Kansetsu-Waza, le travail des luxations

IMG_0005« Pouvoir maîtriser quelqu’un sans forcément mettre ses jours en danger » est une formule qui convient parfaitement à ce groupe de techniques dont le but est d’agir sur les articulations au point de provoquer une douleur qui contraint l’adversaire ou l’agresseur à l’abandon. « Forcer l’articulation dans le sens inverse de son fonctionnement naturel » est une autre formule très explicite. L’efficacité des clefs est incontestable et leur utilisation permet aussi de « graduer » la riposte. Son utilisation est moins radicale que celles des projections et des coups, ce qui n’est pas négligeable sur le plan de la légitime défense, mais aussi au nom du respect de la vie.

Les clefs peuvent s’appliquer sur les bras mais aussi sur les jambes, en sachant que pour certaines disciplines dans lesquelles l’affrontement direct existe, elles ne sont pas autorisées sur les membres inférieurs pour des raisons de sécurité. En effet, elles sont moins facilement maitrisables et surtout elles se pratiquent principalement sur l’articulation – très fragile – du genou pour laquelle, en cas de traumatisme la guérison sera longue et jamais vraiment complète.

Les contrôles sur les articulations se divisent en deux groupes, les clefs en hyper-extension (gatame) et celles en torsion (garami). En ju-jitsu elles s’appliquent debout et au sol,  en judo c’est principalement au sol. En « ju-jitsu self-défense » les opportunités sont nombreuses, essentiellement dans le domaine du corps à corps.  En combinaison avec les coups et les projections elles sont bien souvent la finalité  d’une défense. Lorsqu’il s’agit d’attaques à l’arme blanche, pouvoir maîtriser le bras armé est un atout considérable.

Elles se réalisent principalement à l’aide des mains qui sont les moyens de transmission d’une autre partie du corps telle que l’aisselle, le ventre, etc. Le travail des clefs représente la parfaite combinaison des points faibles du corps humain pour Uke (le méchant) et de l’utilisation la plus rationnelle de celui de Tori (le gentil).

Leur étude demande beaucoup de temps, leur efficacité une très grande précision et une adaptation rapide aussi bien à la situation qu’aux éventuelles  particularités de l’articulation du partenaire et/ou de l’adversaire.

En conclusion, il s’agit d’un domaine efficace, passionnant mais qui réclame des qualités dont la persévérance (pas toujours d’actualité, mais toujours récompensée) !

 

eric@pariset.net  www.jujitsuericpariset.com

Trois coups de cœur

judo-magJudo Magazine juillet-aout 1983. Je remercie Marc Codaccioni de Toulon (très prolixe sur les réseaux sociaux) d’avoir « exhumé » la couverture de la revue judo parue en juillet 1983. C’était l’époque où sous l’impulsion d’une commission technique motivée et persuadée qu’un ju-jitsu éducatif pouvait être associé au judo, un plan de relance énergique de « l’héritage des samouraïs » était mis en place. Depuis le début des années 1970, nous étions quelques professeurs à avoir testé avec succès la méthode appelée atemi-ju-jitsu. Au sein de cette commission, nous mettions notre expérience au service d’un plus grand nombre d’enseignants. On m’avait alors confié la responsabilité des premiers stages de perfectionnement en direction des professeurs qui souhaitaient élargir leur panel technique. C’était à Chamonix au pied des neiges éternelles du Mont-Blanc. Par la suite les évènements n’ont pas été à la hauteur des espérances en matière de rapprochement et encore moins d’union, qu’importe la technique est restée, elle a satisfait un nombre considérable de passionnés et continue à le faire.

La beauté du geste. J’avais très récemment évoqué le sujet mais je ne peux m’empêcher d’insister dans la mesure où après des décennies de pratique, je suis heureux d’avoir conservé une faculté d’émerveillement, face à une qualité de travail et à son résultat. Lorsqu’une technique allie efficacité et esthétisme, on ne peut que s’enthousiasmer devant une telle pureté technique. Pour moi, un très bel uchi-mata peut être considéré comme une œuvre d’art. Il aura fallu tellement d’heure de travail pour le façonner, qu’il peut être l’égal d’un tableau ou d’une sculpture. Bien sûr cette appréciation reste subjective, elle est aussi une affaire de goût, comme toute réalisation. Mais le principal n’est-il pas d’entretenir la passion chez les « anciens » et la faire naitre chez les néophytes ?

