et aux multiples couleurs attractives. Le tatami, que je considère comme un de mes outils de travail.

Ensuite, justement, T comme travail ; avec, pour moi, deux significations principales. Tout d’abord, ce qui nous permet de vivre et à ce propos je préfère employer le mot « métier ». Il offre un indispensable moyen de subsistance tout en étant bien souvent utile à la société, surtout lorsqu’il s’agit d’éducation. La deuxième signification on la trouve dans sa traduction japonaise : waza. Atémi-waza : le travail des coups ; ne-waza : le travail au sol ; nage-waza : le travail des projections, etc. Une signification particulière à laquelle je consacrerai la lettre W de mon dictionnaire. Waza, qui se traduit aussi par « technique ».

On continue avec T comme Transmission ; comment ne pas évoquer ce mot qui est presque toute ma vie ? En premier lieu grâce à mon métier de professeur, mais aussi grâce à mes démonstrations et à la réalisation de supports techniques tels que les livres et les DVD.

On passe à T comme Tori. Tori, l’inséparable compagnon d’Uke. Celui « qui fait », celui qui exécute, celui qui a le dernier mot. Parfois, pour des raisons pédagogiques quelque peu simplistes, il est abusivement assimilé au gentil par rapport au méchant que serait Uke. Cette définition n’est pas juste dans la mesure où dans la pratique les rôles doivent être systématiquement inversés, et puis sans Uke, pas de Tori ! A l’occasion de mes nombreuses démonstrations, j’endossais avec fierté l’identité de ce personnage valorisant.

Je n’oublie pas certaines projections, comme Tani-otoshi et Tsubame-gaeshi, à cause de leur signification qui ne laisse pas insensible : « chute dans la vallée » pour la première et « le retour de l’hirondelle » pour la seconde ; quand la beauté poétique du verbe s’associe à l’efficacité. Cela en dit beaucoup sur la conception de l’art martial qu’était celle de nos glorieux fondateurs ; en serait-il de même maintenant, en serions nous capables ? Mais aussi T comme Tomoe-nage, le sutémi qui illustre à merveille le principe de non-opposition et celui de l’utilisation de la force de l’adversaire, tous deux chers au ju-jitsu.

Toujours pour cette lettre T et concernant des personnalités, je pense à Bernard Tchoulouyan qui vient de nous quitter (bien trop tôt) ; champion du Monde de judo en 1981 grâce à un esprit guerrier et à un judo d’une grande élégance ; Christian Tissier pour qui l’aikido a du être créé et avec qui j’ai partagé l’affiche de nombreux galas en France et à l’étranger. Enfin, Maitre Tomiki le créateur du Goshin-jitsu-no-kata.

Au risque de « gâcher l’ambiance » je pourrais évoquer- en creux – le T de trahison, en ayant été trop souvent la victime. Mais je ne le ferai pas. Je ne parlerai pas non plus des Traitres, ces personnages qui doivent abimer leur miroir chaque matin !

Pour clore avec une note positive, je finirai cet article par deux T. D’abord T comme Tradition, un mot forcément attaché aux arts martiaux qui respectent les codes (quelques fois galvaudés), et T comme Ténacité ; une belle qualité, surtout lorsqu’il s’agit de défendre ses idées et de lutter contre toute compromission.

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Educateurs sportifs ou destructeurs physiques ?

Décidemment il est difficile d’accepter certaines vidéos qui proposent des séquences techniques ou encore des extraits de cours dans lesquels émane davantage de violence que de maitrise de soi. Et encore je n’évoque pas le « street fight » avec lequel on touche le fond. Non, l’article ci-dessous ne concerne que des images filmées dans certains dojos (s’il est encore possible d’utiliser cette appellation), parfois même sous « le regard » de Jigoro Kano. Nous sommes loin de la technique et de la voie de la souplesse qu’il défendait et du système éducatif qu’il prônait.