Evénements. Pour les amateurs d’arts martiaux en général et les judokas/ jujitsukas en particulier, deux évènements institutionnels seront proposés très prochainement. D’abord, en judo, ce que l’on appelait à l’origine le Tournoi de Paris (un peu l’équivalent de Roland-Garros en tennis), et d’autre part, dans un genre différent puisqu’il ne s’agit que de démonstrations, le festival annuel des arts martiaux qui se déroule dans l’ex-Bercy. Le premier évènement – qui se tient d’ailleurs au même endroit que l’on a récemment rebaptisé d’un nom très commercial -, rassemble la majorité des meilleurs judokas de la planète, il offre des affrontements très ouverts dans la mesure où la pression exercée sur les combattants est sans doute un peu moins forte que celle qui existe dans les compétitions dites officielles. Quant au festival des arts martiaux, il propose une belle quantité de démonstrations qui nous donne à la fois la possibilité d’apprécier des disciplines connues, mais aussi de découvrir des styles et des écoles moins populaires. C’est toujours un moment fort, même s’il faut laisser à chacun le soin de juger de la qualité et de l’utilité de certaines prestations. Quoiqu’il en soit, ce sont deux rendez-vous institutionnels auxquels on se doit d’assister au moins une fois dans son existence.

Paris grand slam judo à l’Accorhotels Aréna les 11 et 12 février 2017

Festival des arts martiaux le 25 mars 2017

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Un week-end vosgien

dojo-mirecourtDépart le vendredi midi de Saint-Raphaël en direction des Vosges par un TGV direct, mais aux allures d’omnibus, dans la mesure où une petite dizaine de gares sont desservies avant d’attendre Neufchâteau à quelques kilomètres de Mirecourt où devait se dérouler ce « week-end ju-jitsu ».

Une arrivée pour l’heure du diner chez des élèves du « Dojo Mirecurtien » en compagnie de quelques ju-jitsukas allemands venus avec leur professeur. S’en est suivie une nuit réparatrice avant une matinée du samedi quelque peu touristique avec la visite d’une brasserie locale. Cela nous apprend, entre autres, qu’il est beaucoup plus long et beaucoup plus compliqué de faire de la bière que de la boire !

Rapide déjeuner avec un plat allemand, les « spaetzles » à base de pâtes, de fromage et d’oignon ! De quoi emmagasiner suffisamment d’énergie pour l’après midi.

Une première séance programmée de 13 h 30 à 16 h 00 qui a rassemblé une soixantaine de stagiaires et au cours de laquelle j’ai pu constater que l’intérêt pour la forme de ju-jitsu enseignée ne faiblissait pas. Les discussions d’après cours portaient essentiellement sur les regrets de ne pas voir cette méthode plus largement répandue, notamment qu’elle ne le soit pas au sein de la fédération « mère ». Des discussions au cours desquelles j’ai pu également faire le constat que la gentillesse et la convivialité existaient encore et qu’elles pouvaient créer de solides liens d’amitiés autour d’une passion commune.

Le soir, un diner rassemblait quelques stagiaires et les dirigeants du club. Ce repas ne pouvait pas se dérouler dans une meilleure ambiance. Il a été question de ju-jitsu, bien sûr, mais coté coulisses avec quelques anecdotes croustillantes. D’autres sujets ont été abordés, le Pinot d’Alsace, même avec modération, facilite le partage.

Le dimanche matin, après un solide petit déjeuner, le contenu technique de la séance complétait celui de la veille. Ce fut encore l’occasion d’éprouver un véritable plaisir en constatant d’une part, l’engouement autour de notre méthode et d’autre part la reconnaissance sincère et spontanée d’années de travail !

Comment ne pas remercier Pascale Pierrot-Cracco, la super-dynamique prof – 6e dan – du dojo Mirecurtien, pour l’organisation sans faille de ce week-end exceptionnel au cours duquel j’ai ressenti une chaleur humaine qui a été ma plus belle récompense. Je remercie aussi Hubert, président du club, mais aussi – et surtout – mari de Pascale. Je n’oublie pas l’équipe sans laquelle rien n’est possible, encore faut-il être capable de fédérer.

Il serait indélicat de ne pas mentionner Ralph Emberger le professeur de la délégation d’Outre-Rhin qui collabore régulièrement avec Mirecourt. Il nous a offert deux prestations de qualité, même si certaines différences existent. Quelqu’un a dit : « il faut que mille fleurs s’épanouissent » ! A noter la très sympathique visite du président du comité départemental FFJDA, faisant ainsi la preuve que l’ouverture d’esprit existe chez certains. Une initiative courtoise et constructive.

Le dimanche après midi, le retour s’est effectué à partir de la gare de Nancy, avec cette fois un passage par la capitale avant de reprendre la direction du sud-est.

Ainsi se termine une fin de semaine au cours de laquelle la satisfaction d’avoir pu donner tout ce que l’on pouvait, l’emporte très largement sur une fatigue somme toute assez concevable, surtout lorsque la reconnaissance n’est pas absente.

Voilà, en quelques lignes, résumées, deux journées qui laisseront de beaux souvenirs.

Rendez-vous prochainement pour d’autres aventures. Le 27 à Carqueiranne dans le Var et le 11 décembre à Niort dans les Deux-Sévres.

Renseignements : eric@pariset.net 06 14 60 18 25

Site ju-jitsu Eric Pariset : www.jujitsuericpariset.com

Un point de vue

 

Suite au dernier article consacré au katasans-titre (12), j’ai reçu un témoignage que j’ai le plaisir de vous faire partager. L’auteur ne souhaite pas que son nom soit publié, tout simplement par désir de discrétion. Il n’est pas dans mes habitudes de proposer une publication anonyme, ou bien à l’aide d’un pseudo (ce qui revient au même), mais je fais une exception dans la mesure où cet article n’est pas diffament envers une personne, qu’il est explicite et clair, qu’il reflète le fond de ma pensée – avec une façon différente de l’exprimer -, et que j’en assume la responsabilité. J’aurais pu le signer, mais cela n’aurait pas été correct.

Bonne lecture.

(Le visuel de ce billet est une figurine réalisée par Bernard Pariset. Ses talents ne se limitaient pas au judo.)   

« La stratégie du faible ou les coulisses d’un transfert du sens profond au profit de la forme… »

Assister aux passages de grades pour l’obtention de la ceinture noire (et au-dessus) dans certaines fédérations et observer les exigences des jurys ou en d’autres termes, les critères de validation de l’exercice du Goshin Jitsu No Kata conduit inévitablement à se questionner… Les interrogations sont nombreuses :

Pourquoi s’éloigner du sens profond du Goshin-jistu no kata et de son étonnante simplicité ?

Pourquoi ne pas vouloir clarifier l’accès à la connaissance mais vouloir un chemin obscur et semé d’embûches sans réelle utilité ??

Pourquoi vouloir oublier l’esprit et le sens profond de cette forme codifiée du combat qu’est le kata au profit d’un catalogue de détails parfois insignifiants qui attirent l’attention sur des points techniques dont la préciosité ne sera jamais l’efficacité simple et sans fioriture de chaque technique dans l’esprit des fondateurs ?

N’est-ce pas une manière d’exclure le plus grand nombre ?… de rendre opaque la connaissance et la maîtrise pour garder le pouvoir et quoi de mieux que légitimer une expertise douteuse et un transfert du sens profond vers la forme et uniquement la forme…… N’est-ce pas uniquement un bon moyen de garder ce pouvoir en proposant une forme si alambiquée que sa maîtrise ne s’appuie que sur une suite de détails tortueux et inutiles ?

Pourquoi l’essence même de ce kata, la défense, n’est-elle pas le choix unique de sélection des pratiquants?  « Goshin » traduit en français devient « Défense »…

Or, la défense est ou n’est pas efficace… La défense est ou n’est pas crédible. Doit-on s’arrêter sur la position esthétique du petit doigt, sur la mise en scène de la préhension du judogi ou sur l’élégance du geste pour valider l’efficacité de telle ou telle technique ? Non, certes non !

Revenons à l’esprit, à l’essence, au sens profond, à la connaissance de la voie ! À l’essentiel et au fondamental !…Revenons à la Défense efficace et à la voie qui conduit à cette efficacité… Devons- nous avoir compris avant tout les principes de fonctionnement des techniques et leurs finalités ou faire preuve d’une esthétique chipoteuse ??? La réponse est dans la question !

Demandons – nous les raisons profondes de ce choix… ( ?) politique ??

N’’est-ce pas une forme d’obscurantisme (1) ? Qu’ont-ils à y perdre ? Qu’ont-ils à y gagner ? Qu’est-ce qui pourrait éventuellement les menacer ?

Peut-être, perdre la main…et accepter de ne plus être indispensable, incontournables et seuls et uniques référents… accepter de ne plus être les seuls maîtres du « marché » … ceux qui savent, ceux qui peuvent décider du oui ou du non arbitraires et péremptoires pour des raisons presque difficilement justifiables.. et au final être mus par une immense, une incoercible et une tyrannique peur ne plus être légitimes ???

Ils sont légions ces maîtres à penser totalitaires et étriqués ; dans tous les domaines, sur tous les fronts… Dans le monde politique, noyé sous les directives de la communication et maniant la langue de bois et la syntaxe des énarques pour être sûrs de l’enfumage final ; dans le monde de l’entreprise où des services spécialisés se gardent bien de donner les clés en opacifiant un maximum leur domaine , dans le milieu de l’informatique… nous comprenons très rapidement que la langue volontairement utilisée est celle de l’exclusion… …Nous ne faisons pas partie du sérail !!!

Rassurons-les… Un pratiquant s’élève par l’esprit et par le corps…

Et dans cet océan d’ « experts » accrochés à leurs particularismes, heureusement que nous pouvons choisir et croiser d’autres didactiques.

Pour ma part, celle de Sensei Pariset me convient particulièrement puisqu’elle prône le sens avant tout. Et le sens profond du Goshin Jitsu No Kata c’est la voie de la défense efficace par la technique crédible, rapide, intelligente.

Merci Sensei pour votre enseignement.

Jo 79,.2e dan.

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(1)(Définition de l’obscurantisme : Pour les courants intellectuels et politiques progressistes, héritiers de la philosophie des Lumières, l’obscurantisme est une attitude d’opposition à la diffusion du savoir, dans quelque domaine que ce soit.)

Site ju-jitsu Eric Pariset : www.jujitsuericpariset.com