A un moment où l’actualité nous déverse chaque jour son flot de drames en liaison directe avec la violence, il me semble qu’il n’est pas convenable et admissible d’oublier la mission d’éducateur attachée au rôle de professeur. Nous sommes des éducateurs sportifs et non pas des destructeurs. Que l’on ne s’y méprenne pas, je ne suis pas pour l’impunité, ni pour le laxisme, ni habité par un angélisme inadapté.

Déjà, si une certaine discipline de base était respectée dans tous les dojos, aussi bien en ce qui concerne les arrivées en retard, les allées-venues pieds nus en dehors des tatamis, ou bien encore l’harmonie dans les tenues, ce serait un bon début ; tout comme le serait le respect des lieux, du professeur, des partenaires (qui ne sont pas des adversaires) et du règlement. L’endroit dans lequel nous pratiquons (et dont certains se réclament sans craindre d’en usurper le sens) s’appelle le « dojo », ce qui signifie l’endroit ou l’on « trouve la voie ». Si l’enseignant n’est pas en capacité de faire respecter les règles basiques, cela ne commence pas bien ! L’enseignement et la pratique des disciplines de combat que nous appelons arts martiaux doivent être entourés de précautions. Elles apprennent à se défendre, mais pas à devenir violent.

Les samouraïs, qui les pratiquaient n’étaient pas des tendres, mais nous avons évolué ; nous n’en sommes plus à réparer notre honneur en nous faisant « hara-kiri ». Nous continuons à nommer nos disciplines « arts martiaux » en nous réclamant de certaines de leurs valeurs, mais nous devons y associer l’aspect éducatif. Des attitudes dans lesquelles suinte une certaine violence ne manquent pas de s’imprimer dans les subconscients. Dans l’interprétation et la traduction qui sont les miennes, je considère davantage les arts martiaux comme étant les « arts de l’esprit » que les « arts de la guerre ».

La lutte contre ce fléau que représente la violence doit se faire de deux manières : par l’éducation et par la sanction. Le premier point (l’éducation) s’inscrit sur du long terme, même du très long terme. C’est là que nous, professeurs (dans notre domaine de compétence), nous avons notre rôle, même notre responsabilité. Certes, nous apprenons des techniques qui sont faites pour mettre hors d’état de nuire un individu qui veut du mal et certaines d’entre elles peuvent être fatales. Mais notre mission ne se limite pas à la distribution de techniques de défense (encore moins de « surviolence »), il est indispensable que l’enseignement de ces techniques soit entouré de certaines précautions. Là encore, c’est au professeur d’insister sur les dangers qu’elles représentent si elles sont utilisées de façon inadaptée, en dehors des règles du respect de la vie et de la légitime défense.

Quant au deuxième point, la sanction, la loi doit être appliquée. Dans ce domaine nous sommes sous l’autorité des pouvoirs publics. Alors concentrons nous sur la nôtre et faisons en sorte de rester, aussi et avant tout, des éducateurs en commençant par faire respecter nos règles internes et en donnant une image dans laquelle les « armes naturelles » dont nous disposons, soient davantage des armes de dissuasion. Celles-ci nous apportant assurance et confiance mais certainement pas inconscience et suffisance.

On pourra me reprocher une certaine redondance dans mes propos sur certains sujets, mais selon l’expression populaire, il n’est jamais inutile « d’enfoncer le clou » ! Il faut être volontaire et même obstiné pour de grandes causes, le combat contre la violence me semble en être une. Et encore, cet article se limite aux méfaits engendrés par une violence comportementale, mais il y a aussi beaucoup à dire sur les conséquences physiques des pratiques extrêmes.

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L comme Jean-Claude Leroy.

Aujourd’hui je vous propose la suite de mon dictionnaire des arts martiaux avec la lettre L comme Jean-Claude Leroy.

A une époque où l’on efface encore plus vite que l’on encense, c’est faire preuve de la moindre des corrections que de ne pas oublier ceux qui vous ont marqué et aidé. C’est ce que je m’attache à faire avec mon dictionnaire personnel.

Aujourd’hui je vous parle d’un temps que beaucoup ne peuvent pas connaître. C’était en février 1973, le Service national existait encore et je venais d’être incorporé au Bataillon de Joinville qui, comme son nom ne l’indiquait pas, était basé à Fontainebleau. Ce régiment réunissait des judokas en âge d’effectuer leurs obligations militaires et qui possédaient les qualités requises pour accéder à ce prestigieux groupe. C’est là que j’ai fait la connaissance de Jean-Claude Leroy, un des judokas le plus talentueux que j’ai connu et qui n’a pas eu le palmarès qu’il aurait dû conquérir.

Il était devenu un ami, et peut-être même, parfois un grand frère. Il était mon aîné de deux années et dans beaucoup de domaines il bénéficiait d’une expérience plus importante que la mienne. Ceci étant, je le dis avec humour et sympathie, il n’était pas forcément utile de suivre tous ses conseils, mais il allait de l’avant ; le problème c’est que l’énergie dont il disposait n’était pas assez canalisée.

Ce n’est que mon avis, mais il aurait pu (et dû) devenir notre premier champion du Monde de judo dans les années 1970. Un uchi-mata à gauche dévastateur, un panel impressionnant de techniques autour de ce « spécial », une vitesse exceptionnelle, un sens du combat développé à l’extrême, et une classe folle. En France il a battu les meilleurs de sa catégorie (les « légers », les moins de 63 kilos de l’époque), mais jamais dans la compétition qu’il fallait. Alors que lui a-t-il manqué dans sa conquête du graal ? Peut-être tout simplement l’envie ! Il aimait sans doute trop de choses dans la vie pour se consacrer à une seule. Et puis la beauté du geste lui importait davantage que les reflets de la médaille. Il préférait perdre en ayant tenté de « jolies choses », que gagner « aux pénalités ». Je l’évoque au passé, puisqu’il nous a quittés bien trop tôt au milieu des années 1990.

Né d’une mère vietnamienne et d’un père français il avait un physique fait pour les arts martiaux, surtout au cœur des années 1970, en pleine « période Bruce Lee ». Et comme entre autres qualités il maitrisait parfaitement l’atemi-waza (le travail des coups) grâce à une souplesse naturelle et à son sens du combat déjà évoqué plus haut (sens du combat qui est transposable dans toutes les arts martiaux), il n’aurait pas manqué de briller dans les autres formes d’opposition.

Après avoir passé presque tout notre Service national ensemble, nous avons continué à nous fréquenter ; il habitait dans le Val d’Oise et appartenait à un très grand club : le J.C.V.B. (Judo-Club-Villiers-le Bel). Il est venu enseigner quelques temps au dojo de la rue des Martyrs et surtout il était avec moi au début de l’aventure de l’atémi-ju-jitsu, puisque nous avions été, lui et moi, les deux « acteurs » du premier livre – produit par la F.F.J.D.A. – qui proposait la progression par ceintures. Nous avions réalisé aussi quelques documents vidéo. Puis, comme cela lui arrivait souvent, il disparaissait. C’est sans lui que j’ai continué la croisade pour cette méthode de ju-jitsu.

Le rythme de nos rencontres s’est étiolé au fil des ans ; seul, ce que l’on appelait à l’époque le « Tournoi de Paris » (grand rendez-vous annuel du judo) permettait de nous retrouver en tant que spectateurs attentifs, jusqu’à ce que la maladie nous sépare définitivement. La lettre L de ce dictionnaire ne pouvait que lui être consacrée.

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Les mouches de l’été !

Les fidèles connaissent presque par cœur l’histoire proposée dans les lignes qui suivent, mais comme l’été et les vacances, pour ceux qui ont la chance d’en bénéficier, sont propices à la détente et à la réflexion je ne résiste pas à publier une nouvelle fois ce conte extrait du précieux et délicieux recueil intitulé « contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon ».

Le livre en question aborde plusieurs thèmes illustrés par différentes petites histoires. Le récit proposé ci-dessous matérialise l’art de vaincre sans combattre, ce qui est pour le moins une conduite intelligente (et manifestement efficace). Il vient aussi en appui à l’article du 10 juillet consacré à la souplesse comportementale.

Trois mouches

Dans une auberge isolée, un samouraï est installé, seul à une table. Malgré trois mouches qui tournent autour de lui, il reste d’un calme surprenant. Trois rônins entrent à leur tour dans l’auberge. Ils remarquent aussitôt avec envie la magnifique paire de sabres que porte l’homme isolé. Sûrs de leur coup, trois contre un, ils s’assoient à une table voisine et mettent tout en œuvre pour provoquer le samouraï. Celui-ci reste imperturbable, comme s’il n’avait même pas remarqué la présence des trois rônins. Loin de se décourager, les rônins se font de plus en plus railleurs. Tout à coup, en trois gestes rapides, le samouraï attrape les trois mouches qui tournaient autour de lui, et ce, avec les baguettes qu’il tenait à la main. Puis calmement, il repose les baguettes, parfaitement indifférent au trouble qu’il venait de provoquer parmi les rônins. En effet, non seulement ceux-ci s’étaient tus, mais pris de panique, ils n’avaient pas tardé à s’enfuir. Ils venaient de comprendre à temps qu’ils s’étaient attaqués à un homme d’une maîtrise redoutable. Plus tard, ils finirent par apprendre, avec effroi, que celui qui les avait si habilement découragés était le fameux Miyamoto Musashi.

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Un dimanche « en ju-jitsu »

saint-palais-logoCertes, il n’y avait pas énormément de ju-jitsukas sur les tatamis du magnifique dojo du club de Saint-Palais-sur-Mer en Charente-Maritime à l’occasion du stage que j’ai eu le plaisir de diriger dimanche dernier. Cela n’a rien de bien extraordinaire dans la mesure où il s’agissait d’une « première ». De plus, il est vrai que perdurent certains « blocages » ainsi qu’un sectarisme d’un autre âge. Et puis, existe la crainte de quelques réprimandes venant « d’en haut » en faisant la promotion d’un stage dirigé par une personne n’appartenant pas au « sérail » (et qui d’ailleurs n’appartient à aucun sérail, si ce n’est à celui des enseignants et défenseurs du ju-jitsu). Dommage, surtout lorsque ce sont les pratiquants que l’on prive d’un partage des connaissances.

Ceux qui étaient présents manifestaient une belle motivation, et à un travail intensif sur le tatami, s’est ajoutée la joie de faire de nouvelles connaissances et de renouer avec d’anciennes. C’est aussi l’occasion de tester (si besoin en était) l’attractivité d’une méthode qui satisfait un large éventail de la population, des plus jeunes au moins jeunes et des plus affutés physiquement à ceux qui le sont moins (mais qui aspirent à le devenir).

Entre deux séances, c’est aussi l’occasion d’échanges de points de vue sur le ju-jitsu, les arts martiaux et divers sujets de société. C’est aussi parfois dans ces moments là que naissent de belles amitiés.

Enfin, dimanche dernier il y a eu ce bon moment, lorsque j’ai découvert avec plaisir, et en bonne place dans le dojo, la planche murale sur laquelle je présentais les 16 techniques et le Goshin-jitsu. Cette affiche a bien une trentaine d’années, la conserver et s’en inspirer encore maintenant est la preuve que « tout n’est pas perdu ».

Un grand merci aux dirigeants du club de nous avoir accueillis et des félicitations à Hervé Adam, qui ne s’est pas ménagé dans la préparation de cette belle journée. En attendant la prochaine….

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